La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/05/2023 | FRANCE | N°22MA01074

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 03 mai 2023, 22MA01074


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2020 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite d'office.

Par un jugement n° 2107998 du 6 janvier 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devan

t la cour :

I.- Par une requête enregistrée le 12 avril 2022 sous le numéro 22MA01074, Mme C....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2020 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite d'office.

Par un jugement n° 2107998 du 6 janvier 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I.- Par une requête enregistrée le 12 avril 2022 sous le numéro 22MA01074, Mme C... épouse B..., représentée par Me Cauchon-Riondet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 janvier 2022 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2020 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer le titre demandé, ou, à défaut, de réexaminer sa demande et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à Me Cauchon-Riondet sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation ;

- il s'est cru à tort lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- le refus de séjour méconnaît les dispositions du 5) et du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il est entaché d'erreur manifeste au regard de sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste au regard de sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... épouse B... ne sont pas fondés.

II.- Par une requête enregistrée le 12 avril 2022 sous le numéro 22MA01075, Mme C... épouse B..., représentée par Me Cauchon-Riondet, demande à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 6 janvier 2022 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à Me Cauchon-Riondet sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle reprend les moyens de la requête enregistrée sous le numéro 22MA01074 et soutient en outre que l'exécution du jugement attaqué l'expose à des conséquences difficilement réparables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... épouse B... ne sont pas fondés.

Mme C... épouse B... a été admise, dans les deux instances, au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 24 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la cour a désigné Mme Vincent, présidente assesseure de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 14 décembre 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme C... épouse B..., l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite d'office.

2. Par un jugement du 6 janvier 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande présentée par Mme C... épouse B... à l'encontre de cet arrêté.

3. Les requêtes de Mme C... épouse B... sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer sur celles-ci par le présent arrêt.

Sur le fond :

4. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme C... épouse B.... L'arrêté est suffisamment motivé, conformément aux articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration et au I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur.

5. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté du 14 décembre 2020 que le préfet des Bouches-du-Rhône a procédé à l'examen particulier de la situation de Mme C... épouse B..., et ne s'est pas cru lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

6. En troisième lieu, les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 sont relatives au cas d'un algérien dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale, et non de celui du parent d'un enfant dont l'état de santé nécessite une telle prise en charge. Mme C... épouse B... n'invoque pas d'éléments relatifs à son propre état de santé. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit donc être écarté.

7. En quatrième lieu, un des enfants de A... C... épouse B..., né en juillet 2014, souffre d'une paralysie cérébrale spastique et dystonique des quatre membres entraînant un polyhandicap sévère. Il bénéficie d'une prise en charge pluridisciplinaire. Le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, saisi par le préfet des Bouches-du-Rhône, a estimé, par un avis du 26 octobre 2020, que si l'état de santé de son fils nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Algérie, son pays d'origine. Ainsi que l'a déjà relevé le tribunal administratif, Mme C... épouse B... a produit de nombreuses pièces médicales dont aucune ne permet de remettre en cause la disponibilité des traitements en Algérie et la possibilité de bénéficier d'un suivi médical approprié dans ce pays. Le dossier comporte une attestation relative à du matériel de nutrition entérale rédigée par une diététicienne en des termes ambigus qui concerne un autre enfant et ne mentionne pas le pays concerné. Le rapport manuscrit rédigé par un médecin algérien en 2022, selon lequel l'enfant nécessite une prise en charge " en dehors de l'Algérie vue le manque du plateau technique " n'est pas revêtu d'une crédibilité suffisante, compte tenu de l'absence des précisions techniques et médicales pouvant être attendues d'un médecin spécialisé en pédiatrie évoquant notamment la situation de son propre hôpital. Par ailleurs, le certificat médical daté du 17 janvier 2022 faisant état de ce que des " produits " ne seraient pas disponibles est également trop imprécis. Il suit de là que l'impossibilité pour l'enfant de bénéficier d'un traitement approprié en Algérie n'est pas établie. Par suite, le préfet n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de cet enfant, protégé par le premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Pour les mêmes raisons, et dès lors qu'il s'agit de l'unique motif invoqué, il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire pour apprécier la situation personnelle de l'intéressée.

8. En quatrième lieu, le tribunal administratif a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par des motifs appropriés, figurant aux points 8 et 9 du jugement attaqué, qui ne sont pas contestés et qu'il y a lieu d'adopter en appel. Les mêmes motifs permettent également d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

9. En cinquième lieu, Mme C... épouse B... se réfère à l'argumentation examinée au point 7 pour faire valoir que l'arrêté contesté méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cependant et ainsi qu'il a été dit, l'impossibilité pour son fils de bénéficier d'un traitement approprié en Algérie n'est pas établie. Ces moyens doivent donc en tout état de cause être écartés.

10. Enfin, l'exception d'illégalité du refus de séjour invoquée à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français doit être écartée par les motifs figurant ci-dessus.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme C... épouse B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur la demande de sursis à statuer :

12. Par le présent arrêt, la cour statue au fond sur la requête de Mme C... épouse B... dirigée contre le jugement du 6 janvier 2022 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 14 décembre 2020 du préfet des Bouches-du-Rhône. Par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont sans objet.

Sur les frais liés au litige :

13. L'État, qui n'est pas tenu aux dépens, n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font en conséquence obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par Mme C... épouse B... sur leur fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme E... C... épouse B... enregistrée sous le numéro 22MA01074 est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête enregistrée sous le numéro 22MA01075.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... épouse B..., à Me Cauchon-Riondet et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2023, où siégeaient :

- Mme Vincent, présidente,

- M. Mérenne, premier conseiller,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 mai 2023.

2

Nos 22MA01074 et 22MA01075


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01074
Date de la décision : 03/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINCENT
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : CAUCHON-RIONDET;CAUCHON-RIONDET;CAUCHON-RIONDET

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-05-03;22ma01074 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award