Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2017 par lequel le maire d'Antibes a refusé de lui délivrer un permis de construire sur un terrain situé au 426 chemin de la Garoupe à Antibes.
Par un jugement n° 1705036 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrée le 25 août 2020, M. A..., représenté par Me Elbaz, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1705036 du 23 juin 202 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2017 par lequel le maire d'Antibes a refusé de lui délivrer un permis de construire ;
3°) d'enjoindre au maire d'Antibes de réexaminer sa demande de permis de construire dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Antibes une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- le refus de permis de construire méconnait les dispositions de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme, dès lors que le bâtiment est régulièrement implanté depuis les années 1930, ou qu'il peut bénéficier à défaut de la prescription de 10 ans en application des dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme ou d'une présomption de légalité par la délivrance d'un permis de construire valant permis de démolir le 10 juin 2014 ; les motifs tirés de la méconnaissance des dispositions des articles UD 7.1, UD 9, UD 11-2 et UD 13-4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune ne sont par suite pas opposables sans commettre d'erreur de droit ou d'appréciation alors que le projet en cause n'aggrave pas la situation par rapport à l'existant avant démolition ;
- les premiers juges ont dénaturé les pièces et n'ont pas répondu au moyen tiré de la combinaison des dispositions de l'article L. 421-9 et L. 111-15 du code de l'urbanisme ; ils ont commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation ainsi qu'une erreur de qualification des faits ;
- la construction existante a été partiellement démolie pour des raisons de normes de sécurité ;
- le maire a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en ne régularisant pas la situation.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2020, la commune d'Antibes, représentée par la SELAS LLC et associés, agissant par Me Zago, conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce que le requérant lui verse une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Quenette,
- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique,
- et les observations de Me Larbre, de la SELAS LLC et associés, représentant la commune d'Antibes.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... est propriétaire d'un terrain situé au 426 chemin de la Garoupe, à Antibes, sur une parcelle cadastrée section BN n°18, et a déposé le 20 juillet 2017 une demande de permis de construire " en régularisation " en vue du déplacement et de la modification d'une piscine existante, de la reconstruction d'une chambre, d'un plancher, d'une toiture terrasse et d'un abri de jardin. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2017 par lequel le maire d'Antibes a refusé de lui délivrer le permis de construire sollicité.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, si le requérant soutient que le jugement aurait omis de répondre à une branche du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme en ce qu'elles se combinent avec les dispositions de l'article L. 111-15 du même code, un tel moyen ne ressort pas explicitement des écritures de première instance de M. A.... Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait sur ce point irrégulier.
3. En second lieu, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, les requérants ne sauraient utilement se prévaloir, pour demander l'annulation du jugement attaqué, des erreurs de droit, de dénaturation, d'appréciation des faits ou de leur qualification que les premiers juges auraient commises.
Sur le bienfondé du jugement :
4. Aux termes de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un bâtiment régulièrement édifié vient à être détruit ou démoli, sa reconstruction à l'identique est autorisée dans un délai de dix ans nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement. " Aux termes de l'article L. 421-9 du même code : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou la décision d'opposition à déclaration préalable ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. "
5. Aux termes de l'article 4 des dispositions générales du plan local d'urbanisme de la commune d'Antibes : " Lorsqu'une construction existante n'est pas conforme aux règles édictées par le Règlement applicable à la zone, le permis de construire ne peut être accordé que pour des travaux qui ont pour objet d'améliorer la conformité de cette construction avec lesdites règles ou qui sont sans effet à leur égard. ".
6. Dans l'hypothèse où l'autorité administrative envisage de refuser le permis sollicité parce que la construction dans son entier ne peut être autorisée au regard des règles d'urbanisme en vigueur à la date de sa décision, elle a toutefois la faculté, dans l'hypothèse d'une construction ancienne, à l'égard de laquelle aucune action pénale ou civile n'est plus possible, après avoir apprécié les différents intérêts publics et privés en présence au vu de cette demande, d'autoriser, parmi les travaux demandés, ceux qui sont nécessaires à sa préservation et au respect des normes, alors même que son édification ne pourrait plus être régularisée au regard des règles d'urbanisme applicables.
7. Pour contester la légalité de l'arrêté attaqué, M. A... fait valoir que le maire d'Antibes ne pouvait lui refuser la délivrance du permis de construire qu'il sollicitait en lui opposant les dispositions des articles UD 7-1, UD 9, UD 11-2 et UD 13-4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, dès lors qu'il disposait du droit à reconstruction à l'identique des bâtiments démolis et que les travaux répondaient à des nécessités techniques.
En ce qui concerne la reconstruction du plancher du bâtiment principal
8. Il ressort d'un acte notarié faisant remonter la construction du bâtiment principal à 1928, que ce dernier, situé à l'est de la parcelle, a été régulièrement implanté. Il n'est pas contesté que ce bâtiment comportait déjà un étage avec un plancher dès l'origine jusqu'à la date d'obtention du permis initial. Par suite, la demande de permis modificatif relatif aux travaux consistant à reconstruire à l'identique ce plancher doit être regardée comme n'aggravant pas les non conformités de la construction existante au regard des règles du plan local d'urbanisme. Dès lors, et en application de l'article 4 des dispositions générales du plan local d'urbanisme de la commune d'Antibes, M. A... est fondé à considérer que le maire d'Antibes ne pouvait opposer à ces travaux la méconnaissance des dispositions des articles UD 7-1, UD 9, UD 11-2 et UD 13-4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune.
En ce qui concerne la reconstruction du toit terrasse du premier bâtiment annexe
9. S'il ressort de la photographie IGN datant de 1959 que le bâtiment dont le toit terrasse a été démoli n'existait pas avant l'instauration du permis de construire par l'ordonnance du 17 octobre 1945 et que M. A... n'apporte aucun élément pour attester de sa régulière implantation, il établit en revanche qu'un tel bâtiment était construit en 1966 en sorte que plus aucune action civile ou pénale n'était possible à son encontre en 2014. Il ressort de l'attestation du bureau d'étude Hugotech du 16 décembre 2016 que la dépose puis la repose du toit terrasse était rendue nécessaire pour un motif de sécurité et la préservation du bâtiment existant. Au regard des intérêts publics et privés en présence, et alors même que son édification ne pourrait plus être régularisée au regard des règles d'urbanisme applicables et notamment des articles UD 7-1, UD 9, UD 11-2 et UD 13-4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, de tels travaux sur une partie limitée d'un bâtiment ancien peuvent être autorisés, dans le cas d'espèce, en application des principes rappelés au point 6.
En ce qui concerne la reconstruction de l'annexe ouest et de l'abri de jardin
10. Il ressort en premier lieu de la photographie IGN datant de 1959 que l'annexe ouest comprenant une chambre et une salle de bain ainsi que le garage qui ont été intégralement démolis en 2014 avant d'être reconstruits n'existaient pas avant l'instauration du permis de construire par l'ordonnance du 17 octobre 1945. Par ailleurs, les éléments versés aux débats, en particulier les photographies IGN de 1966, l'acte de vente de 2013 faisant état de l'existence du garage et du bâtiment annexe à la construction principale ainsi que des attestations de l'ancien propriétaire et des voisins indiquant que ces constructions existent au moins depuis 1976, ne sont pas de nature à établir que l'édification des constructions en cause aurait fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme et, par suite, à démontrer le caractère régulier de ces constructions au regard du droit de l'urbanisme. Si M. A... fait en deuxième lieu valoir que l'irrégularité affectant les constructions démolies était en tout état de cause couverte par la prescription de dix ans instituée à l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme, les dispositions précitées des articles L. 421-9 et L. 111-15 du code de l'urbanisme n'ont toutefois ni le même objet, ni le même champ d'application et ne peuvent se combiner. L'article L. 421-9 concerne l'exécution de travaux sur une construction existante irrégulière alors que l'article L. 111-15 ne porte que sur la reconstruction à l'identique, après destruction ou démolition, d'une construction régulièrement édifiée. Il en résulte que la règle posée par l'article L. 421-9 qui fait obstacle à ce qu'un refus de permis de construire soit fondé sur l'irrégularité de la construction initiale ne trouve pas à s'appliquer pour une demande de reconstruction à l'identique d'une construction détruite ou démolie. En dernier lieu, les autorisations d'utilisation du sol ayant pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme en vigueur, la circonstance que le requérant ait bénéficié en 2013 et 2014 d'autorisations d'urbanisme qui portaient sur la modification des bâtiments en cause ne suffit pas à leur conférer le caractère de constructions régulièrement édifiées. Ainsi le requérant ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme pour autoriser leur reconstruction.
11. Le requérant soutient que les travaux de reconstruction de ces bâtiments étaient nécessaires pour des raisons techniques afin de respecter les normes en vigueur ainsi que pour des questions de sécurité dans l'exécution de travaux préalablement autorisés sur d'autres parties du bâtiment. De plus, aucune action civile ou pénale n'était possible à l'encontre des parties de bâtiment irrégulièrement implantées dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que leur implantation avait plus de trente ans. Toutefois, le requérant n'établit pas la nécessité de détruire le garage pour le reconstruire en abri de jardin. En tout état de cause, dès lors que ces bâtiments qui étaient irrégulièrement implantés ont été intégralement démolis ainsi que cela ressort du procès-verbal d'infraction dressé par la commune, les travaux en litige, qui portent ainsi sur une nouvelle construction, ne peuvent être regardés comme nécessaires à la préservation ou la mise aux normes des anciens bâtiments au sens des principes rappelés au point 6. Par suite, le maire d'Antibes pouvait, sans commettre d'erreur de droit ou d'appréciation, opposer à ces nouvelles constructions la méconnaissance des dispositions des articles UD 7-1, UD 9, UD 11-2 et UD 13-4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune dès lors que le principe de non aggravation des non conformités prévues par l'article 4 des dispositions générales du plan local d'urbanisme de la commune d'Antibes s'applique uniquement aux constructions existantes.
12. Il résulte de ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en ce qui concerne la reconstruction à l'identique du plancher du bâtiment principal et du toit terrasse du bâtiment annexe.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
13. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. "
14. Au regard des motifs retenus d'annulation partielle du refus de permis de construire, il convient d'enjoindre au maire d'Antibes de réexaminer la demande du permis sollicité, dans un délai de trois mois à compter de la décision à intervenir, en ce qui concerne la reconstruction à l'identique du plancher du bâtiment principal et du toit terrasse du bâtiment annexe.
Sur les frais liés au litige :
15. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de
M. A... ou de la commune d'Antibes des frais d'instance au titre des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : L'arrêté du 13 septembre 2017 par lequel le maire d'Antibes a refusé de délivrer un permis de construire à M. A... est annulé en ce qu'il refuse la reconstruction du plancher du bâtiment principal et du toit terrasse du bâtiment annexe.
Article 2 : Le jugement n° 1705036 du 23 juin 2020 du tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 1er.
Article 3 : Il est enjoint au maire d'Antibes de réexaminer la demande de permis de construire en ce qui concerne la reconstruction du plancher du bâtiment principal et du toit terrasse du bâtiment annexe dans un délai de trois mois à compter de la décision à intervenir.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... et les conclusions de la commune d'Antibes tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune d'Antibes.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2022, où siégeaient :
- M. Chazan, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Quenette, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mars 2022.
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N° 20MA03120