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18/03/2024 | FRANCE | N°23MA02245

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 18 mars 2024, 23MA02245


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... A... veuve B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2301862 du 23 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.



Procédure devant

la Cour :



Par une requête, enregistrée le 30 août 2023, Mme A..., représentée par Me Zerrouki, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... veuve B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2301862 du 23 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 août 2023, Mme A..., représentée par Me Zerrouki, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 1er décembre 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de lui enjoindre, sous la même astreinte, d'instruire à nouveau sa demande, et de lui délivrer, dans tous les cas et dans l'attente de la nouvelle décision, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de dix jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Zerrouki au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le préfet a fait une inexacte application de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est prise en charge par sa fille et son beau-fils, dont l'assistance est indispensable.

Par une décision en date du 29 septembre 2023, Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Renaud Thielé, président assesseur de la 6ème chambre pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur,

- et les observations de Me Zerrouki, pour Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante russe née le 21 novembre 1943, est entrée en France le 16 août 2018 sous couvert d'un visa de type C valable pendant quatre-vingt-dix jours. Après avoir bénéficié de deux autorisations provisoires de séjour pour raisons de santé, elle a, le 19 juillet 2022, sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire pour le même motif. Par arrêté du 1er décembre 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté cette demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Par le jugement attaqué, dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En soutenant que son état nécessite l'aide de sa fille, la requérante doit être regardée comme invoquant l'atteinte portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégée par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., devenue veuve en 2017, s'est rendue en France en 2018 pour y rejoindre son unique enfant, mariée à un ressortissant français. A la date de la décision litigieuse, elle était âgée de soixante-dix-neuf ans et était hébergée chez ces derniers. Eu égard à la présence en France de l'ensemble de sa famille proche, et compte tenu de la maladie neurodégénérative dont elle souffre, et dont ni la réalité ni la gravité n'est contestée par le préfet, ce dernier ne pouvait lui refuser le séjour sans porter une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen invoqué par Mme A..., celle-ci est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande.

Sur l'injonction :

6. Le présent arrêt implique nécessairement, en l'absence de tout changement allégué dans les circonstances de fait et de droit, la délivrance à Mme A... d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai qu'il convient de fixer à un mois, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Il y a également lieu de lui enjoindre de délivrer à Mme A..., sans délai, une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de la délivrance de cette carte de séjour temporaire.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que Me Zerrouki demande sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2301862 du 23 mai 2023 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 1er décembre 2022 du préfet des Bouches-du-Rhône est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à Mme A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois et, dans l'attente de cette délivrance, de lui accorder immédiatement une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'Etat (préfecture des Bouches-du-Rhône) versera la somme de 1 500 euros à Me Zerrouki sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat dans l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... veuve B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Zerrouki.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2024, où siégeaient :

- M. Renaud Thielé, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère,

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 mars 2024.

N° 23MA02245 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02245
Date de la décision : 18/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. THIELÉ
Rapporteur ?: M. Renaud THIELÉ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : ZERROUKI

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-18;23ma02245 ?
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