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07/04/2022 | FRANCE | N°21MA03173

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 07 avril 2022, 21MA03173


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... veuve B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2020 du préfet de Vaucluse lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2100168 du 13 avril 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juillet 2021, Mme A... veuve B..., représentée par Me Breuillot, demande à la Cour :
>1°) d'annuler le jugement du 13 avril 2021 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... veuve B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2020 du préfet de Vaucluse lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2100168 du 13 avril 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juillet 2021, Mme A... veuve B..., représentée par Me Breuillot, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 13 avril 2021 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2020 du préfet de Vaucluse lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse, à titre principal et dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, de réexaminer sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation par celui-ci à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée.

Mme A... soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de séjour :

- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle n'a pu être entendue au cours de la procédure en méconnaissance des stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure, la commission du titre de séjour n'ayant pas été saisie en méconnaissance des articles L. 312-2 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le tribunal a entaché sur ce point son jugement d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision attaquée méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le tribunal a entaché sur ce point son jugement d'une erreur manifeste d'appréciation, d'appréciation et d'une erreur de droit ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'elle remplit les conditions permettant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le tribunal a entaché sur ce point son jugement d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision attaquée méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le tribunal a entaché sur ce point son jugement d'une erreur d'appréciation ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision attaquée méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de Vaucluse qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une décision du 25 juin 2021, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Marseille lui a accordé l'aide juridictionnelle totale.

La présidente de la Cour a désigné M. d'Izarn de Villefort pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Quenette a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante marocaine née en 1962, entrée en France en 2009 selon ses affirmations, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2020 par lequel préfet de Vaucluse lui a refusé le droit au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...). ".

3. Si la requérante soutient résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, elle ne l'établit pas en tout état de cause s'agissant de la fin de l'année 2010, en se bornant à produire pour cette année un visa Schengen valable du 30 décembre 2009 au 14 avril 2010 avec un passage à la frontière à Melissa le 26 janvier 2010 et en se prévalant d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour déposée en mai 2010 et de l'obtention de l'aide médicale d'Etat valable du 8 octobre 2010 au 17 octobre 2011 alors même qu'elle indique dans ses écritures être venue en Europe pour rejoindre sa fille résidente aux Pays-Bas en 2010. Mme A... n'est donc pas fondée à soutenir que le préfet devait soumettre sa demande d'admission exceptionnelle au séjour à la commission du titre de séjour.

4. Si elle se prévaut d'une longue présence en France, Mme A..., qui est hébergée par des tiers, ne démontre pas une insertion sociale et professionnelle particulière. Par ailleurs, Mme A... qui a déjà fait l'objet de quatre décisions portant refus de séjour et de deux mesures d'éloignement qu'elle n'a pas exécutées, n'établit pas être isolée en cas de retour au Maroc son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-huit ans au moins, la seule production d'une lettre manuscrite qui émanerait de son fils, ainsi que diverses attestations de sa famille non corroborées par aucune pièce probante, ne suffisant pas à démontrer que ses trois enfants auraient quitté le Maroc. Enfin, la seule circonstance de la présence en France de l'ensemble de sa fratrie qui dispose de la nationalité française n'est pas de nature, à elle seule, à établir l'erreur manifeste d'appréciation dont l'intéressée se prévaut. De telles circonstances ainsi décrites ne sont pas de nature à caractériser des circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...). ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

7. Si Mme A... se prévaut de ses efforts d'intégration en France depuis plus de dix ans, de la circonstance que ses frères et sœurs, de nationalité française, résident en France et l'hébergent et qu'elle serait isolée et dans l'indigence en cas de retour dans son pays d'origine, toutefois, elle n'établit nullement être dépourvue d'attache dans son pays d'origine dès lors qu'elle y a vécu jusqu'à l'âge de quarante-huit ans et qu'elle n'établit pas que ses trois enfants auraient quitté le pays et qu'elle y serait réellement isolée. Elle ne démontre pas d'intégration particulière par le seul fait qu'elle fréquente le centre social de Carpentras ou qu'elle aurait suivi des cours de français avec Cap Formation. Les attestations qu'elle produit de différentes personnes sont, à l'égard de son intégration sociale, peu circonstanciées. Par suite, la décision attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises et n'ont donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précité. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précité doit, pour les mêmes motifs, être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) ". Il résulte de ces dispositions, que le préfet est tenu de saisir la commission du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à ces articles auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.

9. Il s'ensuit que Mme A... qui ne remplissait pas les conditions exigées pour la délivrance de plein droit du titre de séjour sollicité, ne peut prétendre que c'est à tort que le préfet de Vaucluse n'a pas saisi la commission du titre de séjour préalablement au refus de séjour qu'il lui a opposé.

10. En quatrième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté, par adoption des motifs du tribunal qui n'appellent pas de précision en appel.

11. Il résulte des éléments qui précèdent que les conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de séjour doivent être rejetées.

12. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de séjour, le moyen soulevé contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit, en l'absence de tout élément particulier invoqué tenant à l'obligation de quitter le territoire français, être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doivent être rejetées.

14. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2020 du préfet du Vaucluse. Il y a lieu par suite de rejeter ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... veuve B..., au ministre de l'intérieur et à Me Breuillot.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2022 où siégeaient :

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Quenette, premier conseiller,

- Mme Baizet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 avril 2022.

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N° 21MA03173

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03173
Date de la décision : 07/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur ?: M. Marc-Antoine QUENETTE
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : CABINET BREUILLOT et VARO

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-04-07;21ma03173 ?
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