Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner la commune de Piedicorte-di-Gaggio à lui verser la somme de 40 768,26 euros en réparation des préjudices subit du fait d'un accident de la circulation le 10 septembre 2015.
Par un jugement n° 1800175 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de M. B....
Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 20 mars, le 6 novembre et le 2 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Roussel-Filippi, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 16 janvier 2020 du tribunal administratif de Bastia ;
2°) de condamner la commune de Piedicorte-di-Gaggio à lui verser la somme de 40 768,26 euros, assortie des intérêts à compter du 11 octobre 2017 ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise ;
4°) de mettre les dépens à la charge de la commune, ainsi que la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier, faute de mentionner qu'il a été rendu après une audience publique ;
- le maire de Piedicorte-di-Gaggio a commis une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police générale ;
- le principe d'égalité entre les usagers des services publics justifie qu'il soit indemnisé ;
- l'arrêté municipal du 1er décembre 2012 est insuffisant ;
- il n'a pas été régulièrement publié ;
- l'information des usagers sur les risques liés à la divagation animale est insuffisante ;
- les préjudices dont il demande l'indemnisation sont en lien direct avec la faute commise ;
- ils sont établis.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2020, la commune de Piedicorte-di-Gaggio, représentée par Me Finalteri, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête présentée par M. B... ;
2°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'indemnisation demandée ;
3°) de mettre les dépens à la charge de M. B..., ainsi que la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés ;
- les sommes demandées sont injustifiées ou excessives.
La requête a été communiquée à la caisse régionale du régime social des indépendants d'Auvergne, qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Merenne,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,
- et les observations de Me Roussel-Filippi, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Le 10 septembre 2015 vers 6 heures 45, M. B... a été victime d'un accident de la circulation au lieu-dit " Pont de Piedicorte " sur la route territoriale n° 50, au cours duquel son véhicule a heurté une vache en divagation. Il fait appel du jugement du 16 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Piedicorte-di-Gaggio à l'indemniser des conséquences de cet accident.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le premier alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative dispose que : " La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. "
3. Si le jugement attaqué comporte les mentions relatives à l'audience du 12 décembre 2019 au rôle de laquelle l'affaire de M. B... a été inscrite, il ne précise pas que cette audience a été publique, en méconnaissance des dispositions citées ci-dessus. Il y a lieu d'annuler le jugement attaqué du fait de cette irrégularité et de statuer immédiatement sur le litige par la voie de l'évocation.
Sur le fond :
4. Il résulte du 7° de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales que la police municipale, qui a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques, comprend notamment le soin d'obvier ou de remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par la divagation des animaux malfaisants ou féroces.
5. Le seul élément utile des pièces du dossier relatif à la situation existant à la date de l'accident est un extrait du procès-verbal de transport rédigé par les services de gendarmerie le jour de l'accident, selon lequel la route territoriale n° 50, entre Aléria et Corte, " est très fréquentée par les bovins en divagation et n'ayant aucun propriétaire connu ".
6. Par un arrêté du 1er décembre 2012, le maire de la commune de Piedicorte-di-Gaggio, sur le territoire de laquelle s'étend une partie de la route territoriale n° 50, a interdit la concentration et la divagation de bovins laissés en liberté dans les rues du village, informé la population que des recherches seraient entreprises pour identifier les propriétaires des animaux divagants, et a invité les propriétaires des animaux en cause à prendre contact avec la mairie pour prendre les mesures appropriées. Il ressort des mentions portées sur cet arrêté qu'il a été régulièrement affiché et communiqué au contrôle de légalité. Il est ainsi devenu exécutoire en application de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales.
7. Il résulte en outre de l'instruction que la commune de Piedicorte-di-Gaggio a fait procéder, avant l'accident, à l'installation de plusieurs barrières et passages canadiens, notamment à proximité de la route territoriale n° 50, afin de limiter la divagation du bétail. La circonstance que ces ouvrages n'aient pas permis d'éviter l'accident ne révèle pas, compte tenu notamment de la taille et de la superficie de la commune, ainsi que du maillage de sa voirie, une carence de sa part.
8. Il ne résulte pas de l'instruction que le maire de Piedicorte-di-Gaggio ait été informé de la divagation de l'animal à l'origine de l'accident dont M. B... a été victime. Il n'a donc pu prendre de mesures spécifiques à cet animal.
9. Si M. B... fait valoir que l'information des usagers des voies publiques quant à la divagation du bétail était insuffisante, l'installation de panneaux de signalisation routière relève, en vertu de l'article L. 411-6 du code de la route, de l'autorité chargée de la voirie, à savoir, pour une route territoriale, de la collectivité territoriale de Corse, et non des pouvoirs de police administrative générale du maire.
10. Enfin, les mesures susceptibles d'avoir été prises par la commune postérieurement à l'accident sont sans incidence sur sa responsabilité.
11. Il résulte ainsi de ce qui précède que le maire de Piedicorte-di-Gaggio, compte tenu des caractéristiques de la commune et des moyens dont elle dispose, n'a pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de cette dernière.
12. Par ailleurs, les administrés victimes d'un accident imputable à une faute de l'administration ne sont pas placés, au regard des règles régissant la responsabilité de la puissance publique, dans la même situation que les administrés victimes d'un accident qui n'est pas imputable à une telle faute. M. B... n'est donc pas fondé à invoquer le principe d'égalité entre les usagers des services publics pour faire valoir que la responsabilité d'une commune est nécessairement engagée du fait des accidents provoqués par la divagation du bétail, indépendamment de l'examen circonstancié de l'existence d'une faute.
13. Il suit de là que la responsabilité de la commune n'est pas engagée. Les conclusions indemnitaires de M. B... doivent donc être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
14. Aucuns dépens n'ont été exposés dans le cadre de la présente instance.
15. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme de 2 000 euros à la commune de Piedicorte-di-Gaggio au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.
16. En revanche, la commune n'est pas la partie perdante. Les dispositions de cet article font en conséquence obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. B... sur le même fondement.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 16 janvier 2020 du tribunal administratif de Bastia est annulé.
Article 2 : La demande de M. B... devant le tribunal administratif de Bastia et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : M. B... versera à la commune de Piedicorte-di-Gaggio la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Piedicorte-di-Gaggio, et à la caisse régionale du régime social des indépendants d'Auvergne.
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2021, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. Merenne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2021.
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No 20MA01330