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09/12/2021 | FRANCE | N°21MA02842

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 09 décembre 2021, 21MA02842


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 13 février 2015 par lequel le maire de Valergues (Hérault) a refusé de lui délivrer un permis de construire ainsi que la décision du 29 avril 2015 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1503761 du 28 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a annulé ces décisions et a enjoint au maire de Valergues de réexaminer la demande de M. B... dans un

délai de deux mois à compter de la notification de son jugement.

Par un arrêt n° ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 13 février 2015 par lequel le maire de Valergues (Hérault) a refusé de lui délivrer un permis de construire ainsi que la décision du 29 avril 2015 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1503761 du 28 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a annulé ces décisions et a enjoint au maire de Valergues de réexaminer la demande de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification de son jugement.

Par un arrêt n° 18MA00917 du 25 juin 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la commune de Valergues contre ce jugement et a enjoint à son maire de délivrer à M. B... l'autorisation de construire sollicitée dans un délai d'un mois à compter de la notification de son arrêt.

Par une décision n° 433868 du 7 juillet 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 26 février 2018, le 9 janvier 2019 et le 9 novembre 2021, la commune de Valergues, représentée par la SCP Margall-d'Albenas, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 décembre 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas statué sur les caractéristiques de la voie de desserte, notamment au regard de sa largeur, sur la méconnaissance du projet à l'article 4 § 1 du règlement du plan d'occupation des sols, ni sur le défaut d'indication des modalités de raccordement du projet au réseau d'électricité ;

- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement pour censurer le motif tiré du non-respect du projet à l'article NC 11 du règlement du plan d'occupation des sols ;

- le dossier de demande de permis de construire, notamment le plan PC01-1, ne pouvait être regardé comme présentant les informations suffisantes sur la voie de desserte du projet dans la mesure où si deux chemins apparaissent, aucune indication ne permet de déterminer celui qui servira d'accès au projet ;

- aucune précision n'est apportée sur la largeur du chemin permettant d'apprécier les caractéristiques des chemins d'accès ;

- le projet méconnait l'article 4 § 1 du règlement du plan d'occupation des sols, en l'absence de raccordement au réseau d'eau potable ;

- le service instructeur n'a pas été en mesure d'apprécier les modalités d'assainissement, ni le traitement des eaux pluviales ;

- le projet ne mentionne pas de places de stationnement ;

- alors même que l'adaptation aux règles relatives à la hauteur serait mineure, sa nécessité au regard de la configuration du terrain n'est justifiée ni par les pièces du dossier, ni par les écritures de M. B... ;

- eu égard à l'emplacement du terrain d'assiette du projet dans l'axe de deux zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF), de deux zones Natura 2000, dans la zone sensible du forage des Benouides et dans la zone agricole où est située la partie ouest de la ville, ainsi qu'au risque de pollution chimique, le projet méconnaît l'article NC 11 du règlement du plan d'occupation des sols ;

- la production d'électricité par l'installation de panneaux photovoltaïques présente une destination principale de la construction à caractère commercial et elle doit être proportionnée aux besoins de l'exploitation pour pouvoir être rattachée à la destination agricole de la construction.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 19 octobre 2018, le 25 mars 2019 et le 3 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Elfassi puis par Me Rosier, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Valergues de lui délivrer un permis de construire et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Valergues la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Valergues ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique,

- et les observations de Me d'Albenas représentant la commune de Valergues et de Me Germe, substituant Me Rosier, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 13 février 2015, le maire de Valergues a refusé, en se fondant sur sept motifs, de délivrer à M. B... un permis de construire une serre multichapelles équipée de panneaux photovoltaïques en toiture sur un terrain situé lieu-dit " Les Plombières ". Sur requête de l'intéressé, le tribunal administratif de Montpellier a, par un jugement du 28 décembre 2017, annulé cet arrêté ainsi que la décision de rejet du recours gracieux et a enjoint au maire de Valergues de réexaminer la demande de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement. Par un arrêt n° 18MA00917 du 25 juin 2019, la Cour a rejeté l'appel formé par la commune de Valergues contre ce jugement et a enjoint à son maire de délivrer à M. B... l'autorisation de construire sollicitée dans un délai d'un mois à compter de la notification de son arrêt. Cependant, par une décision n° 433868 du 7 juillet 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la Cour.

2. M. B... a contesté devant le tribunal administratif de Montpellier l'intégralité des motifs mentionnés par le maire de Valergues dans l'arrêté attaqué, notamment, dans son mémoire enregistré au greffe du tribunal le 16 août 2016, celui tiré de ce que le dossier de demande ne comportait aucun renseignement sur le mode d'alimentation en électricité. Le tribunal a annulé cet arrêté en omettant de se prononcer sur ce moyen. Eu égard aux dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme imposant au juge de se prononcer sur l'ensemble des moyens susceptibles de fonder une annulation, la commune de Valergues peut utilement se prévaloir de cette irrégularité à l'encontre du jugement qui a accueilli d'autres moyens soulevés par M. B.... Par suite, le jugement attaqué doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier.

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. ". En vertu de l'article A. 424-4 du même code, la décision refusant la délivrance d'un permis de construire précise les circonstances de droit et de fait qui motivent la décision.

5. Il ressort de l'examen de l'arrêté contesté que celui-ci vise les articles L. 421-1 et R. 421-1 et suivants du code de l'urbanisme ainsi que les articles pertinents du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Valergues avant de détailler dans quelle mesure la demande de permis de construire déposée par M. B... n'était pas conforme à ces dispositions. Ainsi, le moyen tiré de la motivation insuffisante de cet arrêté doit être écarté.

6. En second lieu, pour refuser de délivrer à M. B... le permis de construire demandé, le maire de Valergues s'est fondé sur l'insuffisance du dossier en ce qui concerne la desserte du site et ses accès, le mode d'alimentation en eau potable, le mode d'assainissement de l'installation, le mode d'alimentation en électricité et le stationnement des véhicules. Il a relevé également que le récépissé de dépôt du dossier " loi sur l'eau " n'était pas joint au dossier, que la hauteur de la construction dépassait la hauteur maximale fixée à l'article 10 du règlement de la zone NC du plan d'occupation des sols (POS), que cette construction relevait d'une activité interdite en zone agricole et que son impact visuel ne permettait pas de respecter les dispositions de l'article 11 du règlement de zone.

7. L'article R. 431-4 du code de l'urbanisme dispose : " La demande de permis de construire comprend : / a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 ; / b) Les pièces complémentaires mentionnées aux articles R. 431-13 à R. 431-33-1 ; / c) Les informations prévues aux articles R. 431-34 et R. 431-34-1. / Pour l'application des articles R. 423-19 à R. 423-22, le dossier est réputé complet lorsqu'il comprend les informations mentionnées au a et au b ci-dessus. / Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente. ". Aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier côté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder. Lorsque le projet est situé dans une zone inondable délimitée par un plan de prévention des risques, les côtes du plan de masse sont rattachées au système altimétrique de référence de ce plan. ".

8. Aux termes de l'article 4 du chapitre II relatif à la zone NCn du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Valergues : " Desserte par les réseaux / § 1 - Eau potable / Toute construction doit être raccordée au réseau public de distribution existant. / En l'absence d'une distribution publique d'eau potable, l'alimentation personnelle d'une famille à partir d'un captage, forage, ou puits particulier pourra être exceptionnellement autorisée, conformément à la législation en vigueur. / Dans le cas où cette adduction autonome ne serait plus réservée à l'usage personnel d'une famille, l'autorisation préfectorale pour l'utilisation d'eau destinée à la consommation humaine devra être préalablement obtenue ".

9. Il résulte de ces dispositions qu'elles imposent à toute construction en zone NCn du POS d'être raccordée au réseau public de distribution d'eau potable, sauf à justifier entrer dans l'une des dérogations prévues aux deuxième et troisième alinéas de ce paragraphe dans lesquelles ne figurent pas les serres de production agricole. Si le plan de masse joint au dossier de demande de permis de construire fait apparaître que la construction doit être raccordée au réseau d'irrigation des cultures " BRL ", ni ce plan, ni aucun autre document, ne mentionnent un raccordement au réseau public de distribution d'eau potable. Eu égard à la précision et au caractère impératif des dispositions précitées du règlement, M. B... ne peut utilement faire valoir que, par nature, la construction d'une serre agricole ne nécessiterait pas un tel raccordement. Il ne peut davantage exciper de ce que le maire pouvait lui délivrer le permis de construire demandé tout en imposant, par voie de prescriptions, l'installation d'un système de filtrage de l'eau d'irrigation permettant de la rendre potable. Dès lors, le motif correspondant mentionné par l'arrêté contesté est légal.

10. M. B... conteste par voie d'exception la légalité des dispositions du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Valergues citées au point 8, applicables à la zone NC, définie comme une zone de richesse économique dans laquelle les terrains doivent être réservés à l'exploitation agricole, l'élevage, l'exploitation des ressources du sous-sol ou de la forêt. Il soutient que le besoin en eau potable des constructions destinées à un usage agricole, qu'autorise l'article 1 du règlement dans cette zone est inexistant alors que l'éloignement des réseaux publics de distribution d'eau potable par rapport aux secteurs concernés rend le raccordement complexe et couteux, voire impossible. L'inutilité en zone agricole de l'alimentation des constructions en eau potable ne peut cependant être regardée comme avérée dans la mesure où elle répond aux besoins résultant de l'occupation permanente ou temporaire de ces constructions par leurs exploitants ou par des personnes extérieures. En outre, les dispositions contestées qui comportent des dérogations en l'absence d'une distribution publique d'eau potable n'ont pas pour effet de s'opposer à toute construction destinée à la culture. Par suite, ces dispositions ne sont entachées ni d'une erreur de droit, ni d'une erreur manifeste d'appréciation. Dans ces conditions, l'exception d'illégalité soulevée ne peut être accueillie.

11. Il résulte de l'instruction que le maire de Valergues aurait pris la même décision s'il s'était fondé seulement sur le motif tiré de l'insuffisance du dossier en ce qui concerne le mode d'alimentation en eau potable.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 13 février 2015 et de la décision du 29 avril 2015 rejetant son recours gracieux.

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Valergues, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par la commune de Valergues au même titre.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 décembre 2017 est annulé.

Article 2 : La demande de M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Valergues au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Valergues et à M. A... B....

Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 25 novembre 2021, où siégeaient :

- M. Chazan, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Quenette, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 décembre 2021.

N° 21MA02842 5

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02842
Date de la décision : 09/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Légalité interne du permis de construire. - Légalité au regard de la réglementation locale. - POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : SCP MARGALL. D'ALBENAS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-09;21ma02842 ?
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