Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de La Crau à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral résultant du retrait de l'urne funéraire contenant les cendres de son ancien concubin du columbarium du cimetière " la Bastidette ".
Par un jugement n° 1704542 du 6 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 janvier 2020, Mme A..., représentée par Me Hollet, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2019 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) de condamner la commune de La Crau à lui verser la somme de 15 000 euros ;
3°) de mettre à la charge de la commune de la Crau la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ouverture de la sépulture a été effectuée sans son accord, alors qu'elle est titulaire de la concession ;
- la commune de La Crau n'a pas respecté ses engagements contractuels ;
- en raison de son désaccord, le maire ne pouvait faire droit à la demande d'exhumation présentée par la fille du défunt sans surseoir à statuer dans l'attente d'une décision de la juridiction civile ;
- son préjudice moral est établi.
La clôture de l'instruction a été fixée au 16 novembre 2020 par une ordonnance du 30 septembre 2020.
Un mémoire en défense a été enregistré pour la commune de La Crau le 28 septembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la cour a désigné M. Marcovici, président assesseur de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Merenne,
- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 16 mai 2014, le maire de la Crau a accordé à Mme A... la concession de l'emplacement n° 32 du columbarium du cimetière " la Bastidette ", pour une durée de six années à compter du 26 novembre 2013. L'urne dans laquelle étaient conservées les cendres de Roger Fargette, décédé le 17 novembre 2013, y a été déposée le 17 décembre 2013. Mme C..., fille du défunt, a demandé au maire de la Crau l'autorisation de retirer l'urne de la concession du site cinéraire en vue de disperser les cendres en mer. Cette opération a été effectuée le 19 avril 2017.
2. Mme A... fait appel du jugement du 6 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de la Crau à l'indemniser du préjudice moral résultant du retrait de l'urne funéraire contenant les cendres de son ancien concubin.
3. L'article L. 2213-8 du code général des collectivités territoriales dispose que : " Le maire assure la police des funérailles et des cimetières. " L'article L. 2213-9 du même code ajoute que : " Sont soumis au pouvoir de police du maire le mode de transport des personnes décédées, le maintien de l'ordre et de la décence dans les cimetières, les inhumations et les exhumations, sans qu'il soit permis d'établir des distinctions ou des prescriptions particulières à raison des croyances ou du culte du défunt ou des circonstances qui ont accompagné sa mort. "
4. S'agissant des opérations consécutives au décès, l'article R. 2213-40 prévoit que : " Toute demande d'exhumation est faite par le plus proche parent de la personne défunte. Celui-ci justifie de son état civil, de son domicile et de la qualité en vertu de laquelle il formule sa demande. / L'autorisation d'exhumer un corps est délivrée par le maire de la commune où doit avoir lieu l'exhumation. / L'exhumation est faite en présence d'un parent ou d'un mandataire de la famille. / Si le parent ou le mandataire dûment avisé n'est pas présent à l'heure indiquée, l'opération n'a pas lieu. " Ces dispositions sont applicables au retrait d'une urne d'une concession d'un site cinéraire en application de l'article R. 2223-23-3.
5. Il résulte de ces dispositions que, saisie d'une telle demande, l'autorité administrative compétente doit s'assurer, au vu des pièces fournies par le demandeur, de la réalité du lien familial dont ce dernier se prévaut et de l'absence de parent plus proche que lui du défunt. Il appartient en outre au demandeur d'attester sur l'honneur qu'il n'existe aucun autre parent venant au même degré de parenté que lui ou, si c'est le cas, qu'aucun d'eux n'est susceptible de s'opposer à l'exhumation sollicitée. Il suit de là que le maire ne peut refuser l'exhumation qui lui est demandée que pour un motif de police administrative ou pour défaut de qualité du demandeur. Si l'administration n'a pas à vérifier l'exactitude de cette attestation, elle doit en revanche, lorsqu'elle a connaissance d'un désaccord sur cette exhumation exprimé, par un ou plusieurs autres parents venant au même degré de parenté que le demandeur, refuser l'autorisation, en attendant le cas échéant que l'autorité judiciaire se prononce.
6. Les dispositions citées aux points 2 et 3, contrairement à ce que soutient Mme A..., s'imposent au maire lorsqu'il est saisi d'une demande d'autorisation d'exhumation ou de retrait d'une urne d'une concession d'un site cinéraire. Elles ne subordonnent pas l'octroi d'une telle autorisation à l'accord du titulaire de la concession. Au cas présent, l'autorisation a été demandée par Mme C..., fille du défunt, dont il n'est pas contesté qu'elle est la plus proche parente. Le désaccord exprimé par Mme A..., qui, en sa qualité d'ancienne concubine du défunt, ne vient pas au même degré de parenté, ne pouvait légalement justifier le refus du maire d'autoriser le retrait de l'urne, quand bien même elle aurait été titulaire de la concession. Tel est d'autant plus le cas que l'autorité judiciaire, par un arrêt du 3 mai 2016 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a déjà statué sur le litige entre Mme C... et Mme A... quant à la restitution de l'urne, en retenant " qu'il est d'évidence que si Mme C... désire reprendre l'urne ou la déplacer, Mme A... ne peut l'en empêcher. "
7. Par ailleurs, la concession accordée le 16 mai 2014 par le maire de la Crau à Mme A... se borne à lui conférer le droit d'occuper un emplacement sur le domaine public. Elle ne fait pas obstacle à l'exercice par le maire de ses pouvoirs de police des funérailles et des lieux de sépulture, et ne pourrait d'ailleurs légalement le faire. Le moyen tiré de la méconnaissance des engagements contractuels qui résulteraient de la concession doit donc être écarté.
8. Le maire de la Crau n'a donc pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de la commune.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de la Crau.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2021, où siégeaient :
- M. Marcovici, président,
- M. Merenne, premier conseiller,
- Mme Balaresque, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2021.
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No 20MA00370