VU la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 16 avril 1988 sous le numéro 97052, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00417, présentée pour la SARL "Sablières TOURNIER" dont le siège social est à PONTARLIER (Doubs) par son gérant en exercice et tendant à ce que la Cour :
1) annule le jugement en date du 10 février 1988 par lequel le tribunal administratif de BESANCON a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1983 et 1984,
2) lui accorde la décharge sollicitée, ainsi que la décharge de la somme de 28 826 F au titre de la T.V.A. et de la somme de 20 158 F au titre de la taxe sur les voitures particulières des sociétés ;
VU l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de la route ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 21 novembre 1989 :
- le rapport de Monsieur BONNAUD, Conseiller ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la société à responsabilité limitée Sablières TOURNIER fait appel du jugement en date du 10 février 1988 par lequel le tribunal administratif de BESANCON a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1983 et 1984 ; qu'elle demande, en outre, la déduction d'un montant de 28 826 F de taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de son véhicule de marque Mercédès type 300 GD 4 X 4 ainsi que la décharge de la taxe sur les voitures particulières des sociétés qui lui a été assignée, au titre des exercices clos en 1983 et 1984, pour un montant de 20 158 Frs ;
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en vertu des dispositions de l'article 209 du même code, "1- le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment ... les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation ..." ; qu'en vertu du 4 du même article, dans sa rédaction applicable aux années litigieuses, l'amortissement des véhicules immatriculés dans la catégorie des voitures particulières pour la fraction de leur prix d'acquisition excédant 35 000 F est, sauf justifications, exclu des charges déductibles pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés ;
Considérant que la société requérante a acheté le 29 octobre 1982 une camionnette Mercédès de type 300 GD 4 X 4 auprès d'un concessionnaire avec, en option, "deux banquettes latérales arrières et deux glaces latérales" ; qu'il est constant que le véhicule a été immatriculé dans la catégorie des camionnettes ; qu'en admettant que, comme l'affirme l'administration, ces aménagements aient été réalisés après l'immatriculation, et même si ce véhicule devait être regardé comme étant à "usages mixtes" au sens des dispositons de l'article 237 de l'annexe II du C.G.I. relatives à la taxe sur la valeur ajoutée, il ne résulte pas de l'instruction que de tels aménagements doivent être regardés comme constituant une "transformation notable" au sens des dispositions de l'article R. 106 du code de la route, seule de nature à justifier une nouvelle réception du véhicule et, par suite, son classement éventuel dans une autre catégorie ; qu'il suit de là que l'amortissement de cette camionnette ne relevait pas des dispositions de l'article 39-4 du C.G.I. qui ne concernent que les voitures particulières ; qu'ainsi l'administration n'était pas en droit d'exclure des charges déductibles l'amortissement dudit véhicule pour la fraction de son prix excédant 35 000 F ; que, dès lors, la SARL Sablières TOURNIER est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué et la décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1983 et 1984 à concurrence, respectivement, des sommes de 7 133 F et 11 441 F ;
En ce qui concerne la T.V.A. :
Considérant que, bien que la société Sablières TOURNIER ait fait état dans sa réclamation du 28 décembre 1985 d'autres impositions et notamment du montant de 28 826 F de taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de son véhicule, il résulte des termes mêmes de cette réclamation que ses conclusions tendaient seulement à la décharge, à concurrence des montants globaux de 7 133 F et 11 441 F, du complément d'impôt sur les sociétés établi au titre des exercices clos en 1983 et 1984 ; qu'elle n'a d'ailleurs contesté en première instance que cette dernière imposition ; que, dès lors, les conclusions de la requête relatives à la taxe sur la valeur ajoutée, qui n'ont été formulées ni dans ladite réclamation au directeur ni devant le tribunal administratif, ne sont pas recevables ;
En ce qui concerne la taxe sur les voitures particulières des sociétés :
Considérant qu'aux termes de l'article 1010 du C.G.I. "Les véhicules immatriculés dans la catégorie des voitures particulières, possédés ou utilisés par les sociétés, sont soumis à une taxe annuelle ... perçue par voie de timbre ..." ; que, selon l'article L.199 du livre des procédures fiscales, "En matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions ... le tribunal compétent est le tribunal de grande instance ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que la taxe sur les voitures particulières des sociétés ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ;
Article 1 : Les conclusions de la requête de la SARL Sablières TOURNIER tendant à la décharge, à concurrence de 20 158 F, de la taxe sur les voitures particulières des sociétés qui lui a été assignée, au titre des exercices clos en 1983 et 1984, sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de BESANCON en date du 10 février 1988 est annulé.
Article 3 : Il est accordé à la SARL Sablières TOURNIER décharge, en droits et pénalités, du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie, au titre des exercices clos en 1983 et 1984, à concurrence respectivement des sommes de 7 133 F et 11 441 F.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Sablières TOURNIER est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Sablières TOURNIER et au ministre délégué, chargé du Budget.