Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Jubil Interim Béziers a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) à l'indemniser des préjudices qui ont résulté pour elle de l'absence de publication de trois lettres des 18 avril 2006, 7 juillet 2006 et 13 mars 2008.
Par un jugement n° 1901703 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 septembre 2020, la société Jubil Interim Béziers, représentée par Me Porte, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 juillet 2020 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de condamner l'ACOSS à lui verser la somme de 26 773,35 euros en réparation de ses préjudices résultant de l'absence de publication des lettres des 18 avril 2006, 7 juillet 2006 et 13 mars 2008 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les circulaires comportaient bien une interprétation du droit positif au sens de l'article 7 de la loi du 17 juillet 1978, en particulier de l'article 144 de la loi de finances pour la sécurité sociale pour 2006 et de l'article L. 241-15 du code de la sécurité sociale, et énonçaient même des règles procédurales ;
- le refus litigieux ne lui a pas permis de prendre connaissance des lettres ministérielles et lui a donc fait perdre une chance de bénéficier, avant le terme de la prescription triennale de l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, des exonérations de cotisations patronales auxquelles ces lettres lui ouvraient droit entre les 1er juillet 2003 et 1er janvier 2006 ;
- le préjudice financier résultant de cette faute s'élève à la somme de 26 773,35 euros ;
Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2021, l'ACOSS, représentée par Me Claisse, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la société Jubil Interim Béziers sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens de la requête ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
- l'obligation de publication ne s'impose qu'à l'égard de l'URSSAF ;
- aucune des lettres ministérielles ne se livre à une interprétation du droit positif ;
- les préjudices de la requérante sont en tout état de cause sans lien avec l'absence de publication ;
- ces préjudices revêtent un caractère incertain.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Alfonsi,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Porte, représentant Jubil Interim Béziers et de Me Briere substituant Me Cano, représentant l'ACOSS.
Considérant ce qui suit :
1. Alors que, par une lettre du 10 septembre 2004 et une circulaire du 8 octobre 2004, le ministre de la santé a précisé que seules les heures effectives de travail étaient éligibles à la réduction de cotisation de sécurité sociale prévue à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, l'article L. 241-15 de ce code, entré en vigueur le 1er janvier 2006, dispose que cette réduction s'applique à l'ensemble des heures rémunérées. Par une lettre du 18 avril 2006, le ministre de la santé a demandé au directeur de l'ACOSS de ne pas redresser les employeurs ayant appliqué cette réduction à la totalité des heures rémunérées et de mettre fin aux procédures de redressement en cours. Le directeur de l'ACOSS a transmis cette consigne aux URSSAF par une lettre du 7 juillet 2006 en précisant ses modalités d'application. Enfin, par une lettre du 13 mars 2008, le directeur de la sécurité sociale a réitéré cette consigne au directeur de l'ACOSS. La société Jubil Interim Béziers relève appel du jugement du 15 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à condamner l'ACOSS à l'indemniser des préjudices financiers qu'elle impute à l'absence de publication de ces trois lettres.
2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article 7 de la loi du 17 juillet 1978, alors en vigueur et désormais reprises à l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Font l'objet d'une publication les directives, les instructions, les circulaires, ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives. (...) ".
3. Il résulte des termes même de la lettre du 16 avril 2006 que la décision du ministre de la santé de mettre un terme aux procédures de redressement de cotisation à l'encontre des employeurs ayant appliqué la réduction de cotisations patronales à l'ensemble des heures rémunérées ne procède pas d'une interprétation nouvelle de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale mais d'une volonté de sécuriser les situations existantes à des fins d'équité, compte-tenu des effets de l'entrée en vigueur de l'article L. 241-15 de ce code. Ni la lettre du directeur de l'ACOSS du 7 juillet 2006, qui se borne à transmettre cette information aux URSSAF en précisant la conduite à tenir en fonction des cas de figure susceptibles de se présenter, ni celle du 13 mars 2008 du directeur général de la sécurité sociale ne contiennent davantage d'interprétation du droit positif ou de description d'une procédure administrative. Il s'ensuit que le directeur de l'ACOSS n'était ni tenu de publier la lettre du 7 juillet 2006 ni, en tout état de cause, les deux autres documents.
4. En second lieu, en tout état de cause, la société Jubil Interim Béziers ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article R. 112-2 du code de la sécurité sociale, qui ne met à la charge du ministre chargé de la sécurité sociale un devoir d'information générale qu'à l'égard des assurés sociaux.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Jubil Interim Béziers n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande indemnitaire. Il s'ensuit que sa requête doit être rejetée, en toutes ses conclusions. Il y a lieu, en revanche, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à sa charge la somme globale de 2 000 euros à verser à l'ACOSS au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Jubil Interim Béziers est rejetée.
Article 2 : La société Jubil Interim Béziers versera à l'ACOSS une somme de 2 000 euros sur le fondement L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Jubil Interim Béziers et à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président,
- Mme Massé-Degois, présidente-assesseure,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2022.
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N° 20MA03451