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10/10/1991 | FRANCE | N°89NC00529;89NC00531

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 10 octobre 1991, 89NC00529 et 89NC00531


Vu 1°/ la décision en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 8ème sous-section de la Section du Contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le recours présenté par le Ministre délégué au Budget ;
Vu le recours enregistré au Secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 septembre 1988 sous le n° 101 993 et au greffe de la Cour sous le n° 89NC00529 présenté par le ministre délégué au Budget ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du 26 mai

1988 par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la Société HOVER...

Vu 1°/ la décision en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 8ème sous-section de la Section du Contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le recours présenté par le Ministre délégué au Budget ;
Vu le recours enregistré au Secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 septembre 1988 sous le n° 101 993 et au greffe de la Cour sous le n° 89NC00529 présenté par le ministre délégué au Budget ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du 26 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la Société HOVERLLOYD LIMITED la réduction de l'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 1972 à 1978 et de la contribution exceptionnelle mise à sa charge au titre des années 1974 à 1976 ;
2°) de remettre intégralement les impositions contestées à la charge de la Société HOVERLLOYD LIMITED ;
Vu 2°/ la décision en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 8ème sous-section de la Section du Contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour la Société HOVERLLOYD LIMITED ;
Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au Secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 27 juillet et 28 novembre 1988 sous le numéro 100 424 et au greffe de la Cour sous le numéro 89NC00531, présentés pour la Société HOVERLLOYD LIMITED, dont le siège social est à Londres-Wixbae (Grande-Bretagne), 49, Charles Y..., ayant fait élection de domicile à l'Hoverport International, rue du Port à CALAIS (62226), représentée par son directeur administratif et financier ;
La Société Hoverlloyd Limited demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 26 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Lille a, après lui avoir accordé une réduction d'impôt, rejeté le surplus de sa demande en décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés, de la contribution exceptionnelle et de l'imposition forfaitaire annuelle auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 1972 à 1978 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées soit 15 728 018 F au titre de l'impôt sur les sociétés, 153 078 F au titre de la cotisation exceptionnelle et 7 700 F au titre de l'imposition forfaitaire annuelle, ainsi que la décharge des majorations et pénalités, et subsidiairement d'ordonner une expertise portant sur le mode de calcul des impositions ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention franco-britannique du 22 mai 1968 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 septembre 1991 :
- le rapport de M. LAPORTE, conseiller,
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées du ministre délégué au budget et de la société HOVERLLOYD Limited sont dirigées contre le même jugement qui a accordé à cette dernière la réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés, de la contribution exceptionnelle et de l'imposition forfaitaire annuelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1972 à 1978 ; qu'elles présentent à juger des questions connexes ; qu'il y a lieu, dès lors, de les joindre afin d'y statuer par une même décision ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société de droit anglais HOVERLLOYD Limited, dont le siège social est à LONDRES, et qui exerce l'activité de transport de voyageurs, véhicules et marchandises par aéroglisseurs entre CALAIS et RAMSGATE, a obtenu de la Chambre de Commerce et d'Industrie de CALAIS, par une convention en date du 14 septembre 1970, l'autorisation d'utiliser pour une durée de dix ans et pour les besoins de son exploitation, les locaux à usage de bureaux, bar-restaurant et boutique sous douane appartenant à ladite Chambre de Commerce ; que, par une seconde convention en date du 8 mai 1970, cet organisme consulaire a autorisé M. X... puis la S.A. Etablissements Léon GHESQUIERS à occuper les locaux dont s'agit et leurs dépendances, et à y exercer les activités de restaurateur, cafetier et commerçant ; qu'en contrepartie, M. X... et la société HOVERLLOYD Limited se sont engagés conjointement à payer à la Chambre de Commerce et d'industrie de CALAIS, d'une part, le loyer dû à raison de l'occupation et de l'exploitation de ces locaux et commerces, et, d'autre part, une redevance représentant une proportion dégressive du chiffre d'affaires réalisé dans le magasin sous douane ;
Considérant que, par un contrat de concession en date du 1er février 1971, la société HOVERLLOYD Limited a accordé à M. X... puis à la S.A. Etablissements Léon GHESQUIERS le droit d'occuper lesdits locaux ; qu'en contrepartie, cette dernière société s'engageait à verser à la société HOVERLLOYD Limited, outre les loyers et redevances à rétrocéder à la Chambre de Commerce et d'Industrie de CALAIS, un loyer annuel de 8 100 F pour le bar, le restaurant et le logement, une somme annuelle de 11 200 F à titre d'amortissements pour le magasin sous douane, et une redevance donnant lieu à des versements mensuels égaux à 38 % du chiffre d'affaires réalisé par le magasin sous douane ;
Considérant qu'en raison des bénéfices ainsi retirés de la location desdits locaux et de l'exploitation du magasin sous douane, la société HOVERLLOYD Limited a fait l'objet de deux vérifications portant sur les exercices clos le 31 décembre des années 1972 à 1978 ; qu'après avoir considéré que ces bénéfices étaient détachables des résultats de l'activité de transport maritime et étaient donc imposables en France, l'administration lui a notifié divers redressements ; que sa réclamation contentieuse a été partiellement admise par une décision du directeur régional des impôts de Lille en date du 17 septembre 1980 confirmant le principe de l'imposition mais admettant une réduction des bases taxables à la suite de la prise en compte de certains frais généraux ;

Considérant que, par le jugement attaqué en date du 26 mai 1988, le tribunal administratif de Lille a réduit les bases annuelles d'imposition de la société HOVERLLOYD Limited, pour chacune des années 1972 à 1978 incluses, de la somme de 19 300 F, et a accordé à cette société la décharge des impositions correspondantes, après avoir considéré que, si les bénéfices litigieux étaient normalement imposables en France, l'administration avait imposé à tort, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, le loyer annuel de 8 100 F versé pour le bar et le restaurant, et l'amortissement annuel de 11 200 F versé pour le magasin sous douane ; que le ministre délégué au Budget demande le rétablissement des impositions contestées tandis que la société HOVERLLOYD Limited en demande la décharge en contestant leur principe et subsidiairement leur mode de détermination ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que la société HOVERLLOYD Limited soutient que le jugement attaqué est irrégulier en la forme dès lors qu'il n'aurait pas répondu à tous les moyens de la requête ; qu'un tel moyen, d'ailleurs non repris dans le mémoire ampliatif, n'est assorti d'aucune précision de nature à permettre d'en apprécier la portée et le bien-fondé ; qu'il ne peut, dès lors, être accueilli ;
Sur le principe de l'imposition des revenus en France :
Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968 : "1. Les bénéfices qu'un résident d'un Etat contractant tire de l'exploitation de navires ou d'aéronefs en trafic international ne sont imposables que dans cet Etat." ; qu'il résulte de l'instruction que les bénéfices ayant donné lieu aux impositions litigieuses proviennent de l'utilisation de locaux et de l'exploitation d'un commerce de produits "sous douane" ; que si ces bénéfices ont été réalisés par la société HOVERLLOYD qui exerce à titre principal l'activité de transporteur maritime international et concernent des locaux et commerces principalement ou même exclusivement utilisés par la clientèle du service de transport par "Hovercraft", ils ne peuvent être considérés comme indissociables de cette activité de transport maritime et ne peuvent être regardés comme tirés de l'exploitation de navires ou d'aéronefs en trafic international au sens des dispositions claires de l'article 7 précité ; que, dès lors, aucun de ces bénéfices n'est imposable dans le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord sur le fondement dudit article ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de ladite convention du 22 mai 1968 : "1. Les bénéfices industriels et commerciaux d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat à moins que l'entreprise exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices industriels et commerciaux de l'entreprise sont imposables dans l'autre Etat, mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable ... 5. L'expression bénéfices industriels et commerciaux désigne les revenus tirés par une entreprise de la conduite d'une exploitation industrielle et commerciale ... mais elle ne comprend pas les revenus visés à l'article 5 ..." ; qu'enfin, aux termes de l'article 5 de cette même convention : "1. Les revenus qu'un résident d'un Etat contractant tire de biens immobiliers ... situés dans l'autre Etat contractant, ainsi que les revenus tirés des droits attachés à ces biens sont imposables dans cet autre Etat ..." ;

Considérant, d'une part, que, même s'ils constituaient des revenus de propriétés bâties, les loyers et amortissements perçus par la société HOVERLLOYD Limited ne pourraient pas en vertu de l'article 14 du code général des impôts être compris dans la catégorie des revenus fonciers, dès lors qu'ils sont inclus dans les bénéfices d'une entreprise commerciale ; que de tels revenus résultent d'une exploitation de l'actif commercial et ne peuvent être rattachés qu'aux bénéfices commerciaux de l'entreprise Hoverlloyd ; que, d'autre part, la redevance proportionnelle au chiffre d'affaires du magasin sous douane, qui ne peut d'ailleurs être rattachée aux bénéfices visés à l'article 7, aux revenus visés à l'article 5, ni aux diverses catégories de revenus visées aux articles 9 à 22, constitue également un bénéfice commercial ; que ces différents revenus ne seraient donc imposables en France que dans la mesure où ils seraient imputables à un établissement stable que la société requérante posséderait en France ; que l'article 4 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968 définit l'établissement stable comme une "installation fixe d'affaires où l'entreprise exerce tout ou partie de son activité" et ajoute que cette expression comprend notamment "une succursale" ; qu'il résulte de l'instruction que la société HOVERLLOYD Limited est immatriculée au registre du commerce de CALAIS depuis le 24 septembre 1970 en tant que "succursale d'une société étrangère exploitant une ligne d'aéroglisseurs entre RAMSGATE et CALAIS et services annexes" ; qu'ainsi, elle doit être regardée comme ayant réalisé les bénéfices tirés de la redevance proportionnelle au chiffre d'affaires du magasin sous douane par l'intermédiaire d'un établissement stable au sens des dispositions sus-rappelées du 1. de l'article 6 et des 1. et 2. de l'article 4 de la convention du 22 mai 1968, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que, selon le contrat de concession du 1er février 1971, la rémunération due par les établissements X... est payable au siège de la société HOVERLLOYD Limited ; que si les dispositions du 5. de l'article 4 écartent l'existence d'un établissement stable lorsque l'activité est exercée par l'entremise d'un courtier, d'un commissionnaire général ou de tout autre intermédiaire jouissant d'un statut indépendant, ces conditions ne peuvent être regardées comme remplies en l'espèce du seul fait que les locaux et commerces dont s'agit sont utilisés et exploités en réalité par un concessionnaire, la société X..., alors que l'activité génératrice du revenu imposable est bien exercée par la société HOVERLLOYD Limited ; que, dès lors, la redevance proportionnelle au chiffre d'affaires du magasin sous douane ainsi que les loyers et amortissements afférents aux locaux constituent un bénéfice commercial imposable en France en vertu du 1. de l'article 6 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que si la société HOVERLLOYD Limited fait état des irrégularités dont seraient entachés la vérification et le redressement, ce moyen, d'ailleurs invoqué uniquement dans la requête sommaire, n'est pas davantage assorti de précisions susceptibles de permettre au juge de l'impôt d'en apprécier la portée et le bien-fondé ; que, dès lors, il ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 26 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968 publiée au Journal Officiel de la République Française des 24 et 25 novembre 1969 : "1. Lorsqu'un résident d'un Etat contractant estime que les mesures prises par un Etat contractant ou par chacun des deux Etats contractants entraînent ou entraîneront pour lui une imposition non conforme à la présente convention, il peut, indépendamment des recours prévus par la législation nationale de ces Etats, soumettre son cas aux autorités contractantes de l'un ou l'autre des Etats contractants. 2. Ces autorités compétentes s'efforcent, si la réclamation leur paraît fondée et si elles ne sont pas elles-mêmes en mesure d'apporter une solution satisfaisante, de régler la question par voie d'accord amiable avec les autorités compétentes de l'autre Etat contractant, en vue d'éviter une imposition non conforme à la convention. 3. Les autorités compétentes des Etats contractants s'efforcent de résoudre par voie d'accord amiable les difficultés auxquelles peut donner lieu l'application de la convention ..." ; qu'il résulte clairement de ces stipulations qu'elles n'ont pas pour effet de permettre au contribuable, dans le cas où l'administration saisie d'une demande de révision n'y donne pas les suites prévues par la convention, d'obtenir du juge de l'impôt la décharge des impositions qui font l'objet de cette demande ; que, dès lors, la société HOVERLLOYD Limited ne peut utilement, pour demander la décharge des impositions contestées, se prévaloir de ce que les autorités françaises, saisies par elle d'une demande de révision de ces impositions, n'auraient pas mis en oeuvre la procédure prévue par les stipulations précitées et n'auraient pas provoqué la réunion d'une commission mixte franco-britannique, ni soutenir que les règles relatives à la consultation de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires sont transposables en la matière ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne la réduction accordée par le tribunal administratif :

Considérant que, comme il a été dit ci-dessus le loyer annuel de 8 100 F et l'amortissement annuel de 11 200 F constituent des bénéfices commerciaux au sens et pour l'application des dispositions du 1. de l'article 5 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968, en ce qui concerne la détermination de l'Etat dans lequel doit être établie l'imposition ; que de telles sommes constituaient des profits passibles de l'impôt sur les sociétés, et non des revenus immobiliers au sens de l'article 5 de ladite convention ; que, dès lors, contrairement à ce qu'ont affirmé les premiers juges, c'est à bon droit que l'administration les a comprises dans les bases de l'impôt sur les sociétés dû par la société HOVERLLOYD Limited ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif a prononcé la décharge des impositions correspondant à ces sommes ;
En ce qui concerne la charge de la preuve :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 179 et 221 du code général des impôts dans leur rédaction alors applicable, qu'en matière d'impôt sur les sociétés est taxé d'office tout contribuable qui n'a pas souscrit les déclarations mentionnées à l'article 223-1 dudit code ; qu'il en est de même en matière d'imposition forfaitaire annuelle en vertu de l'article 223 septies du même code, ainsi que pour les contributions exceptionnelles instituées par la loi n° 74-644 du 16 juillet 1974 et par la loi n° 76-978 du 29 octobre 1976 ; qu'il est constant que la société HOVERLLOYD Limited, qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus est imposable en France à l'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés par l'intermédiaire de son établissement stable de CALAIS, et, par voie de conséquence, à l'imposition forfaitaire annuelle et à la contribution exceptionnelle, n'a pas souscrit les déclarations susmentionnées ; qu'ainsi, elle se trouvait en situation d'être taxée d'office ; que si l'administration a eu néanmoins recours à la procédure contradictoire de redressement prévue par l'article 1649 quinquies A du code général des impôts applicable en l'espèce, cette circonstance n'est pas de nature à dispenser la société HOVERLLOYD Limited d'apporter la preuve de l'exagération des impositions qu'elle conteste ;
En ce qui concerne le montant de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968 : "3. Dans le calcul des bénéfices industriels et commerciaux d'un établissement stable, sont admises en déduction les dépenses exposées aux fins poursuivies par cet établissement stable, y compris les dépenses de direction et les frais généraux ainsi exposés dans l'Etat où est situé l'établissement stable, soit ailleurs, mais à l'exclusion des dépenses qui ne seraient pas déductibles si l'établissement stable constituait une entreprise séparée" ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, pour déterminer les bases d'imposition de la société, l'administration fiscale avait initialement déduit des recettes brutes comptabilisées les montants des frais réellement connus, tels que les loyers, ainsi qu'une somme forfaitaire égale à 5 % des produits encaissés ; que la société HOVERLLOYD Limited ayant apporté des éléments supplémentaires d'appréciation, les services fiscaux ont modifié les bases taxables en admettant en déduction des résultats un pourcentage de divers postes de frais généraux du siège social de la société à LONDRES (frais de direction, frais de publicité et marketing) et de frais généraux du siège de CALAIS (frais administratifs mixtes et frais de tenue de comptabilité) ; que la société requérante n'apporte pas la preuve qu'il y aurait lieu d'admettre en déduction des résultats imposables une proportion de divers autres frais ; que, comme il a été dit ci-dessus, l'activité de transport maritime et les activités imposables en France étant dissociables, il n'y a pas lieu d'admettre, comme le demande la société HOVERLLOYD Limited, les frais d'amortissement des aéroglisseurs ni l'ensemble des frais d'exploitation de l'activité de transport en déduction des profits de l'établissement stable, de tels frais ne pouvant être regardés comme ayant été exposés à celles des fins poursuivies par l'établissement stable qui ont entraîné la réalisation des bénéfices imposables ; qu'en outre, la société HOVERLLOYD Limited ne démontre pas que ses frais financiers liés à l'existence d'un stock de marchandises destinées à la boutique sous douane ne font pas déjà l'objet d'une facturation à leur destinataire français ; qu'ainsi, elle n'établit pas que l'administration fiscale aurait écarté à tort la déduction de certains frais ;
Considérant, en second lieu, que l'administration a appliqué aux frais ainsi admis en déduction, un pourcentage obtenu en divisant le montant total des redevances encaissées dans l'établissement stable de CALAIS par le chiffre d'affaires total de l'entreprise ; que si la requérante a soutenu en première instance, dans le dernier état de ses écritures, et confirme en appel qu'il y avait lieu d'appliquer aux frais déductibles un pourcentage tiré de la comparaison entre le revenu global de la boutique sous douane et le revenu global de la société résultant des opérations trans-Manche, elle n'apporte aucun élément de nature à établir le bien-fondé du mode de calcul dont elle revendique l'application ; que le numérateur de cette proportion ne saurait être supérieur aux seuls revenus perçus par l'établissement stable en France, et comprendre également, ainsi que le soutient la requérante, les redevances versées à la Chambre de Commerce et d'Industrie de CALAIS et les produits conservés par M. X..., puis la S.A. Etablissements X... ; que ne sauraient davantage être retenus au dénominateur de cette proportion les seuls revenus tirés par la société HOVERLLOYD Limited de l'exploitation du trafic trans-Manche, dès lors qu'il n'est apporté aucune précision chiffrée permettant d'individualiser cette activité au sein de la société ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, la société HOVERLLOYD Limited n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 26 mai 1988, le tribunal administratif de Lille, après lui avoir accordé la décharge partielle des impositions contestées en conséquence d'une réduction de base de 19 300 F au titre de chacune des années 1972 à 1978 incluses, a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ; que, d'autre part, le ministre délégué au Budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce même jugement, le tribunal administratif a prononcé une telle réduction ;
Article 1er : La requête de la société HOVERLLOYD Limited est rejetée.
Article 2 : L'impôt sur les sociétés, la contribution exceptionnelle et l'imposition forfaitaire annuelle auxquels la société HOVERLLOYD Limited a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre des années 1972, 1973, 1974, 1975, 1976, 1977 et 1978, sont remis à sa charge à concurrence des droits correspondant à la réduction des bases de 19 300 F prononcée par le tribunal administratif pour chacune de ces années.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 26 mai 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société HOVERLLOYD Limited et au ministre délégué au Budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 89NC00529;89NC00531
Date de la décision : 10/10/1991
Sens de l'arrêt : Rejet droits maintenus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - CONVENTIONS INTERNATIONALES - CONVENTIONS BILATERALES - Grande-Bretagne (convention du 22 mai 1968) - Article 7 - Notion de bénéfices nés de l'exploitation de navires ou d'aéronefs - Absence - Commerce de produits sous douane.

19-01-01-05-02, 19-04-01-04-02 Les revenus tirés par une société britannique de l'utilisation de locaux commerciaux par un tiers et de l'exploitation en France d'un commerce de produits sous douane ne sont pas indissociables de son activité de transport maritime et ne constituent donc pas des bénéfices nés de l'exploitation de navires et d'aéronefs, qui en vertu de l'article 7 de la convention franco-britannique du 22 mai 1968, ne seraient imposables qu'en Grande-Bretagne. Ces revenus ne peuvent être rattachés qu'aux bénéfices commerciaux de la société, y compris les loyers et amortissements des locaux loués qui ne constituent pas des revenus fonciers. Ils sont imposables en France en vertu de l'article 6 de la convention dès lors que, selon les critères définis à l'article 4, la société qui a son siège social en Grande-Bretagne, doit être regardée comme possédant un établissement stable à Calais.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LES BENEFICES DES SOCIETES ET AUTRES PERSONNES MORALES - TERRITORIALITE DE L'IMPOT - Notion d'établissement stable en France - Société ayant son siège à l'étranger exerçant en France une activité de commerce sous douane.


Références :

CGI 14, 179, 221, 223 par. 1, 223 septies, 1649 quinquies A
Convention du 22 mai 1968 France Royaume-Uni art. 7, art. 6, art. 5, art. 9 à 22, art. 4, art. 26
Loi 74-644 du 16 juillet 1974 Finances rectificative pour 1974
Loi 76-978 du 29 octobre 1976 Finances rectificative pour 1976


Composition du Tribunal
Président : M. Charlier
Rapporteur ?: M. Laporte
Rapporteur public ?: Mme Fraysse

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1991-10-10;89nc00529 ?
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