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06/11/1990 | FRANCE | N°89NC00324;89NC01376;89NC01410

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 06 novembre 1990, 89NC00324, 89NC01376 et 89NC01410


Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 avril 1988 sous le numéro 96863 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 4 janvier 1989 sous le numéro 89NC00324, présentée pour le centre hospitalier de LUNEVILLE, représenté par son directeur en exercice ;
Le centre hospitalier demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 2 février 1988 par lequel le tribunal administratif de NANCY l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de la défenestration de Mme X... le 5 janvier 1983 dans le service de médecine dudit h

pital, et a ordonné avant dire droit une expertise médicale sur l'éva...

Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 avril 1988 sous le numéro 96863 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 4 janvier 1989 sous le numéro 89NC00324, présentée pour le centre hospitalier de LUNEVILLE, représenté par son directeur en exercice ;
Le centre hospitalier demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 2 février 1988 par lequel le tribunal administratif de NANCY l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de la défenestration de Mme X... le 5 janvier 1983 dans le service de médecine dudit hôpital, et a ordonné avant dire droit une expertise médicale sur l'évaluation du préjudice subi ;
Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 3 août 1989 sous le numéro 89NC01376, présentée pour la Caisse de mutualité sociale agricole du département de MEURTHE-ET-MOSELLE, dont le siège est ... à 54500 VANDOEUVRE-LES-NANCY ;
La Caisse de mutualité sociale agricole demande à la Cour :
- de réformer le jugement en date du 30 mai 1989 par lequel le tribunal administratif de NANCY n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de LUNEVILLE à lui verser une somme de 152 366,12 F à la suite de la défenestration de Mme X... le 5 janvier 1983 dans le service de médecine du centre hospitalier de LUNEVILLE ;
- de condamner le centre hospitalier de LUNEVILLE à lui verser une somme de 5 000 F au titre de l'article 1 du décret du 2 septembre 1988 ;
Vu le mémoire en défense et recours incident enregistré le 12 février 1990, présenté pour le centre hospitalier de LUNEVILLE ;
Le centre hospitalier conclut au rejet de la requête et à l'annulation du jugement du 30 mai 1989 ;
Vu le mémoire additionnel, enregistré le 16 mars 1990, présenté pour la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE ;
La caisse conclut à la condamnation du centre hospitalier de LUNEVILLE à lui verser une somme de 159 901,32 F, assortie des intérêts au taux légal ;
Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 28 juillet 1989 sous le numéro 89NC01410, présentée pour le centre hospitalier de LUNEVILLE (MEURTHE-ET-MOSELLE), représenté par son directeur ;
Le centre hospitalier demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 30 mai 1989 par lequel le tribunal administratif de NANCY l'a condamné a verser à Mme X... une indemnité de 241 350 F et une somme de 3 000 F au titre des frais de procès non compris dans les dépens, et a mis à sa charge les frais d'expertise ;
Vu le mémoire en défense et recours incident, enregistré le 12 décembre 1989, présenté pour Mme Thérèse X... ;
Mme X... conclut au rejet de la requête et à la condamnation du centre hospitalier de LUNEVILLE à lui verser une indemnité de 606 070 F, à lui verser conjointement avec son époux une indemnité de 300 000 F au titre du préjudice professionnel, et une somme de 3 000 F au titre des frais de procès ;

Vu l'ordonnance du 14 novembre 1988 par laquelle le Président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier enregistré sous le n° 96863 à la cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la Sécurité Sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 23 octobre 1990 :
- le rapport de M. DAMAY, conseiller,
- les observations de Me HECHINGER, substituant Me BOURGAUX, avocat de la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE ;
- et les conclusions de Mme FELMY, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes du centre hospitalier de LUNEVILLE, enregistrées sous les n° 89NC00324 et 89NC01376 et la requête de la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE, enregistrée sous le n° 89NC01410, sont relatives aux conséquences d'un même accident hospitalier ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Sur la responsabilité :
Considérant que Mme Thérèse X... a été hospitalisée le 4 janvier 1983 dans le service de médecine du centre hospitalier de LUNEVILLE et y a subi un lavage gastrique suivi de la mise en route d'une perfusion ; que le lendemain, elle s'est jetée par la fenêtre de sa chambre située au 1er étage et s'est grièvement blessée aux deux jambes ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'admission à l'hôpital de Mme X... était consécutive à une tentative de suicide par absorption de médicaments dont le personnel hospitalier a été informé par le médecin traitant de l'intéressée ; que celui-ci avait attiré l'attention sur les précautions particulières rendues nécessaires par l'état dépressif de sa patiente ; qu'en la laissant seule, le lendemain de son admission, dans une chambre dont la fenêtre n'était munie d'aucun dispositif de sécurité, le centre hospitalier de LUNEVILLE a commis une faute dans l'organisation du service qui engage sa responsabilité ;
Sur le préjudice :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal, que Mme X... a subi de graves blessures aux jambes, consolidées le 15 août 1984, et reste atteinte d'une claudication prononcée, rendant la marche difficile, qui entraîne une invalidité permanente partielle évaluée au taux de 30 % ; qu'elle a subi des souffrances physiques assez importantes et un préjudice esthétique moyen ;
Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas établi que l'état de santé de Mme X... aurait nécessité en tout état de cause une hospitalisation prolongée ou son transfert dans un établissement spécialisé ; que les frais exposés par la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE à compter du 5 janvier 1983 doivent dès lors être regardés comme découlant directement des soins nécessités par la défenestration de Mme X... ; que la Caisse justifie devant le juge d'appel de débours d'un montant au moins égal à la somme de 152 366,12 F dont elle a demandé le remboursement devant le tribunal administratif ; que, par contre, les conclusions tendant à ce que ce montant soit majoré d'une somme de 7 535,20 F correspondant à des frais d'hospitalisation exposés en décembre 1983, antérieurement au jugement de première instance, constituent une demande nouvelle en appel, qui n'est pas recevable ; que la Caisse de mutualité sociale agricole est par suite fondée à demander que le montant des frais médicaux résultant directement de l'accident du 5 janvier 1983 soit majoré, mais dans la limite d'une somme de 152 366,12 F ;

Considérant, en second lieu, qu'en fixant à 200 000 F l'indemnité due à Mme X... en réparation de ses troubles dans les conditions d'existence, y compris son préjudice d'agrément, et à 20 000 F les indemnités dues au titre des souffrances physiques et du préjudice esthétique, le tribunal administratif a fait une exacte appréciation du préjudice subi par l'intéressée ;
Considérant, en troisième lieu, que si Mme X... exerçait une activité au sein de l'exploitation familiale, elle ne justifie pas des pertes de revenus qu'auraient entraînées son hospitalisation et sa convalescence ; qu'il n'est par ailleurs pas établi que la mise en vente de leur exploitation agricole par les époux X... en 1988 soit en relation directe avec les blessures reçues par Mme X... dont la consolidation est intervenue en 1984 ;
Considérant, en quatrième lieu, que Mme X... a versé une somme de 1 570 F à titre de forfait hospitalier aux établissements dans lesquels elle a été hospitalisée entre le 5 janvier 1983 et le 21 juillet 1984 ; qu'il y a par suite lieu de faire droit à sa demande tendant à ce que la somme accordée par le tribunal en remboursement des forfaits hospitaliers soit portée de 1 350 F à 1 570 F ;
Sur les droits de la Caisse de mutualité sociale agricole :
Considérant que la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE a droit au remboursement des frais médicaux qu'elle a exposés à la suite de l'accident du 5 janvier 1983 ; qu'elle est fondée à demander que la somme que le centre hospitalier de LUNEVILLE a été condamné à lui verser soit portée à 152 366,12 F, et que le jugement du 30 mai 1989 soit réformé en ce sens ;
Sur les droits de Mme X... :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à demander que l'indemnité qui lui a été accordée par le tribunal administratif de NANCY soit portée de 241 350 F à 241 570 F ; que par voie de conséquence le centre hospitalier de LUNEVILLE n'est pas fondé à demander une réduction de cette indemnité ; Sur les frais de procès non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner le centre hospitalier de LUNEVILLE a payer à Mme X... et à la Caisse de mutualité sociale agricole des sommes de 3 000 F au titre des sommes exposées par elles et non comprises dans les dépens ;
Article 1 : L'indemnité que le centre hospitalier de LUNEVILLE a été condamné à verser à la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE est portée à la somme de 152 366,12 F.
Article 2 : L'indemnité que le centre hospitalier de LUNEVILLE a été condamné à verser à Mme X... est portée à la somme de 241 570 F.
Article 3 : Les requêtes du centre hospitalier de LUNEVILLE, le surplus du recours incident de Mme X..., le surplus de la requête de la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE et le recours incident du centre hospitalier de LUNEVILLE présenté sous le n° 89NC01376 sont rejetés.
Article 4 : Le centre hospitalier de LUNEVILLE est condamné à payer à Mme X... et à la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE des sommes de 3 000 F au titre de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de NANCY en date du 30 mai 1989 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X..., à la Caisse de mutualité sociale agricole de MEURTHE-ET-MOSELLE et au centre hospitalier de LUNEVILLE.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 89NC00324;89NC01376;89NC01410
Date de la décision : 06/11/1990
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-03-02 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL -Préjudice correspondant à des frais et charges - Forfait hospitalier.

60-04-03-02 Le forfait hospitalier est un élément indemnisable du préjudice subi par la victime qui a dû subir une hospitalisation (sol. impl.).


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222


Composition du Tribunal
Président : M. Woehrling
Rapporteur ?: M. Damay
Rapporteur public ?: Mme Felmy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1990-11-06;89nc00324 ?
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