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25/10/2021 | FRANCE | N°20MA00798

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 25 octobre 2021, 20MA00798


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... F... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juin 2019 par lequel le préfet de l'Hérault lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de quatre mois et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui dé

livrer une autorisation provisoire de séjour dès la notification du jugement à i...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... F... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juin 2019 par lequel le préfet de l'Hérault lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de quatre mois et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dès la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1903934 du 3 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 février 2020, M. F..., représenté par Me Ruffel, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 juin 2019 du préfet de l'Hérault ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dès la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me Ruffel au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne précise pas le fondement sur lequel elle repose ;

- il n'a pas été informé de la possibilité de présenter une demande d'admission au séjour sur un autre fondement et l'arrêté est donc intervenu en méconnaissance des dispositions de l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet n'a pas examiné sa situation personnelle et l'obligation de quitter le territoire français est dès lors entachée d'erreur de droit et méconnaît les dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants, en méconnaissance du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit car le préfet s'est borné, pour l'éloigner vers la Géorgie, à prendre en compte le rejet de sa demande d'asile sans tenir compte de l'introduction d'un recours devant la cour nationale du droit d'asile ;

Sur la décision portant interdiction de retour :

- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la mesure de surveillance :

- la mesure de surveillance qui lui a été imposée est dépourvue de base légale ;

- cette mesure est insuffisamment motivée ;

- cette mesure est entachée d'erreur de droit car le préfet s'est cru tenu de l'édicter.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Un mémoire présenté par M. F..., enregistré le 30 juin 2020, n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... Guillaumont, rapporteur,

- et les conclusions de M. C... Thielé, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. F..., ressortissant géorgien né le 18 avril 1969, entré en France pour la première fois en février 2019, a demandé à se voir octroyer le statut de réfugié. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté cette demande le 22 mai 2019. Par un arrêté du 27 juin 2019, le préfet de l'Hérault a prescrit l'éloignement de l'intéressé et lui a interdit le retour sur le territoire français pour un délai de quatre mois.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

4. La décision attaquée vise l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que l'intéressé s'est vu refuser l'octroi de la qualité de réfugié et ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire. Il en résulte, d'une part, qu'elle est suffisamment motivée en fait et, d'autre part, que sa motivation révèle qu'elle n'a pu intervenir que sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit donc être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger a présenté une demande d'asile qui relève de la compétence de la France, l'autorité administrative, après l'avoir informé des motifs pour lesquels une autorisation de séjour peut être délivrée et des conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements à ce stade, l'invite à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et, dans l'affirmative, l'invite à déposer sa demande dans un délai fixé par décret. Il est informé que, sous réserve de circonstances nouvelles, notamment pour des raisons de santé, et sans préjudice de l'article L. 511-4, il ne pourra, à l'expiration de ce délai, solliciter son admission au séjour ". Selon l'article R. 311-37 du même code : " Lors de l'enregistrement de sa demande d'asile, l'administration remet à l'étranger, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, une information écrite relative aux conditions d'admission au séjour en France à un autre titre que l'asile et aux conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements que ceux qu'il aura invoqués dans le délai prévu à l'article D. 311-3-2. " Aux termes de cet article D. 311-3-2 : " Pour l'application de l'article L. 311-6, les demandes de titres de séjour sont déposées par le demandeur d'asile dans un délai de deux mois. Toutefois, lorsqu'est sollicitée la délivrance du titre de séjour mentionné au 11° de l'article L. 313-11, ce délai est porté à trois mois. "

6. L'information prévue par l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 44 de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018, a pour seul objet, ainsi qu'en témoignent les travaux préparatoires de la loi, de limiter à compter de l'information ainsi délivrée le délai dans lequel il est loisible au demandeur d'asile de déposer une demande de titre de séjour sur un autre fondement, ce délai étant ainsi susceptible d'expirer avant même qu'il n'ait été statué sur sa demande d'asile. Le requérant, qui n'a pas déposé de demande de titre de séjour auprès des services de la préfecture avant qu'aux termes de l'arrêté attaqué le préfet ne tire les conséquences sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile du rejet de sa demande d'asile, ne peut donc utilement se prévaloir, contre l'obligation de quitter le territoire français, de son défaut d'information dans les conditions prévues par l'article L. 311-6 du même code.

7. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : / (...) 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 ".

8. Il ressort des pièces du dossier et, en particulier, des mentions de la décision attaquée que le préfet de l'Hérault a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. F.... Par suite, les moyens tirés de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel et complet de la situation et de la méconnaissance de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

10. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que M. F..., entré en France le 20 février 2019, ne résidait sur le territoire français que depuis quelques mois à la date de l'arrêté attaqué et, d'autre part, que son épouse, Mme E..., entrée en France en même temps que lui, ne bénéficiait plus du droit de se maintenir sur le territoire national après le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'intéressé ayant d'ailleurs également fait l'objet, le même jour, d'une mesure d'éloignement. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que les enfants de A... E... et M. F..., âgés respectivement de seize ans et dix ans, n'étaient scolarisés que depuis quelques semaines à la date de la décision contestée. Dès lors, et en l'absence, en outre, de signe d'intégration de ce couple, M. F..., qui a vécu en Géorgie jusqu'à l'âge de cinquante ans et n'établit pas être dépourvu d'attaches privées et familiales dans ce pays, n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français attaquée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

11. En troisième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, les tribunaux des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

12. Il ressort des pièces du dossier que les enfants de M. F..., âgés respectivement de seize ans et dix ans ainsi qu'il vient d'être dit, n'étaient scolarisés que depuis quelques semaines à la date de la décision attaquée, alors qu'ils avaient suivi toute leur scolarité en Géorgie, et n'étaient dès lors pas intégrés profondément en France. Ils sont en outre de même nationalité que leurs deux parents. L'arrêté attaqué n'a donc ni pour objet ni pour effet de les priver de la possibilité de suivre une scolarité ou de les séparer de leurs parents. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à arguer de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

13. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée des illégalités que le requérant lui impute. M. F... n'est donc pas fondé à exciper de l'illégalité de cet acte à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.

14. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

15. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de la décision attaquée, que le préfet ne s'est pas cru tenu d'éloigner le requérant à destination de la Géorgie, mais a examiné la situation personnelle de l'intéressé et n'a fixé le pays de destination de l'éloignement qu'après avoir relevé que M. F..., à qui il incombait, en tout état de cause, de faire état de pièces ou arguments sur ce point, n'apportait aucun élément nouveau de nature à établir la réalité des risques personnels qu'il dit encourir en cas de retour en Géorgie, la circonstance que M. F... a présenté un recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides devant la Cour nationale du droit d'asile étant sans incidence sur le bien-fondé de ce moyen.

16. D'autre part, si M. F... affirme craindre la menace de l'ancienne belle-famille de son épouse, qui n'aurait pas accepté son remariage, cette seule affirmation imprécise, qui n'est étayée par aucune pièce, n'est pas de nature à établir les risques allégués. Il s'ensuit que le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait été pris en méconnaissance des dispositions et stipulations précitées.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée des illégalités que le requérant lui impute. M. F... n'est donc pas fondé à exciper de l'illégalité de cet acte à l'appui des conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français.

18. En second lieu, aux termes du quatrième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". En vertu du huitième alinéa de cet article : " La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

19. Si M. F... n'a jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement avant l'intervention de l'obligation de quitter le territoire français attaquée et si aucune menace à l'ordre public ne lui est imputée, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'il ne résidait que depuis quelques mois sur le territoire français et qu'il ne dispose d'aucun lien particulier avec la France. Le préfet de l'Hérault n'a donc pas fait une inexacte application des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne les mesures de surveillance :

20. Aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ. (...) ".

21. Il résulte de ce qui précède que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée des illégalités que le requérant lui impute. M. F... n'est donc pas fondé à exciper de l'illégalité de cet acte à l'appui des conclusions dirigées contre les mesures de surveillance prises à son encontre.

22. Si l'obligation de présentation à laquelle un étranger est susceptible d'être astreint sur le fondement de l'article L. 513-4 a, ainsi qu'il vient d'être dit, le caractère d'une décision distincte de l'obligation de quitter le territoire français, cette décision, qui tend à assurer que l'étranger accomplit les diligences nécessaires à son départ dans le délai qui lui est imparti, concourt à la mise en œuvre de l'obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, si l'article L. 211-1 du code des relations entre le public et l'administration et le public impose que cette décision soit motivée au titre des mesures de police, cette motivation peut, outre la référence à l'article L. 513-4, se confondre avec celle de l'obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire.

23. En premier lieu, l'arrêté attaqué, qui vise l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne les fondements et l'existence de l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre du requérant, lui accorde un délai de départ volontaire de trente jours et précise qu'il est nécessaire que l'intéressé se présente à l'autorité administrative pour l'informer des diligences en vue de son départ. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit dès lors être écarté.

24. En second lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de la décision attaquée, que le préfet de l'Hérault ne s'est pas cru tenu de prescrire les mesures de surveillance contestées mais a examiné la situation de l'intéressé. Le moyen d'erreur de droit soulevé sur ce point doit dès lors être écarté.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

25. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. F..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.

Sur les frais liés au litige :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée par Me Ruffel sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... F..., à Me Ruffel et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2021, où siégeaient :

- M. Guy Fédou, président,

- M. Gilles Taormina, président assesseur,

- M. D... Guillaumont, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 octobre 2021.

3

N° 20MA00798


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00798
Date de la décision : 25/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-01-01 ÉTRANGERS. - OBLIGATION DE QUITTER LE TERRITOIRE FRANÇAIS (OQTF) ET RECONDUITE À LA FRONTIÈRE. - LÉGALITÉ EXTERNE. - PROCÉDURE. - MÉCONNAISSANCE DE L'OBLIGATION D'INFORMATION DU DEMANDEUR D'ASILE SUR LA POSSIBILITÉ DE DÉPOSER UNE DEMANDE DE TITRE DE SÉJOUR SUR UN AUTRE FONDEMENT QUE CELUI DE L'ASILE (ARTICLE L. 311-6 DU CODE DE L'ENTRÉE ET DU SÉJOUR DES ÉTRANGERS ET DU DROIT D'ASILE) - MOYEN OPÉRANT CONTRE LA DÉCISION PORTANT OBLIGATION DE QUITTER LE TERRITOIRE PRISE SUR LE FONDEMENT DES DISPOSITIONS DU 6° DE L'ARTICLE L. 511-1 DU CODE DE L'ENTRÉE ET DU SÉJOUR DES ÉTRANGERS ET DU DROIT D'ASILE : NON.

335-03-01-01 L'information prévue par l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 44 de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018, a pour seul objet, ainsi qu'en témoignent les travaux préparatoires de la loi, de limiter à compter de l'information ainsi délivrée le délai dans lequel il est loisible au demandeur d'asile de déposer une demande de titre de séjour sur un autre fondement, ce délai étant ainsi susceptible d'expirer avant même qu'il n'ait été statué sur sa demande d'asile. Le requérant, qui n'a pas déposé de demande de titre de séjour auprès des services de la préfecture avant qu'aux termes de l'arrêté attaqué le préfet ne tire les conséquences sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile du rejet de sa demande d'asile, ne peut donc utilement se prévaloir, contre l'obligation de quitter le territoire français, de son défaut d'information dans les conditions prévues par l'article L. 311-6 du même code.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: M. Olivier GUILLAUMONT
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-10-25;20ma00798 ?
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