Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a retiré sa carte de résident valable jusqu'au 21 juin 2030 et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Par un jugement n° 2103758 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 10 novembre 2021 et 22 février 2022, Mme B... D..., représentée par Me Dumont, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2021;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a retiré sa carte de résident valable jusqu'au 21 juin 2030 et lui fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de renouveler sa carte de résident ou, à défaut, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté méconnaît l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle a fait l'objet de violences familiales et conjugales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2022, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la requête n'est pas fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Balaresque a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 26 mars 2021, le préfet de l'Hérault a retiré la carte de résident de Mme D..., valable jusqu'au 21 juin 2030 et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme D... relève appel du jugement du 12 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " En cas de rupture de la vie commune ne résultant pas du décès de l'un des conjoints, le titre de séjour qui a été remis au conjoint d'un étranger peut, pendant les trois années suivant l'autorisation de séjourner en France au titre du regroupement familial, faire l'objet d'un retrait ou d'un refus de renouvellement. (...). En outre, lorsque l'étranger a subi des violences conjugales de la part de son conjoint et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial et en accorde le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ".
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme D..., ressortissante marocaine, est entrée en France le 4 mars 2020 dans le cadre d'une procédure de regroupement familial demandée par son époux, M. A... C..., ressortissant marocain, qu'elle a épousé le 25 novembre 2018 à Meknès (Maroc). Mme D... a obtenu le 10 décembre 2020 une carte de résident valable du 22 juin 2020 au 21 juin 2030. Par courrier du 17 février 2021, l'époux de Mme D... a informé le préfet de l'Hérault que son épouse avait quitté le domicile conjugal depuis décembre 2020 et qu'il avait introduit une demande de divorce en janvier 2021. Si Mme D... soutient avoir subi des violences conjugales antérieurement à la rupture de la communauté de vie d'avec son époux, elle ne l'établit pas par les pièces qu'elle produit, en particulier le procès-verbal de son dépôt de plainte du 2 mars 2021, dans lequel si elle fait état de difficultés de cohabitation avec sa belle-mère ainsi que du vol de son passeport, de sa carte vitale, de sa carte de résident et de son permis de conduire par son époux lors de son retour au Maroc le 13 décembre 2020, elle précise expressément que ce dernier ne l'a " jamais insultée ni violentée ", ni " forc[é]e à rien ". Les attestations émanant d'associations qui la suivent, très peu détaillées et postérieures à la décision attaquée, le certificat d'un médecin généraliste également postérieur qui se borne à mentionner l'état d'anxiété de l'intéressée ainsi que les attestations émanant de ses proches qui reprennent les déclarations contenues dans le procès-verbal du 2 mars 2021, ne sont pas non plus de nature à établir la réalité des violences alléguées. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
5. Ainsi qu'il a été dit au point 3, Mme D..., entrée en France le 4 mars 2020, est séparée de son époux depuis le 14 décembre 2020 et ce dernier a entamé une procédure de divorce dès le mois de janvier 2021. Si Mme D... fait valoir qu'elle est bien intégrée, la formation linguistique et les contrats de travail dont elle se prévaut sont en tout état de cause postérieurs à la décision attaquée. Enfin, si l'intéressée se prévaut de la présence de plusieurs de ses cousins sur le territoire français, elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Maroc, où résident notamment ses parents et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 21 ans. Dans ces conditions, eu égard en particulier au caractère très récent de son entrée sur le territoire, Mme D... ne peut être regardée comme ayant établi en France le centre de sa vie privée et familiale. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle dont serait entachée la décision attaquée doit également être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mars 2021.
7. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que ses conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2022, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président-assesseur,
- Mme Balaresque, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2022.
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No 21MA04351