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19/10/2022 | FRANCE | N°21MA00519

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 19 octobre 2022, 21MA00519


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision n° 656/2019 du 29 octobre 2019 par laquelle le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a retiré la licence de pêche européenne du navire Marco Polo IV NI 821697.

Par un jugement n° 1903938 du 5 février 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I.- Par une requête enregistrée le 8 février 2021 sous le n° 21MA00519 et régularisée le 9 avril 202

1, et deux mémoires, enregistrés les 19 mars et 26 août 2022, M. B..., représenté par Me Marques, d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision n° 656/2019 du 29 octobre 2019 par laquelle le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a retiré la licence de pêche européenne du navire Marco Polo IV NI 821697.

Par un jugement n° 1903938 du 5 février 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I.- Par une requête enregistrée le 8 février 2021 sous le n° 21MA00519 et régularisée le 9 avril 2021, et deux mémoires, enregistrés les 19 mars et 26 août 2022, M. B..., représenté par Me Marques, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 février 2021 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler la décision du 29 octobre 2019 du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur ;

3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer et transmettre à la Cour de justice de l'Union européenne, sur le fondement de l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, une question préjudicielle portant sur la question de savoir si les règlements (CE) n° 1281/2005 du 3 août 2005, (CE) n° 1224/2009 du 20 novembre 2009 et (UE) n° 404/2011 du 8 avril 2011, doivent être interprétés de telle sorte qu'ils autorisent les États membres à prévoir une disposition nationale permettant le retrait définitif d'une licence de pêche pour inactivité d'un navire ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à Me Marques sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision contestée n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire ;

- les articles R. 921-9 et R. 921-19 du code rural et de la pêche maritime sont contraires aux dispositions du règlement d'exécution (UE) n° 404/2011 de la Commission du 8 avril 2011 ;

- le préfet de région a fait une inexacte application de l'article R. 921-9 ;

- la décision contestée est une sanction administrative reposant sur des textes imprécis ;

- cette sanction est disproportionnée ;

- son état de santé l'exonère des conditions fixées par l'article R. 921-9.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 janvier 2022, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire est irrecevable ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle (55%) par une décision du 25 octobre 2021.

II.- Par une requête enregistrée le 19 mars 2021 sous le n° 21MA01108, et deux mémoires, enregistrés les 19 mars et 26 août 2022, M. B..., représenté par Me Marques, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 février 2021 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler la décision du 29 octobre 2019 du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur ;

3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer et transmettre à la Cour de justice de l'Union européenne, sur le fondement de l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, une question préjudicielle portant sur la question de savoir si les règlements (CE) n° 1281/2005 du 3 août 2005, (CE) n° 1224/2009 du 20 novembre 2009 et (UE) n° 404/2011 du 8 avril 2011, doivent être interprétés de telle sorte qu'ils autorisent les États membres à prévoir une disposition nationale permettant le retrait définitif d'une licence de pêche pour inactivité d'un navire ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à Me Marques sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il reprend les moyens de la requête enregistrée sous le n° 21MA00519.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 janvier 2022, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire est irrecevable ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le règlement (CE) n° 1224/2009 du Conseil du 20 novembre 2009 ;

- le règlement d'exécution (UE) n° 404/2011 de la Commission du 8 avril 2011 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 29 octobre 2019, le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a retiré la licence de pêche du navire Marco Polo IV NI 821697, sur le fondement du 5° de l'article R. 921-19 du code rural et de la pêche maritime, au motif que le navire, du fait d'un nombre limité de jours d'embarquement au cours des douze mois précédents, n'avait pas respecté les conditions minimales d'activité fixées à l'article R. 921-9 du même code. M. B... est le propriétaire, armateur et patron embarqué du navire. Par un jugement n° 1903938 du 5 février 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision préfectorale du 29 octobre 2019. Les requêtes de M. B... sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer sur celles-ci par le présent arrêt.

2. Aux termes de l'article R. 921-16 du code rural et de la pêche maritime :

" La licence de pêche européenne est délivrée à un producteur, pour chacun de ses navires, par l'autorité désignée à l'article R.* 911-3 en fonction du port d'immatriculation du navire. Préalablement à la délivrance de la licence, cette autorité s'assure : / 1° Que le producteur dispose d'un permis de mise en exploitation et d'un permis d'armement valides pour le navire concerné (...) ". Aux termes de l'article R. 921-9 du même code : " Les navires immatriculés ou destinés à être immatriculés en France métropolitaine (...), et armés ou devant être armés à

la pêche professionnelle, sont soumis à l'obligation de disposer d'un permis de mise en

exploitation, délivré dans les conditions fixées par la présente sous-section. Ce permis est

exigé avant : (...) 5° Le réarmement à la pêche d'un navire qui a cessé d'être actif ; (...) Est

considéré comme actif à une date donnée un navire dont, dans les douze mois qui précèdent,

l'effectif qui a été porté au rôle correspond à celui prévu pour son exploitation pendant une

période de six mois au moins, et dont l'activité de pêche est attestée par le débarquement

régulier de ressources biologiques de la mer et par l'accomplissement des obligations

déclaratives fixées aux articles L. 932-1 à L. 932-3 (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 921-19 de ce code : " Outre les cas résultant de l'application de l'article L. 946-1 (qui définit les sanctions administratives applicables), la licence de pêche européenne d'un producteur peut être retirée par l'autorité qui l'a délivrée dans les cas suivants : (...) 5° Lorsque le navire ne

respecte pas les conditions d'activité minimale définie par l'article R. 921-9 (...) ".

Sur la méconnaissance du droit de l'Union européenne :

3. L'article 4, paragraphe 9, du règlement (CE) n° 1224/2009 du Conseil du 20 novembre 2009 définit la licence de pêche comme " un document officiel conférant à son détenteur le droit, défini par les règles nationales, d'utiliser une certaine capacité de pêche pour l'exploitation commerciale des ressources aquatiques vivantes. Elle contient les informations minimales relatives à l'identification, aux caractéristiques techniques et à l'armement d'un navire de pêche de l'Union ". L'article 6, paragraphe 5, du même règlement ajoute que : " L'État membre du pavillon délivre, gère et retire la licence de pêche selon les modalités arrêtées conformément à la procédure visée à l'article 119 ". Ledit article 119 renvoie à un acte délégué, en l'espèce le règlement d'exécution (UE) n° 404/2011 de la Commission du 8 avril 2011.

4. L'article 3, paragraphe 2, dudit règlement d'exécution prévoit que : " Les licences de pêche visées à l'article 6 du règlement de contrôle sont délivrées, gérées et retirées par les États membres pour leurs navires de pêche conformément au présent règlement ". Le paragraphe 5 du même article 3 prévoit qu'une : " licence de pêche n'est valable que si les conditions sur la base desquelles elle a été délivrée sont encore réunies ". Enfin, les articles 129 et suivants de ce règlement définissent les conditions de suspension ou de retrait définitif d'une licence de pêche en cas de commission d'une " infraction grave ", dans le cadre d'un " système de points ".

5. Le 5° de l'article R. 921-19 du code rural et de la pêche maritime, qui autorise l'autorité compétente à retirer une licence de pêche lorsque le navire ne respecte pas les conditions d'activité minimale auxquelles le permis d'exploitation de ce navire est lui-même subordonné en application de l'article R. 921-9 du même code, n'institue pas une sanction destinée à réprimer la commission d'une infraction mais se borne à permettre à l'autorité compétente de tirer les conséquences de ce que l'une des conditions au maintien de la licence de pêche n'est plus remplie, afin de permettre l'adaptation de la capacité de pêche aux possibilités de pêche. Le requérant ne peut donc utilement se prévaloir de la méconnaissance par ces dispositions des articles 129 et suivants du règlement n° 404/2011 de la Commission du 8 avril 2011 qui, ainsi qu'il a été dit au point précédent, régissent le retrait d'une licence de pêche, à titre de sanction.

6. Par ailleurs, les articles R. 921-9 et R. 921-19 du code rural et de la pêche maritime ne portent pas sur l'établissement de " plans de sondage " visés à l'article 16, paragraphe 1, et à l'article 25, paragraphe 1, du règlement n° 1224/2009 du 20 novembre 2009. Par suite, la définition des " navires actifs " figurant à l'annexe XVI du règlement d'exécution n° 404/2011 du 8 avril 2011, aux fins de cette annexe, n'est pas davantage applicable au litige.

7. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions invoquées du droit de l'Union européenne par les dispositions du code rural et de la pêche maritime qui constituent la base légale de la décision attaquée doit être écarté, sans qu'il soit besoin, en l'absence de pertinence, de transmettre une question préjudicielle à la Cour de justice.

Sur les autres moyens :

8. En premier lieu, le moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire préalable relève d'une cause juridique nouvelle, invoquée pour la première fois en appel. Par suite, il est irrecevable.

9. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'effectif du navire Marco Polo IV NI 821697 a été porté au rôle pour vingt-cinq jours au cours de la période comprise entre le 29 octobre 2018 et le 28 octobre 2019, soit moins que la durée minimale de six mois prévue à l'article R. 921-9 du code rural et de la pêche maritime. Par suite, le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur n'a pas inexactement qualifié les faits en retenant que les conditions minimales d'activité prévues par cet article n'étaient pas remplies.

10. En troisième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 5, la décision contestée n'est pas une sanction. Les moyens tirés de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines et du caractère disproportionné de la prétendue sanction sont donc inopérants.

11. Enfin, l'état de santé de M. B... est sans incidence sur l'application des articles R. 921-9 et R. 921-19 du code rural et de la pêche maritime, qui fixent des conditions relatives au navire, et non au propriétaire, à l'armateur ou au patron-pêcheur embarqué.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

13. L'État n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font en conséquence obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. B... sur leur fondement.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Me Marques, et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la cour,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- M. Mérenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2022.

2

Nos 21MA00519 et 21MA01108


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00519
Date de la décision : 19/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

395-04


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : MARQUES;MARQUES;MARQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-10-19;21ma00519 ?
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