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16/04/1998 | FRANCE | N°94NC00007

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 16 avril 1998, 94NC00007


(Troisième Chambre)
Vu enregistrés le 4 janvier 1994 et le 17 février 1994 la requête et le mémoire de production présentés pour le DEPARTEMENT DE LA MARNE par la société civile professionnelle Mes Breaud Sammut, avocats ;
Le DEPARTEMENT DE LA MARNE demande à la Cour :
- de réformer le jugement du 19 octobre 1993 par lequel le tribunal de Châlons-sur-Marne a rejeté sa requête tendant à la condamnation de l'Etat ministre de l'équipement à lui verser une somme de 1 429 962,48 F majorée de l'indemnité complémentaire au jour du jugement, et à la complète exécutio

n de la convention du 7 juillet 1987 relative au partage des services de la dir...

(Troisième Chambre)
Vu enregistrés le 4 janvier 1994 et le 17 février 1994 la requête et le mémoire de production présentés pour le DEPARTEMENT DE LA MARNE par la société civile professionnelle Mes Breaud Sammut, avocats ;
Le DEPARTEMENT DE LA MARNE demande à la Cour :
- de réformer le jugement du 19 octobre 1993 par lequel le tribunal de Châlons-sur-Marne a rejeté sa requête tendant à la condamnation de l'Etat ministre de l'équipement à lui verser une somme de 1 429 962,48 F majorée de l'indemnité complémentaire au jour du jugement, et à la complète exécution de la convention du 7 juillet 1987 relative au partage des services de la direction départementale de l'équipement ;
- de condamner l'Etat à lui verser du même chef 3 313 459,25 F, plus les intérêts à compter du dépôt de la requête ;
- de le condamner à lui verser 20 000 F au titre des frais non compris dans les dépens ;
Vu l'ordonnance du 20 janvier 1995 du président de la première chambre de la Cour ordonnant la clôture de l'instruction à la date du 14 mars 1995 à 16 heures ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 82-213 du 2 mars 1982 ;
Vu la loi n 83-8 du 7 janvier 1983 ;
Vu la loi n 84-16 du 26 janvier 1984 ;
Vu la loi n 85-1098 du 11 octobre 1985 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n 87-100 du 13 février 1987 ;
Vu le décret n 91-1001 du 30 septembre 1991 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 1998 :
- le rapport de Mme BLAIS, Premier Conseiller ;
- et les conclusions de M. VINCENT, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la loi n 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat : "Les services extérieurs de l'Etat ou parties de services extérieurs chargés à titre principal de la mise en oeuvre, soit d'une compétence attribuée au département ou à la région en vertu de la présente loi ou de la loi prévue au deuxième alinéa de l'article 4, soit d'une compétence relevant actuellement du département ou de la région, seront réorganisés dans un délai de six ans à compter de la publication de la loi relative aux garanties statutaires accordées au personnel des collectivités territoriales, prévue par l'article 1er de la loi n 82-213 du 2 mars 1982 précitée, pour permettre leur transfert à l'autorité locale concernée. Les modalités et la date du transfert de chaque catégorie de services sont fixées par décret ... Dans chaque département et région, et pour chaque service une convention conclue entre le représentant de l'Etat et le président du conseil général ou le président du conseil régional et approuvée par arrêté des ministres intéressés, détermine les conditions de mise en oeuvre du présent article. A défaut de convention conclue dans le délai prévu par le décret mentionné au deuxième alinéa, un arrêté conjoint des ministres intéressés peut fixer les conditions de mise en oeuvre du présent article, notamment la liste des services intéressés" ; que le décret n 87-100 du 13 février 1987 fixe les modalités de transfert aux départements et de la mise à leur disposition des services extérieurs du ministère de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports et du secrétariat d'Etat à la mer (direction départementale de l'équipement et services spécialisés maritimes) et prévoit la conclusion d'une convention dont le modèle est joint en annexe ;
Considérant qu'en application de ces dispositions le préfet et le président du conseil général de la Marne ont signé le 7 juillet 1987 une convention approuvée par arrêté ministériel du 6 novembre 1987, dont l'article 2 stipulait que l'équivalent de 51,32 emplois à temps complet des services extérieurs du ministère de l'équipement, du logement de l'aménagement du territoire et des transports et du secrétariat d'Etat à la mer étaient transférés au département pour l'exercice des attributions qui lui étaient également transférées; que le DEPARTEMENT DE LA MARNE, estimant qu'il n'a pas bénéficié du transfert effectif de ces emplois, dont plusieurs sont demeurés vacants pendant de longues périodes, soutient que cette carence engage la responsabilité de l'Etat, et demande à être indemnisé pour le préjudice qui en est résulté pour lui ;

Considérant d'une part qu'aux termes du premier alinéa de l'article 30 de la loi susvisée du 2 mars 1982, dont les dispositions sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi n 92-1255 du 2 décembre 1992, soit le ler janvier 1993 : " ... restent à la charge de l'Etat les prestations de toute nature qu'il fournit actuellement aux services transférés à la collectivité départementale ..." ; que les personnels affectés aux services transférés sont aux nombre des prestations de toute nature visées par ces dispositions ; d'autre part, qu'en vertu des dispositions de l'article 4 de la loi susvisée du 11 octobre 1985 l'Etat est tenu de remplacer ses agents affectés aux tâches transférées jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions de compensation financière mises en place par la même loi du 11 octobre 1985, soit en l'espèce jusqu'au 1er janvier 1992 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la prestation en personnel que l'Etat fournissait aux services de l'équipement transférés au DEPARTEMENT DE LA MARNE par la convention du 7 juillet 1987 est restée à sa charge jusqu'au 1er janvier 1993, et que, jusqu'à la date du 1er janvier 1992, en l'absence de compensation financière prévue, il a eu l'obligation de maintenir cette prestation en nature, sans que le ministre ne puisse utilement invoquer les difficultés inhérentes à la gestion des personnels, et le fait que lui-même ne disposait pas toujours des effectifs complets de ses services ; qu'il est constant qu'au cours des années 1990 et 1991, le nombre des agents affectés par l'Etat au DEPARTEMENT DE LA MARNE a été sensiblement inférieur au nombre fixé par la convention susmentionnée ; que le département est par suite fondé à soutenir que l'Etat n'a pas respecté ses obligations et que ce manquement est constitutif d'une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard du département et à justifier sa condamnation à réparer le préjudice qui en est résulté ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant que si le DEPARTEMENT DE LA MARNE demande à titre principal une indemnité calculée à partir du coût théorique des emplois vacants, il sollicite à titre subsidiaire une somme de 1 175 776,22 F, correspondant au coût réel pour les années 1990 et 1991 des recrutements auxquels il a dû procéder pour assumer les missions qui lui ont été transférées par l'Etat ; que ni la nécessité, ni l'évaluation de ces dépenses qui correspondent au préjudice réellement causé au demandeur ne sont contestées ; que le département, en revanche, ne justifie pas de la réalité d'un préjudice moral qu'il aurait subi ; qu'il y a lieu par suite de condamner l'Etat, ministre de l'équipement, des transports et du logement à payer la somme de 1 175 776,22 F au DEPARTEMENT DE LA MARNE outre les intérêts au taux légal à compter du 10 avril 1990, date de l'enregistrement de sa demande d'indemnité au tribunal administratif de Châlons-sur-Marne ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le département est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne, par le jugement attaqué, a rejeté sa requête ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de condamner, l'Etat ministre de l'équipement, des transports et du logement à verser au DEPARTEMENT DE LA MARNE une somme de 5 000 F au titre des dispositions susrappelées ;
Article 1er : Le jugement du 19 octobre 1993 du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne est annulé.
Article 2 : L'Etat (ministre de l'équipement, des transports et du logement) paiera au DEPARTEMENT DE LA MARNE une somme de 1 175 776,22 F augmentée des intérêts au taux légal à compter du 10 avril 1990.
Article 3 : L'Etat (ministre de l'équipement, des transports et du logement) paiera au DEPARTEMENT DE LA MARNE une somme de 5 000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au DEPARTEMENT DE LA MARNE et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 94NC00007
Date de la décision : 16/04/1998
Sens de l'arrêt : Annulation condamnation de l'état
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-01-07-03,RJ1 COLLECTIVITES TERRITORIALES - DISPOSITIONS GENERALES - DISPOSITIONS FINANCIERES - COMPENSATION DES TRANSFERTS DE COMPETENCES -Obligation de l'Etat de pourvoir aux vacances des emplois transférés au département - Existence.

135-01-07-03 Jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions de compensation financière mises en place par la loi du 11 octobre 1985 relative à la prise en charge par l'Etat, les départements et les régions des dépenses de personnel, de fonctionnement et d'équipement des services placés sous leur autorité, l'Etat est tenu, au titre du maintien des prestations de toute nature au sens de l'article 30 de la loi du 2 mars 1982 de pourvoir aux vacances des emplois transférés au département en vertu de la convention conclue entre le représentant de l'Etat et celui de la collectivité en application des dispositions de l'article 8 de la loi du 7 janvier 1983 (1).


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 87-100 du 13 février 1987 annexe
Loi 82-213 du 02 mars 1982 art. 30
Loi 83-8 du 07 janvier 1983 art. 8
Loi 85-1098 du 11 octobre 1985 art. 4
Loi 92-1255 du 02 décembre 1992

1. Confirmé par CE, 2000-06-16, Ministre de l'équipement, des transports et du logement c/ Département de la Marne, n° 197582


Composition du Tribunal
Président : M. Roustan
Rapporteur ?: Mme Blais
Rapporteur public ?: M. Vincent

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-04-16;94nc00007 ?
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