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28/02/2022 | FRANCE | N°20MA03746

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 28 février 2022, 20MA03746


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au président du tribunal administratif de Toulon d'annuler les arrêtés du 26 août 2020 par lesquels le préfet du Var l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office, et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2002311 du 1er septembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.>
Procédure devant la cour :

I.- Par une requête enregistrée le 30 septembre 2020 sous le nu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au président du tribunal administratif de Toulon d'annuler les arrêtés du 26 août 2020 par lesquels le préfet du Var l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office, et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2002311 du 1er septembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I.- Par une requête enregistrée le 30 septembre 2020 sous le numéro 20MA03746, M. B..., représenté par Me Oreggia, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er septembre 2020 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 août 2020 du préfet du Var l'obligeant à quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet n'a pas consulté le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- l'arrêté contesté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Var, qui n'a pas produit d'observations.

II.- Par une requête enregistrée le 30 septembre 2020 sous le numéro 20MA03964, M. B..., représenté par Me Oreggia, demande à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement du 1er septembre 2020 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il reprend les moyens de la requête enregistrée sous le numéro 20MA03746 et soutient en outre que l'exécution du jugement attaqué l'expose à des conséquences difficilement réparables.

La requête a été communiquée au préfet du Var, qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces des dossiers.

La présidente de la cour a désigné M. Marcovici, président assesseur de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Mérenne a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux arrêtés du 26 août 2020, le préfet du Var a obligé M. B... à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office, et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par un jugement du 1er septembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux arrêtés. M. B... fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions contre l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français. Il en demande également le sursis à exécution.

2. Les requêtes de M. B... sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer sur celles-ci par le présent arrêt.

Sur la régularité de l'obligation de quitter le territoire français :

3. Il résulte du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, qu'un étranger résidant habituellement en France ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français " si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

4. Pour l'application de ces dispositions, l'article R. 511-1 du même code prévoit que : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Toutefois, lorsque l'étranger est retenu en application de l'article L. 551-1, le certificat est établi par un médecin intervenant dans le lieu de rétention conformément à l'article R. 553-8. / En cas de rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2, l'avis est émis par un médecin de l'office et transmis sans délai au préfet territorialement compétent. "

5. Lors de son audition par les services de police, M. B... a indiqué à deux reprises qu'il souffrait d'une pathologie cardiaque - une valvulopathie - pour laquelle une opération était envisagée dans les mois suivants. En s'abstenant, au regard de ces éléments, de saisir pour avis un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article R. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Var a statué au terme d'une procédure irrégulière.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 26 août 2020 du préfet du Var l'obligeant à quitter le territoire français.

7. Il n'est dès lors pas nécessaire pour la cour de se prononcer sur l'autre moyen invoqué par l'appelant.

Sur l'injonction :

8. L'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Si la décision portant obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 721-6, L. 721-7, L. 731-1, L. 731-3, L. 741-1 et L. 743-13, et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. "

9. Compte tenu de ces dispositions, l'annulation de l'arrêté du 26 août 2020 obligeant M. B... à quitter le territoire français implique nécessairement, en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative, que le préfet du Var réexamine sa situation, dans un délai qu'il convient de fixer à deux mois, et lui délivre dans l'attente une autorisation provisoire de séjour.

Sur la demande de sursis à exécution :

10. Par le présent arrêt, la cour statue au fond sur la requête de M. B... dirigée contre le jugement du 1er septembre 2020 du tribunal administratif de Toulon et l'arrêté du 26 août 2020 du préfet du Var l'obligeant à quitter le territoire français. Par suite, les conclusions tendant et à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont sans objet.

Sur les frais liés au litige :

11. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à M. B... au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 26 août 2020 du préfet du Var obligeant M. B... à quitter le territoire français est annulé.

Article 2 : L'article 2 du jugement du 1er septembre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Var de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête enregistrée sous le numéro 20MA03964.

Article 5 : L'État versera à M. B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 7 février 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Mérenne et Mme C..., premiers conseillers.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2022.

2

Nos 20MA03746 et 20MA03964


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03746
Date de la décision : 28/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : OREGGIA

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-28;20ma03746 ?
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