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11/07/2022 | FRANCE | N°20MA02802

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 11 juillet 2022, 20MA02802


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un déféré, enregistré le 15 novembre 2019, la préfète de la Corse-du-Sud a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 27 mai 2019 par lequel le maire de Carbuccia ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux présentée par M. A... B... et portant sur la reconstruction à l'identique d'un chalet suite à sinistre pour une surface de plancher de 19,72 m² sur la parcelle cadastrée section C n° 263, située lieu-dit " Diceppu ".

Par un jugement n°1901514

du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 27 mai 2019 du m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un déféré, enregistré le 15 novembre 2019, la préfète de la Corse-du-Sud a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 27 mai 2019 par lequel le maire de Carbuccia ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux présentée par M. A... B... et portant sur la reconstruction à l'identique d'un chalet suite à sinistre pour une surface de plancher de 19,72 m² sur la parcelle cadastrée section C n° 263, située lieu-dit " Diceppu ".

Par un jugement n°1901514 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 27 mai 2019 du maire de Carbuccia.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 août 2020, M. B..., représenté par Me Nesa, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia du 11 juin 2020 ;

2°) de rejeter le déféré de la préfète de la Corse-du-Sud ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est au prix d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme que le tribunal a annulé l'arrêté du 27 mai 2019 ;

- la construction initiale, détruite par un incendie criminel en 2009, a été édifiée à une époque où ni permis de construire ni déclaration de travaux n'était requis ;

- l'irrégularité de la construction initiale pour défaut de déclaration de travaux ne peut en tout état de cause justifier l'opposition à déclaration préalable pour la reconstruction à l'identique de cette construction, achevée depuis plus de dix ans à la date du sinistre, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2020, le préfet de la Corse-du-Sud conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête n'est pas fondée dans les moyens qu'elle soulève ;

- le terrain d'assiette du projet se situe en dehors des zones constructibles de la carte communale de Carbuccia.

La requête a été communiquée à la commune de Carbuccia qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Laurent Marcovici, président assesseur de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 27 mai 2019, le maire de Carbuccia ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux présentée par M. B... portant sur la reconstruction à l'identique d'un chalet suite à sinistre pour une surface de plancher de 19,72 m² sur la parcelle cadastrée section C n° 263, située lieu-dit " Diceppu ". M. B... relève appel du jugement du 11 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Bastia, sur déféré de la préfète de la Corse-du-Sud, a annulé cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un bâtiment régulièrement édifié vient à être détruit ou démoli, sa reconstruction à l'identique est autorisée dans un délai de dix ans nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement ".

3. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme que le législateur a entendu reconnaître au propriétaire d'un bâtiment détruit le droit de procéder à une reconstruction à l'identique dans un délai de dix ans, à condition que le bâtiment ait été régulièrement édifié. Tel est notamment le cas lorsque le bâtiment détruit ou démoli avait été autorisé par un permis de construire ou édifié avant l'entrée en vigueur de la loi susvisée du 15 juin 1943, à une date à laquelle le droit de construire n'était pas subordonné à l'obtention d'une autorisation. En revanche, les bâtiments construits sans autorisation ou en méconnaissance de celle-ci, ainsi que ceux édifiés sur le fondement d'une autorisation annulée par le juge administratif ou retirée par l'administration, doivent être regardés comme n'ayant pas été régulièrement édifiés. Il appartient au pétitionnaire d'apporter la preuve de l'existence légale de sa construction, au moment où il envisage d'y réaliser des aménagements soumis à déclaration ou à autorisation.

4. Il ressort des explications et pièces fournies par les parties que le chalet détruit a été édifié en 1978. Contrairement à ce que soutient le requérant, compte tenu de l'époque de la construction de ce bâtiment, celle-ci était subordonnée à la délivrance d'une autorisation d'urbanisme, en application de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : " Quiconque désire entreprendre ou implanter une construction à usage d'habitation ou non, même ne comportant pas de fondations, doit, au préalable, obtenir un permis de construire. Cette obligation s'impose aux services publics et concessionnaires de services publics de l'Etat, des départements et des communes comme aux personnes privées. (...) ". La circonstance, à la supposer établie, que le bâtiment en cause ait été assuré est sans incidence sur l'appréciation de la régularité de son édification, au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme.

5. Aux termes des dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou la décision d'opposition à déclaration préalable ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables : (...) 5° Lorsque la construction a été réalisée sans qu'aucun permis de construire n'ait été obtenu alors que celui-ci était requis ".

6. Si le requérant soutient que l'irrégularité affectant la construction détruite par le sinistre était en tout état de cause couverte par la prescription de dix ans instituée à l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme, les dispositions précitées des articles L. 421-9 et L. 111-15 du code de l'urbanisme n'ont toutefois ni le même objet, ni le même champ d'application. L'article L. 421-9 concerne l'exécution de travaux sur une construction existante irrégulière alors que l'article L. 111-15 ne porte que sur la reconstruction à l'identique, après destruction ou démolition, d'une construction régulièrement édifiée. Il en résulte que la règle posée par l'article L. 421-9 qui fait obstacle à ce qu'un refus de permis de construire soit fondé sur l'irrégularité de la construction initiale ne trouve pas à s'appliquer pour une demande de reconstruction à l'identique d'une construction détruite ou démolie.

7. Dans ces conditions, ainsi que l'a jugé le tribunal, le maire de Carbuccia n'a pu légalement autoriser la reconstruction à l'identique d'un bâtiment qui ne pouvait être regardé comme ayant été régulièrement édifié au sens des dispositions de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 27 mai 2019 du maire de Carbuccia. Par suite, ses conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Carbuccia et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet de Corse et de Corse-du-Sud.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Mérenne, premier conseiller,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2022.

N°20MA02802 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02802
Date de la décision : 11/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-001-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Règles générales d'utilisation du sol. - Règles générales de l'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: Mme Claire BALARESQUE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : NESA

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-07-11;20ma02802 ?
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