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15/05/2023 | FRANCE | N°21MA02487

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 15 mai 2023, 21MA02487


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ainsi que la D... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté interministériel du 18 septembre 2018 en tant qu'il a refusé de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur le territoire communal pour des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols survenus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2017, ensemble, s'agissant de la D..., la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par un jug

ement n° 1803949 et 1901131 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Toulon a r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ainsi que la D... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté interministériel du 18 septembre 2018 en tant qu'il a refusé de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur le territoire communal pour des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols survenus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2017, ensemble, s'agissant de la D..., la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1803949 et 1901131 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leurs requêtes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée le 28 juin 2021 sous le n° 21MA02487 et un mémoire en réplique enregistré le 30 août 2022, M. A... B... et Mme C... B..., représentés par Me Dupied, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler l'arrêté interministériel du 18 septembre 2018 en tant qu'il a refusé de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur le territoire de la D... pour des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols survenus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2017 ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de procéder à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la lettre de notification dudit arrêté par le préfet est insuffisamment motivée ;

- le principe constitutionnel d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme a été méconnu ;

- le principe d'égalité a été méconnu, d'autres communes limitrophes ayant obtenu la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 décembre 2021, le ministre de l'intérieur, représenté par Me Fergon, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de M. et Mme B... ;

2°) de mettre à la charge de M. et Mme B... le paiement de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens de la requête sont infondés.

La procédure a été communiquée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique qui n'a pas produit d'observations.

II. Par une requête enregistrée le 27 juillet 2021 sous le n° 21MA03017 et un mémoire complémentaire enregistré le 28 avril 2023 et non communiqué, la D..., représentée par Me Reghin, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler l'arrêté interministériel du 18 septembre 2018 en tant qu'il a refusé de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur son territoire pour des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols survenus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2017, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de procéder à une nouvelle instruction de sa demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle après avoir procédé à une expertise spécifique de son territoire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté portant non reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, la lettre de notification dudit arrêté par le préfet et la décision implicite de rejet de son recours gracieux sont insuffisamment motivés en fait et en droit ;

- l'intensité anormale d'un agent naturel n'est définie par aucun texte ; les critères météorologiques qui lui ont été opposés sont dépourvus de base textuelle et sont sans rapport avec la mesure de l'intensité du phénomène de sècheresse et de réhydratation des sols ;

- l'existence, les modalités de fonctionnement et d'organisation de la commission interministérielle ne sont pas justifiées ;

- le principe constitutionnel d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme a été méconnu ;

- le principe d'égalité a été méconnu, d'autres communes limitrophes ayant obtenu la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 décembre 2021, le ministre de l'intérieur, représenté par Me Fergon, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de la D... ;

2°) de mettre à la charge de la D... le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens de la requête sont infondés.

La procédure a été communiquée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent, présidente assesseure,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- les observations de Me Reghin pour la D....

Considérant ce qui suit :

1. La D... a adressé au préfet du Var, le 1er février 2018, sur le fondement des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances, une demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle du territoire communal en raison de 193 déclarations de sinistre au titre des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols sur la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017. Les ministres chargés de l'intérieur, de l'économie et des finances et de l'action et des comptes publics, par un arrêté du 18 septembre 2018, ont fixé à l'annexe II de l'arrêté la liste des communes pour lesquelles l'état de catastrophe naturelle au titre de ce phénomène naturel n'a pas été reconnu, au nombre desquelles figure la D... pour la période sollicitée. Cette décision a été notifiée à la commune par le préfet du Var par courrier du 25 octobre 2018. La D... ainsi que M. et Mme B... relèvent appel du jugement n° 1803949 et 1901131 du 28 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leurs conclusions aux fins d'annulation de cet arrêté interministériel en tant qu'il a refusé de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur le territoire communal.

2. Les requêtes n° 21MA02487 et 21MA03017 présentées par M. et Mme B..., d'une part, et la D..., d'autre part, sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu, dès lors, de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 125-1 du code des assurances dans sa rédaction alors applicable : " Les contrats d'assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que l'Etat et garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles, dont ceux des affaissements de terrain dus à des cavités souterraines et à des marnières sur les biens faisant l'objet de tels contrats. / En outre, si l'assuré est couvert contre les pertes d'exploitation, cette garantie est étendue aux effets des catastrophes naturelles, dans les conditions prévues au contrat correspondant. / Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises./ L'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s'est située la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article. Cet arrêté précise, pour chaque commune ayant demandé la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, la décision des ministres. Cette décision est ensuite notifiée à chaque commune concernée par le représentant de l'Etat dans le département, assortie d'une motivation. L'arrêté doit être publié au Journal officiel dans un délai de trois mois à compter du dépôt des demandes à la préfecture. De manière exceptionnelle, si la durée des enquêtes diligentées par le représentant de l'Etat dans le département est supérieure à deux mois, l'arrêté est publié au plus tard deux mois après la réception du dossier par le ministre chargé de la sécurité civile. / Aucune demande communale de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ne peut donner lieu à une décision favorable de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle par arrêté interministériel lorsqu'elle intervient dix-huit mois après le début de l'événement naturel qui y donne naissance. Ce délai s'applique aux événements naturels ayant débuté après le 1er janvier 2007. Pour les événements naturels survenus avant le 1er janvier 2007, les demandes communales de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle doivent être déposées à la préfecture dont dépend la commune avant le 30 juin 2008 (...) ".

4. En premier lieu, si les dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances exigent que la décision des ministres, assortie de sa motivation, soit, postérieurement à la publication de l'arrêté, notifiée par le représentant de l'État dans le département à chaque commune concernée, elles ne sauraient être interprétées comme imposant une motivation en la forme de l'arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle qui serait une condition de légalité de ce dernier. Ainsi, le moyen mentionné ci-dessus doit être écarté comme inopérant.

5. En deuxième lieu, la commission interministérielle relative aux dégâts non assurables causés par les catastrophes naturelles, créée par une circulaire interministérielle des ministres chargés de la tutelle des assurances et de la sécurité civile du 24 mars 1984, a pour mission d'éclairer les ministres sur l'application à chaque commune des méthodologies et paramètres scientifiques permettant de caractériser les phénomènes naturels en cause, notamment ceux issus des travaux de Météo France, les avis qu'elle émet ne liant pas les autorités dont relève la décision. Les ministres, à qui il incombe de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement des administrations placées sous leur autorité, ont la faculté, même en l'absence de disposition le prévoyant expressément, de s'entourer, avant de prendre les décisions relevant de leur compétence, des avis qu'ils estiment utile de recueillir. Dès lors, à le supposer ainsi soulevé par la D..., le moyen tiré de ce que la commission interministérielle précitée, laquelle s'est, au cas d'espèce, réunie le 11 septembre 2018 ainsi que cela ressort des pièces du dossier, n'aurait pas été légalement créée ne peut qu'être écarté.

6. En troisième lieu, pour instruire la demande de la D..., les ministres compétents se sont appuyés sur des données fournies par Météo France, sur celles du Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) pour l'évaluation du critère géologique, ainsi que sur l'avis précité de la commission interministérielle prévue par la circulaire interministérielle du 27 mars 1984. Pour chaque commune et pour l'aléa relatif aux mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols, la méthodologie retenue permet ainsi d'analyser des critères météorologiques et un critère géologique. S'agissant des critères météorologiques, les ministres se sont appuyés sur des données météorologiques de Météo France et, tenant compte de l'évolution des connaissances scientifiques, sur une méthodologie fondée sur le modèle Safran/Isba/Modcou (SIM) développé par Météo France, permettant d'évaluer le bilan hydrique des sols, et matérialisé par un découpage fin du territoire français en plus de 9 000 mailles géographiques carrées de seulement huit kilomètres de côté auxquelles sont associées des valeurs déterminées à partir de critères permettant d'évaluer, pour chaque maille, le seuil à partir duquel le phénomène de retrait-réhydratation issu de la sécheresse est considéré comme intense et anormal. Ce modèle intègre un paramètre de teneur en eau des sols mesuré par l'index SWI (Soil Wetness Index), permettant de ne pas s'en tenir aux seuls critères météorologiques de pluviométrie et de mieux apprécier les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse puis à la réhydratation des sols. Les paramètres de température, d'humidité, de vent, de précipitations solides et liquides, de rayonnement solaire et d'infrarouge incident sont analysés par 300 mètres d'altitude et sont ensuite interpolés sur une grille de calcul régulière de huit kilomètres carrés. Ainsi, selon cette méthodologie, le phénomène de sécheresse dite hivernale est considéré comme revêtant une intensité anormale lorsque l'indice d'humidité du sol superficiel moyen est inférieur à la normale calculée sur la période 1981-2010, sur les 4 trimestres de l'année et lorsque l'indice d'humidité du sol est inférieur à 80 % de la normale pendant 4 trimestres consécutifs au moins. Le phénomène de sécheresse printanière est avéré si la durée de retour de la moyenne des indices SWI des trois mois d'avril à juin est supérieure à vingt-cinq ans. Enfin, le phénomène de sécheresse dite estivale (de juillet à septembre) est considéré comme revêtant une intensité anormale par la prise en compte de deux critères alternatifs. Le premier de ces critères est rempli lorsque la teneur en eau des sols est inférieure à 70 % de son niveau habituel durant le troisième trimestre de l'année considérée et que le nombre de décades (10 jours) au cours desquelles le niveau d'humidité du sol SWI est inférieur à ce seuil se situe au premier, deuxième ou troisième rang sur la période 1989-2017. Le second de ces critères est rempli lorsqu'un indice d'humidité du sol SWI des neuf décades (90 jours) composant la période de juillet à septembre de l'année considérée est si faible que le temps de retour à la normale de la moyenne des SWI représente au moins vingt-cinq années. Dès lors que les critères relatifs à une période de sécheresse, portant, selon les périodes hivernale, printanière ou estivale, sur le pourcentage de réserve hydrique, la durée de retour du phénomène de sécheresse ou encore l'indice d'humidité du sol, sont réunis pour une maille de rattachement de la commune concernée, ils sont considérés comme réunis pour l'ensemble du territoire communal pour la période en cause. Les ministres se sont également appuyés sur un critère géologique, à partir des données issues du BRGM, déterminé en fonction du pourcentage de sols, sur le territoire de la commune concernée, sensibles au phénomène de retrait et de gonflement des argiles. Cette méthode scientifique pour apprécier l'intensité anormale d'un phénomène naturel, est précise et claire et ne saurait, dès lors, être regardée comme étant inintelligible. Par suite, le moyen tiré de ce qu'elle méconnaîtrait le principe d'accessibilité et d'intelligibilité ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, les ministres compétents peuvent légalement, même en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires le prévoyant, s'appuyer sur des méthodologies et paramètres scientifiques, sous réserve que ceux-ci apparaissent appropriés, en l'état des connaissances, pour caractériser l'intensité des phénomènes en cause et leur localisation, qu'ils ne constituent pas une condition nouvelle à laquelle la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle serait subordonnée ni ne dispensent les ministres d'un examen particulier des circonstances propres à chaque commune. Il incombe enfin aux ministres concernés de tenir compte de l'ensemble des éléments d'information ou d'analyse dont ils disposent, le cas échéant à l'initiative des communes concernées. Il suit de là que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait entaché d'un défaut de base légale doit être écarté. Par ailleurs, les critères posés par la méthodologie rappelée au point 6 ne sont pas, contrairement à ce que soutient la commune requérante, sans rapport avec la mesure de l'intensité du phénomène de sécheresse et de réhydratation des sols.

8. En cinquième lieu, ainsi que l'ont estimé les premiers juges, il ressort des pièces du dossier et notamment du tableau de synthèse joint à la notification préfectorale que le territoire de la D... ne remplit, sur aucune des cinq mailles qui le composent, les critères requis par la méthodologie précitée. Ainsi, s'agissant du critère hivernal, il a été constaté, d'une part, que l'indice d'humidité du sol superficiel moyen n'a pas été inférieur à la normale sur une période de 4 trimestres consécutifs et, d'autre part, qu'aucun " choc hivernal " caractérisé par une réserve hydrique inférieure au seuil de 80% pendant au moins 10 jours du 1er trimestre de l'année n'a été constaté, la réserve hydrique ayant atteint un taux variant de 94 à 97 %. S'agissant de l'analyse de la sécheresse de printemps, il a été constaté une durée de retour variant, selon les mailles de 3 à 4 années, inférieure à la durée de 25 années requises. S'agissant de la sécheresse estivale, si la réserve hydrique, qui varie de 66 à 67 %, répond au seuil d'éligibilité fixé à 70 % maximum, toutefois, le rang de la sécheresse estivale parmi celles enregistrées depuis 1989, constitutif de l'autre critère cumulatif, présente une fréquence trop élevée (rang de 4 à 6), la privant d'un critère d'exceptionnalité fixé à un rang de 1 à 3. La commune ne remplit pas davantage le critère alternatif lié à la durée de retour de la sécheresse estivale, qui est de 14 à 19 années, inférieure aux 25 années requises. Par ailleurs, si la commune fait état de considérations générales tirées de ce qu'il résulte du bilan climatique de l'année 2017 réalisé par Météo France et qui révèle que cette année se caractérise, au niveau national, et plus particulièrement dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, comme l'une des années les plus sèches sur la période 1959-2017, celles-ci ne sont pas de nature à contredire les données précises concernant les mailles précitées. La circonstance que le pourcentage du sol de la commune présentant des argiles sensibles au retrait gonflement soit de 96,60 % n'est pas une condition suffisante pour bénéficier de l'état de catastrophe naturelle, faute pour le territoire communal de répondre aux critères météorologiques précités. En outre, si la commune requérante produit un rapport établi par le cabinet 2M Conseils, rédigé par un docteur en sciences de la terre, ledit rapport, qui constitue essentiellement une analyse de la nature des sols de la commune alors qu'il est constant que la présence d'argiles sensibles à l'aléa sécheresse et réhydratation des argiles a été retenue sur le territoire communal, celui-ci, qui ne comporte aucune étude météorologique précise, ne permet pas de contredire utilement les données fournies par Météo France précitées pour chacune des mailles du territoire. Dans ces conditions, la circonstance, pour regrettable qu'elle soit, que 193 habitants de la commune, dont M. et Mme B..., sur un total de 9 326 aient subi des dégâts matériels importants, et notamment des fissures dans leurs bâtiments, ne caractérise pas, en elle-même, l'intensité anormale de la sécheresse. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les ministres en cause auraient commis une erreur d'appréciation en considérant que l'événement climatique de l'été 2017 ne présentait pas une intensité anormale sur le territoire communal de nature à caractériser un état de catastrophe naturelle, sans qu'il soit besoin de recourir à une expertise locale.

9. En dernier lieu, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de la décision de constater l'état de catastrophe naturelle dans d'autres communes limitrophes dès lors que leurs territoires, qui ont fait l'objet d'une analyse fondée sur une méthodologie identique, ne présentent pas les mêmes caractéristiques.

10. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leurs conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté interministériel du 18 septembre 2018 en tant qu'il a refusé de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur le territoire de Lorgues pour des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols survenus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2017, ensemble la décision implicite du rejet du recours gracieux exercé par la commune.

Sur les frais d'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la D... et à M. et Mme B... la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par le ministre de l'intérieur.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... et de la D... sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées par le ministre de l'intérieur en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme C... B..., à la D..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2023, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- Mme Vincent, présidente-assesseure,

- M. Mérenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mai 2023.

N° 21MA02487 et 21MA0301702


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02487
Date de la décision : 15/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

12-02 Assurance et prévoyance. - Contrats d'assurance.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : CABINET ARCO-LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-05-15;21ma02487 ?
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