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01/07/2024 | FRANCE | N°23MA01359

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 01 juillet 2024, 23MA01359


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A..., se disant M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 24 juin 2020, par laquelle le préfet du Var a refusé de lui délivrer un passeport français ainsi que la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique.



Par un jugement n° 2100894 du 16 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une r

equête, enregistrée le 31 mai 2023, M. A..., se disant M. B..., représenté par Me Ibrahim, demande à la Cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A..., se disant M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 24 juin 2020, par laquelle le préfet du Var a refusé de lui délivrer un passeport français ainsi que la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique.

Par un jugement n° 2100894 du 16 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 mai 2023, M. A..., se disant M. B..., représenté par Me Ibrahim, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 décembre 2022 ;

2°) d'annuler la décision du 24 juin 2020, par laquelle le préfet du Var a refusé de lui délivrer un passeport français ainsi que la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique ;

3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un passeport français dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les décisions de refus de délivrance d'un passeport français sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus qui lui est opposé porte atteinte à sa liberté d'aller et venir.

Une mise en demeure a été adressée le 6 septembre 2023 au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Un courrier du 30 novembre 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Par ordonnance du 31 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée à sa date d'émission en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Par une décision en date du 28 avril 2023, M. A..., se disant M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 ;

- le décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Isabelle Ruiz, rapporteure,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de Me Ibrahim, pour M. A..., se disant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Le 11 juin 2020, M. B... a déposé une demande de passeport auprès des services de la mairie de Marseille. Par une décision du 24 juin 2020, le préfet du Var a rejeté expressément cette demande au motif que le ministre de l'intérieur avait estimé qu'il n'était pas titulaire de l'état civil produit, revendiqué par plusieurs personnes. L'intéressé a formé un recours hiérarchique contre cette décision par lettre du 26 août 2020 lequel a été implicitement rejeté. M. A..., se disant M. B... a alors saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à l'annulation de ces décisions. Par le jugement du 16 décembre 2022, le tribunal administratif a rejeté cette demande. M. A..., se disant M. B... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 30 du code civil : " La charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause. / Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants. ". Aux termes de l'article 29-3 du même code : " Toute personne a le droit d'agir pour faire décider qu'elle a ou qu'elle n'a point la qualité de Français. / Le procureur de la République a le même droit à l'égard de toute personne. Il est défendeur nécessaire à toute action déclaratoire de nationalité. Il doit être mis en cause toutes les fois qu'une question de nationalité est posée à titre incident devant un tribunal habile à en connaître. ". Enfin, aux termes de l'article 31-2 de ce code : " Le certificat de nationalité indique, en se référant aux chapitres II, III, IV et VII du présent titre, la disposition légale en vertu de laquelle l'intéressé a la qualité de Français, ainsi que les documents qui ont permis de l'établir. Il fait foi jusqu'à preuve du contraire. / Pour l'établissement d'un certificat de nationalité, le directeur des services de greffe judiciaires du tribunal judiciaire pourra présumer, à défaut d'autres éléments, que les actes d'état civil dressés à l'étranger et qui sont produits devant lui emportent les effets que la loi française y aurait attachés. ".

3. En vertu de l'article 2 du décret du 22 octobre 1955 instituant une carte nationale d'identité et de l'article 4 du décret du 30 décembre 2005 relatif aux passeports, la carte nationale d'identité et le passeport sont délivrés, sans condition d'âge, à tout français qui en fait la demande. Il résulte des dispositions du II de l'article 4 du décret du 22 octobre 1955 et du II de l'article 5 du décret du 30 décembre 2005 que la preuve de la nationalité française du demandeur peut être établie à partir de l'extrait d'acte de naissance portant en marge l'une des mentions prévues aux articles 28 et 28-1 du code civil ou, lorsque l'extrait d'acte de naissance ne suffit pas à établir la nationalité française du demandeur, par la production de l'une des pièces justificatives mentionnées aux articles 34 ou 52 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française, ou à défaut par la justification d'une possession d'état de Français de plus de dix ans ou, lorsque ne peut être produite aucune de ces pièces, par la production d'un certificat de nationalité française.

4. Indépendamment des dispositions 29-3, 30 et 31-2 du code civil, qui régissent la détermination de la nationalité d'une personne déterminée, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, il appartient aux autorités administratives de s'assurer, sous le contrôle normal du juge administratif, que les pièces produites à l'appui d'une demande de carte nationale d'identité ou de passeport sont de nature à établir l'identité du demandeur, seul un doute suffisant sur celles-ci pouvant justifier un refus de délivrance ou de renouvellement du document.

5. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de la décision en litige du préfet du Var que ce dernier n'a pas mis en cause la nationalité française de M. E... B... né le 27 décembre 1983 à Didjoni aux Comores, mais s'est borné à mettre en doute le fait que l'appelant s'identifiait à cette personne. Pour lui refuser la délivrance d'un passeport, le préfet du Var a remis en cause le certificat de nationalité dont l'intéressé se prévalait et qui concernait, en réalité selon cette autorité, une autre personne. Si l'appelant soutient qu'il est titulaire d'un certificat de nationalité française délivré par le tribunal d'instance de Marseille du 29 décembre 2011 aux termes duquel il est mentionné que la filiation de l'intéressé est établie, il ressort toutefois des pièces versées en première instance par le préfet du Var et émanant de la préfecture de Seine-et-Marne ainsi que des services du ministère de l'intérieur, qu'en raison d'une usurpation d'identité de la part de M. A..., se disant M. B..., les services préfectoraux de Seine-et-Marne ont procédé à l'invalidation le 12 mai 2017 de la carte nationale d'identité présentée en original par le requérant et à l'inscription, le même jour, de l'intéressé au fichier des personnes recherchées, et, ont rejeté le 17 mai 2017 la demande de titre sollicité par M. A..., se disant M. B.... Il ressort également de ces mêmes pièces que la demande de délivrance de passeport que l'appelant avait présentée le 3 juillet 2014 à la mairie de Pontault Combault avait déjà été refusée pour ce même motif d'usurpation d'identité, celle mentionnée par M. A..., se disant M. B... étant revendiquée par plusieurs individus. L'intéressé n'apporte aucun élément de preuve de nature à démontrer qu'il est bien l'individu auquel le certificat de nationalité 22422011 a été délivré et demeurant à l'époque chez M. D... F..., 52 rue de la Belle de Mai à Marseille (13003). Il n'apporte pas davantage d'élément de preuve, par tous moyens, de nature à établir les relations de filiation avec M. B... H... et avec Mme C... G.... Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet du Var et le ministre de l'intérieur et des outre-mer ont refusé, sur la base d'un doute suffisant, à M. A..., se disant M. B... la délivrance d'un passeport.

6. En second lieu, il résulte de ce qui vient d'être exposé, que M. A..., se disant M. B..., ne justifiant pas de l'identité qu'il revendique, ne peut être regardé comme un ressortissant de nationalité française. Il ne peut dès lors se prévaloir de la liberté de circulation vers d'autres pays garantie par la possession d'un passeport aux ressortissants français. Par suite, le moyen tiré de l'atteinte à sa liberté d'aller et venir ne saurait être accueilli.

7. Il résulte de ce qui précède que M. A..., se disant M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation doivent donc être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A..., se disant M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... se disant M. E... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Ibrahim.

Délibéré après l'audience du 17 juin 2024, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président de chambre,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juillet 2024.

N° 23MA01359 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01359
Date de la décision : 01/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

26-01-04 Droits civils et individuels. - État des personnes. - Questions diverses relatives à l`état des personnes.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Isabelle RUIZ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : IBRAHIM

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-01;23ma01359 ?
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