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19/12/1989 | FRANCE | N°89NC00321

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, Pleniere, 19 décembre 1989, 89NC00321


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 14 mars 1988 et 23 décembre 1988 sous le numéro 96048, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 5 janvier 1989 sous le numéro 89NC00321, présentés pour M. Ali X..., domicilié ..., tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 30 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de BESANCON a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de BESANCON (Doubs) à lui verser la somme de 60 914,01 F en réparation du préjudice résultant

de la mise en fourrière de son véhicule, le 1er mars 1983 ;
- la c...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 14 mars 1988 et 23 décembre 1988 sous le numéro 96048, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 5 janvier 1989 sous le numéro 89NC00321, présentés pour M. Ali X..., domicilié ..., tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 30 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de BESANCON a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de BESANCON (Doubs) à lui verser la somme de 60 914,01 F en réparation du préjudice résultant de la mise en fourrière de son véhicule, le 1er mars 1983 ;
- la condamne à lui verser ladite somme avec intérêts de droit capitalisés ;
Vu l'ordonnance du 2 janvier 1989 par laquelle le Président de la 5ème sous-section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 65-29 du 11 janvier 1965 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et les décrets n° 88-906 et 88-907 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 5 décembre 1989 :
- le rapport de M. FONTAINE, Conseiller ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la recevabilité de la requête introductive d'instance :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 65-29 du 11 janvier 1965 : "Sauf en matière de travaux publics, la juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les 2 mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ... Les délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision" ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la commune de BESANCON ait notifié à M. X..., dans les formes prévues par les dispositions précitées, sa décision du 17 février 1986 rejetant la demande d'indemnité de l'intéressé ; que, dès lors, la fin de non-recevoir tirée de l'expiration du délai de recours contentieux ne saurait être accueillie ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'aux termes de l'article R.290-1 du code de la route : "La mise en fourrière doit être notifiée par l'officier de police judiciaire qui l'a décidée ou par l'autorité dont relève la fourrière, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception soit à l'adresse relevée par le procès-verbal d'infraction si le propriétaire était présent, soit, au cas contraire, à l'adresse indiquée au répertoire des immatriculations. Cette notification, accompagnée, le cas échéant, d'un état des travaux indispensables à faire effectuer avant restitution, précise l'autorité qualifiée pour donner mainlevée de la mesure et met en demeure le propriétaire d'avoir à retirer son véhicule avant l'expiration d'un délai de dix jours pour les véhicules visés à l'article L.25-3 (alinéas 4 et 5) et d'un délai de quarante-cinq jours dans les autres cas. Elle indique aussi que, faute de retrait dans les délais impartis, le véhicule sera, dans les conditions prévues par décret, soit livré à la destruction, soit remis au service des domaines en vue de son aliénation ..." ;
Considérant que si M. X... a été invité, par lettre recommandée avec avis de réception en date du 3 mars 1983, à retirer sa voiture immobilisée en fourrière dans un délai de quarante cinq jours, cette notification, qui n'indiquait pas "l'autorité qualifiée pour donner mainlevée de la mesure", n'était pas conforme aux prescriptions de l'article R.290-1 précité ; qu'ainsi, la destruction du véhicule de M. X... est intervenue à la suite d'une procédure irrégulière et constitue, dès lors, une faute de service de nature à engager, en l'absence de faute de l'intéressé, l'entière responsabilité de la commune de BESANCON ; que, par suite, M. X... est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, en date du 30 décembre 1987, par lequel le tribunal administratif de BESANCON a rejeté sa demande d'indemnité ;
Sur le préjudice :

Considérant que M. X... a évalué, dans le dernier état de ses conclusions, le préjudice qu'il a subi à la somme de 60 914,01 F ; qu'il ne peut toutefois prétendre qu'à la prise en charge par la commune des débours résultant de la faute commise, à l'exclusion des frais qu'il a engagés pour l'acquisition d'une nouvelle automobile ; qu'il y a lieu de retenir, eu égard aux justifications apportées, la valeur vénale du véhicule détruit et les coûts de transport de remplacement, de la cotisation d'assurance et d'un constat d'huissier ; que ces différents chefs de préjudice s'élèvent respectivement à 6 000 F, 1 663,80 F, 853 F et 300 F ; que, par contre, la commune de BESANCON ne saurait supporter le coût des amendes infligées à M. X... à la suite des procès-verbaux de contravention de police dressés à son encontre ; qu'ainsi, l'indemnité due à M. X... par la commune est de 8 816,80 F ;
Sur les intérêts et leur capitalisation :
Considérant que la somme de 8 816,80 F portera intérêts au taux légal, comme il est demandé, à compter du 16 mai 1986, date d'enregistrement de la requête introductive d'instance au greffe du tribunal adminis- tratif ;
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 20 mai 1987, 9 décembre 1987, 14 mars 1988 et 3 avril 1989 ; qu'à la première et à la quatrième de ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces deux demandes et de rejeter les autres, présentées les 9 décembre 1987 et 14 mars 1988 ;
Sur les conclusions relatives aux frais de procès non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, en application de l'article 1er du décret n° 88-907 du 2 septembre 1988, de condamner la commune de BESANCON à verser à M. X... une somme de 6 000 F, y compris tous intérêts au jour de la présente décision, au titre des frais exposés par lui à l'occasion du procès et non compris dans les dépens ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de BESANCON en date du 30 décembre 1987 est annulé.
Article 2 : La commune de BESANCON est condamnée à verser à M. Ali X... la somme de 8 816,80 F avec intérêts au taux légal à compter du 16 mai 1986. Les intérêts échus les 20 mai 1987 et 3 avril 1989 seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 3 : La commune de BESANCON est condamnée à verser à M. X... la somme de 6 000 F, y compris tous intérêts à la date du présent arrêt, au titre de l'article 1er du décret n° 88-907 du 2 septembre 1988.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et à la commune de BESANCON.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 89NC00321
Date de la décision : 19/12/1989
Sens de l'arrêt : Annulation indemnité
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - RESPONSABILITE - RESPONSABILITE EXTRA-CONTRACTUELLE - COMPETENCE ADMINISTRATIVE - Responsabilité à raison de l'activité de différents services publics administratifs - Police - Destruction d'un véhicule mis en fourrière (1).

17-03-02-05-01-01, 26-04-04, 60-01-04-01 Si le requérant a été invité, par lettre recommandée avec avis de réception, à retirer sa voiture immobilisée en fourrière dans un délai de quarante-cinq jours, cette notification, qui ne précisait pas "l'autorité qualifiée pour donner mainlevée de la mesure", n'était pas conforme aux prescriptions de l'article R.290-1 du code de la route. Ainsi, la destruction du véhicule est intervenue à la suite d'une procédure irrégulière et constitue, dès lors, une faute de service de nature à engager, en l'absence de faute de l'intéressé, l'entière responsabilité de la puissance publique.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - DROIT DE PROPRIETE - ACTES DES AUTORITES ADMINISTRATIVES CONCERNANT LES BIENS PRIVES - Destruction - à la suite d'une procédure irrégulière - d'un véhicule mis en fourrière - Responsabilité de la puissance publique.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - RESPONSABILITE ET ILLEGALITE - ILLEGALITE ENGAGEANT LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - Police - Irrégularité de la notification préalable à la destruction d'un véhicule mis en fourrière.


Références :

Code civil 1154
Code de la route R290-1
Décret 65-29 du 11 janvier 1965 art. 1
Décret 88-907 du 02 septembre 1988 art. 1

1.

Cf. CE, 1981-03-18, Consorts Ferran, p. 148


Composition du Tribunal
Président : M. Gourdes
Rapporteur ?: M. Fontaine
Rapporteur public ?: Mme Fraysse

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-12-19;89nc00321 ?
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