Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal administratif de Marseille de suspendre sur le fondement de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 3 septembre 2021 par lequel le maire de la commune de Saint-Martin-de-Crau a délivré un permis de construire un logement de 190 m² ainsi qu'un local à usage de bureau et d'archives à M. A... B....
Par une ordonnance n° 2200668 du 14 février 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu l'exécution de l'arrêté du maire de Saint-Martin-de-Crau du 3 septembre 2021.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er mars 2022 la commune de Saint-Martin-de-Crau, représentée par MCL avocats, agissant par Me Ladouari, demande au juge des référés :
1°) d'annuler cette ordonnance du 14 février 2022 ;
2°) de rejeter la requête du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance attaquée est entachée d'erreur de droit, dans la mesure où elle a omis de tenir compte du fait que le projet ne porte pas uniquement sur un local à usage d'habitation, mais aussi sur un local d'exploitation, sur un espace bureau et sur un espace affecté aux archives ;
- la délivrance d'un permis en zone agricole n'est pas subordonnée à l'impossibilité de se loger " au plus près " ;
- l'ordonnance attaquée ne tient pas compte de la délivrance, le même jour, d'un permis de construire une serre en vue d'agrandir l'exploitation ;
- l'ordonnance attaquée est ainsi entachée d'une erreur manifeste de fait ;
- la présence rapprochée et permanente de l'exploitant est nécessaire à l'exploitation agricole ;
Par une ordonnance du 8 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chazan, juge des référés,
- et les observations de Me Daimallah de MCL avocats, représentant la commune de Saint-Martin-de-Crau et de Mme C..., représentant le préfet des Bouches-du-Rhône.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B... a déposé une demande de permis de construire portant sur une maison à usage d'habitation et de local à usage de bureau et d'archivage sur un terrain sis à Saint-Martin-de-Crau qu'il exploite déjà dans le cadre d'une activité agricole. Le maire de Saint-Martin-de-Crau lui délivré le permis demandé le 3 septembre 2021. Toutefois, après avoir sollicité en vain le retrait de ce permis de construire, le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré cette décision au tribunal administratif de Marseille et a demandé la suspension de son exécution sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative. Le juge des référés de ce tribunal a fait droit à cette demande par une ordonnance du 14 février 2022, dont la commune de Saint-Martin-de-Crau relève appel.
2. Aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3ème alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ci-après reproduit : " Article L. 2131-6, alinéa 3. -Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. (...). ".".
3. Pour suspendre l'exécution de l'arrêté attaqué, le premier juge a estimé que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles A1 et A2 du code de l'urbanisme étaient propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.
4. Aux termes de l'article A1 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Martin-de-Crau : " (...) toutes les constructions dont la destination n'est pas mentionnée à l'article A2 sont interdites. ". Aux termes de l'article A2 du même règlement : " Dans la zone A, hormis le secteur Ab, sont autorisés. Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole : (...) b) les nouvelles constructions à usage d'habitation ainsi que leurs annexes, sous réserve de démontrer la nécessité de la présence rapprochée et permanente. Le logement (dont annexes), ne devra pas dépasser 200 m² de surface de plancher et devra être implanté de manière à limiter le mitage et à former un ensemble compact avec les autres bâtiments de l'exploitation agricole. (...) ". Le lien de nécessité mentionné à l'article A2 du règlement du PLU, qui doit faire l'objet d'un examen au cas par cas, s'apprécie entre, d'une part, la nature et le fonctionnement des activités de l'exploitation agricole et, d'autre part, la destination de la construction ou de l'installation projetée.
5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le permis litigieux porte sur un bâtiment unique dont 191 m² sont à usage d'habitation et 27 m² à usage de bureau et d'archives. Cette construction est donc à usage principal d'habitation.
6. D'autre part, le pétitionnaire pratique le maraichage sous serre selon les règles de l'agriculture biologique, sur une surface de l'ordre d'un hectare qui a vocation à doubler à la suite de la délivrance d'un permis de construire pour la construction d'une nouvelle serre, outre une activité de culture de plein champ sur environ 3,5 hectares. L'exploitant réside à environ dix kilomètres. S'il ressort des pièces du dossier que le type d'agriculture pratiquée nécessite une gestion attentive des aléas météorologiques, ainsi que de l'hydrométrie et de la température des serres, que certaines tâches doivent être effectuées de nuit et enfin que la culture maraichère biologique nécessite des " interventions complexes ", il n'apparaît pas, en revanche, que certaines de ces interventions ne pourraient pas être programmées, que les interventions non programmées doivent nécessairement intervenir sans aucun délai, ni enfin que la fréquence de ces dernières rend indispensable la présence permanente de l'exploitant sur place. Il n'est ni établi ni allégué que le risque de vols ne pourrait être prévenu que par la seule présence de l'exploitant sur site. Enfin, l'amplitude des journées de travail de l'exploitant n'est pas, à elle seule, de nature à justifier une présence permanente. Dans ces conditions, la commune de Saint-Martin-de-Crau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu l'exécution du permis litigieux au motif que la méconnaissance des articles A1 et A2 du PLU paraissaient sérieux en l'état de l'instruction.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par la commune de Saint-Martin-de-Crau non compris dans les dépens.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de la commune de Saint-Martin-de-Crau est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Saint-Martin-de-Crau et au préfet de la région Provence, Alpes, Côte d'Azur et des Bouches-du-Rhône
Fait à Marseille, le 12 mai 2022.
N° 22MA00748 2
hw