Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 4 février 2016 par laquelle le président du conseil départemental des Alpes-Maritimes a procédé au retrait de son agrément d'assistante maternelle.
Par un jugement n° 1601492 du 11 octobre 2018, le tribunal administratif de Nice a fait droit à cette demande.
Par un arrêt n° 18MA05412 du 23 janvier 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par Mme B... devant le tribunal.
Par une décision n° 440582 du 7 juillet 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 décembre 2018, le 16 septembre 2019 et le 22 novembre 2021, le département des Alpes-Maritimes, représenté par la SELARL Bazin et Cazelles, demande à la cour, en l'état de ces dernières écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 11 octobre 2018 ;
2°) de rejeter la requête présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Nice ;
3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en l'absence d'indication dans les visas d'un mémoire déposé par Mme B... le 7 décembre 2017 ;
- le jugement est irrégulier en l'absence de signature de l'expédition du jugement et du courrier d'envoi de l'expédition par le greffier en chef ;
- le litige conserve son objet à la date à laquelle la décision contestée est intervenue et dès lors qu'elle n'a pas été retirée ;
- le moyen tiré de l'insuffisance de motivation, soulevé pour la première fois en appel, est irrecevable et, en tout état de cause, infondé dès lors qu'en reprenant fidèlement la formulation de l'alinéa 4 de l'article L. 421-6 du code action sociale et des familles, il était dispensé d'y faire explicitement référence ;
- l'auteur de la décision contestée bénéficiait d'une délégation de signature régulièrement publiée ;
- il ne s'est pas estimé lié par l'avis de la commission consultative paritaire départementale ;
- la décision ne méconnaît pas le principe non bis in idem ;
- elle ne contrevient pas au principe de proportionnalité ;
- elle n'est entachée ni d'une erreur de droit, ni d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 mars 2019, 25 septembre 2019 et 19 août 2021, ainsi qu'un mémoire non communiqué enregistré le 9 janvier 2020, Mme B..., représentée par Me Oloumi, demande à la cour, en l'état de ses dernières écritures :
1°) d'annuler la décision de retrait d'agrément du 4 février 2016 ;
2°) de mettre à la charge du département des Alpes-Maritimes la somme de 5 300 euros au profit de Me Oloumi en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ou, à défaut, en cas d'absence ou de retrait de l'aide juridictionnelle, à elle-même au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.
Elle soutient, en l'état de ses dernières écritures, que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée en droit ;
- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le président du conseil départemental s'est borné à constater qu'une perquisition administrative avait été réalisée à son domicile ;
- elle a été prise sans être précédée de l'avertissement prévu par l'article R. 421-6 du code de l'action sociale et des familles ;
- elle est disproportionnée par rapport aux faits reprochés, lesquels ne permettent de mettre en évidence aucun risque pour la sécurité et le bien-être des enfants qui lui sont confiés.
Un mémoire et des pièces produites pour Mme B... le 14 décembre 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction, n'ont pas été communiqués.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massé-Degois,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Gaudon substituant Me Bazin représentant le département des Alpes-Maritimes et de Me Hamdi représentant Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision en date du 4 février 2016, le président du conseil départemental des Alpes-Maritimes a retiré les décisions des 10 et 13 janvier 2016 par lesquelles il avait accordé à Mme B..., respectivement implicitement puis expressément, le renouvellement de son agrément d'assistante maternelle. Par un arrêt n° 18MA05412 du 23 janvier 2020, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie par le département des Alpes-Maritimes, a, d'une part, annulé le jugement n° 1601492 du 11 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nice avait annulé pour excès de pouvoir, à la demande de Mme B..., la décision du 4 février 2016 portant retrait d'agrément et, d'autre part, rejeté la demande de l'intéressée. Après avoir annulé cet arrêt, pour erreur de droit, par une décision n° 440582 du 7 juillet 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a renvoyé à l'affaire à la cour.
Sur l'exception de non-lieu :
2. A supposer que Mme B... soit regardée comme ayant entendu maintenir, à titre principal, ses conclusions à fin de constatation de non-lieu à statuer présentées dans ses mémoires enregistrés devant la cour les 26 mars et 25 septembre 2019 alors même qu'elle sollicite la seule confirmation de l'annulation de la décision 4 février 2018 dans ses dernières écritures enregistrées le 19 août 2021, en lui accordant, par une décision du 17 décembre 2018, un agrément valable du 13 janvier 2016 au 9 janvier 2021, le président du conseil départemental, n'a ce faisant pas pris d'autre mesure que celle qu'appelait, selon lui, l'exécution du jugement attaqué. Par suite, et en tout état de cause, la décision du 17 décembre 2018 ne prive pas d'objet le présent litige.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le département des Alpes-Maritimes, le jugement qu'il conteste vise et analyse le mémoire présenté pour Mme B... le 7 décembre 2017.
4. En second lieu, si aux termes de l'article R. 751-2 du code de justice administrative : " Les expéditions des décisions sont signées et délivrées par le greffier en chef ou, au Conseil d'Etat, par le secrétaire du contentieux ", le fait que cette expédition du jugement attaqué ne comportait pas la signature du greffier en chef est sans influence sur la régularité de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles : " Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait ... / Toute décision de retrait de l'agrément ... doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés. " et selon l'article R. 421-26 du même code : " Un manquement grave ou des manquements répétés aux obligations de déclaration et de notification prévues aux articles R. 421-38, R. 421-39, R. 421-40 et R. 421-41 ainsi que des dépassements du nombre d'enfants mentionnés dans l'agrément et ne répondant pas aux conditions prévues par l'article R. 421-17 peuvent justifier, après avertissement, un retrait d'agrément. ".
6. La décision contestée du 4 février 2016, qui fait état de l'avis favorable émis le 13 janvier précédent par la commission consultative paritaire départementale des assistants maternels et familiaux en vue du retrait de l'agrément maternel de Mme B..., repose sur les motifs, d'une part, que l'intéressée a manqué gravement à ses obligations d'information du président du conseil départemental des Alpes-Maritimes d'un événement impactant les conditions d'accueil des enfants, à savoir la perquisition administrative effectuée à son domicile le 26 novembre 2015 dans le cadre de l'état d'urgence et, d'autre part, que les conditions d'accueil des enfants qui lui étaient confiés dans le cadre de son agrément n'étaient plus garanties du fait de cette perquisition, sans que ne soient visés les textes législatifs ou règlementaires dont elle fait application.
7. En premier lieu, par un courrier recommandé du 14 décembre 2015, le médecin de la PMI de Grasse Sud, relevant de la direction générale des services départementaux du département des Alpes-Maritimes, a notifié à Mme B... un avertissement pour manquements à ses obligations professionnelles. Ce courrier lui rappelait son obligation de les informer de tout événement et/ou modification survenant dans sa situation professionnelle et/ou familiale et lui précisait que, si des manquements venaient à se répéter, son agrément serait réévalué. L'article R. 421-26 du code de l'action sociale et des familles figurant en " Objet " de ce courrier du 14 décembre 2015 ne saurait tenir lieu de motivation en droit de la décision contestée du 4 février 2016, faute, d'une part, pour ce courrier d'indiquer laquelle des obligations de déclaration et de notification prévues aux articles R. 421-38, R. 421-39, R. 421-40 et R. 421-41 l'intéressée a méconnu et, d'autre part, pour la décision contestée du 4 février 2016 de s'y référer expressément. En outre, il ne ressort pas des autres pièces du dossier que Mme B... aurait été destinataire, antérieurement à la décision du 4 février 2016, de courriers précisant, parmi les quatre fondements règlementaires des articles R. 421-38, R. 421-39, R. 421-40 et R. 421-41 du code précité, lequel fondait le retrait de son agrément en litige.
8. En second lieu, alors qu'aucune des deux décisions des 14 décembre 2015 et 4 février 2016 ne citent l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et familles, celle du 4 février 2016 contestée, à laquelle n'était pas joint l'avis de la commission paritaire départementale des assistants maternels et familiaux du 13 janvier précédent, ne saurait être regardée comme motivée en droit en référence à cet article du code de l'action sociale et des familles cité au point 5 par la seule circonstance qu'elle précise que le dossier de Mme B... " a été présenté pour avis à la commission paritaire départementale ... en vue du retrait de [son] agrément maternel " et qu'elle mentionne que " les conditions d'accueil des enfants (santé, sécurité et épanouissement) dans lesquelles l'agrément a été accordé ne sont plus garanties (...) ".
9. Par suite, la décision litigieuse du 4 février 2016, qui ne comporte pas une motivation en droit rappelant les fondements légaux du retrait de l'agrément d'assistance maternelle de Mme B..., souffre d'une insuffisance de motivation ainsi que le faisait valoir cette dernière dans sa requête introductive de première instance et non pour la première fois en appel comme le soutient le département des Alpes-Maritimes. En effet, si Mme B... invoque la méconnaissance des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration pour la première fois devant la cour, il est constant que ces dispositions reprennent celles de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, aux termes desquelles la motivation doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision, dont elle avait invoqué la méconnaissance devant le tribunal.
10. Il résulte de tout ce qui précède que le département des Alpes-Maritimes n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 4 février 2016. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. Il n'y a toutefois pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme B... au titre des mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête du département des Alpes-Maritimes est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département des Alpes-Maritimes et à Mme A... B....
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2021, où siégeaient :
- Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Ciréfice, présidente-assesseure,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 décembre 2021.
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N° 21MA02681
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