Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... et plusieurs autres personnes physiques, ainsi que deux sociétés civiles immobilières, ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 21 juin 2016 par lequel le maire de Perpignan a délivré un permis de construire à l'association culturelle Turc Islam en vue de l'édification d'un centre culturel et cultuel incluant trois logements de fonction, ainsi que la décision du 13 octobre 2016 rejetant le recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté.
Par un jugement n° 1606392 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier, après avoir donné acte du désistement de plusieurs personnes physiques requérantes, a fait partiellement droit à cette demande en annulant l'arrêté du 21 juin 2016, ainsi que la décision de rejet du recours gracieux, en tant seulement qu'ils autorisent la création de plus d'un logement.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 28 novembre 2018, les 12 et 15 novembre 2019, puis le 16 décembre 2019, M. B..., représenté par la SCPA Lincetto-Cohen, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'ordonner à l'association culturelle Turc Islam de produire, d'une part, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, la déclaration de cette association en préfecture, ainsi que la copie de la publication au Journal officiel de cette déclaration et, d'autre part, le procès-verbal de l'élection de son président ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;
3°) d'annuler, d'une part, l'arrêté du maire de Perpignan du 21 juin 2016, d'autre part, et par voie de conséquence, l'arrêté du 22 décembre 2017 portant permis de construire modificatif, ensuite, " le permis modificatif obtenu " et, enfin, les décisions de rejet des recours gracieux ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Perpignan et de l'association culturelle Turc Islam la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;
- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal ne s'est pas assuré que le permis modificatif du 22 décembre 2017 avait été notifié à l'ensemble des requérants avant d'écarter les moyens d'illégalité externe dirigés contre le permis de construire initial ;
- le tribunal a dénaturé les faits en répondant au moyen tiré de la méconnaissance des règles d'emprise au sol fixées par le plan de prévention des risques d'inondation ;
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et est entaché d'une omission à statuer ;
- le tribunal n'a pas valablement examiné le moyen tiré de ce que le permis de construire en litige a été obtenu par fraude ;
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le tribunal ne pouvait faire application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme et aurait dû annuler le permis litigieux en totalité ;
- le permis initial et le permis modificatif de régularisation ont été déposés par une personne n'ayant pas qualité pour représenter l'association pétitionnaire ;
- les dispositions du c) et du d) de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;
- les dispositions des articles L. 425-14 et R. 424-6 du même code n'ont pas été respectées ;
- le permis litigieux est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et méconnaît le règlement de la zone II du plan de prévention des risques d'inondation de Perpignan applicable à la " poche 5 " ;
- les permis initial et modificatif ne sont pas conformes à l'objet social de l'association pétitionnaire ;
- le permis litigieux a été obtenu par fraude.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 février 2019, la commune de Perpignan, représentée par la SCP CGCB et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le requérant ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;
- il ne justifie pas avoir accompli l'ensemble des formalités de notification prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- la requête est tardive ;
- le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 425-14 et R. 424-6 du code de l'urbanisme est inopérant ;
- les autres moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense enregistrés les 22 février, 31 octobre et 5 décembre 2019, l'association culturelle Turc Islam, représentée par la SELAS Raynaud Falandry Codognes Bottin, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le requérant ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;
- la requête est tardive ;
- la requête ne lui a pas été notifiée, en méconnaissance de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.
Par une lettre du 12 octobre 2020, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions, nouvelles en appel, dirigées contre l'arrêté du 22 décembre 2017 portant permis de construire modificatif ainsi qu'à l'encontre de la décision de rejet du recours gracieux formé à son encontre.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Par une décision du 24 août 2021, la présidente de la cour a désigné M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mouret,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me Djabali, représentant la commune de Perpignan.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de Perpignan a, par un arrêté du 21 juin 2016, délivré un permis de construire à l'association culturelle Turc Islam en vue de l'édification d'un centre culturel et cultuel, incluant trois logements, sur une parcelle cadastrée section DL n° 144. Par un jugement du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier, faisant partiellement droit à la demande présentée notamment par M. B..., a annulé cet arrêté, ainsi que la décision de rejet du recours gracieux formé à son encontre, en tant seulement qu'ils autorisent la création de plus d'un logement. M. B... relève appel de ce jugement et doit être regardé comme demandant à la cour d'annuler en totalité, d'une part, cet arrêté et cette décision, d'autre part, l'arrêté du 22 décembre 2017 par lequel le maire de Perpignan a délivré un permis de construire modificatif à l'association pétitionnaire et, enfin, l'arrêté du 14 février 2019 portant délivrance d'un nouveau permis modificatif autorisant la création d'un seul logement.
Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 décembre 2017 :
2. Les conclusions tendant à l'annulation du permis modificatif délivré le 22 décembre 2017 à l'association culturelle Turc Islam sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.
Sur la régularité du jugement :
3. En premier lieu, lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée dès lors que le permis modificatif ou de régularisation assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.
4. Contrairement à ce que soutient M. B..., les premiers juges n'étaient pas tenus, avant de faire application du principe énoncé au point précédent, de s'assurer que l'arrêté du 22 décembre 2017 portant permis de construire modificatif avait été notifié à l'ensemble des demandeurs de première instance. Le tribunal n'a ainsi commis aucune irrégularité en s'abstenant de diligenter une mesure d'instruction sur ce point avant d'écarter plusieurs moyens dirigés contre le permis initial au regard des modifications autorisées par cet arrêté du 22 décembre 2017.
5. En deuxième lieu, il ressort du point 26 du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu au moyen tiré de ce que le maire de Perpignan a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Par ailleurs, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a suffisamment explicité les raisons pour lesquelles ce moyen devait être écarté. Il suit de là que le jugement attaqué n'est pas insuffisamment motivé sur ce point.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation ".
7. Lorsque le premier juge prononce l'annulation partielle d'un permis de construire sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme alors que l'illégalité qu'il a relevée viciait le permis de construire dans son entier, il se méprend sur les pouvoirs qu'il tient de cet article et méconnaît son office. Il appartient à la cour administrative d'appel, même d'office, de censurer une telle irrégularité, puis de statuer sur la demande présentée devant les premiers juges par la voie de l'évocation. Un tribunal administratif qui prononce à tort l'annulation partielle d'un permis de construire sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme se méprend sur les pouvoirs qu'il tient de cet article et entache ainsi son jugement d'irrégularité.
8. Si M. B... soutient que le vice retenu au point 31 du jugement attaqué, tiré de la méconnaissance du d) du 2.3 du titre II du règlement du plan de prévention des risques d'inondation de Perpignan, ne pouvait faire l'objet d'une annulation limitée à cette partie du projet en application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, il ressort des pièces du dossier que le vice en cause n'affecte, ainsi que l'ont relevé les premiers juges qui ont suffisamment explicité les raisons pour lesquelles ces dispositions trouvaient à s'appliquer, qu'une partie identifiable du projet et peut être régularisé par la délivrance d'un permis de construire modificatif. Les dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme n'imposaient pas au tribunal, qui s'est borné à exercer son office, d'inviter les parties à présenter leurs observations préalablement à leur mise en œuvre, ni de fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourrait en demander la régularisation. Par suite, le jugement attaqué n'est entaché d'aucune irrégularité sur ce point.
9. En quatrième et dernier lieu, si M. B... reproche au tribunal d'avoir commis une dénaturation des faits et des pièces du dossier aux points 24 à 26 du jugement attaqué et argue du caractère erroné du raisonnement suivi par les premiers juges pour écarter le moyen tiré de ce que le permis litigieux a été obtenu par fraude, de telles critiques se rattachent au bien-fondé du jugement attaqué et non à sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le permis de construire initial :
10. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire (...) sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ". L'article R. 431-5 du même code prévoit que la demande de permis de construire comporte notamment l'attestation du demandeur qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1.
11. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 précité. Les autorisations d'utilisation du sol étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Les tiers ne sauraient donc utilement faire grief à l'administration de ne pas en avoir vérifié l'exactitude. Il en va autrement lorsque l'autorité compétente vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer. Dans ce cas, il lui revient de rejeter la demande de permis pour ce motif.
12. Il ressort des pièces du dossier que l'association culturelle Turc Islam a attesté, dans le formulaire normalisé de demande, avoir qualité pour déposer sa demande de permis de construire. La circonstance que M. A..., signataire de ce formulaire, n'aurait pas justifié, auprès de l'autorité d'urbanisme, être habilité pour représenter l'association est sans incidence sur la régularité de cette demande. Il ressort au demeurant de l'attestation établie le 5 décembre 2019 par le président de l'association culturelle Turc Islam que M. A... a été habilité à déposer cette demande. A cet égard, et au surplus, le requérant n'établit nullement que cette attestation constituerait un faux en se bornant à relever qu'elle n'est pas accompagnée d'une pièce d'identité de son auteur et à émettre des doutes quant à l'authenticité de la signature qui y figure. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Perpignan aurait disposé, à la date de l'arrêté attaqué du 21 juin 2016, d'informations de nature à établir le caractère frauduleux de la demande de permis de construire ou que l'association pétitionnaire n'aurait pas eu qualité pour la déposer.
13. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : (...) / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain (...) ".
14. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
15. Il ressort des pièces du dossier que le plan de situation, le document graphique et les documents photographiques joints à la demande de permis initial, ainsi que les documents graphiques joints à la demande de permis modificatif déposée le 20 septembre 2017, ont mis l'autorité administrative à même d'apprécier l'ensemble des éléments mentionnés par les dispositions citées ci-dessus de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.
16. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-14 du code de l'urbanisme, créé par l'article 1er de l'ordonnance n° 2016-354 du 25 mars 2016 relative à l'articulation des procédures d'autorisation d'urbanisme avec diverses procédures relevant du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque le projet porte sur une installation, un ouvrage, des travaux ou une activité soumis à autorisation ou à déclaration en application de la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code de l'environnement, le permis (...) ne peut pas être mis en œuvre : (...) / b) Avant la décision d'acceptation, pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à déclaration au titre du II du même article ". Selon l'article 3 de cette ordonnance du 25 mars 2016 : " Les dispositions de l'article 1er ne sont pas applicables aux projets pour lesquels les demandes de permis et les déclarations préalables ont été déposées antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la présente ordonnance (...) ". L'article R. 424-6 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque la réalisation des travaux est différée dans l'attente de formalités prévues par une autre législation, la décision en fait expressément la réserve ".
17. La demande de permis de construire initial ayant été déposée antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 25 mars 2016 évoquée au point précédent, les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 425-14 du code de l'urbanisme ne sont pas applicables au projet litigieux. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ce dernier article ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté. Il en va de même de celui tiré de la méconnaissance de l'article R. 424-6 du code de l'urbanisme.
18. En quatrième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire (...) ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique ". Il résulte de ces dispositions que le permis de construire a pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'il autorise avec la législation et la réglementation d'urbanisme.
19. Si M. B... soutient que le permis de construire en litige n'est pas conforme à l'objet social de l'association pétitionnaire, il n'invoque à cet égard la méconnaissance d'aucune disposition dont l'autorité compétente en matière d'urbanisme est en charge d'assurer le respect en application de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
20. En cinquième lieu, en vertu de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, l'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles, en particulier pour les inondations, qui ont notamment pour objet de délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de leur nature et de leur intensité, d'y interdire les constructions ou la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages ou de prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités. Selon l'article L. 562-4 du même code : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan local d'urbanisme (...) ". Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".
21. Les prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, destinées notamment à assurer la sécurité des personnes et des biens exposés aux risques en cause et valant servitude d'utilité publique, s'imposent directement aux autorisations de construire, sans que l'autorité administrative soit tenue de reprendre ces prescriptions dans le cadre de la délivrance du permis de construire. Il incombe à l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme de vérifier que le projet respecte les prescriptions édictées par le plan de prévention et, le cas échéant, de préciser dans l'autorisation les conditions de leur application. Si les particularités de la situation l'exigent et sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, il peut subordonner la délivrance du permis de construire sollicité à des prescriptions spéciales, s'ajoutant aux prescriptions édictées par le plan de prévention dans cette zone, si elles lui apparaissent nécessaires pour assurer la conformité de la construction aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Ce n'est que dans le cas où l'autorité compétente estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet pour lequel l'autorisation de construire est sollicitée, y compris d'éléments déjà connus lors de l'élaboration du plan de prévention des risques naturels, qu'il n'est pas légalement possible d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions permettant d'assurer la conformité de la construction aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, qu'elle peut refuser, pour ce motif, de délivrer le permis.
22. D'une part, il résulte des dispositions liminaires du titre 2 du règlement du plan de prévention des risques d'inondation de Perpignan applicables à la zone II que la poche n° 5 est une zone exposée à un risque fort d'inondation dans laquelle l'emprise au sol des constructions est limitée à 10 %. Le lexique de ce règlement précise que le " coefficient d'emprise au sol est le rapport entre l'emprise au sol des constructions existantes ou à créer sur l'unité foncière considérée et la superficie de cette unité foncière ". Il indique en outre que : " L'emprise au sol correspond à la projection verticale du volume de la construction au sol. Toutefois, est exclue la projection des saillies telles que les balcons, marquises, débords de toiture (...) ".
23. La parcelle d'assiette du projet, qui est incluse dans la poche constructible n° 5 de la zone II du plan de prévention des risques d'inondation de Perpignan, présente une superficie de 11 362 mètres carrés. Il ressort du plan détaillant le calcul de l'emprise au sol, joint à la première demande de permis de construire modificatif de l'association pétitionnaire, que le projet prévoit la création d'une emprise au sol totale de 1 136 mètres carrés et respecte ainsi les exigences des dispositions citées au point précédent. Si M. B... relève que le projet litigieux entraîne une imperméabilisation d'environ 38 % de la parcelle d'assiette, cette circonstance n'est pas de nature à établir que l'emprise au sol du projet excéderait le coefficient d'emprise au sol autorisé. Par ailleurs, les données chiffrées dont se prévaut le requérant sont insuffisamment précises pour remettre en cause les indications fournies par l'association pétitionnaire en ce qui concerne l'emprise au sol du projet. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du règlement du plan de prévention des risques d'inondation de Perpignan mentionnées au point précédent doit être écarté.
24. D'autre part, pour apprécier si les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, il appartient à l'autorité compétente en matière d'urbanisme, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.
25. Le terrain d'assiette du projet s'inscrit, ainsi qu'il a été dit précédemment, dans un secteur constructible exposé à un risque fort d'inondation, identifié notamment par le plan de prévention des risques d'inondation de Perpignan, dans lequel les hauteurs d'eau sont comprises entre 1 mètre et 1,50 mètre. Le projet litigieux prévoit la création d'un espace refuge au premier étage de la construction en cause. En outre, l'arrêté contesté du 21 juin 2016 comporte une prescription prévoyant que : " Les espaces pouvant servir de refuge devront demeurer accessibles en permanence ". Dans ces conditions, en dépit de l'intensité du risque d'inondation clairement identifié dans le secteur en cause, il ne ressort pas des pièces du dossier, alors au demeurant qu'un avis favorable au projet a notamment été émis par la commission de sécurité, que le maire de Perpignan aurait, en délivrant le permis de construire en litige sans l'assortir d'autres prescriptions spéciales, s'ajoutant aux prescriptions édictées par le plan de de prévention des risques d'inondation de Perpignan, commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
26. En sixième et dernier lieu, un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés ou affectés à un usage non conforme aux documents et aux règles générales d'urbanisme n'est pas, par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis, de nature à affecter la légalité de celui-ci. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration.
27. M. B... persiste à soutenir que le permis de construire en litige a été obtenu par fraude. En l'absence d'élément nouveau, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus au point 29 du jugement attaqué.
En ce qui concerne le permis de régularisation :
28. Aux termes de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un permis modificatif, une décision modificative ou une mesure de régularisation intervient au cours d'une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d'aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue et que ce permis modificatif, cette décision modificative ou cette mesure de régularisation ont été communiqués aux parties à cette instance, la légalité de cet acte ne peut être contestée par les parties que dans le cadre de cette même instance ".
29. Il ressort du jugement attaqué que le tribunal a annulé le permis de construire initial en litige, ainsi que la décision rejetant le recours gracieux formé à son encontre, en tant seulement qu'ils autorisent la création de plus d'un logement. En exécution de ce jugement, le maire de Perpignan a, par un arrêté du 14 février 2019, délivré à l'association pétitionnaire un permis modificatif de régularisation prévoyant la création d'un seul logement.
30. Il ressort des pièces du dossier que l'association pétitionnaire a attesté, dans le formulaire normalisé de demande, avoir qualité pour déposer sa demande de permis de construire modificatif de régularisation, conformément aux exigences de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme cité ci-dessus. La circonstance alléguée que l'identité du signataire de cette demande déposée le 10 octobre 2018 ne soit pas précisée dans l'encadré n° 12 de ce formulaire est sans incidence sur la régularité de cette demande. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Perpignan aurait disposé, à la date de l'arrêté attaqué du 14 février 2019, d'informations de nature à établir le caractère frauduleux de cette demande de permis de construire modificatif ou que l'association pétitionnaire n'aurait pas eu qualité pour la déposer.
31. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense ni d'ordonner la production, sous astreinte, des pièces sollicitées par M. B..., ce dernier n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté le surplus de sa demande ni, par suite, à demander l'annulation totale tant du permis de construire délivré le 21 juin 2016 par le maire de Perpignan que de la décision rejetant son recours gracieux formé contre ce permis. Il n'est pas davantage fondé à demander l'annulation du permis modificatif délivré le 22 décembre 2017, ainsi que du permis de régularisation délivré le 14 février 2019 par cette même autorité.
Sur les frais liés au litige :
32. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Perpignan et de l'association culturelle Turc Islam, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la commune de Perpignan ainsi que par l'association culturelle Turc Islam.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Perpignan et par l'association culturelle Turc Islam au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à la commune de Perpignan et à l'association culturelle Turc Islam.
Délibéré après l'audience du 1er mars 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Carassic, première conseillère,
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mars 2022.
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N° 18MA05005