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28/02/2025 | FRANCE | N°19MA04030

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 28 février 2025, 19MA04030


Vu la procédure suivante :



Par un arrêt avant dire droit du 17 septembre 2021, la Cour a sursis à statuer sur la requête du ministre de la transition écologique et solidaire, en application de l'article L. 191-1 du code de l'environnement, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification de son arrêt ou de douze mois en cas de reprise des consultations, en vue de l'édiction des mesures de régularisation de l'arrêté du préfet du Gard du 16 septembre 2016 en litige prises selon les modalités mentionnées aux points 34 à 37 dudit ar

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Par un second arrêt avant dire droit du 18 novembre 2022, la ...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant dire droit du 17 septembre 2021, la Cour a sursis à statuer sur la requête du ministre de la transition écologique et solidaire, en application de l'article L. 191-1 du code de l'environnement, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification de son arrêt ou de douze mois en cas de reprise des consultations, en vue de l'édiction des mesures de régularisation de l'arrêté du préfet du Gard du 16 septembre 2016 en litige prises selon les modalités mentionnées aux points 34 à 37 dudit arrêt.

Par un second arrêt avant dire droit du 18 novembre 2022, la Cour a modifié son arrêt du 17 septembre 2021 pour fixer au 16 novembre 2023 la date jusqu'à laquelle il était sursis à statuer, dans l'attente de la notification à son greffe des mesures de régularisation prescrites.

Par lettre du 17 novembre 2023, la présidente assesseure de la 7ème chambre de la Cour a accordé un nouveau et dernier délai de six mois à compter du 16 novembre 2023 pour la notification de ces mesures de régularisation.

Par un mémoire, enregistré le 29 avril 2024, et des pièces complémentaires, produites le 30 mai 2024, le préfet du Gard a notifié au greffe de la Cour l'arrêté du 15 avril 2024, complémentaire à l'arrêté du 16 septembre 2016, en vue de la régularisation du plan de prévention des risques d'inondation de la commune de Jonquières-Saint-Vincent, ainsi que les pièces de procédure correspondantes.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 29 mai et 5 juin 2024, M. A... C..., représenté par Me Blanc, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête et de confirmer le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 25 juin 2019, annulant l'arrêté du préfet du Gard du 16 septembre 2016, portant plan de prévention des risques d'inondation de la commune de Jonquières-Saint-Vincent, en tant qu'il classe les parcelles cadastrées section AS n° 112 à 118 et 167 ainsi que les parcelles à vocation agricole n° 3, 4, 7 et 8 du lieu-dit " B... " en zone inondable, ensemble le rejet de son recours gracieux ;

2°) d'annuler l'arrêté complémentaire du 15 avril 2024 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le dossier d'évaluation environnementale est insuffisant, ainsi que l'a relevé l'autorité environnementale ; il ne comportait pas le dossier approuvé en 2016 ; les bâtiments présentant un enjeu particulier ne sont pas identifiés en cartographie ; l'analyse des incidences du PPRI sur les zones humides et de protection spéciale Costières nîmoises est manquante ;

- le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur doivent être produits ; les dispositions de l'article R. 123-21 du code de l'environnement ont été méconnues ;

- dès lors que l'enquête publique n'a porté que sur l'évaluation environnementale et que le dossier élaboré en 2016 n'a fait l'objet d'aucune modification, les dispositions des articles L. 122-4 et L. 562-3 du code de l'environnement n'ont pas été respectées ; l'évaluation et les consultations effectuées n'ont pas été prises en compte, sans quoi une révision du PPRI aurait été engagée ;

- une confusion a été opérée entre le Grand Valat et le Grand Vallat, affluent du Gardon, ce qui ôte sa crédibilité à l'étude hydraulique.

Par un mémoire, enregistré le 13 juin 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 25 juin 2019 ;

2°) de rejeter la demande de première instance.

Il soutient que les moyens invoqués en défense à la suite de la régularisation intervenue sont non fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Poullain,

- et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a formé un recours pour excès de pouvoir contre l'arrêté du 16 septembre 2016 par lequel le préfet du Gard a approuvé le plan de prévention des risques d'inondation sur le territoire de la commune de Jonquières-Saint-Vincent en tant qu'il classe ses parcelles cadastrées section AS n° 112, 113, 114, 115, 116, 117, 118, 167 et les parcelles n° 3, 4, 7 et 8 situées au lieu-dit " B... " en zone inondable, ainsi que contre la décision implicite rejetant son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté. Sur le fondement de l'article L. 191-1 du code de l'environnement et par un arrêt du 17 septembre 2021, la Cour, avant de statuer sur l'appel formé par le ministre de la transition écologique et solidaire contre le jugement du 25 juin 2019 du tribunal administratif de Nîmes, faisant droit à la demande de M. C..., a sursis à statuer en vue de l'édiction de mesures de régularisation de l'arrêté litigieux, tenant à la consultation de l'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable sur la nécessité d'une évaluation environnementale du plan et, le cas échéant, à la réalisation d'une telle évaluation et à sa soumission à consultations et enquête publique.

2. Conformément à l'avis implicite rendu par ladite autorité, une évaluation environnementale a été conduite et soumise à l'avis des personnes publiques associées, de la commune, des organismes intéressés et de l'autorité environnementale, avant que le préfet du Gard ne prenne, le 15 avril 2024, après enquête publique, un arrêté complémentaire à son arrêté du 16 septembre 2016, en vue de la régularisation du plan de prévention des risques d'inondation de Jonquières-Saint-Vincent.

Sur la régularisation du vice relevé :

3. Les parties à une instance ayant donné lieu à un arrêt avant dire droit sur le fondement de l'article L. 191-1 du code de l'environnement peuvent contester la légalité de la mesure de régularisation, sur laquelle la cour d'appel les a invitées à présenter des observations, dans le cadre de la même instance. A compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 191-1 du code de l'environnement, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. A ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant dire droit. Elles ne peuvent en revanche soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse d'un moyen déjà écarté par la décision avant dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

En ce qui concerne l'évaluation environnementale :

4. L'article R. 122-20 du code de l'environnement définit le contenu de l'évaluation environnementale, qui doit être proportionnée à l'importance du plan, aux effets de sa mise en œuvre ainsi qu'aux enjeux environnementaux de la zone considérée. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure que si elles peuvent avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou seraient de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

5. En premier lieu, si M. C... soutient que l'évaluation environnementale aurait dû comporter le plan de prévention des risques d'inondation, il est constant que l'étude comporte un résumé du rapport de présentation du plan et que l'entier dossier correspondant était en tout état de cause accessible sur le site internet des services de l'Etat dans le Gard. Les cartes réglementaires reproduites, définissant les aléas, les risques et le zonage, permettent par ailleurs d'identifier les bâtiments concernés, et notamment le cœur du village, alors même qu'aucune ne localise spécialement les bâtiments publics ou présentant un enjeu particulier.

6. En deuxième lieu, l'évaluation environnementale relève que le territoire communal comporte deux zones d'intérêt écologique faunistique et floristique, la plaine de Manduel et Meynes et les coteaux de Jonquières-Saint-Vincent, un grand ensemble de zones humides constitué par le canal des Costières ainsi qu'une zone humide élémentaire, l'étang asséché de la Palud, enfin des espaces naturels sensibles, les Costières de Nîmes et une zone de protection spéciale Natura 2000. Elle retient en conséquence l'enjeu, pour le plan de prévention des risques d'inondation, de préserver les milieux naturels, notamment ceux en zone d'expansion des crues et les zones humides. Elle précise ainsi, d'une part, que le plan permet de préserver les milieux naturels liés au Grand Valat et à l'étang de la Palud, leurs services écosystémiques, les capacités d'écoulement et d'infiltration des eaux, ainsi que les puits de carbone présents, telles les zones humides, prairies et boisements. Elle ajoute, d'autre part, que l'ensemble des milieux naturels décrits sont localisés en zone rouge pour les terrains non bâtis, c'est-à-dire en zone inconstructible. Il ne saurait dès lors être soutenu que l'étude est insuffisante quant à l'analyse de l'incidence du plan sur les zones naturelles.

7. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que, malgré les critiques formulées à cet égard par l'autorité environnementale, le contenu de l'évaluation environnementale répond, dans les circonstances de l'espèce, aux exigences de l'article R. 122-20 du code de l'environnement et n'avait pas à faire l'objet de compléments.

En ce qui concerne la consultation complémentaire :

8. Aux termes de l'arrêt avant dire droit de la Cour du 17 septembre 2021, dès lors qu'une évaluation environnementale était réalisée, celle-ci devait faire l'objet d'une enquête publique comme l'imposait à la date de l'arrêté en litige les dispositions de l'article L. 562-3 du code de l'environnement ainsi que d'une consultation des conseils municipaux et organismes intéressés.

9. En premier lieu, il est constant que, contrairement à ce que soutient M. C..., le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur ont dûment été publiés sur le site Internet des services de l'Etat dans le Gard où avait été publié l'avis d'enquête publique, conformément aux exigences de l'article R. 123-21 du code de l'environnement.

10. En deuxième lieu, si, en application de l'article L. 122-4 du même code, le rapport sur les incidences environnementales ainsi que les consultations opérées sur cette base doivent être pris en compte par l'autorité administrative lors de l'adoption du plan, il ressort de l'arrêté complémentaire du 15 avril 2024 que le préfet du Gard a dûment pris en compte l'évaluation à laquelle il avait fait procéder, relevant qu'elle concluait à l'absence d'impact du plan de prévention des risques d'inondation sur l'environnement, ainsi que l'ensemble des consultations et l'enquête publique intervenue, dont les conclusions favorables du commissaire enquêteur, avant de confirmer le plan en régularisant l'arrêté portant approbation du 16 septembre 2016. Contrairement à ce que soutient M. C..., cette évaluation ne justifiait pas que soit entreprise une révision, ni même une modification du plan. Il ne saurait dès lors être soutenu que les dispositions de l'article L. 122-4 du code de l'environnement auraient été méconnues, ni qu'une enquête publique plus large, portant sur l'ensemble du plan lui-même, aurait dû à nouveau être conduite.

En ce qui concerne l'autre moyen :

11. Si M. C... soutient, dans ses dernières écritures, qu'une confusion a été opérée entre le Grand Valat et le Grand Vallat, affluent du Gardon, ce qui ôte sa crédibilité à l'étude hydraulique, ce point avait été évoqué à l'occasion de l'enquête publique conduite préalablement à l'approbation du plan de prévention des risques d'inondation. Ce moyen nouveau n'est ainsi pas fondé sur des éléments révélés par la procédure de régularisation et ne peut être utilement invoqué.

12. La Cour, dans son arrêt avant dire droit du 17 septembre 2021, a écarté l'ensemble des autres moyens de première instance et d'appel présentés par M. C.... Il résulte dès lors de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 15 avril 2024 doivent être rejetées et que le ministre en charge de la transition écologique est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 25 juin 2019, ayant annulé le rejet implicite de son recours gracieux et l'arrêté du 16 septembre 2016 en tant qu'il classe les parcelles cadastrées section AS n° 112 à 118 et 167 ainsi que les parcelles à vocation agricole n° 3, 4, 7 et 8 du lieu-dit " B... " en zone inondable.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 25 juin 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Nîmes, de même que ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche et à M. A... C....

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 7 février 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Poullain, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2025.

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N° 19MA04030

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04030
Date de la décision : 28/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Nature et environnement.

Nature et environnement - Divers régimes protecteurs de l`environnement - Prévention des crues - des risques majeurs et des risques sismiques.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS BLANC - TARDIVEL

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-28;19ma04030 ?
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