Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts ;
- le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Contec relève appel du jugement du 10 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'elle soit déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2014 ainsi que de la majoration pour manquement délibéré et de l'amende prévues aux articles 1729 et 1736 du code général des impôts mises à sa charge au titre de la même période. Elle demande également à la Cour de condamner l'Etat à payer à M. C... A... une indemnité d'un montant de 10 000 euros en réparation de ses préjudices financiers et moraux.
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales : " Pour rechercher les manquements aux règles de facturation auxquelles sont soumis les assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée en application du code général des impôts (...), les agents des impôts ayant au moins le grade de contrôleur peuvent se faire présenter les factures, la comptabilité matière ainsi que les livres, les registres et les documents professionnels pouvant se rapporter à des opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation et procéder à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation. (...) / Ils peuvent recueillir sur place ou sur convocation des renseignements et justifications. Ces auditions donnent lieu à l'établissement de comptes rendus d'audition. (...) / L'enquête définie au présent article ne relève pas des procédures de contrôle de l'impôt prévues aux articles L. 10 à L. 47 A (...) ". Aux termes de l'article L. 80 H du même livre : " A l'issue de l'enquête prévue à l'article L. 80 F, les agents de l'administration établissent un procès-verbal consignant les manquements constatés ou l'absence de tels manquements. (...) Les constatations du procès-verbal ne peuvent être opposées à cet assujetti, au regard d'impositions de toute nature, que dans le cadre des procédures de contrôle mentionnées à l'article L. 47 (...) ".
3. Les dispositions combinées des articles L. 80 F et L. 80 H du livre des procédures fiscales, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 17 juillet 1992 dont elles sont issues, permettent à l'administration d'enquêter, dans les conditions qu'elles définissent, sur les manquements aux règles de facturation applicables aux personnes assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée et de rechercher notamment d'éventuelles factures fictives. L'administration n'est pas tenue, dans ce cas, de mettre en œuvre la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 16 B qui nécessitent l'autorisation du président du tribunal de grande instance. Elle peut ensuite, conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article L. 80 H du livre des procédures fiscales, se fonder sur les éléments recueillis dans le cadre de cette enquête pour procéder à une vérification de comptabilité dans les conditions prévues notamment à l'article L. 47 du même livre.
4. Il résulte de ce qui vient d'être dit que, contrairement à ce que soutient la SARL Contec, les dispositions des articles L. 80 F et L. 80 H du livre des procédures fiscales ne font pas obstacle à ce que l'administration se fonde sur les éléments recueillis verbalement dans le cadre de son droit d'enquête pour procéder à une vérification de comptabilité, dès lors qu'en l'espèce ces éléments ont été consignés dans le procès-verbal dressé par l'administration et que ce compte-rendu a été contresigné sans observations par la personne mandatée par le gérant de cette société.
En ce qui concerne le bien-fondé des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés :
5. La société appelante soutient que les facturations remises en cause par l'administration fiscale au titre de l'impôt sur les sociétés correspondent à des prestations réelles, justifiées et réalisées à son profit.
6. En premier lieu, la SARL Contec n'apporte en appel aucun élément nouveau ou déterminant au soutien de son allégation selon laquelle la facture émise le 26 mai 2013 par l'entreprise Trockenbau Berthold pour un montant de 12 181,23 euros correspondrait à une prestation réelle, justifiée et réalisée à son profit. Il y a, dès lors, lieu d'écarter celle-ci par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 9 et 10 du jugement attaqué.
7. En deuxième lieu, la société requérante ne fournit pas plus d'élément en appel qu'en première instance pour justifier la réalité des prestations ayant fait l'objet de factures mentionnant M. C... A... comme destinataire et précisant que celui-ci était localisé en Allemagne. Dès lors, le tribunal a pu ainsi jugé à bon droit au point 9 du jugement attaqué que c'est à bon droit que l'administration a refusé la déduction de ces sommes en tant que charges exposées par la société.
8. En troisième lieu, il appartient au contribuable, pour l'application du premier alinéa du 2 de l'article 38 du code général des impôts, de justifier, par la production de tous éléments suffisamment précis, l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise. Or, en l'espèce, si l'appelante soutient que les sommes des crédits du compte courant d'associés de 92 023 euros au titre de l'exercice 2012 et de 89 636 euros au titre de l'exercice 2013 correspondent à des règlements de fournisseurs effectués par M. C... A... en précisant avoir versé les relevés du compte bancaire personnel ouvert par ce dernier à la BNP, aucun justificatif de nature à rattacher ces dépenses à l'activité de la société Contec n'est cependant produit. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a réintégré, dans le bénéfice de la société, ces sommes comme des passifs non justifiés.
En ce qui concerne le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
9. Ainsi que le fait valoir le ministre, si la société requérante demande à la Cour de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, elle n'articule aucun moyen particulier à l'appui de ses conclusions qui ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.
En ce qui concerne les pénalités :
S'agissant de l'amende prévue par l'article 1736 du code général des impôts :
10. Aux termes du I de l'article 1736 du code général des impôts : " 1. Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % des sommes non déclarées le fait de ne pas se conformer aux obligations prévues à l'article 240 (...). L'amende n'est pas applicable, en cas de première infraction commise au cours de l'année civile en cours et des trois années précédentes, lorsque les intéressés ont réparé leur omission, soit spontanément, soit à la première demande de l'administration, avant la fin de l'année au cours de laquelle la déclaration devait être souscrite. / La personne tenue d'effectuer une déclaration en application de l'article 240 peut régulariser les déclarations des trois années précédentes sans encourir l'application de l'amende prévue au premier alinéa du présent 1 lorsque les conditions suivantes sont réunies : elle présente une demande de régularisation pour la première fois et est en mesure de justifier, notamment par une attestation des bénéficiaires, que les rémunérations non déclarées ont été comprises dans les propres déclarations de ces derniers déposées dans les délais légaux, à condition que le service puisse être en mesure de vérifier l'exactitude des justifications produites. Cette demande de régularisation peut avoir lieu au cours du contrôle fiscal de la personne soumise à l'obligation déclarative. (...) ". Aux termes de l'article 240 du même code : " 1. Les personnes physiques qui, à l'occasion de l'exercice de leur profession versent à des tiers des commissions, courtages, ristournes commerciales ou autres, vacations, honoraires occasionnels ou non, gratifications et autres rémunérations, doivent déclarer ces sommes. (...) / 2. Les dispositions des 1 et 1 bis sont applicables à toutes les personnes morales ou organismes, quel que soit leur objet ou leur activité, y compris les administrations de l'Etat, des départements et des communes et tous les organismes placés sous le contrôle de l'autorité administrative. (...) ".
11. Il résulte de l'instruction que la SARL Contec a versé des honoraires à des tiers au cours des exercices 2012, 2013 et 2014 en déclarant ces sommes, s'agissant des années 2012 et 2013, par une déclaration datée du 11 décembre 2015, soit postérieurement à la fin des années au cours desquelles les déclarations devaient être souscrites et, s'agissant de l'année 2014, par une déclaration datée du 15 décembre 2015 dont l'administration n'a cependant eu connaissance qu'à l'occasion de la réclamation datée du 22 juin 2018, soit postérieurement à la fin de l'année au cours de laquelle elle devait être souscrite. Dans ces conditions, la requérante ne justifiant pas avoir déposé ses déclarations avant la fin de chacune des trois années au cours desquelles elles devaient être souscrites, elle n'est pas fondée à solliciter la décharge de l'amende de 50 % sur les sommes versées au titre des années 2012, 2013 et 2014 qui lui a été infligée sur le fondement du I de l'article 1736 du code général des impôts.
S'agissant de la majoration pour manquement délibéré :
12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " et selon l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " (...) la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ".
13. Ainsi que l'a exactement jugé le tribunal, la SARL Contec a, de manière répétée, facturé des prestations non justifiées ou à destination de son gérant et associé unique, M. C... A..., et, comme il a été dit précédemment, n'a pas justifié une partie de son passif sur plusieurs exercices. Dans ces conditions, eu égard à l'importance des montants, l'administration établit la volonté de cette société d'éluder l'impôt. Par suite, elle n'est pas fondée à solliciter la décharge de cette majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts mise à sa charge au titre des années 2012 à 2014.
14. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Contec n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2014 ainsi que de la majoration pour manquement délibéré et de l'amende prévues aux articles 1729 et 1736 du code général des impôts mises à sa charge au titre de la même période.
Sur les conclusions indemnitaires :
15. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. (...) ".
16. Il résulte de l'instruction que la présentation devant la Cour par la SARL Contec de conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement à M. A..., non partie à la présente instance, de dommages et intérêts n'a pas été précédée d'une demande indemnitaire adressée à l'administration fiscale et ayant un tel objet. En conséquence, ainsi que le soutient le ministre, ces conclusions sont doublement irrecevables. Par suite, elles doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en tout état de cause, obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée à ce titre par la SARL Contec au profit de M. A..., partie non présente à l'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Contec est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Contec et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient :
- Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Point, premier conseiller,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022.
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N° 21MA02536
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