Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 2004790 en date du 26 février 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 mars 2021, M. B..., représenté par Me Ciccolini, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que:
- le tribunal a, à tort, considéré qu'il ne justifiait pas de dix années de résidence habituelle sur le territoire français alors qu'il a produit, pour l'établir, des documents en nombre important et de nature variée ;
- il lui a, à tort, dénié le bénéfice des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors que le centre de sa vie privée et familiale se situe en France ;
- il a, à tort, considéré que les décisions contestées étaient exemptes d'erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Prieto a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 25 octobre 1987 et de nationalité égyptienne, est entré en France en 2006 selon ses déclarations. Il a présenté, pour la dernière fois, une demande d'admission exceptionnelle au séjour le 5 avril 2019 auprès de la préfecture des Alpes-Maritimes à laquelle il n'a pas été répondu. Ce refus de délivrance du titre de séjour sollicité, né du silence gardé par l'administration, n'ayant pas été suivi de la communication des motifs demandée par la suite par l'intéressé, a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Nice du 24 juin 2020 pour défaut de motivation, ce même jugement enjoignant au préfet des Alpes-Maritimes de procéder au réexamen de la demande. Par arrêté du 26 octobre 2020, ce préfet a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et a assorti ce refus d'une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours. M. B... relève appel du jugement du 26 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".
3. M. B... produit, pour la période d'octobre 2010 à octobre 2020, de vingt à plus de quarante pièces par an et pour presque chaque mois, excepté pour 2011 où il produit néanmoins quinze pièces, au moins une par mois. Ces pièces sont notamment constituées de relevés bancaires sur lesquels apparaissent des opérations nécessitant la présence physique, sur place, de leur auteur ainsi que des factures d'électricité et de téléphonie. La circonstance que les noms et prénoms indiqués sur les pièces sont parfois inversés avec la mention " M. C... B... " au lieu de " M. B... C... " ne suffit pas à, elle seule, à retirer le caractère probant de ces pièces, d'autant que l'adresse indiquée à la suite est toujours la même. Par la production de l'ensemble des pièces qu'il produit dans l'instance, M. B... doit être regardé comme justifiant avoir résidé habituellement sur le territoire français au cours des dix années précédant la date de l'arrêté contesté. En conséquence M. B... est fondé à soutenir que l'arrêté contesté est entaché d'illégalité à défaut pour l'autorité préfectorale d'avoir saisi la commission du titre de séjour préalablement à son édiction.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".
6. Il y a lieu, eu égard aux motifs de l'annulation de l'arrêté en cause, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de procéder au réexamen de la demande présentée par M. B... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... A... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 26 février 2021 et l'arrêté du 26 octobre 2020 du préfet des Alpes-Maritimes sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour présentée par M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à M. B....
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nice.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2021 où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. Prieto, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2021
N° 21MA01202 4
bb