Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCP JP Louis et A Lageat, agissant en qualité de liquidatrice judiciaire de la Société nationale maritime Corse Méditerranée (SNCM), et les sociétés Axa Corporate Solutions Assurance, XL Catlin Services SE, Helvetia assurances, Amlin Insurance SE, MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, Syndicate 457, Generali Iard, Helvetia assurances et Helvetia assurances SA, Allianz Global Corporate and Specialty SE, Mapfre Empresa Compania de Seguros y Reaseguros - Marine Claims, Dutch Marine Insurance, Liberty Mutual Insurance SE, Baloise Belgium SA, Syndicate 1209 et Syndicate 1183 ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le grand port maritime de Marseille à verser la somme de 8 972 025 euros à la SCP JP Louis et A Lageat et la somme de 78 140 000 euros aux compagnies d'assurances en réparation des préjudices résultant de l'échouement du navire Napoléon Bonaparte.
Par un jugement n° 1608546 du 2 décembre 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 31 janvier, 7 août et 1er décembre 2020, ainsi que le 8 mars et le 19 avril 2021, la SCP JP Louis et A Lageat et autres, représentées par Mes Brajeux et Charles, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 décembre 2019 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de condamner le grand port maritime de Marseille à verser la somme de 8 972 025 euros à la SCP JP Louis et A Lageat et la somme de 78 140 000 euros aux compagnies d'assurances, assorties des intérêts à compter du 28 octobre 2016, ainsi que la somme complémentaire de 1 302 167,42 euros ;
3°) de mettre à la charge du grand port maritime de Marseille la somme de 469 078,14 euros en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, et celle de 1 185 449,65 euros en application de l'article L. 761-1 du même code.
Elles font valoir, dans le dernier état de leurs écritures, que :
- le jugement attaqué est irrégulier, dès lors qu'il a écarté d'office sans en avoir préalablement informé les parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;
- il est également irrégulier pour avoir écarté d'office des moyens relatifs à la régularité de l'expertise ;
- l'attribution du poste 116 pour l'amarrage est constitutive d'une faute ;
- le bollard 21 était défectueux ;
- les bollards devaient être excentrés et surélevés ;
- les ouvrages du port sont vétustes et mal entretenus ;
- le recours à des amarres courtes est constitutif d'une faute ;
- le grand port maritime a manqué à son obligation de surveillance de l'amarrage ;
- l'arrivée des remorqueurs a été tardive ;
- le port aurait dû être consigné ;
- l'absence de plan de crise constitue une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service ;
- le grand port maritime n'a pas appelé les marins-pompiers après l'abordage ;
- le défaut de protection du coin du quai du poste 40 aurait permis d'éviter l'ouverture d'une brèche dans la coque du navire ;
- la SNCM n'a pas commis de faute de nature à exonérer le grand port maritime de sa responsabilité ;
- le dommage a été directement causé par le défaut d'entretien de l'ouvrage public portuaire et les fautes commises par le grand port maritime ;
- les préjudices dont elles demandent l'indemnisation sont établis ;
- le tribunal administratif a commis une erreur sur le montant des dépens.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 août et 13 octobre 2020, ainsi que les 12 février et 7 avril 2021, le grand port maritime de Marseille, représenté par la SCP Gobert et associés, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête présentée par la SCP JP Louis et A Lageat et autres ;
2°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise ;
3°) à titre très subsidiaire, de réduire le montant de l'indemnisation demandée ;
4°) de mettre à la charge de la SCP JP Louis et A Lageat et autres la somme de 1 000 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la SNCM connaissait les lieux ;
- le caractère défectueux de l'amarrage, l'absence de précautions de la part de la SNCM, le non-respect de ses procédures ISM, et la consigne nautique donnée par le commandant de bord au remorqueur constituent des fautes exonératoires de responsabilité ;
- une expertise est nécessaire pour déterminer les causes de la rupture d'amarrage, celles de l'envahissement du navire, et le coût des travaux de réparation ;
- les préjudices ne sont établis que pour une partie de leur montant ;
- aucun préjudice n'est resté à la charge de la SNCM ;
- les moyens soulevés par la SCP JP Louis et A Lageat et autres ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des transports ;
- le décret n° 2009-877 du 17 juillet 2009 ;
- l'arrêté inter-préfectoral du 16 janvier 2012 portant création de la zone maritime et fluviale de régulation du grand port maritime de Marseille ;
- l'arrêté préfectoral du 26 mars 2009 portant règlement particulier de police dans le grand port maritime de Marseille ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mérenne,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,
- et les observations de Me Brajeux et de Me Charles, représentant la SCP JP Louis et A Lageat et autres, et de Me Ravit et de Me Fouilleul, représentant le grand port maritime de Marseille.
Considérant ce qui suit :
1. Le 1er octobre 2012, le Napoléon Bonaparte, navire amiral de la Société nationale maritime Corse-Méditerranée (SNCM), s'est amarré pour hivernage bâbord à quai au poste 116 de la digue du Large, dans le bassin " la Pinède " du grand port maritime de Marseille. A partir du 26 octobre suivant, Météo France émet plusieurs bulletins météorologiques spéciaux prévoyant un vent localement de force 10 et de secteur Ouest à Nord-Ouest. Dans la nuit du 27 au 28 octobre suivant, à 21h40, le chef mécanicien constate la rupture, sous la force du vent et de fortes rafales, de deux amarres avant et du câble maillant la ligne de mouillage. Le cadre d'astreinte de la SNCM monte à bord à 23h40 pour prendre le commandement du navire. Il sollicite l'assistance d'un premier remorqueur à 23h46, qui arrive à 00h08. A 2h45, le vent fraîchit à 60 nœuds et tourne à 30° sur bâbord. Il entraîne la rupture d'une amarre de bout et de deux amarres arrière. Le Napoléon Bonaparte demande l'intervention d'un second remorqueur. A 2h50, le vent fraîchit encore avec des rafales de 70 noeuds à 35° sur bâbord. Le Napoléon Bonaparte demande au remorqueur présent de réaliser une manœuvre vers l'avant. A 2h53, le câble d'alimentation électrique courant depuis le quai est arraché, ce qui entraîne un " black-out " et la perte du propulseur d'étrave. Les amarres restantes rompent successivement. Le Napoléon Bonaparte dérive et heurte l'angle du quai du poste 40, ce qui ouvre une brèche dans la coque, à l'origine de l'envahissement de deux compartiments sous le pont principal, et provoque l'échouement du navire. Le navire, renfloué et vendu par la SNCM à un tiers, a quitté le port de Marseille en mai 2014.
2. Le mandataire liquidateur de la SNCM et les quinze assureurs du navire font appel du jugement du 2 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes tendant à la condamnation du grand port maritime de Marseille à leur verser la somme totale de 88 414 192,42 euros.
Sur la régularité du jugement :
3. Les requérantes avaient contesté en première instance la régularité des opérations d'expertise et la faute du grand port maritime à ne pas avoir imposé l'intervention de lamaneurs après la rupture des amarres, notamment en pages 9, 41 et 57 de leur mémoire du 31 juillet 2019. Ainsi et en tout état de cause, le tribunal administratif, en écartant ces moyens, n'a pas soulevé d'office un moyen qu'il lui aurait appartenu de communiquer préalablement aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.
Sur la responsabilité du grand port maritime de Marseille :
En ce qui concerne l'attribution du poste 116 :
4. Le premier alinéa de l'article 12 du décret du 17 juillet 2009 portant règlement général de police dans les ports maritimes de commerce et de pêche applicable à la date des faits, dispose que : " L'autorité investie du pouvoir de police portuaire fait placer dans le port les navires, bateaux et engins flottants aux postes à quai attribués par l'autorité portuaire. ".
5. Il résulte de l'instruction que le Napoléon Bonaparte s'est présenté le 30 septembre 2012 au port de Marseille en demandant que lui soit attribué le poste 116 de la digue du Large ou celui de la forme 10. La capitainerie n'a pas attribué la forme 10 au Napoléon Bonaparte en raison de la puissance électrique nécessaire au navire pour l'hivernage, et non du fait de la politique du port à l'égard des navires de croisière, comme le soutiennent les requérantes, alors que cette question est étrangère au litige. La capitainerie lui a attribué en conséquence le poste 116. Il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas allégué, qu'un emplacement disponible autre que ceux déjà évoqués aurait été plus approprié pour l'hivernage du Napoléon Bonaparte.
6. Les requérantes font valoir que la digue du Large est un ouvrage ancien, construit au dix-neuvième siècle, et trop exposé aux vents d'orientation inhabituelle ayant soufflé dans la nuit du 27 au 28 octobre 2012. Il aurait ainsi été inadapté à l'hivernage d'un navire de grand fardage tel que le Napoléon Bonaparte. Cependant, ces circonstances ne révèlent pas un vice de conception ou un défaut d'entretien normal de l'ouvrage, mais sont seulement à l'origine d'un risque de coup de vent inhérent à la configuration des lieux.
7. La SNCM était dès l'origine usagère du port de Marseille, où ses navires hivernaient régulièrement. Elle disposait d'une connaissance détaillée de la configuration et des caractéristiques des installations portuaires, de l'état de leurs ouvrages, et de la météorologie locale. En particulier, le Napoléon Bonaparte, depuis sa mise en service en 1997, avait accosté au moins 568 jours sur la digue du Large, et hiverné à deux reprises au poste 116. En 2005, il avait déjà subi un incident de rupture d'amarres du fait d'un coup de vent.
8. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, l'attribution d'un poste à quai n'est pas un ordre donné par les autorités portuaires sur le fondement de l'article L. 5334-5 du code des transports, auquel le navire n'aurait pu échapper. Ni la présence du siège de la SNCM à Marseille, ni la disponibilité de " moyens humains et matériels " non précisés n'obligeaient l'armateur à faire hiverner le Napoléon Bonaparte au sein du grand port maritime de Marseille. La SNCM, à laquelle il était possible de choisir un autre port d'hivernage, et qui n'a émis aucune réserve sur le poste attribué, a assumé le risque mentionné au point 6 en toute connaissance de cause.
En ce qui concerne l'état de certains ouvrages :
9. En premier lieu, l'indisponibilité alléguée du bollard 9, relevant du poste 115, n'est pas établie.
10. En second lieu, il résulte de l'instruction que le Napoléon Bonaparte, qui ne disposait pas d'un plan d'amarrage préétabli, a réalisé un amarrage renforcé en vue de l'hivernage, correspondant à son amarrage habituel, similaire à ceux réalisés lors des hivernages précédents. Il n'a formulé aucune demande ou réserve sur les conditions d'amarrage au poste 116. Dès lors, il ne résulte pas de l'instruction que le navire ait jamais eu l'intention de réaliser un amarrage " long ", nécessitant de recourir aux bollards des postes voisins. Le caractère inutilisable du bollard 21, relevant du poste 117, n'a dès lors pu avoir d'incidence sur l'amarrage réalisé et la survenue de l'accident.
11. En troisième lieu, des " bollards excentrés et surélevés " ne sont pas des ouvrages courants dont l'absence serait par elle-même constitutive d'un défaut d'entretien normal des ouvrages portuaires.
12. En quatrième lieu, si les requérantes formulent une critique générale des ouvrages du grand port maritime, en se référant à un rapport de la Cour des comptes, celle-ci est dépourvue de lien avec le litige.
En ce qui concerne l'amarrage :
13. L'article 12 du décret cité au point 4 prévoit en outre que les navires " sont amarrés sous la responsabilité de leur capitaine ou patron, conformément aux usages maritimes et aux prescriptions qui leur sont signifiées par l'autorité investie du pouvoir de police portuaire ", que " les moyens d'amarrage doivent être en bon état et adaptés aux caractéristiques du navire ", et qu' " en cas de nécessité, tout capitaine, patron, ou gardien à bord doit renforcer ou faire renforcer les amarres et prendre toutes les précautions qui lui sont prescrites sur ordre de l'autorité investie du pouvoir de police portuaire. ".
14. Les requérantes font valoir que l'autorité de police portuaire a commis une faute en s'abstenant d'ordonner au commandant du Napoléon Bonaparte de renforcer ses amarres. La recommandation du bureau d'enquêtes sur les évènements en mer (BEA mer) d'éviter les amarrages " courts " et d'étudier la solution des amarres de poste pour l'hivernage d'un navire de ce fardage sur la digue du Large est une préconisation formée pour l'avenir à partir de l'analyse de l'évènement, et non un examen rétrospectif des responsabilités, ainsi que le rappelle l'avertissement figurant en préambule du rapport, destiné à éviter qu'il en soit donné une interprétation erronée. Il résulte en réalité de l'instruction, notamment du rapport du BEA mer et du rapport d'expertise, que le plan d'amarrage était approprié, et que les amarrages " courts ", bien qu'ils soient moins sécurisés que les amarrages " longs ", restaient conformes aux usages maritimes au moment de la mise en hivernage. L'amarrage effectué n'appelait donc aucune remarque de la part de l'autorité de police portuaire. Les requérantes avancent que l'officier de port a constaté, la veille de l'accident, que la chaîne d'ancre était " un peu raide ". Toutefois, la nécessité d'ordonner le renforcement des amarres au regard de ce seul élément, tiré d'une citation anodine des auditions réalisées par l'expert, ne ressort d'aucune des pièces du dossier. Enfin, si l'incidence de la vétusté des aussières reste en discussion à l'issue des opérations d'expertise, il résulte de l'instruction que leur état n'était pas décelable par le personnel du grand port maritime. L'autorité de police portuaire n'a donc pas commis de faute dans l'exercice de ses pouvoirs concernant l'amarrage.
En ce qui concerne l'action des autorités portuaires lors de l'évènement :
15. En premier lieu, le dernier alinéa de l'article 8 du décret cité au point 4 prévoit que : " L'autorité investie du pouvoir de police portuaire peut imposer aux capitaines l'assistance de services de remorquage (...). L'article 3.7 de l'arrêté du 16 janvier 2012 portant création de la zone maritime et fluviale de régulation du grand port maritime de Marseille, alors en vigueur, prévoit que : " La réglementation en vigueur prévoit, localement et dans des cas particuliers, l'obligation de remorquage. / Le capitaine du navire, sur conseil du pilote, passe commande du nombre de remorqueurs nécessaires pour la manœuvre. / En fonction des circonstances météorologiques, de régularité et de sécurité du trafic maritime ou d'autres éléments dûment justifiables, le STM portuaire peut, en coordination avec le service de pilotage, imposer au capitaine, à ses frais, l'assistance d'un ou plusieurs remorqueurs (...) ".
16. Les requérantes font valoir que l'autorité de police portuaire a commis une faute en s'abstenant d'imposer l'intervention d'un second remorqueur au Napoléon Bonaparte. Il résulte de l'instruction que le personnel du grand port maritime de Marseille a alerté à plusieurs reprises le personnel de la SNCM présent à bord du Napoléon Bonaparte, en l'invitant à demander l'assistance des navires remorqueurs. Ainsi qu'il a été dit au point 1, le cadre d'astreinte de la SNCM est monté à bord du navire à 23h40, a pris la direction des opérations, et a demandé à 23h46 l'assistance d'un premier remorqueur, arrivé à 00h08. Selon le rapport du BEA mer et le rapport d'expertise, l'assistance d'un second remorqueur aurait été nécessaire pour stabiliser le navire avant la nouvelle rupture d'amarres intervenue à 2h45. Il résulte également de l'instruction que l'équipage du Napoléon Bonaparte, avant cet instant, avait mal estimé la situation, face à la dégradation météorologique prévisible au regard des bulletins météo, considérant à tort que celle-ci était stable et maîtrisée. C'est la raison pour laquelle le capitaine n'a pas lui-même sollicité en amont l'intervention d'un second remorqueur. Cette attitude faussement rassurante, venant d'un équipage expérimenté qui avait une meilleure connaissance des caractéristiques du navire et de sa situation en temps réel, n'a pas permis au personnel du grand port maritime de Marseille d'apprécier la nécessité de faire intervenir un second remorqueur malgré l'absence de demande exprès du capitaine du navire. Dans ces conditions, le fait de ne pas avoir imposé cette intervention au Napoléon Bonaparte ne constitue pas une faute de la part de l'autorité de police portuaire.
17. En deuxième lieu, les requérantes contestent l'absence de consignation anticipée du port. Toutefois, il est constant que les remorqueurs du port étaient disponibles et prêts à intervenir. Il ressort du rapport du BEA mer et du rapport d'expertise que la consignation du port est la conséquence de la mobilisation prolongée des remorqueurs disponibles, et non son préalable. Par suite, l'absence de consignation anticipée du port n'est pas fautive, et n'a pas non plus eu d'incidence sur la survenance de l'accident.
18. En troisième lieu, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose aux ports maritimes d'adopter un plan de gestion de crise. L'absence d'un tel plan, qui ne méconnaît pas une obligation préexistante, n'est pas en elle-même constitutive d'une faute. En outre, la recommandation du BEA mer à destination du grand port maritime de Marseille pour " coordonner l'étude d'un plan d'actions à mettre en œuvre en cas de prévisions météorologiques exceptionnelles, pour les navires désarmés ou en hivernage " ne révèle pas l'existence d'une faute, pour les raisons déjà exposées au point 14. Enfin, le tribunal administratif a répondu au détail des reproches formulés par les requérantes à l'égard du personnel portuaire au point 21 du jugement attaqué, dont il y a lieu d'adopter les motifs en appel.
En ce qui concerne l'état du quai du poste 40 :
19. Les requérantes font valoir que l'absence de protection du coin du quai du poste 40, heurté par le navire après la rupture des amarres, a contribué à l'ampleur du dommage. Toutefois, cette partie du quai n'était pas destinée à recevoir les navires et n'avait donc pas à être munie de défenses. Le tribunal administratif a écarté le surplus de l'argumentation des requérantes par des motifs appropriés, figurant au point 11 du jugement attaqué, qui ne sont pas utilement contestés et qu'il y a lieu aussi d'adopter en appel.
20. Il résulte de ce qui précède que la SCP JP Louis et A Lageat et autres ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
21. L'article 2 du jugement attaqué a mis à la charge des requérantes les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 329 920 euros. En outre, le tribunal administratif, au point 25 du jugement, a laissé à leur charge la somme qu'elles demandaient au titre des autres dépens. Il a rejeté en conséquence les conclusions présentées à ce titre à l'article 1er du jugement. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, cette solution est exempte d'erreur. Il convient de la confirmer, dès lors qu'elles sont les parties perdantes dans la présente instance.
22. Il y a lieu également lieu de mettre à leur charge le versement de la somme de 15 000 euros au grand port maritime de Marseille en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais non compris dans les dépens exposés dans la présente instance.
23. Les dispositions du même article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la SCP JP Louis et A Lageat et autres sur le même fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SCP JP Louis et A Lageat et autres est rejetée.
Article 2 : La SCP JP Louis et A Lageat et autres verseront au grand port maritime de Marseille la somme de 15 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCP JP Louis et A Lageat, aux sociétés XL Insurance Company SE, XL Catlin Services SE, Helvetia assurances, MS Amlin Marine N.V., MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, Syndicate 457, Generali IARD, Helvetia assurances SA, Allianz Global Corporate et Speciality SE, DUPI Underwriting Agencies B.V., Mapfre Empresa Compania de Seguros y Reaseguros Marine Claims, Liberty Mutual Insurance SE, Baloise Belgium SA, Syndicate 1209, Syndicate 1183, et au grand port maritime de Marseille.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2021, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Mérenne et Mme A..., premiers conseillers.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2021.
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No 20MA00403