La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/03/2024 | FRANCE | N°23MA01387

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 18 mars 2024, 23MA01387


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A..., se disant Chamsedine B..., a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 29 avril 2023, par lequel le préfet du Var l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, a édicté à son encontre une interdiction de retour sur le territoire national pendant trois ans et l'a inscrit dans le système d'information Schengen.



Par un jugement n° 2304057 du 10 mai 2

023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté et a enjoint au ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A..., se disant Chamsedine B..., a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 29 avril 2023, par lequel le préfet du Var l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, a édicté à son encontre une interdiction de retour sur le territoire national pendant trois ans et l'a inscrit dans le système d'information Schengen.

Par un jugement n° 2304057 du 10 mai 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet du Var de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 juin 2023, le préfet du Var demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille du 10 mai 2023 ;

2°) de rejeter la demande de première instance.

Il soutient que :

- M. A..., se disant Chamsedine B..., ne justifie pas avoir effectivement déposé une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

- il a usé de manœuvres dilatoires afin de faire obstacle aux mesures d'éloignement édictées à son encontre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2023, M. A..., se disant Chamsedine B..., représenté par Me Riou, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Un courrier du 23 août 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Un avis d'audience portant clôture immédiate de l'instruction a été émis le 9 février 2024.

Le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusé à M. A..., se disant Chamsedine B..., par une décision du 29 décembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Renaud Thielé, président assesseur de la 6ème chambre pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Isabelle Gougot, rapporteure.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 29 avril 2023, le préfet du Var a enjoint à M. A..., se disant Chamsedine B..., ressortissant algérien, de quitter sans délai le territoire français et a édicté à son encontre une interdiction de retour en France d'une durée de trois ans. Le préfet du Var relève appel du jugement du 10 mai 2023 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A..., se disant Chamsedine B..., dans un délai d'un mois.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français ". Et selon l'article L. 611-1 du même code : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants: [...] 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ".

3. Pour annuler l'arrêté attaqué, le tribunal s'est fondé sur le fait que M. A..., se disant Chamsedine B..., avait demandé l'asile en France le 30 septembre 2021, qu'il avait fait l'objet d'un arrêté de transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile, lesquelles avaient implicitement donné leur accord pour la reprise en charge de l'intéressé le 21 octobre 2021, qu'il avait été déclaré en fuite, que le délai imparti aux autorités françaises pour procéder à son transfert vers l'Italie avait pris fin le 21 avril 2023 et qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le transfert de M. A..., se disant Chamsedine B..., vers l'Italie aurait été exécuté avant le 21 avril 2023. Le tribunal en a déduit qu'en application de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 la responsabilité du traitement de la demande de protection internationale présentée par M. A..., se disant Chamsedine B..., incombait à la France et a constaté qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides se serait déjà prononcé sur la demande de l'intéressé qui bénéficiait ainsi, en tant que demandeur d'asile, du droit au maintien sur le territoire national en application de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Pour contester ce jugement, le préfet du Var soutient que l'intéressé ne justifierait pas avoir effectivement déposé une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et qu'il se serait seulement pré-enregistré auprès d'une structure de premier accueil des demandeurs d'asile (SPADA) chargée de donner les informations au demandeur d'asile et de prendre un rendez-vous mais qu'il n'aurait jamais déposé effectivement son dossier au guichet unique des demandeurs d'asile (GUDA) en dépit d'une convocation. Toutefois, le préfet ne justifie pas, malgré une mesure d'instruction en ce sens, d'une convocation de M. A..., se disant Chamsedine B..., au GUDA.

5. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : [...] 2o Lorsque le demandeur : [...] b) a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3o de l'article L. 531-32, uniquement en vue de faire échec à une décision d'éloignement. ". Le préfet du Var, qui ne démontre pas que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides aurait pris une décision d'irrecevabilité de la demande de l'intéressé sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut par suite utilement soutenir que la demande d'asile de M. A..., se disant Chamsedine B..., présenterait un caractère dilatoire, dans le seul but de faire obstacle aux mesures d'éloignement à son encontre.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Var n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande de M. A..., se disant Chamsedine B....

Sur les frais liés au litige :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande M. A..., se disant Chamsedine B..., sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du préfet du Var est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. A..., se disant Chamsedine B..., tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A..., se disant Chamsedine B..., et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2024, où siégeaient :

- M. Renaud Thielé, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère,

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 mars 2024.

2

N° 23MA01387


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01387
Date de la décision : 18/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. THIELÉ
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : RIOU

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-18;23ma01387 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award