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13/12/2021 | FRANCE | N°21MA02978

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 13 décembre 2021, 21MA02978


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Santa Maria a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner la commune de Porto-Vecchio à lui verser la somme de 100 000 euros qu'elle estime lui être due au titre de la location de parcelles pour la période du 1er septembre 2010 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1900098 du 1er juin 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2021, la SCI Santa Maria, représentée par Me

Gilliard et Me Kujawa, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Santa Maria a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner la commune de Porto-Vecchio à lui verser la somme de 100 000 euros qu'elle estime lui être due au titre de la location de parcelles pour la période du 1er septembre 2010 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1900098 du 1er juin 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2021, la SCI Santa Maria, représentée par Me Gilliard et Me Kujawa, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du maire de Porto-Vecchio en date du 1er février 2018 portant refus de paiement ;

3°) de condamner la commune de Porto-Vecchio à lui verser la somme de 100 000 euros qu'elle estime lui être due au titre de la location de parcelles pour la période du 1er septembre 2010 au 31 décembre 2013 ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Porto-Vecchio la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est compétente dès lors que la requête est dirigée contre un acte administratif ; le terrain a été loué non pour les besoins de la commune ou de ses agents mais à destination du public ; la convention a été conclue pour répondre à un besoin de la commune " en matière de travaux, de fournitures ou de services " au sens des dispositions de l'article 2 de la loi du 11 décembre 2001 ;

- elle a capacité pour agir en justice ;

- la commune s'est engagée à louer, pour la période du 1er septembre 2010 au 31 décembre 2013, les parcelles dont elle est propriétaire moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 2 500 euros ;

- la commune a occupé les parcelles dont elle est propriétaire au cours de cette période sans contrepartie financière ; même en l'absence de l'existence d'un bail écrit ou d'un contrat de mise à disposition, il ne peut être contesté que la commune de Porto-Vecchio était redevable du règlement des loyers durant la période d'occupation ; la commune et la SCI étaient d'accord sur la chose et sur le prix ; la commune est ainsi redevable de la somme de 100 000 euros au titre des loyers dus au cours de cette période ;

- le courrier du 19 décembre 2017 a eu pour effet de suspendre la prescription quadriennale pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2021, la commune de Porto-Vecchio, représentée par Me Lonqueue, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCI Santa Maria au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est incompétente pour connaître du litige qui a trait à la contrepartie financière de l'occupation par une personne publique d'une propriété privée ;

- l'engagement de la commune à occuper contre le paiement d'un loyer les parcelles de la société requérante ne portait que sur la période du 1er septembre au 31 décembre 2010 tandis qu'aucun engagement n'a été pris pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 ;

- les créances de la société requérante sont prescrites en application des dispositions de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

- les créances invoquées par la société requérante sont, en tout état de cause, surévaluées car les services du domaine ont estimé la valeur locative des parcelles à la somme annuelle de 6 400 euros.

Par une ordonnance du 24 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 octobre 2021 à 12 h.

Un mémoire présenté pour la SCI Santa Maria a été enregistré le 25 octobre 2021, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... Guillaumont, rapporteur,

- les conclusions de M. A... Thielé, rapporteur public,

- et les observations de Me Kujawa pour la SCI Santa Maria.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Santa Maria a mis à disposition de la commune de Porto-Vecchio, de 2005 à 2018, les parcelles cadastrées section AE nos 437 et 466, correspondant à des terrains nus, dont elle est propriétaire afin d'y permettre le stationnement de véhicules. Par courrier du 1er février 2018, le maire de la commune de Porto-Vecchio a refusé de faire droit à la demande de la SCI Santa Maria tendant à obtenir le versement d'une somme de 120 000 euros au titre d'arriérés de loyers pour la période comprise entre le 1er septembre 2010 et le 31 décembre 2013. Suite à cette décision de refus, la SCI Santa Maria a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner la commune de Porto-Vecchio à lui verser la somme de 100 000 euros. La SCI Santa Maria relève appel du jugement du 1er juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

2. Il résulte de l'instruction que les terrains en cause, propriété de la SCI Santa Maria, ont été mis d'un commun accord à la disposition de la commune d'abord à titre gratuit, puis à titre onéreux. Par courrier du 26 juillet 2010, le maire de la commune de Porto-Vecchio a confirmé, s'agissant de la période du 1er septembre 2010 au 31 décembre 2010, l'accord de la commune pour la location des parcelles en cause et indiqué que le montant annuel du loyer serait de 30 000 euros soit 2 500 euros par mois. S'agissant de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2013, aucun accord écrit n'a été formalisé. La société requérante fait valoir que même en l'absence d'un bail écrit ou d'un contrat de mise à disposition la commune est redevable des loyers. Elle se prévaut, pour l'ensemble de la période, des engagements contractuels de la commune nés d'un accord réciproque sur la chose et sur le prix.

3. En premier lieu, aux termes de l'article 2 de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier : " Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. (...) ". Aux termes de l'article 3 du même code dans sa version applicable au litige : " Les dispositions du présent code ne sont pas applicables aux (...) : / (...) 3° Accords-cadres et marchés de services qui ont pour objet l'acquisition ou la location, quelles qu'en soient les modalités financières, de terrains, de bâtiments existants ou d'autres biens immeubles, ou qui concernent d'autres droits sur ces biens (...) ".

4. Il résulte des dispositions exposées au point précédent que la seule location à titre onéreux ou mise à disposition à titre gratuit de terrains nus appartenant à une personne privée n'entre pas dans le champ d'application du code des marchés publics.

5. En deuxième lieu, d'une part, il ne résulte pas de l'instruction que la commune et la société requérante aient entendu soumettre leurs engagements à une clause qui, notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l'exécution du contrat, implique, dans l'intérêt général, qu'ils relèvent du régime exorbitant des contrats administratifs. D'autre part, alors que l'action indemnitaire de la SCI Santa Maria a pour fondement le refus de la commune de payer des loyers dont elle estime la commune redevable à raison de la seule location de terrains nus, il ne résulte pas de l'instruction que la SCI Santa Maria soit associée à l'exécution du service public du stationnement.

6. En dernier lieu, si la société requérante demande, pour la première fois en cause d'appel, l'annulation de la décision du maire de Porto-Vecchio en date du 1er février 2018 portant refus de paiement des arriérés de loyers en cause, ce refus n'est pas détachable de l'exécution des engagements contractuels de droit privé dont la SCI Santa Maria entend se prévaloir.

7. Il résulte de tout ce qui précède que l'action de la SCI Santa Maria relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur les frais du litige :

8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Porto-Vecchio, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à la SCI Santa Maria une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la SCI Santa Maria une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Porto-Vecchio, au titre des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de SCI Santa Maria est rejetée.

Article 2 : La SCI Santa Maria versera une somme de 1 500 euros à la commune de Porto-Vecchio au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Santa Maria et à la commune de Porto-Vecchio.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2021, où siégeaient :

- Mme Laurence Helmlinger présidente de la Cour,

- M. Gilles Taormina, président assesseur,

- M. B... Guillaumont, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 décembre 2021.

N° 21MA02978 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02978
Date de la décision : 13/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction - Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel - Contrats - Contrats de droit privé.

Marchés et contrats administratifs - Notion de contrat administratif - Nature du contrat - Contrats n'ayant pas un caractère administratif.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Olivier GUILLAUMONT
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : SCP SARTORIO LONQUEUE SAGALOVITSCH et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-13;21ma02978 ?
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