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02/06/2022 | FRANCE | N°21MA03500

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 02 juin 2022, 21MA03500


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la délibération du 25 octobre 2019 par laquelle le conseil de la métropole Nice Côte d'Azur a approuvé le plan local d'urbanisme métropolitain, en tant qu'elle classe en zone agricole la parcelle cadastrée section AC n° 66 sise à Aspremont, ainsi que la décision portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 2002833 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour

:

Par une requête enregistrée le 12 août 2021, M. B..., représenté par Me Furio-Frisch...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la délibération du 25 octobre 2019 par laquelle le conseil de la métropole Nice Côte d'Azur a approuvé le plan local d'urbanisme métropolitain, en tant qu'elle classe en zone agricole la parcelle cadastrée section AC n° 66 sise à Aspremont, ainsi que la décision portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 2002833 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 août 2021, M. B..., représenté par Me Furio-Frisch, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cette délibération, en tant qu'elle classe en zone agricole la parcelle cadastrée section AC n° 66 sise à Aspremont, ainsi que la décision portant rejet de son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la métropole Nice Côte d'Azur la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le classement de sa parcelle en zone agricole le prive des attributs de son droit de propriété sans qu'une telle privation ne soit légitimée par une utilité publique et méconnaît ainsi l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et l'article 1er du 1er protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le classement de sa parcelle en zone agricole est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- ce classement n'est pas cohérent avec les orientations du plan local d'urbanisme de la métropole et notamment du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) ;

- ce classement ne se justifie pas au regard de l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP).

Par un mémoire en défense enregistré le 25 novembre 2021, la métropole Nice Côte d'Azur, représentée par la SELARL Itinéraires avocats Cadoz-Lacroix-Rey-Verne, agissant par Me Lacroix, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable en l'absence de moyens d'appel ;

-la demande de M. B... devant le tribunal administratif était tardive ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une intervention, enregistrée le 14 janvier 2022, la commune d'Aspremont, représentée par Me Parriaux, demande que la Cour rejette la requête par les mêmes motifs que ceux exposés par la métropole Nice Côte d'Azur et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- le code civil ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique,

- et les observations de Me Furio-Frisch, représentant M. B..., et de Me Ollier, de la SELARL Itinéraires avocats Cadoz-Lacroix-Rey-Verne, représentant la métropole Nice Côte d'Azur.

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 25 octobre 2019, le conseil de la métropole Nice Côte d'Azur a approuvé le plan local d'urbanisme métropolitain. M. B... fait appel du jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération, en tant qu'elle classe en zone agricole la parcelle cadastrée section AC n° 66 sise à Aspremont, ainsi que la décision portant rejet de son recours gracieux.

Sur l'intervention de la commune d'Aspremont :

2. La commune d'Aspremont a intérêt au maintien du jugement attaqué. Dès lors, son intervention est recevable.

Sur l'appel de M. B... :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Aux termes de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire (...) ". Aux termes de l'article R. 151-22 de ce code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ".

4. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

5. M. B... conteste le classement de sa parcelle cadastrée section AC n° 66, située sur le territoire de la commune d'Aspremont. Cette parcelle a été classée par le PLUm en zone agricole, au sein de la sous-zone Ac qui, constituant la zone A la plus commune, correspond aux zones agricoles dans lesquelles toutes les possibilités de constructibilité autorisées par le code de l'urbanisme sont mises en œuvre.

6. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section AC n° 66, qui présente une importante superficie de 26 688 m², est située sur un coteau exposé sud dominant, à la sortie du village d'Aspremont, la route menant à Tourrette-Levens. Si elle est enserrée à l'intérieur d'un secteur urbanisé classé en zone pavillonnaire UFb3, il résulte notamment de la vue aérienne produite en défense qu'elle est plantée d'oliviers et aménagée en restanques anciennement destinées à une activité agricole, comme le confirme l'extrait du rapport de présentation de l'ancien PLU de la commune produit en première instance. Le PADD fixe un objectif de préservation des terres agricoles et de développement de secteurs agricoles en milieu péri urbain pour assurer un développement équilibré du territoire. Il résulte des mentions du rapport de présentation que les auteurs du PLUm ont entendu réduire l'extension des zones pavillonnaires par rapport aux plans locaux d'urbanisme communaux préexistants. Eu égard aux caractéristiques propres de ce terrain et au parti d'urbanisme retenu, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le classement en zone agricole de la parcelle cadastrée section AC n° 66, en dépit de l'absence actuelle d'exploitation, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ou d'une erreur de droit. Il ne peut utilement se prévaloir des recommandations de la commission d'enquête relatives au comblement des " dents creuses " en milieu urbain.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 142-4 du code de l'urbanisme : " Dans les communes où un schéma de cohérence territoriale n'est pas applicable : / 1° Les zones à urbaniser délimitées après le 1er juillet 2002 ainsi que les zones naturelles, agricoles ou forestières d'un plan local d'urbanisme ou d'un document en tenant lieu ne peuvent être ouvertes à l'urbanisation à l'occasion de l'élaboration ou d'une procédure d'évolution d'un document d'urbanisme ; (...) ". Aux termes de l'article L. 142-5 du même code : " Il peut être dérogé à l'article L. 142-4 avec l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat après avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime et, le cas échéant, de l'établissement public prévu à l'article L. 143-16. La dérogation ne peut être accordée que si l'urbanisation envisagée ne nuit pas à la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers ou à la préservation et à la remise en bon état des continuités écologiques, ne conduit pas à une consommation excessive de l'espace, ne génère pas d'impact excessif sur les flux de déplacements et ne nuit pas à une répartition équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services. ".

8. Dès lors que la parcelle en litige était classée en zone agricole par le plan local d'urbanisme communal et que, en application des articles L. 142-4 et L. 142-5 du code de l'urbanisme, le territoire métropolitain n'étant pas couvert par un schéma de cohérence territoriale (SCOT), son ouverture à l'urbanisation nécessitait l'accord préalable de l'autorité administrative de l'Etat. D'une part, il ressort des mentions du rapport de présentation que l'accord donné par le préfet des Alpes-Maritimes sur ce fondement à hauteur de 0,51 ha concernait des terrains construits et non pas la parcelle litigieuse. D'autre part, il résulte du motif énoncé au point 5 que le maintien de son classement en zone agricole par le PLUm n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation. Ainsi, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il appartenait à la métropole Nice Côte d'Azur de faire application de ces dispositions.

9. En troisième lieu, M. B... se prévaut de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que des articles 544 et 552 du code civil pour soutenir que le classement en zones naturelle et agricole des parcelles litigieuses porte une atteinte illégale à son droit de propriété dès lors que ce classement n'est pas justifié par l'utilité publique. Sur ce point, les lois et règlements applicables en matière d'urbanisme permettent de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes et impliquent nécessairement des atteintes aux droits des propriétaires. Lorsque cette délimitation ne repose pas, comme en l'espèce, sur une appréciation manifestement erronée et respecte les dispositions applicables, elle ne saurait porter aucune atteinte illégale au droit de propriété.

10. En quatrième lieu, M. B... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de ce que le classement de sa parcelle n'est pas cohérent avec les orientations du plan local d'urbanisme de la métropole et notamment du projet d'aménagement et de développement durables (PADD), ne se justifie pas au regard de l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) " mobilité ", est constitutif d'une inégalité de traitement et que sa parcelle aurait dû être classée en zone U, en reproduisant exactement le même argumentaire qu'en première instance. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Nice.

11. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la métropole Nice Côte d'Azur et sur la recevabilité de la demande de première instance, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la métropole Nice Côte d'Azur, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la métropole Nice Côte d'Azur et non compris dans les dépens. En revanche, les conclusions présentées sur ce fondement par la commune d'Aspremont, qui n'a pas la qualité de partie, ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : L'intervention de la commune d'Aspremont est admise.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 3 : M. B... versera à la métropole Nice Côte d'Azur une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune d'Aspremont au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la métropole Nice Côte d'Azur et à la commune d'Aspremont.

.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2022, où siégeaient :

- M. Chazan, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- Mme Baizet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2022.

Le rapporteur,

Signé

P. D'IZARN DE VILLEFORTLe président,

Signé

G. CHAZANLa greffière,

Signé

P. RANVIER

La République mande et ordonne au préfet des Alpes-Maritimes en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N° 21MA03500 2

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03500
Date de la décision : 02/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : SELARL ITINERAIRES AVOCATS CADOZ - LACROIX - REY - VERNE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-06-02;21ma03500 ?
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