Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Métropole Nice Côte d'Azur a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 5 mai 2020 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a retiré l'autorisation d'activité partielle pour les agents de la régie du marché d'intérêt national (MIN) d'Azur, ensemble la décision implicite née du silence gardé par la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur son recours hiérarchique, et d'enjoindre à l'Etat de lui verser ces allocations d'activité partielle.
Par un jugement n° 2004426 du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 5 mai 2020 du préfet des Alpes-Maritimes et la décision implicite de rejet de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et a enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de verser à la Métropole Nice Côte d'Azur les allocations d'activité partielle aux salariés de droit privé de la régie MIN d'Azur, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
Par un recours enregistré le 2 décembre 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2004426 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de Nice ;
2°) de confirmer les décisions de refus de demande d'autorisation d'activité partielle n° 006BCUY0100 rendues par la délégation départementale des Alpes-Maritimes et le rejet implicite du recours hiérarchique formé à l'encontre de ce refus ;
3°) par voie de conséquence, d'annuler l'injonction relative au versement à la Métropole Nice Côte d'Azur des allocations d'activité partielle aux salariés de droit privé de la régie MIN d'Azur ;
Elle soutient que :
- la métropole ne remplissait pas la condition relative à l'adhésion à l'assurance-chômage requise par la décision n° 432340 du Conseil d'État du 28 janvier 2021 ;
- elle sollicite une substitution de motifs, les décisions attaquées pouvant être fondées sur l'inéligibilité du demandeur en raison d'une condition non remplie pour la période considérée, à savoir son adhésion effective à l'Unedic ;
- le dispositif d'activité partielle n'a pas vocation à prendre en charge les " retards de paiement et [...] nombreux impayés sur les redevances du domaine public ".
Par un mémoire en défense enregistré le 3 juin 2022, la Métropole Nice Côte d'Azur conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code du travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;
- l'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,
- et les observations de Me Schanvic représentant la Métropole Nice Côte d'Azur.
Considérant ce qui suit :
1. La Métropole Nice Côte d'Azur a demandé, le 30 avril 2020, pour son service " régie du Marché d'Intérêt National (MIN) d'Azur ", l'autorisation de placer les salariés de cet établissement en position d'activité partielle, respectivement pour la période du 16 mars au 30 juin 2020. Cette demande a fait l'objet d'une autorisation tacite conformément aux dispositions de l'article R. 5122-4 du code du travail. Par un courrier du 5 mai 2020, le chef de service activité partielle de l'unité départementale des Alpes-Maritimes de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) de Provence Alpes-Côte d'Azur a retiré cette décision tacite et a rejeté la demande d'autorisation de mise en activité partielle des salariés du MIN d'Azur. Le directeur général des services de la Métropole de Nice Côte d'Azur a formé, le 26 juin 2020, un recours hiérarchique auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui a été implicitement rejeté. La ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion relève appel du jugement du 5 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 5 mai 2020 et la décision implicite de rejet du recours hiérarchique et a enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de verser à la Métropole Nice Côte d'Azur les allocations d'activité partielle dues au titre des salariés de droit privé de la régie MIN d'Azur, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet des Alpes-Maritimes à la demande première instance :
2. L'article R. 421-1 du code de justice administrative énonce que la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. Ce délai est un délai franc. L'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que " Toute décision administrative peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai. ".
3. Par la décision précitée du 5 mai 2020, l'administration a retiré l'autorisation de mise en activité partielle des salariés de la régie MIN d'Azur. Il ressort des pièces du dossier que la Métropole Nice Côte d'Azur a formé, le 26 juin 2020, un recours hiérarchique contre la décision du 5 mai 2020, lequel a été réceptionné le 29 juin 2020. Le délai de recours à l'encontre de la décision implicite de rejet née le 29 août 2020 expirait, dès lors, le 30 octobre 2020. Par suite, la requête, enregistrée le 29 octobre 2020, est recevable. La fin de non-recevoir opposée par le préfet des Alpes-Maritimes devant les premiers juges et tirée de la tardiveté de la requête ne peut, par suite, qu'être rejetée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. D'une part, aux termes de l'article L. 5122-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " I. - Les salariés sont placés en position d'activité partielle, après autorisation expresse ou implicite de l'autorité administrative, s'ils subissent une perte de rémunération imputable (...) à la fermeture temporaire de leur établissement ou partie d'établissement (...) / II. - Les salariés reçoivent une indemnité horaire, versée par leur employeur, correspondant à une part de leur rémunération antérieure dont le pourcentage est fixé par décret en Conseil d'Etat. L'employeur perçoit une allocation financée conjointement par l'Etat et l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage. (...) ". L'article R. 5122-1 du même code précise que : " L'employeur peut placer ses salariés en position d'activité partielle lorsque l'entreprise est contrainte de réduire ou de suspendre temporairement son activité pour l'un des motifs suivants : (...) / 3° Un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel (...) / 5° Toute autre circonstance de caractère exceptionnel " et le premier alinéa de l'article R. 5122-2 de ce code prévoit que : " L'employeur adresse au préfet du département où est implanté l'établissement concerné une demande préalable d'autorisation d'activité partielle. ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 5424-1 de ce même code : " Ont droit à une allocation d'assurance (...) : / 2° Les agents non titulaires des collectivités territoriales (...) " et aux termes de l'article L. 5424-2 : " (...) peuvent adhérer au régime d'assurance : / 1° Les employeurs mentionnés au 2° de l'article L. 5424-1 (...) ".
6. Il ressort de ces dispositions combinées que les salariés de droit privé des collectivités territoriales travaillant dans un service public industriel et commercial, notamment ceux exploités en régie dotée de la seule autonomie financière, peuvent être placés en position d'activité partielle dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre Ier de la cinquième partie du code du travail, sous réserve de l'adhésion de la collectivité territoriale dont ils relèvent au régime d'assurance chômage.
7. En premier lieu, le préfet des Alpes-Maritimes a retiré l'autorisation au titre de l'allocation de mise en activité partielle sollicitée pour le MIN d'Azur au motif que " ... les collectivités territoriales ne sont pas éligibles au dispositif de l'activité partielle... ".
8. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 qu'en excluant du bénéfice du dispositif de l'activité partielle toutes les collectivités territoriales, quand bien même celles-ci adhèrent au régime d'assurance chômage pour les agents non titulaires qu'elles emploient, le préfet a commis une erreur de droit.
9. En deuxième lieu, la ministre demande à la Cour, par une substitution de motifs, de maintenir les décisions de refus attaquées et de les fonder, non pas sur une inéligibilité générale des collectivités territoriales, mais sur l'inéligibilité de la Métropole Nice Côte d'Azur, à défaut d'adhésion effective à l'Unedic. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la Métropole Nice Côte d'Azur a adhéré à l'assurance chômage par une convention signée le 29 février 2012, qui a prévu expressément, en son article 1er, que " le présent contrat vise tous les agents non titulaires ou non statutaires présents et à venir y compris les contrats d'apprentissage pour lesquels l'employeur avait auparavant adhéré au régime particulier d'adhésion. L'adhésion de l'organisme public signataire emporte effet à l'égard de l'ensemble de ses services et activités non dotés d'une personnalité juridique. ". Ledit contrat était conclu " pour une durée de six ans renouvelable, pour la même durée, par tacite reconduction " selon son article 4, et prenait effet au 31 décembre 2011 selon son article 8. La métropole produit également une attestation de son président déclarant et certifiant que, depuis sa création, le 31 décembre 2011, cet établissement public de coopération intercommunale adhère au régime d'assurance chômage de Pôle Emploi pour tous ses agents contractuels comme en attestent également les tableaux récapitulatifs de cotisations pour les années 2018 et 2019. Par suite, le moyen tiré de ce que la Métropole Nice Côte d'Azur ne remplirait pas la condition d'une adhésion effective à l'assurance chômage pour la période considérée manque en fait.
10. En dernier lieu, si la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion soutient que le dispositif n'a pas vocation à prendre en charge les " retards de paiement et [...] nombreux impayés sur les redevances du domaine public ", il ressort toutefois de la demande d'autorisation préalable du 30 avril 2020 que sont d'abord invoqués les incidences du confinement sur l'activité de la régie et que sont cochées dans l'imprimé de demande, les cases " réduction d'activité " et " totalité de l'établissement ". Par suite, le moyen invoqué par la ministre ne peut qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 5 mai 2020 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a retiré le bénéfice de l'activité partielle aux salariés de la régie MIN d'Azur ainsi que la décision implicite de rejet du recours hiérarchique de la Métropole Nice Côte d'Azur et a enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de verser à cette dernière les allocations d'activité partielle dues au titres des salariés de droit privé de la régie MIN d'Azur.
Sur les frais liés au litige :
12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la Métropole Nice Côte d'Azur au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le recours de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la Métropole Nice Côte d'Azur la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et à la Métropole Nice Côte d'Azur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 7 avril 2023, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- Mme Ciréfice, présidente assesseure,
- M. Prieto, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 avril 2023.
N° 21MA04615 2
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