Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme N... et autres ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2019 par lequel le maire de la commune de Corte a délivré à M. E... B... un permis de construire vingt-sept logements sur la parcelle cadastrée section AD n° 215 située au lieudit Perru à Corte.
Par un jugement n° 1901629 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de Mme N... et autres.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, des pièces et mémoires complémentaires enregistrés les 8 février 2021, 13 février 2021, 3 novembre 2021 et 28 juillet 2022, Mme S... N..., M. L... N..., Mme Z... J..., Mme F... H..., M. A... H..., M. I... P..., Mme U... P..., M. O... Q..., Mme G... Q..., M. D... R..., Mme Y... R..., M. X... K..., Mme V... K..., M. D... M... et M. C... T..., représentés par Me Palmieri, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 10 décembre 2020 ;
2°) d'annuler le permis de construire accordé par le maire de Corte à M. B... le 7 octobre 2019 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Corte le paiement de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils ont intérêt à agir ;
- le jugement est entaché d'irrégularité en ce qu'il est insuffisamment motivé ;
- les dispositions de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme ont été méconnues dès lors, d'une part, qu'aucune orientation d'aménagement et de programmation du PLU de Corte ne définit les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone 3 AUe, d'autre part, que le pétitionnaire ne prévoit pas la réalisation d'équipements propres à la zone 3 AUe et, enfin, que la suffisance des réseaux doit s'apprécier à l'échelle de la zone dans son ensemble ;
- les dispositions des articles 3AU-2 et 3AU-4 du PLU de Corte ont été méconnues dès lors que le projet envisage un raccordement sur les réseaux anciens et insuffisants de la cité Pianuccia et non la réalisation d'équipements propres ;
- les dispositions de l'article UD10 afférentes à la hauteur des constructions ont été méconnues.
Par deux mémoires en défense enregistrés les 16 avril 2021 et 16 mars 2022, M. E... B..., représenté par Me Techer, demande à la Cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête ;
2°) à titre subsidiaire, de faire application des dispositions des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;
3°) de mettre à la charge de chacun des requérants le paiement de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les requérants n'ont pas d'intérêt à agir ;
- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
- les moyens de la requête sont infondés.
La procédure a été communiquée à la commune de Corte qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vincent, présidente assesseure,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,
- et les observations de Me Hachem, substituant Me Palmieri, pour Mme N... et autres.
Une note en délibéré a été enregistrée pour Mme N... et autres le 22 novembre 2022.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 7 octobre 2019, le maire de la commune de Corte a délivré à M. B... un permis de construire un bâtiment de 27 logements sur la parcelle cadastrée section AD 215 au lieudit Perru. Par jugement n° 1901629 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête présentée par Mme N... et autres, résidents de la cité Pianuccia, située à proximité du terrain d'assiette du projet. Mme N... et autres demandent à la Cour d'annuler ledit jugement.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Si les requérants font valoir que le jugement attaqué aurait insuffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3AU-4 du PLU de Corte, le tribunal, en indiquant, en son considérant 13, après avoir cité les dispositions dudit article, que : " Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué le pétitionnaire bénéficiait d'une promesse de vente portant sur les parcelles cadastrées n° 119 et n° 120. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le pétitionnaire ne peut raccorder l'immeuble dont la construction est projetée aux réseaux installés au sous-sol de la parcelle cadastrée section AD n° 119 faute pour lui de justifier d'une servitude de passage " a répondu de manière suffisamment motivée au moyen dont il était saisi. Par suite, le moyen tiré de ce que ledit jugement serait entaché d'irrégularité doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone ".
5. Les requérants, qui ont expressément fait valoir ne pas soulever l'exception d'illégalité du PLU, ne peuvent utilement se prévaloir de ces dispositions, qui fixent les conditions d'un classement de parcelles en zone à urbaniser, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation d'autorisations d'urbanisme délivrées au sein desdites zones. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme doit être écarté en toutes ses branches.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3AU-2 du PLU de Corte : " 2.1. Dans l'attente de l'aménagement des différentes zones, seuls sont autorisés l'aménagement et l'extension des constructions existantes sans changement de destination ". Par ailleurs, aux termes de l'article 3AU-4 dudit PLU : " Dans le cadre de l'aménagement de ces zones, il sera exigé des bénéficiaires d'autorisation, d'occupation ou d'utilisation du sol la réalisation d'équipements propres, comme stipulé dans les articles 332-15 et 332-16 du code de l'urbanisme. L'alimentation en eau potable et l'assainissement de toute construction doit être assurée dans les conditions conformes aux règlements en vigueur, aux prévisions des projets d'alimentation en eau potable et assainissement. Les opérations d'ensemble devront tenir compte de la nécessité d'un aménagement global de la zone dans la conception des réseaux (ex : dimensionnement et localisation permettant un bouclage entre les différentes opérations) ".
7. Les requérants soutiennent que le projet envisagé est contraire aux dispositions précitées dès lors qu'il ne prévoit pas, pour la desserte par les réseaux, la réalisation d'équipements propres mais se borne à envisager un raccordement sur le réseau de la cité Pianuccia lequel est ancien et insuffisant puisqu'il n'a été conçu que pour desservir 21 lots. Il ressort cependant des pièces du dossier que le projet prévoit la réalisation d'équipements propres qui, s'ils passeront, sous réserve des droits des tiers, sur les parcelles cadastrées AD 119 et AD 120, constituant les voies d'accès à la cité Pianuccia, ne se raccorderont néanmoins pas aux réseaux de ce lotissement mais aux réseaux publics d'électricité, d'eau et d'assainissement. Par ailleurs, il ressort des courriers établis par EDF, Cort'Aqua et la communauté des communes du centre Corse les 10 avril 2019, 1er avril 2019 et 29 avril 2019 que la parcelle AD 215 peut être desservie par les réseaux d'électricité, d'eau et d'assainissement collectif, lesquels présentent une capacité suffisante pour répondre aux besoins du projet envisagé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du PLU doit être écarté.
8. En dernier lieu, si les requérants se prévalent de la méconnaissance des dispositions de l'article UD10 du PLU aux termes desquelles " La hauteur maximale des constructions à partir du terrain naturel ne pourra excéder 7m à l'égout et 10 m au faîtage. ", celles-ci sont inapplicables au projet envisagé qui, au regard de sa localisation, est régi par les seules dispositions de l'article 3AU-10 du PLU prévoyant une hauteur maximale de 10 mètres à l'égout et de 13 mètres au faîtage, dont il n'est ni établi ni même allégué qu'elles auraient été méconnues.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par M. B..., que les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté leurs conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 7 octobre 2019.
Sur les frais d'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Corte, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse aux requérants la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, en application desdites dispositions, de mettre à la charge des requérants la somme globale de 3 000 euros qui sera versée à M. B....
DECIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme N... et autres est rejetée.
Article 2 : Les requérants verseront à M. B... la somme globale de 3 000 euros (trois mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme S... N..., M. L... N..., Mme Z... J..., Mme F... H..., M. A... H..., M. I... P..., Mme U... P..., M. O... Q..., Mme G... Q..., M. D... R..., Mme Y... R..., M. X... K..., Mme V... K..., M. D... M..., M. C... T..., à M. E... B... et à la commune de Corte.
Copie en sera adressée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- Mme Vincent, présidente-assesseure,
- Mme Balaresque, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2022.
N°21MA00522 2