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01/10/2021 | FRANCE | N°21MA01592

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 01 octobre 2021, 21MA01592


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Alpes-Maritimes a déféré devant le tribunal administratif de Nice comme prévenues d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques la société civile immobilière (SCI) Cap Rochers et Mme A... B..., sur le fondement d'un procès-verbal de contravention de grande voirie du 30 mai 2017 constatant l'occupation du domaine public maritime, au droit du lieu-dit " Villa Cap Rochers ", à Roquebrune Cap-Martin

(Alpes-Maritimes), par des canalisations de pompage et de rejet et des platefor...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Alpes-Maritimes a déféré devant le tribunal administratif de Nice comme prévenues d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques la société civile immobilière (SCI) Cap Rochers et Mme A... B..., sur le fondement d'un procès-verbal de contravention de grande voirie du 30 mai 2017 constatant l'occupation du domaine public maritime, au droit du lieu-dit " Villa Cap Rochers ", à Roquebrune Cap-Martin (Alpes-Maritimes), par des canalisations de pompage et de rejet et des plateformes de périmètres irréguliers d'une superficie totale de 47 m².

Par un jugement n° 1703325 du 16 février 2021, ce tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à la condamnation de la SCI Cap Rochers et de Mme B..., au paiement d'une amende, et a enjoint à ces dernières de procéder à la démolition des installations et ouvrages mentionnés dans le procès-verbal dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et à verser à l'Etat la somme de 114,44 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 29 avril 2021, la SCI Cap Rochers et Mme B..., représentées par Me Audoin, demandent à la Cour :

1°) à titre principal, d'ordonner, sur le fondement des articles R. 811-16 et R. 811-17 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement du tribunal administratif de Nice du 16 février 2021 ;

2°) à titre subsidiaire d'en ordonner partiellement le sursis à exécution en distinguant les éléments qui sont en dehors du domaine public et en tout état de cause d'ordonner le sursis à exécution de l'injonction de remise en état des lieux dans le délai de quatre mois sous astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent qu'il existe des moyens sérieux de surseoir à l'exécution du jugement attaqué tirés de ce que :

- le tribunal administratif a jugé à tort irrecevables leurs conclusions reconventionnelles tendant à l'annulation des décisions du 8 juin 2010 et 9 décembre 2015 refusant à la SCI le renouvellement de son autorisation d'occupation du domaine public maritime ;

- le tribunal administratif a jugé à tort irrecevable l'exception d'illégalité de la décision du 9 décembre 2015 ;

- le tribunal administratif a considéré de manière erronée qu'elles ne pouvaient invoquer l'illégalité du refus d'autorisation du 8 juin 2010 ;

- le tribunal administratif a estimé à tort que l'autorité de la chose jugée attachée à son précédent jugement de relaxe du 16 juillet 2015 ne s'opposait pas à la condamnation prononcée ;

- le tribunal administratif a estimé à tort que le procès-verbal de contravention de grande voirie était régulier nonobstant son imprécision et la circonstance que l'agent verbalisateur s'est rendu sur la propriété de la SCI sans son accord ;

- le procès-verbal ne leur a pas été régulièrement notifié ;

- le tribunal administratif a estimé illégalement qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision du juge judiciaire sur la propriété des terrains en litige et que l'occupation du domaine public maritime était matériellement constituée ;

- le tribunal administratif a refusé de manière erronée de tenir compte de la rupture d'égalité avec les propriétaires des villas voisines, de ce que les installations ont été autorisées pendant de nombreuses années et réalisées dans le respect des règles alors en vigueur, que des prescriptions pourraient être imposées pour réduire l'impact des installations sur l'environnement ;

- les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

- le tribunal administratif a fixé un délai insuffisant de quatre mois pour remettre en état toutes les installations qui ne tient pas compte des circonstances exceptionnelles liées à l'épidémie de covid-19 ;

- l'exécution du jugement attaqué aurait des conséquences difficilement réparables compte tenu des coûts, des risques de démolition des ouvrages sur la propriété privée et de désordres causés à l'installation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2021, la ministre de la transition écologique et la ministre de la mer concluent au rejet de la requête.

Elles soutiennent que :

- les conditions pour qu'il soit sursis à statuer sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative ne sont pas remplies ;

- les requérantes ne justifient pas de ce que l'exécution du jugement contesté serait susceptible d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;

- aucun des moyens soulevés par la SCI Cap Rochers et Mme B... ne présente un caractère sérieux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me Audoin, représentant la SCI Cap Rochers et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Après qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie eut été dressé le 30 mai 2017, le préfet des Alpes-Maritimes a déféré la SCI Cap Rochers et Mme B..., représentante légale de la société, comme prévenues d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques, devant le tribunal administratif de Nice qui, par un jugement du 16 février 2021, les a condamnées, d'une part, à procéder à la démolition de canalisations de pompage et de rejet ainsi que de plusieurs plateformes de périmètres irréguliers d'une superficie totale de 47 m² installées sur le domaine public maritime dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et, d'autre part, à verser à l'Etat la somme de 114,44 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal. La SCI Cap Rochers et Mme B... demandent qu'il soit sursis totalement ou partiellement à l'exécution de ce jugement sur le fondement des dispositions des articles R. 811-16 et R. 811-17 du code de justice administrative.

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :

2. Aux termes de l'article R. 811-16 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel par une personne autre que le demandeur en première instance, la juridiction peut, à la demande de l'appelant, ordonner sous réserve des dispositions des articles R. 533-2 et R. 541-6 qu'il soit sursis à l'exécution du jugement déféré si cette exécution risque d'exposer l'appelant à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses conclusions d'appel seraient accueillies. ". Aux termes de l'article R. 811-17 du même code : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction. ".

3. En premier lieu, il résulte des termes mêmes des dispositions de l'article R. 811-16 du code de justice administrative que son champ d'application ne s'étend pas aux jugements par lesquels le tribunal administratif se borne à ordonner la démolition d'installations et d'ouvrages édifiés sur le domaine public maritime, même sous astreinte, sans prononcer la condamnation du défendeur de première instance au paiement d'une somme d'argent. Si la SCI Cap Rochers et Mme B... font néanmoins valoir que dans l'hypothèse où leur conclusions d'appel seraient accueillies, les frais de démolition sont susceptibles de rester à leur charge, le préjudice qu'elles invoquent, qui au demeurant est indemnisable, n'est pas au nombre de ceux qui peuvent justifier le sursis à l'exécution du jugement attaqué sur le fondement des dispositions citées au point 2 de l'article R. 811-16. Par ailleurs, en cas d'annulation, après qu'il aurait été exécuté, du jugement attaqué, par lequel le tribunal administratif de Nice les a condamnées à payer une somme de 114,44 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal, la SCI Cap Rochers et Mme B... ne risqueraient pas de perdre définitivement cette somme, qui devrait leur être remboursée par l'Etat.

4. Il résulte de ce qui précède, que la SCI Cap Rochers et Mme B... ne sont pas fondées à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative.

5. En second lieu, il résulte des dispositions citées au point 2 que le sursis à exécution ne peut être ordonné sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative qu'à la double condition que l'exécution de la décision attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et que les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction.

6. Il est constant que la SCI Cap Rochers a bénéficié de plusieurs autorisations successives d'occupation temporaire du domaine public maritime, dont la dernière en date expirait le 31 décembre 2002, pour l'installation et le maintien sur ce domaine " de quatre plateformes irrégulières avec des amorces de sentiers " et de deux canalisations de 125 millimètres destinées au pompage et au rejet d'eau de mer desservant une piscine située sur sa propriété et que cette autorisation n'a pas été renouvelée à son échéance. Le jugement attaqué du 16 février 2021 a pour objet de condamner la SCI et sa gérante à procéder à la démolition de ces installations, à savoir la partie des canalisations implantées sur le domaine public maritime ainsi que ces quatre plateformes, à l'exclusion de la piscine elle-même ou de la station de pompage qui ne sont pas situées sur ce domaine, ainsi que le précise d'ailleurs l'autorisation domaniale arrivée à échéance en 2002 s'agissant de cette dernière installation. Il ne résulte pas de l'instruction que l'exécution de ce jugement risquerait d'entraîner pour la SCI Cap Rochers et sa gérante des conséquences difficilement réparables au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, dès lors qu'il n'est nullement établi que la destruction de ces ouvrages et installations, affecterait gravement ses conditions d'exploitation ou sa situation économique ou qu'elle aurait un quelconque impact environnemental.

7. La première condition posée par l'article R. 811-17 du code de justice administrative n'étant pas remplie, il y a lieu, sans qu'il soit besoin d'examiner si l'autre condition posée par ce même article est remplie, de rejeter les conclusions présentées sur ce fondement.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Cap Rochers et Mme B... ne sont pas fondées à demander qu'il soit sursis, totalement ou partiellement, à l'exécution du jugement attaqué.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Cap Rochers et de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Cap Rochers, à Mme A... B... et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2021, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Prieto, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er octobre 2021.

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N° 21MA01592

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01592
Date de la décision : 01/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Domaine - Domaine public - Protection du domaine - Contraventions de grande voirie.

Procédure - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : AUDOUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-10-01;21ma01592 ?
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