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07/05/2024 | FRANCE | N°23MA02174

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 07 mai 2024, 23MA02174


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... Imam A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.



Par un jugement n° 2300717 du 17 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
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Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 18 août 2023, M. Imam A..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... Imam A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2300717 du 17 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 août 2023, M. Imam A..., représenté par Me Leonhardt, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2300717 du 17 mai 2023 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2022 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour lui permettant de travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation de séjour lui permettant de travailler, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet a méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en tant qu'elle refuse un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- elle est illégale par voie d'exception ;

- le préfet a méconnu le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et commis une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2023, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par M. Imam A... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui a déposé des pièces et des observations enregistrées les 7 mars 2024 et 13 mars 2024.

Par une décision du 13 juillet 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille, M. Imam A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles, modifié ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

La présidente de la Cour a désigné M. Platillero, président assesseur, pour présider la formation de jugement, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Platillero a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. Imam A..., ressortissant algérien, a sollicité son admission au séjour en raison de son état de santé, sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Après avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 30 mai 2022, par un arrêté du 28 juillet 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. Imam A... relève appel du jugement du 17 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : "Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

3. Pour rejeter la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. Imam A..., le préfet s'est notamment approprié l'avis du 30 mai 2022 par lequel le collège de médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il ressort des pièces du dossier, notamment du certificat médical du 8 mars 2022 établi par une psychiatre de la clinique des Trois Lucs à Marseille produit à l'appui de la demande de titre de séjour et du rapport médical du 26 avril 2022 destiné au collège de médecins, que M. Imam A... souffre de schizophrénie paranoïde, pathologie pour laquelle il est hospitalisé au sein de cette clinique et suit un traitement médicamenteux composé notamment de clozapine et, en dernier lieu, de " Lepticur ", dont la substance active est la tropatépine. M. Imam A... fait valoir, en se prévalant de recherches effectuées sur la liste publiée par l'observatoire de veille des médicaments disponibles en officine dépendant du ministère algérien de l'industrie pharmaceutique et sur le site Pharm'net que la clozapine et le " Lepticur ", ainsi que tout médicament à base de tropatépine, ne sont pas disponibles en Algérie. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment des observations produites par l'OFII, que la clozapine, qui figure d'ailleurs sur le site référentiel algérien du médicament, est disponible en Algérie et que la tropatépine peut être remplacée par le trihexyphénidyle, dont il est n'est pas contesté qu'il a les mêmes effets et est disponible dans ce pays, par exemple au sein d'une pharmacie mentionnée dans ces observations. Par ailleurs, en se prévalant notamment de statistiques, d'un rapport des Nations-Unies sur le droit à la santé, d'une étude académique, de témoignages de professionnels de santé algériens et d'articles de presse, M. Imam A... n'apporte aucun élément permettant d'affirmer qu'il lui serait impossible de mettre effectivement en place un suivi psychiatrique approprié à son état de santé en Algérie, l'OFII indiquant d'ailleurs qu'un suivi hospitalier ou ambulatoire par un psychiatre est disponible dans ce pays, et qu'il ne pourrait tisser une alliance thérapeutique avec un nouveau praticien pour assurer son suivi. Enfin, M. Imam A... n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquelles sa situation personnelle en cas de retour en Algérie l'empêcherait d'avoir effectivement accès à des soins, notamment au sein d'établissements publics. Dans ces conditions, les éléments avancés par M. Imam A... ne permettent pas de remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'OFII du 30 mai 2022 estimant qu'il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Par suite, alors même qu'il a précédemment bénéficié d'un titre de séjour, au demeurant pour une durée limitée à neuf mois, M. Imam A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Bouches-du-Rhône a méconnu le 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien en refusant de renouveler son titre de séjour.

4. Pour les mêmes motifs que ceux précédemment mentionnés, M. Imam A... n'est pas fondé à soutenir que, compte tenu de son état de santé, le préfet des Bouches-du-Rhône aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

6. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. Imam A... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie d'exception et que le préfet des Bouches-du-Rhône a, en édictant cette décision, méconnu le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) ".

8. D'une part, l'arrêté contesté, qui mentionne des éléments de fait propres à la situation de M. Imam A..., précise, dans son article 2, que ce dernier est obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la date de notification de l'arrêté et que sa situation personnelle ne justifie pas qu'à titre exceptionnel un délai supérieur lui soit accordé. La motivation de la décision fixant le délai de départ volontaire, qui se réfère aux éléments d'appréciation de la situation de l'intéressé qui sont relevés dans les considérants de l'arrêté contesté, est ainsi en tout état de cause suffisante. D'autre part, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans les circonstances propres de l'espèce, le préfet des Bouches-du-Rhône aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision fixant un délai de départ volontaire de trente jours sur la situation personnelle de M. Imam A....

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. Imam A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation de ce jugement et de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 28 juillet 2022 doivent dès lors être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

10. Le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. Imam A... doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. Imam A... demande au titre des frais qu'il a exposés.

D É C I D E :

Article 1 : La requête de M. Imam A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... Imam A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2024, où siégeaient :

- M. Platillero, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Mastrantuono, première conseillère,

- M. Merenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2024.

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N° 23MA02174


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02174
Date de la décision : 07/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. PLATILLERO
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : SCP BOURGLAN - DAMAMME - LEONHARDT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-07;23ma02174 ?
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