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16/10/2023 | FRANCE | N°21MA00541

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 16 octobre 2023, 21MA00541


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Société d'exploitation de l'Aqua club a demandé au tribunal administratif de Toulon, à titre principal, d'annuler la concession de service public relative au lot n° E2 sur la plage de Pampelonne conclue le 19 octobre 2018 entre la commune de Ramatuelle et la SARL 24 GV, et, à titre subsidiaire, de résilier cette convention.

Par un jugement n° 1803893 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et u

n mémoire en réplique, enregistrés le 9 février 2021 et le 11 novembre 2022, la SARL Société...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Société d'exploitation de l'Aqua club a demandé au tribunal administratif de Toulon, à titre principal, d'annuler la concession de service public relative au lot n° E2 sur la plage de Pampelonne conclue le 19 octobre 2018 entre la commune de Ramatuelle et la SARL 24 GV, et, à titre subsidiaire, de résilier cette convention.

Par un jugement n° 1803893 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 9 février 2021 et le 11 novembre 2022, la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club, représentée par Me Tenailleau et Me Carenzi, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 10 décembre 2020 ;

2°) à titre principal, d'annuler la concession de service public relative au lot n° E2 sur la plage de Pampelonne conclue le 19 octobre 2018 entre la commune de Ramatuelle et la SARL 24 GV, et à titre subsidiaire, de résilier cette convention ;

3°) en tout état de cause, de condamner la commune de Ramatuelle à lui verser la somme de 9 443 976 euros de dommages et intérêts, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2018, capitalisés ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Ramatuelle la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement, qui a méconnu le principe du contradictoire et l'article 16 II de l'ordonnance n° 2020 du 25 mars 2020, est irrégulier ;

- il est insuffisamment motivé ;

- le tribunal a omis de répondre aux moyens tirés d'une part, de l'absence de définition des besoins de la commune et, d'autre part, de la critique de la conception du critère prix ;

- la procédure est irrégulière dès lors que la commune a limité le nombre de lots auxquels les candidats pouvaient soumissionner ce qui porte atteinte à la liberté d'accès à la commande publique ;

- la commune de Ramatuelle n'a pas défini ses besoins avec précision et a par suite méconnu les principes de transparence et d'égalité de traitement ;

- les critères d'attribution des contrats sont illégaux et méconnaissent les articles 1, 27 et 47 de l'ordonnance concessions ; ils sont imprécis et sans lien avec l'objet du contrat ;

- la commune a inexactement apprécié l'offre financière de la Société d'exploitation de l'Aqua club ;

- elle a méconnu les principes de transparence et d'égalité de traitement car elle n'avait pas défini les caractéristiques minimales de la négociation et n'a pas mis en place les moyens permettant d'assurer la traçabilité des négociations ;

- le contrat de sous-concession, notamment l'article 4, comporte des clauses non conformes à l'article 34 de l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 et à l'article 6 du décret n° 2016-86 du 1er février 2016 ;

- les droits d'entrée prévus dans les documents de la consultation n'ont pas été mis à la charge de la société attributaire ;

- la candidature de la SARL 24 GV méconnaissait l'article 8.2 du règlement de consultation sur le respect des garanties financières et professionnelles ainsi que l'article 6.3 du même règlement ;

- en retenant la candidature de la SARL 24 GV qui ne présentait pas de capacités techniques suffisantes au regard de l'article 2.1 du cahier des charges techniques et dont l'offre financière n'était pas économiquement viable la commune a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- en l'absence de viabilité économique de l'offre financière de la société attributaire, le consentement de la commune a été vicié ; le contrat est également entaché d'un vice du consentement au regard des conditions dans lesquelles l'établissement est effectivement exploité par la société attributaire, qui génère de multiples nuisances sonores et ne respecte pas les tarifs annoncés ;

- la commune a transmis des informations erronées et incohérentes sur le chiffre d'affaires prévisionnel ce qui a vicié la procédure ;

- la commune ne justifie pas que l'annulation ou la résiliation du contrat porterait atteinte à l'intérêt général ;

- la société requérante disposait d'une chance sérieuse de remporter le contrat de concession et pourra donc être indemnisée de son manque à gagner.

Par un mémoire en défense, un mémoire complémentaire et un mémoire en défense n° 2, enregistrés le 4 février 2022, le 10 novembre 2022 et le 22 novembre 2022, la commune de Ramatuelle, représentée par Me Petit, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la société requérante la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Un courrier du 3 novembre 2022 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Par ordonnance du 15 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée à sa date d'émission en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire présenté pour la commune de Ramatuelle a été enregistré le 15 juin 2023, postérieurement à la clôture d'instruction et non communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- l'ordonnance n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- le décret n° 2016-86 du 1er février 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Isabelle Gougot, rapporteure,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de Me Carenzi, pour la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club, et de Me Callot, pour la commune de Ramatuelle.

Une note en délibéré présentée pour la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club a été enregistrée le 27 septembre 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 7 avril 2017, le préfet du Var a accordé à la commune de Ramatuelle la concession de la plage naturelle de Pampelonne pour une durée de douze ans à compter du 1er janvier 2019. La commune de Ramatuelle a engagé, le 30 juin 2017, une procédure de mise en concurrence en vue de l'attribution de sous-concessions du service public balnéaire sur cette plage pour une durée de douze ans à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 31 décembre 2030. La consultation portait sur trente lots, parmi lesquels vingt-trois lots " établissements de plage " dont le lot n° E2. Par une délibération du 16 juillet 2018, le conseil municipal de Ramatuelle a attribué le lot n° E2 à la société 24 GV. Par un courrier du 19 juillet 2018, la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club, qui avait déposé sa candidature pour ce lot, a été informée du rejet de son offre. Le 19 octobre 2018, le maire de Ramatuelle a signé avec la société 24 GV la convention de délégation de service public litigieuse. La SARL Société d'exploitation de l'Aqua club a saisi le tribunal administratif de Toulon d'une demande tendant, à titre principal, à l'annulation de la sous-concession de service public du lot n° E2 de la plage de Pampelonne conclue le 19 octobre 2018 avec la société 24 GV, et, à titre subsidiaire, à sa résiliation. Parallèlement, elle a demandé, par courrier du 18 décembre 2018, à la commune de Ramatuelle de lui verser à titre indemnitaire la somme de 9 443 976 euros en réparation de son manque à gagner, pour avoir été irrégulièrement évincée de cette procédure d'attribution du lot n° E2. La SARL Société d'exploitation de l'Aqua club relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulon du 10 décembre 2020 qui a rejeté ses demandes.

Sur le cadre du litige :

2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu'au représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice du contrôle de légalité. Les requérants peuvent éventuellement assortir leur recours d'une demande tendant, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, à la suspension de l'exécution du contrat. Ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi. La légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours ainsi défini. Toutefois, dans le cadre du contrôle de légalité, le représentant de l'Etat dans le département est recevable à contester la légalité de ces actes devant le juge de l'excès de pouvoir jusqu'à la conclusion du contrat, date à laquelle les recours déjà engagés et non encore jugés perdent leur objet. Le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini. Les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office.

3. Saisi ainsi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences. Ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci. Il peut enfin, s'il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu'il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice découlant de l'atteinte à des droits lésés.

Sur la régularité du jugement :

4. La société requérante soutient que la procédure contradictoire en première instance a été méconnue.

5. L'article 16 de l'ordonnance du 25 mars 2020 dans sa version alors en vigueur, en application de l'article 2 de l'ordonnance du 13 mai 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions administratives, dispose que: " I. ' Les mesures d'instruction dont le terme vient à échéance entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 sont prorogées de plein droit jusqu'au 24 août 2020 inclus. / Toutefois, lorsque l'urgence ou l'état de l'affaire le justifie, le juge peut fixer un délai plus bref que celui résultant du report prévu à l'alinéa précédent. Il précise alors que celui-ci ne s'applique pas à la date ainsi fixée. / II. ' Les mesures de clôture d'instruction dont le terme vient à échéance entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 inclus sont prorogées de plein droit jusqu'au 23 juin 2020 inclus, à moins que ce terme ne soit reporté par le juge. / Toutefois, le juge peut, lorsque l'urgence ou l'état de l'affaire le justifie, fixer une date de clôture d'instruction antérieure à la date résultant du report prévu à l'alinéa précédent. Son ordonnance mentionne alors que celui-ci ne s'applique pas à la date ainsi fixée. ".

6. En l'espèce, suite au courrier du 8 avril 2020 adressé aux parties sur le fondement de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant que l'affaire était susceptible d'être enrôlée au cours du deuxième trimestre 2020 et les invitant à produire avant le 30 avril 2020, le premier mémoire en défense de la commune de Ramatuelle a été communiqué le 27 avril 2020 à la société requérante, sans que le calendrier prévisionnel d'instruction ne soit modifié et en lui précisant que si elle souhaitait répliquer elle avait " tout intérêt, si [elle l'estime] utile à produire ces observations aussi rapidement que possible. ". La clôture immédiate a ensuite été prononcée par une ordonnance du 25 mai 2020 alors même qu'en application de l'article 16 II alinéa 1 de l'ordonnance du 25 mars 2020 citée au point précédent, les mesures d'instruction dont le terme vient à échéance entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 inclus sont prorogées de plein droit jusqu'au 23 juin 2020. Si le tribunal pouvait, en application de l'article 16 II alinéa 2 de l'ordonnance du 25 mars 2020 citée au point précédent fixer une date de clôture antérieure au 23 juin 2020 en le mentionnant dans son ordonnance, c'est à la condition qu'il existât une urgence ou que l'état de l'affaire le justifie. L'ordonnance du tribunal portant clôture immédiate du 25 mai 2020 mentionnait que " Dans les circonstances de l'espèce, le report prévu au II de l'article 16 de l'ordonnance n° 2020-305 modifiée ne s'applique pas à la date de clôture de l'instruction fixée par la présente ordonnance. ". Toutefois, d'une part, le tribunal ne pouvait considérer qu'il existait une urgence alors notamment que c'est seulement le 9 novembre 2020 que l'affaire a été enrôlée. D'autre part, il ne pouvait pas non plus considérer que l'affaire était " en état d'être jugée " dans les circonstances particulières de l'espèce, alors que le calendrier prévisionnel d'instruction avait été mis en place pendant la période de l'urgence sanitaire, qu'il fixait une date possible de clôture de l'instruction seulement trois semaines plus tard, que la société attributaire n'avait pas produit de mémoire en défense, et que, lors de la communication du premier mémoire en défense de la commune, il était demandé à la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club de répondre " aussi rapidement que possible " sans préciser le délai qui lui était imparti, ce qui ne lui donnait pas d'indication suffisamment explicite. En clôturant immédiatement ce dossier dès le 25 mai 2020, alors qu'en principe, le délai imparti par le calendrier d'instruction au 30 avril 2020 devait être prorogé au 23 juin suivant en application de l'article 16 II alinéa 1 de l'ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, les premiers juges ont ainsi privé la société requérante de la possibilité de répliquer au mémoire en défense de la commune et ont, ce faisant méconnu les exigences du contradictoire.

7. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de régularité, la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club est fondée à soutenir que le jugement est irrégulier pour méconnaissance du principe du contradictoire et à en demander l'annulation. Il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Toulon.

Sur les conclusions en contestation de la validité du contrat :

8. Si le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui d'un recours de plein contentieux contre un contrat, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif ne peut ainsi, à l'appui d'un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d'ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.

En ce qui concerne la limitation du nombre de lots auxquels le candidat peut soumissionner :

9. L'article 4.3 du règlement de la consultation stipulait que " les candidats sont informés de la possibilité de présenter une offre pour un ou deux lots au maximum en précisant expressément leur préférence. ".

10. La SARL Société d'exploitation de l'Aqua club ne peut utilement, au soutien de ses conclusions en annulation et en résiliation concernant le contrat de concession du lot n° E2, se prévaloir du fait qu'elle aurait été empêchée de soumissionner aux autres lots, cette circonstance relative aux règles de passation du contrat ne constituant pas, par application de la règle indiquée au point 8, un vice d'ordre public et étant sans rapport direct avec son éviction du lot n° E2 auquel elle a candidaté et qui est le contrat attaqué dans la présente instance.

En ce qui concerne la définition des besoins de la commune :

11. Aux termes de l'article 27 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession alors en vigueur : " La nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale. ". Les concessions sont soumises aux principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, qui sont des principes généraux du droit de la commande publique. Pour assurer le respect de ces principes, la personne publique doit apporter aux candidats à l'attribution d'une concession, avant le dépôt de leurs offres, une information suffisante sur la nature et l'étendue des besoins à satisfaire. Il lui appartient à ce titre d'indiquer aux candidats les caractéristiques essentielles de la concession et le type d'investissements attendus ainsi que les critères de sélection des offres.

12. Il résulte de l'instruction et notamment de l'article 3 du règlement de consultation et du document programme correspondant aux lots " établissements de plage " que l'autorité concédante avait informé les candidats sur les principales caractéristiques du service public concédé, au demeurant développées à l'article 6 du cahier des charges de la concession du 7 avril 2017. L'article 3 du règlement de la consultation prévoyait ainsi le développement du " caractère attractif du site de la plage de Pampelonne au plan touristique, la qualité de l'architecture, des activités et des services personnalisés à destination d'une clientèle diversifiée sur le périmètre délégué ". Si la société requérante reproche à la commune de Ramatuelle de ne pas avoir défini avec suffisamment de précision, pour chaque lot de plage, le type d'établissement et d'ambiance, familiale, festive ou autre et de gamme de prestation attendue, la commune n'était toutefois pas tenue de définir cet élément de la stratégie commerciale des établissements exploités sur chacun des lots. Par suite, et alors même que, par ailleurs, la commune a, ainsi qu'il a été dit aux points 9 et 10 entendu limiter le nombre de lots auxquels le candidat peut soumissionner, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en l'absence de définition suffisamment précise des besoins de la commune, la procédure de passation du contrat du lot n° E2 méconnaitrait les principes de transparence et d'égalité de traitement entre candidats.

En ce qui concerne la légalité des critères d'attribution :

S'agissant de la précision des critères d'attribution :

13. Aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, alors en vigueur : " I. - Les contrats de concession soumis à la présente ordonnance respectent les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. ". Et l'article 27 de la même ordonnance précise que : " La nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale. ". Enfin selon l'article 47 de la même ordonnance : " Le contrat de concession est attribué au soumissionnaire qui a présenté la meilleure offre au regard de l'avantage économique global pour l'autorité concédante sur la base de plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du contrat de concession ou à ses conditions d'exécution. / Les critères d'attribution n'ont pas pour effet de conférer une liberté de choix illimitée à l'autorité concédante et garantissent une concurrence effective. ".

14. D'une part, il résulte de l'instruction que l'autorité concédante avait informé les candidats sur les principales caractéristiques du service public concédé, notamment pour les " lots de plage ", dans le document de programme et à l'article 6 du cahier des charges de la concession. Ces éléments d'information étaient suffisants pour permettre aux candidats de construire leur offre. D'autre part, ainsi qu'il a été dit aux points 11 et 12, la commune n'était pas tenue à ce titre de définir parmi les éléments de la stratégie commerciale des établissements exploités sur chacun des lots le " niveau de standing " attendu. La société requérante n'est par suite pas fondée à se prévaloir de l'insuffisante définition des besoins pour soutenir que les critères de sélection seraient imprécis.

15. Par ailleurs il résulte de l'article 8.3 du règlement de consultation que pour apprécier l'offre présentant le meilleur avantage économique global, la commune de Ramatuelle a retenu quatre critères par ordre d'importance décroissant. Le 1er critère relatif au " projet d'établissement " se décomposait en trois sous-critères, selon lesquels en premier lieu le projet d'établissement doit être en corrélation avec la politique touristique communale, en deuxième lieu, le projet architectural et paysager doit s'intégrer dans l'espace naturel et remarquable dans l'esprit de la plage de Pampelonne, en troisième lieu, les prestations doivent permettre une personnalisation du service, une communication, un contrôle de la qualité et de la maintenance des ouvrages. L'autorité administrative a en outre retenu un deuxième critère relatif à la " qualité et cohérence de l'offre au plan technique : moyens humains et matériels ". Le troisième critère était relatif à la " proposition du candidat en rapport avec l'attente d'excellence de la commune : démarche de responsabilité sociale de l'entreprise ". Et le quatrième critère était relatif à la " qualité et cohérence de l'offre au plan financier ".

16. Plus précisément, il résulte de l'instruction, et notamment du cahier des charges techniques (CCT) que pour le sous-critère 1.1 "projet d'établissement en corrélation avec la politique touristique communale" critiqué par la société requérante, il était précisé notamment que la plage de Pampelonne constitue avant tout un environnement et un paysage naturels remarquables grâce auxquels des activités balnéaires se sont développées de manière à constituer un pôle touristique de renommée mondiale, que la commune souhaitait préserver l'unicité de ce patrimoine tout en y permettant le développement d'une activité balnéaire raisonnée, c'est-à-dire " respectueuse de l'environnement, et de l'Homme ". Il était encore précisé que le candidat devait présenter et expliciter son projet de " concept " d'établissement en corrélation avec la politique touristique communale en exposant sa vision de la plage de Pampelonne et de l'intégration de son projet architectural ainsi que de son activité dans l'environnement naturel et humain de Ramatuelle et en précisant la capacité maximale de l'établissement, la période annuelle et l'amplitude journalière d'exploitation ainsi que les tarifs proposés pour les différents services de la concession. Ces précisions étaient suffisantes.

17. Pour le critère 1.2 relatif au " projet architectural et paysager ; intégration dans l'espace naturel remarquable et dans l'esprit de la plage de Pampelonne ", le CCT précisait que le candidat devait s'attacher à démontrer la parfaite intégration de sa proposition architecturale dans l'environnement naturel, ce qui était suffisamment précis.

18. Contrairement à ce que soutient la société requérante, le critère 1.3.2 relatif à la personnalisation du service qui se référait aux " dispositions spécifiques complémentaires pour chaque catégorie de lot " que l'on pouvait retrouver à l'article 6 du cahier des charges de la concession de plage, lequel précisait pour chaque zone le type de bâti, de mobilier et d'activité autorisés ainsi que les caractéristiques des lots et leurs dimensions maximales, était suffisamment précis également.

19. Le troisième critère relatif à la responsabilité sociale de l'entreprise se décomposait lui-même en deux sous-critères sur la " vision environnementale de la concession " et la " vision sociétale de la concession ", chacun étant divisé respectivement en cinq et sept sous-items. Et contrairement à ce que soutient la société requérante, la commune n'a pas exigé au titre du sous-critère 3.2.5 la production d'un bilan carbone formalisé, mais simplement des propositions visant à réduire l'empreinte carbone de leur activité.

20. Enfin pour le quatrième critère de " qualité et cohérence de l'offre au plan financier " il était aussi précisé que la cohérence était attendue " entre le plan prévisionnel d'exploitation, la tarification du service proposé et le niveau de redevance communale proposé " ce qui était suffisant.

21. Il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les critères d'attribution étaient subjectifs et imprécis et qu'ils auraient conféré à la commune une liberté de choix discrétionnaire.

S'agissant de la régularité des critères :

22. Aux termes de l'article 47 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession alors en vigueur : " Les critères d'attribution n'ont pas pour effet de conférer une liberté de choix illimitée à l'autorité concédante et garantissent une concurrence effective. ". L'autorité concédante définit librement la méthode d'évaluation des offres au regard de chacun des critères d'attribution qu'elle a définis et rendus publics. Elle peut ainsi déterminer tant les éléments d'appréciation pris en compte pour son évaluation des offres que les modalités de leur combinaison. Une méthode d'évaluation est toutefois entachée d'irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, les éléments d'appréciation pris en compte pour évaluer les offres au titre de chaque critère d'attribution sont dépourvus de tout lien avec les critères dont ils permettent l'évaluation ou si les modalités d'évaluation des critères d'attribution par combinaison de ces éléments sont, par elles-mêmes, de nature à priver de leur portée ces critères ou à neutraliser leur hiérarchisation et sont, de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure offre ne soit pas la mieux classée, ou, au regard de l'ensemble des critères, à ce que l'offre présentant le meilleur avantage économique global ne soit pas choisie.

23. En premier lieu, le critère n° 3 sur la " démarche de responsabilité sociale de l'entreprise " concernait ainsi qu'il a été dit au point 19, d'une part, la " vision environnementale de la concession " et, d'autre part, la " vision sociétale de la concession ", ce qui correspond aux critères énoncés à l'article 27 du décret du 1er février 2016. La société requérante n'est pas fondée à soutenir que ce critère serait sans lien avec l'objet de la concession alors que la plage de Pampelonne est un espace naturel protégé et que les objectifs environnementaux, l'accès aux handicapés, les moyens de surveillance ou encore les sanitaires sont mentionnés dans le cahier des charges de la concession conclue entre l'Etat et la commune.

24. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la société requérante le sous-critère " implication dans la vie associative " qui consiste, ainsi qu'il est précisé au point 3.2.7 du cahier des charges techniques, à s'engager dans " les manifestations culturelles ou sportives locales susceptibles de valoriser l'image de marque de l'économie balnéaire de la plage de Pampelonne et donc de la station de tourisme classée de Ramatuelle " n'est pas non plus sans lien avec l'objet de la concession.

25. En troisième lieu, pour le deuxième critère relatif à la qualité de l'offre au plan technique, le cahier des charges techniques de la concession précisait qu'il concernait notamment les " compétences humaines qu'il se proposait de mobiliser pour en garantir l'excellence " ou qu'il " exposera ses compétences et expérience de moins de dix ans en matière de gestion ou d'exploitation d'une entreprise en lien avec le service à déléguer " ou encore pour les moyens matériels que seront décrits " les équipements (qualitatif et quantitatif) " et que le " matériel devra être renouvelé aussi souvent que nécessaire pour maintenir un aspect de qualité " et que " la qualité des matériaux à employer [...] s'applique également au mobilier ". Contrairement à ce que soutient la société requérante, le critère incluait donc bien la qualité de l'offre rendue aux usagers.

26. En quatrième et dernier lieu, la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club soutient que la commune de Ramatuelle aurait manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en prévoyant, dans le règlement de consultation, que le critère " Qualité et cohérence de l'offre au plan financier " prendra en compte le " compte prévisionnel d'exploitation ", ce qui inclut le chiffre d'affaires prévisionnel, alors que celui-ci repose seulement sur les déclarations des candidats, sans être assorti d'engagements contractuels. Mais un tel élément d'appréciation ne saurait être regardé comme entachant d'irrégularité la méthode d'évaluation, dès lors que ce critère vise clairement à apprécier la cohérence, la solidité et la crédibilité de l'offre au plan financier en comparant ce plan prévisionnel d'exploitation avec la tarification du service et le niveau de redevance communale proposés.

En ce qui concerne l'analyse de l'offre de la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club :

27. La société requérante soutient que son offre a été dénaturée par la commune, qui a qualifié son chiffre d'affaires d'" ambitieux " alors qu'il était conforme aux chiffres constatés en exploitation par le passé. Toutefois, d'une part, le terme " ambitieux " ne revêt pas nécessairement un caractère péjoratif et, d'autre part, le chiffre d'affaires prévu par la société attributaire, presque identique à celui avancé par la requérante, a également été qualifié d'ambitieux. Cette seule mention est donc sans influence sur l'éviction de la requérante, comme rappelé au point 8.

En ce qui concerne la régularité de la négociation :

28. En premier lieu aux termes de l'article 46 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 : " Les autorités concédantes peuvent organiser librement une négociation avec un ou plusieurs soumissionnaires dans des conditions prévues par voie réglementaire. La négociation ne peut porter sur l'objet de la concession, les critères d'attribution ou les conditions et caractéristiques minimales indiquées dans les documents de la consultation. ".

29. Si la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club soutient que la commune n'aurait pas précisé les " caractéristiques minimales de la négociation " dans les documents de la consultation, les dispositions précitées de l'article 46 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 ne prévoient pas que l'autorité concédante définisse les caractéristiques minimales sur lesquelles il peut y avoir négociation. Elles se bornent à indiquer que la négociation ne peut porter, ainsi d'ailleurs que le rappelle le point 8.4 du règlement de la consultation, sur les caractéristiques minimales de la concession, le cahier des charges techniques définissant au demeurant les éléments constituant le cadre obligatoire au regard desquels les offres doivent être conçues. Ce moyen ne peut par suite qu'être écarté, comme inopérant.

30. En second lieu, l'article 13 du décret du 1er février 2016 précise que : " Pour les contrats de concession qui relèvent du 1° de l'article 9, l'autorité concédante consigne, par tout moyen approprié, les étapes de la procédure de passation ".

31. Contrairement à ce que soutient la société requérante, les dispositions citées au point précédent n'imposent pas aux autorités concédantes d'" obligation de traçabilité " les contraignant à établir un procès-verbal de chaque phase de la négociation mais impliquent seulement qu'elles consignent les étapes de la procédure de passation, ce que la commune de Ramatuelle justifie avoir fait. Il résulte en effet de l'instruction que le conseil municipal a été destinataire d'une note retraçant les différentes étapes de la procédure incluant un calendrier détaillé des négociations et que les candidates ont signé un procès-verbal à l'issue des négociations. Par suite, la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club n'est pas fondée à soutenir que la commune aurait manqué à son obligation de traçabilité et aurait ce faisant méconnu le principe de transparence et d'égalité de traitement entre les différents candidats lors des négociations.

En ce qui concerne la durée de la concession :

32. D'une part, l'article 34 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession alors en vigueur dispose que : " I. - Les contrats de concession sont limités dans leur durée. Cette durée est déterminée par l'autorité concédante en fonction de la nature et du montant des prestations ou des investissements demandés au concessionnaire, dans les conditions prévues par voie réglementaire. ". L'article 6 du décret du 1er février 2016 alors en vigueur précise que : " I. - Pour l'application de l'article 34 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 susvisée, les investissements s'entendent comme les investissements initiaux ainsi que ceux devant être réalisés pendant la durée du contrat de concession, nécessaires pour l'exploitation des travaux ou des services concédés. [...] II. - Pour les contrats de concession d'une durée supérieure à cinq ans, la durée du contrat n'excède pas le temps raisonnablement escompté par le concessionnaire pour qu'il amortisse les investissements réalisés pour l'exploitation des ouvrages ou services avec un retour sur les capitaux investis, compte tenu des investissements nécessaires à l'exécution du contrat... ". Il résulte de ces dispositions que le choix de la collectivité publique est encadré quant à la fixation de la durée d'une délégation de service public.

33. En se bornant à soutenir que la durée de douze années prévue pour la sous-délégation de service public serait excessive au regard des dispositions citées au point précédent et l'aurait lésée en ne lui permettant pas de candidater avant douze ans, la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club ne démontre pas que cette durée l'aurait privée d'un accès au contrat, objet de la présente contestation alors en outre que cette durée correspondait à la durée limite prévue à son article 10 par la concession de la plage. Par suite, comme indiqué au point 8, le moyen selon lequel la durée de la convention serait excessive ne peut qu'être écarté, car il est sans lien avec l'éviction de la société requérante. Par ailleurs, il ne constitue pas un vice d'une gravité telle que le juge devrait le relever d'office, alors même que l'impératif d'ordre public visant à garantir un libre accès aux contrats justifierait la résiliation unilatérale du contrat par la personne publique.

En ce qui concerne les droits d'entrée :

34. Si la société requérante soutient qu'aucune clause sur les droits d'entrée prévus à l'article 23 du document de programme n'aurait été intégrée dans le contrat conclu entre la commune et la SARL 24 GV, elle ne le démontre pas, alors que la commune le conteste. En tout état de cause cette circonstance, à la supposer même établie, demeure sans incidence sur la régularité de la procédure de passation et sans lien avec l'intérêt lésé de la requérante comme indiqué au point 8. Un tel vice ne constitue pas non plus un vice que le juge devrait relever d'office.

En ce qui concerne la régularité de l'offre de la SARL 24 GV au regard du règlement de consultation et du cahier des charges techniques :

35. D'une part, aux termes de l'article 25 du décret du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession : " Les offres [...] qui ne respectent pas les conditions et caractéristiques minimales indiquées dans les documents de la consultation sont éliminées... ". Et l'article 6 du règlement de consultation relatif au contenu et à la présentation des propositions stipule à l'article 6.3 que : " ... La sous-enveloppe n° 1 contiendra les documents suivants classifiés dans l'ordre précisé et dans des chemises numérotées : [...] chemise n° 4 : références techniques démontrant l'aptitude du candidat à assurer l'ensemble des missions imparties à un délégataire du service public balnéaire : / 1 / curriculum vitae du candidat, références relatives : aux expériences et garanties professionnelles et techniques du candidat ; à son aptitude à assurer avec sérieux, dans le cadre légal et réglementaire, la continuité du service public et l'égalité de traitement de ses usagers ; à assurer l'accueil du public pendant la période d'exploitation dans un espace naturel remarquable, la préservation du domaine public, tant du point de vue physique que juridique... ". Selon l'article 8.2 du même règlement de consultation : " La Commission établira la liste des candidats admis à présenter une offre après examen des points suivants : / garanties professionnelles et financières... ". Enfin comme rappelé au point 26, l'article 2 du cahier des charges techniques relatif à la " qualité et cohérence de l'offre au plan technique : moyens humains et matériels affectés à l'exécution de la délégation " précise que " Pour chacun des services à assurer dans le cadre du lot visé, le candidat explicitera les compétences humaines qu'il se proposera de mobiliser pour en garantir l'excellence. Il exposera ses compétences et expériences de moins de dix ans en matière de gestion ou exploitation d'une entreprise en lien avec les différents services à déléguer : établissements de plage ; loisirs nautiques motorisés ; loisirs nautiques non motorisés ; clubs pour enfants. ".

36. D'autre part, le règlement de la consultation prévu par une autorité délégante pour la passation d'une délégation de service public est obligatoire dans toutes ses mentions. L'autorité délégante ne peut, dès lors, attribuer ce contrat à un candidat qui ne respecte pas une des exigences imposées par ce règlement, sauf si cette exigence se révèle manifestement dépourvue de toute utilité pour l'examen des candidatures ou des offres.

37. Le seul fait que la SARL 24 GV, qui exploite deux restaurants et établissements de nuit à Paris, ne justifie pas de compétences ou d'une expérience antérieure en matière de service public balnéaire, n'est pas de nature à permettre de regarder sa candidature comme irrégulière alors que le règlement de consultation et le cahier des charges techniques cités au point 35, n'imposent pas une telle compétence ou expérience antérieure mais impliquent seulement de préciser si le candidat dispose de compétences ou d'expériences permettant d'établir que la gestion d'une plage pourrait lui être concédée.

En ce qui concerne l'appréciation de l'offre de la société attributaire :

38. Aux termes de l'article 47 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession : " Le contrat de concession est attribué au soumissionnaire qui a présenté la meilleure offre au regard de l'avantage économique global pour l'autorité concédante sur la base de plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du contrat de concession ou à ses conditions d'exécution. / Les critères d'attribution n'ont pas pour effet de conférer une liberté de choix illimitée à l'autorité concédante et garantissent une concurrence effective... ".

39. La société requérante soutient que la SARL 24 GV ne justifierait pas d'une capacité technique suffisante en l'absence d'expérience en matière de service public balnéaire et que son offre se fonderait sur un chiffre d'affaires irréaliste et des redevances fixes et variables excessives, dont la cohérence financière n'a pas été contrôlée par la commune. Toutefois le seul fait que la société attributaire ne dispose pas d'une expérience antérieure en matière de service public balnéaire n'est pas suffisant pour démontrer qu'elle ne présenterait pas de capacités techniques suffisantes.

40. Par ailleurs, la société requérante ne démontre pas que la commune n'aurait pas effectué de contrôle de la cohérence de l'offre au plan financier comme l'exigeait l'article 4 du règlement de consultation alors que la commune le conteste en précisant qu'elle a apprécié cette cohérence pour chacun des candidats notamment au regard de l'analyse des hypothèses de fréquentation, de l'amplitude des horaires d'ouverture, de la décomposition des charges, du ticket moyen et du montant du chiffre d'affaires, de l'évolution dans le temps des hypothèses de recettes, et de l'analyse des hypothèses de fréquentation et de la clientèle en fonction du positionnement du lot et que cela résulte de l'analyse financière du rapport d'analyse des offres. Il ne résulte pas de l'instruction que le chiffre d'affaires annuel moyen estimé par la société attributaire, au demeurant, inférieur à celui proposé par la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club, serait disproportionné. La seule circonstance que le montant de redevance proposé par la SARL 24 GV soit nettement supérieur à celui de la société requérante avec un ticket moyen nettement inférieur n'est pas suffisante pour établir que son offre n'était pas économiquement viable. C'est donc sans erreur manifeste d'appréciation que la commune a, au regard des critères décroissants énoncés à l'article 8.3 du règlement de consultation, du projet d'établissement, de la qualité et de la cohérence de l'offre technique, de la démarche de " responsabilité sociale de l'entreprise " et de la qualité et de la cohérence de l'offre au plan financier, retenu l'offre de la SARL 24 GV.

En ce qui concerne le vice du consentement :

41. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 40, la société requérante ne démontre pas l'absence de viabilité économique de l'offre financière de la société attributaire.

42. En deuxième lieu, la circonstance que la société concessionnaire n'a pas respecté les termes de son offre ou qu'elle pourrait ne pas respecter les clauses du contrat de concession qu'elle a signé qui concerne l'exécution de ce contrat demeure sans influence sur la validité de celui-ci, cette validité s'appréciant à la date de la conclusion du contrat. En tout état de cause, la méconnaissance répétée, par le concessionnaire, de ses obligations contractuelles, est susceptible de justifier une résiliation pour faute grave de la concession par l'Etat, mais également de donner lieu, de la part des tiers, au recours en abrogation ouvert par la décision du Conseil d'Etat n° 398445 du 30 juin 2017.

43. En troisième et dernier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 34, si la société requérante soutient qu'aucune clause sur les droits d'entrée prévus à l'article 23 du document de programme n'aurait été intégrée dans le contrat conclu entre la commune et la SARL 24 GV, elle ne le démontre pas alors que la commune le conteste.

44. La SARL société d'exploitation de l'Aqua club ne démontre donc pas que l'offre de la SARL 24 GV était entachée d'une erreur déterminante et que le consentement de la commune aurait été vicié.

En ce qui concerne les informations fournies par la commune :

45. La société requérante soutient que la commune aurait fourni des informations erronées sur le chiffre d'affaires aux candidats requérants car la valeur de la concession aurait été très largement surévaluée et que les tableaux de chiffre d'affaires des anciens titulaires qui ont été communiqués ne sauraient concorder compte tenu du redécoupage des lots. Cependant, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club, la commune qui n'a d'ailleurs pas reconnu une telle erreur, avait au contraire précisé dans le cadre des " questions-réponses " que la valeur de la concession avait été déterminée dans le seul but de définir les règles de passation en fonction du seuil mais ne devait pas être confondue avec le chiffre d'affaires qui figurera dans les dossiers d'offre. La commune a en outre mentionné qu'elle avait retenu une valeur moyenne à partir des données brutes des bilans des exploitants et que le site était complètement reconfiguré en 2019. La société requérante, qui au demeurant n'a pas bâti son offre en se fondant sur ces chiffres, n'est par conséquent pas davantage fondée à soutenir que les règles de publicité et de mise en concurrence auraient été méconnues au motif que la commune aurait fourni des informations erronées aux candidats.

46. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation et de résiliation de la société requérante doivent être rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

47. Ainsi qu'il a été dit au point 46, en l'absence de toute illégalité établie dans l'attribution du contrat, il n'existe donc pas de faute et les conclusions indemnitaires de la société requérante ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

48 Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club n'est pas fondée à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

49. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club dirigées contre la commune de Ramatuelle qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Société d'exploitation de l'Aqua club la somme de 1 500 euros, à verser à la commune de Ramatuelle en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1803893 du tribunal administratif de Toulon du 10 décembre 2020 est annulé.

Article 2 : Les demandes de la SARL Société d'exploitation de l'Aqua Club sont rejetées.

Article 3 : La SARL Société d'exploitation de l'Aqua Club versera à la commune de Ramatuelle une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Société d'exploitation de l'Aqua Club et à la commune de Ramatuelle.

Copie en sera adressée à la SARL 24 GV.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2023, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président de chambre,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère,

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 octobre 2023.

2

N° 21MA00541


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00541
Date de la décision : 16/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02 Marchés et contrats administratifs. - Formation des contrats et marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : ELFASSY

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-16;21ma00541 ?
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