Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... G... a demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, de condamner solidairement Aix-Marseille Université et l'université Jean Moulin Lyon III à lui verser la somme de 78 290,01 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 octobre 2016 avec capitalisation de ces intérêts et augmentée de 497,05 euros par mois entre l'enregistrement de la requête et la date du jugement à intervenir et à titre subsidiaire, de les condamner solidairement à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de la perte de rémunération subie entre octobre 2013 et octobre 2015, outre la somme de 20 000 euros au titre de son préjudice moral.
Par jugement n° 1701526 du 24 juin 2019, le tribunal administratif de Marseille a condamné Aix-Marseille Université à payer à Mme G... la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral en raison des deux années qu'elle a consacrées à préparer un concours pour lequel sa candidature n'était pas recevable, outre une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté pour le surplus la requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, un mémoire ampliatif et un mémoire en réplique enregistrés les 19 août 2019, 20 septembre 2019, 22 juin 2020 et 1er septembre 2020, Mme G..., représentée par Me Helfer, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1701526 du 24 juin 2019 du tribunal administratif de Marseille qui a partiellement rejeté son recours indemnitaire visant à obtenir l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait du rejet de sa candidature à la session 2015 de l'examen professionnel réservé d'assistant ingénieur (ASI) du ministère de l'enseignement supérieur, en tant que ce jugement a fixé à seulement 3 000 euros le montant de l'indemnisation de son préjudice subi du fait des fautes commises par Aix Marseille Université (A.M.U.), et en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires présentées à l'encontre de l'Université Jean Moulin- Lyon III ;
2°) de condamner solidairement Aix-Marseille Université et l'université Jean Moulin Lyon III à lui verser la somme de 78 290,01 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 octobre 2016 avec capitalisation de ces intérêts et augmentée de 497,05 euros par mois entre l'enregistrement de la requête de première instance, le 3 février 2017, et la date de l'arrêt à intervenir ;
3°) à titre subsidiaire, de les condamner solidairement à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de la perte de rémunération subie entre octobre 2013 et octobre 2015 et la somme de 20 000 euros au titre de son préjudice moral ;
4°) de mettre à la charge d'Aix-Marseille Université et de l'université Jean Moulin Lyon III la somme de 3 000 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
1°) s'agissant de la régularité du jugement, les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement en omettant de se prononcer sur les moyens tirés du fait que, à titre subsidiaire, à supposer qu'il soit jugé qu'elle n'avait jamais eu vocation à être titularisée dans un corps de catégorie A, elle n'en aurait pas moins subi un double préjudice du fait des fautes commises par Aix Marseille Université, du retard avec lequel elle a pu, finalement, être titularisée en catégorie B, et du préjudice moral qu'elle a subi en raison des espérances légitimes de titularisation en catégorie A qu'elle a pu nourrir pendant plus de deux années, entre 2013 et 2015 ;
2°) s'agissant du bien-fondé du jugement :
- c'est à tort que le tribunal a écarté la responsabilité de l'Université Lyon III ;
- l'université Lyon III et Aix-Marseille Université lui ont fait perdre des chances sérieuses d'être titularisée en catégorie A dès octobre 2015 ;
- subsidiairement, le tribunal a sous-estimé son préjudice moral.
Par mémoire en défense enregistré le 12 décembre 2019, Aix-Marseille Université, représentée par Me Beauvillard, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme G... à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
1°) s'agissant de la régularité du jugement, il est suffisamment motivé ;
2°) s'agissant du bien-fondé du jugement :
- Mme G..., qui n'exerçait aucune fonction d'encadrement ou de conception, n'a jamais exercé des fonctions d'assistant-ingénieur lui permettant de revendiquer la catégorie A décrites par l'article 33 du décret n° 85-1534 du 31 décembre 1985, mais plutôt des fonctions de technicien en formation et en orientation décrites à l'article 41 du même décret ; aux termes de son contrat à durée indéterminée du 10 juillet 2009, Mme G... s'est vu confier les missions suivantes : " gestionnaire scolarité et financière, chargée des relations avec les entreprises et de la formation continue de l'institut " ; la fiche de poste annexée audit contrat mentionne que l'intitulé du poste est " Responsable de la formation continue de l'Institut Droit des affaires et chargée des relations avec les entreprises " ;
- la demande subsidiaire formulée au titre de la réparation du préjudice moral est disproportionnée.
Par mémoire en défense enregistré le 9 juin 2020, le ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation conclut à sa mise hors de cause.
Il soutient qu'il n'était pas partie en première instance.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 juin 2020, l'Université Jean Moulin Lyon III, représentée par Me Gardien, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme G... à lui payer la somme de 2 520 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
1°) s'agissant de la régularité du jugement, il est suffisamment motivé ;
2°) s'agissant du bien-fondé du jugement :
- Mme G... n'a jamais fourni, au moment où sa candidature à l'examen de titularisation en catégorie A en 2015 a été déclaré irrecevable, un quelconque élément permettant de conclure à son appartenance à la catégorie A ; les missions de la fiche de poste de Mme G... correspondent davantage à des fonctions de l'emploi type de technicien en formation et en orientation-insertion professionnelle (catégorie B) que de celles attendues pour un assistant-ingénieur (catégorie A) ;
- les éléments produits par l'appelante ne suffisent pas à établir son appartenance à la catégorie A au regard des dispositions du décret n° 85-1534 du 31 décembre 1985.
Par ordonnance du 22 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 juillet 2021 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;
- le décret n° 86-83 du 7 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n° 85-1534 du 31 décembre 1985 fixant les dispositions statutaires applicables aux ingénieurs et aux personnels techniques et administratifs de recherche et de formation du ministère chargé de l'enseignement supérieur ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D... Taormina, rapporteur,
- les conclusions de M. F... Thielé, rapporteur public,
- et les observations de Me Helfer pour Mme G... et de Me Champeau représentant l'Université d'Aix-Marseille.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G... a été recrutée, en 2003, par l'Université Paul-Cézanne Aix-Marseille III devenue en 2011 Aix-Marseille Université du fait d'une fusion des Universités d'Aix-Marseille I, II et III, initialement par voie de contrat à durée déterminée, pour exercer, au sein du cabinet de la présidence de l'Université, des fonctions de secrétariat relevant de la catégorie C. Elle a conclu, entre 2003 et 2009, plusieurs contrats de travail successifs. Entre le 1er juillet 2007 et le 28 février 2008, elle a occupé, au sein des services administratifs de l'Institut de Droit des Affaires (I.D.A.) de la Faculté de Droit et de Science Politique (F.D.S.P.) de 1'Université Aix-Marseille III, des fonctions de secrétariat relevant de la catégorie B. Le 1er mars 2008, elle a été promue afin d'exercer, au sein de ces mêmes services, des fonctions pour lesquelles elle revendique l'appartenance à la catégorie A, conformément aux vœux du doyen de la Faculté de Droit et de Science Politique de l'Université Aix-Marseille III exprimés par celui-ci dans un courrier du 1er octobre 2007 adressé au directeur des ressources humaines de l'université, dans lequel celui-ci indique que le directeur de l'institut de droit des affaires (IDA), M. E... A..., souhaite la promouvoir sur les fonctions de responsable formation continue de l'institut, chargée des relations avec les entreprises, fonctions laissées vacantes et que, afin d'assurer à l'intéressée une rémunération conforme à ces nouvelles attributions, il souhaite que, titulaire d'une licence, elle soit rémunérée au 1er échelon de la grille indiciaire d'attaché administratif de l'éducation nationale et de la recherche.
2. A la suite de ce courrier, un nouveau contrat a été conclu, pour la période allant du 1er mars au 31 août 2008, puis un autre couvrant la période s'étendant du 1er septembre 2008 au 31 août 2009. Enfin, le 10 juillet 2009, Mme G... a conclu avec l'Université Aix-Marseille III un contrat de travail à durée indéterminée en application de l'article 13, paragraphe I de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005, pour exercer les fonctions de " gestionnaire scolarité et financière, chargée des relations avec les entreprises et de la formation continue de l'institut " de droit des affaires de la Faculté de Droit et de Science Politique, fonctions rémunérées à l'I.B. 366 (I.M.M. 339).
3. Mme G... s'est ensuite présentée, en 2014, puis en 2015, à l'examen professionnel réservé pour le recrutement d'assistants ingénieurs (ASI). Alors qu'elle avait été déclarée admissible à la session de 2015 et qu'elle s'apprêtait à passer les épreuves orales de cet examen de titularisation, une décision d'inéligibilité prise par l'Université Jean Moulin Lyon III, organisatrice de l'examen, lui a été notifiée par courrier du 3 juillet 2015 lui indiquant que sa candidature n'était pas recevable, au motif que si elle remplissait les conditions pour se présenter à un recrutement réservé de catégorie B dans le cadre de la loi Sauvadet, en revanche, elle ne remplissait pas celles requises pour un recrutement réservé de catégorie A.
4. A la suite de cette décision, Mme G... a été destinataire, à sa demande, le 17 février 2016, de la part du service des ressources humaines d'Aix-Marseille Université, d'un projet d'avenant signé le 26 février 2016, visant à ajouter à son contrat de travail la mention suivante : " A compter du 1er février 2016, les dispositions du contrat en cours sont modifiées comme suit : Mme G... C... perçoit par référence au grade de ASI RF et de catégorie fonction publique CATEGORIE A une rémunération mensuelle brute correspondant à 1'indice suivant : Indice Brut: 396 ". Ce courrier précisait toutefois que, " en 1'état de la règlementation, cet avenant n'a pas d'incidence sur votre inéligibilité au Protocole Sauvadet (volet titularisation) sur un poste de la catégorie hiérarchique 1, telle qu'elle vous a été notifiée par 1'Université Lyon 3 organisatrice du concours ".
5. Afin d'être titularisée, Mme G... a, ensuite, passé avec succès l'examen professionnel réservé ouvert pour le recrutement de techniciens de recherche et de formation, corps de catégorie B, et a été titularisée au 13 octobre 2016 dans ce corps, sans changement de fonctions.
6. Afin d'obtenir l'indemnisation du préjudice qu'elle estime éprouver du fait de ce qu'elle vit comme un déclassement en catégorie B, causé selon elle par une conjonction de fautes commises tant par Aix-Marseille Université qui n'a pas indiqué dans son dernier contrat son grade et sa catégorie, que par l'Université Lyon III qui a écarté à tort sa candidature à l'examen professionnel réservé pour le recrutement d'assistants ingénieurs (ASI), session de 2015, Mme G... a adressé le 27 octobre 2016 une demande d'indemnisation préalable à chacune des deux universités qu'elle estime solidairement responsables, reçue respectivement par chacune d'entre elles les 7 novembre 2016 et 2 novembre 2016. N'ayant fait l'objet, de l'une comme de l'autre, d'aucune réponse, cette demande a fait naître successivement deux décisions implicites de rejet, l'une à partir du 7 janvier 2017, du silence gardé durant plus de deux mois par le président d'Aix-Marseille Université, l'autre à partir du 2 janvier 2017, du silence gardé durant plus de deux mois par le président de l'Université Jean Moulin Lyon III.
7. Mme G... relève appel du jugement n° 1701526 du 24 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a condamné Aix-Marseille Université à lui payer la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral en raison des deux années qu'elle a consacrées à préparer un concours pour lequel sa candidature n'était pas recevable, outre une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté pour le surplus la requête.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la catégorie dans la fonction publique de l'Etat du poste occupé par Mme G... au sein d'Aix-Marseille Université dans le cadre du contrat à durée indéterminée n° 09-014 conclu le 10 juillet 2009 :
8. Aux termes de l'article 33 du décret n° 85-1534 du 31 décembre 1985 fixant les dispositions statutaires applicables aux ingénieurs et aux personnels techniques et administratifs de recherche et de formation du ministère chargé de l'enseignement supérieur : " Les assistants ingénieurs sont chargés de veiller à la préparation et au contrôle de l'exécution d'opérations techniques ou spécialisées, réalisées dans les établissements où ils exercent. Ils peuvent être chargés d'études spécifiques de mise au point ou d'adaptation de techniques ou méthodes nouvelles. Ils concourent à l'accomplissement des missions d'enseignement. Ils peuvent se voir confier des missions d'administration. Ils peuvent participer à l'encadrement de personnels techniques ou administratifs des établissements où ils exercent. ". Aux termes de l'article 41 du même décret : " I. - Les techniciens de recherche et de formation sont chargés de la mise en œuvre de l'ensemble des techniques et méthodes concourant à la réalisation des missions et des programmes d'activité des services et établissements où ils exercent. Ils concourent à l'accomplissement des missions d'enseignement et de recherche. Ils peuvent participer à la mise au point et à l'adaptation des techniques ou méthodes nouvelles et se voir confier des missions d'administration. / Dans les unités d'enseignement et établissements publics locaux d'enseignement, ils peuvent participer dans leurs spécialités, sous la responsabilité des personnels en charge de l'enseignement, aux formes d'activité pratique d'enseignements./ II. - Les techniciens de recherche et de formation de classe normale peuvent être chargés de l'encadrement et de l'animation d'une équipe. / III. - Les techniciens de recherche et de formation de classe supérieure et les techniciens de recherche et de formation de classe exceptionnelle ont vocation à occuper les emplois qui, relevant des domaines d'activité mentionnés au I du présent article, requièrent un niveau d'expertise acquis par la formation initiale, par la formation professionnelle tout au long de la vie et par les acquis de l'expérience professionnelle./ Ils peuvent être investis de responsabilités particulières d'encadrement et de coordination d'une ou plusieurs équipes ".
9. Il résulte de la fiche de poste d'" Assistant-e en ingénierie de formation continue " extraite du Référentiel des Emplois-types de la Recherche et de l'Enseignement Supérieur III (REF.E.R.EN.S.), répertoire des branches d'activités professionnelles et des emplois-types décrivant les métiers des ingénieurs et personnels techniques de recherche et de formation (I.T.R.F.) et des ingénieurs et personnels techniques de la recherche (I.T.A.) établie par le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, que ce poste qui correspond au cadre d'emploi de catégorie A d'assistant ingénieur consiste principalement à organiser la logistique des actions de formation continue en liaison avec les enseignants, les responsables de formation et les intervenants, gérer les aspects administratif et budgétaire des actions de formation (stagiaires, formateurs, contrats, conventions...), analyser les demandes de formation, accueillir, informer, orienter et accompagner les divers publics de la formation continue, assurer le suivi des relations avec les différents partenaires, entreprises, organismes sociaux, services publics, structurer et diffuser l'information sur les dispositifs de formation continue et les systèmes de validation de parcours professionnels, assister les équipes d'enseignants et d'ingénieurs dans la conduite de projet, gérer au quotidien des équipements pédagogiques (centres de ressources, laboratoires, locaux...), administrer et exploiter des bases de données relatives à la scolarité des stagiaires.
10. Il résulte des termes du contrat de travail à durée indéterminée n° 09-014 conclu le 10 juillet 2009 en application des dispositions de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, modifiant notamment l'article 4 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, que l'Université Paul Cézanne Aix-Marseille III a conservé à son service Mme G..., titulaire d'une licence, qu'elle avait recrutée le 18 mars 2003 en contrat à durée déterminée jusqu'alors plusieurs fois renouvelé, en qualité de " gestionnaire scolarité et financière, chargée des relations avec les entreprises et de la formation continue de l'institut " de droit des affaires de la faculté de droit et de science politique. La fiche de poste correspondant à ce contrat, dont il n'est pas contesté par Aix-Marseille Université qu'elle est identique à celle établie en 2007 pour le dernier contrat à durée déterminée, les fonctions de l'intéressée étant inchangées dans le cadre du contrat conclu en 2009, prévoyait que Mme G... était chargée, en sa qualité de responsable de la formation continue à l'institut de droit des affaires, de l'accueil et de l'information des personnes qui souhaitent avoir des renseignements sur les diplômes nationaux et universitaires et toutes les formations se réalisant en formation continue, les entretiens, le conseil des candidats pour leur orientation suivant leur projet professionnel, l'analyse et la sélection des dossiers avant de les présenter au responsable du diplôme concerné, l'accompagnement des stagiaires tout au long de leur formation et suivi de leur dossier au niveau des différents organismes de financement, l'aide à la recherche de stage professionnel et d'emploi et le suivi pédagogique, animation et coordination pédagogique. Dans le cadre de ses relations avec les entreprises, elle était chargée de la gestion de l'actualisation en droit des affaires destinée aux professionnels, de l'organisation de journées mensuelles de formation tout au long de l'année, de colloques, du forum des masters de l'institut, de formations à la carte à la demande des professionnels, de développer des déjeuners ou dîners débats sur des thèmes de droit des affaires et de collecter et gérer la taxe d'apprentissage. Dans le cadre de ses fonctions de responsable de la gestion du site de l'institut, elle était en charge du contrôle et de la coordination de l'annuaire informatique des anciens étudiants (plus de 3 000) et de la création et de la mise à jour des pages relatives aux activités de l'institut. Elle était enfin chargée de l'établissement de statistiques sur l'insertion des anciens étudiants, de la gestion des offres et demandes d'emplois, de la réalisation d'une base de données et de l'organisation de manifestations.
11. Malgré l'importance des tâches qui étaient ainsi confiées à Mme G..., il ne résulte pas de sa fiche de poste, relatée au point 10 ci-dessus, que celle-ci était en charge des tâches de direction et de conception correspondant à celles décrites dans la fiche de poste d'" Assistant-e en ingénierie de formation continue " extraite du Référentiel des Emplois-types de la Recherche et de l'Enseignement Supérieur III citée au point 9 ci-dessus. Dès lors, Mme G... n'est pas fondée à soutenir qu'elle occupait sous contrat un emploi d'assistante ingénieur correspondant à la catégorie A de la fonction publique de l'Etat, nonobstant les mentions figurant sur le seul bulletin de salaire qu'elle produit du mois d'août 2015 qui porte comme grade la mention " BIATOSS (personnels de bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniques, ouvriers de service, sociaux et de santé de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur) CDI A ", l'attestation établie par M. B... H..., chef du service central des rémunérations de l'université à l'époque qui déclare qu'" elle était rémunérée en qualité d'agent contractuel en CDI de catégorie A ", ainsi que celle établie en vue de sa présentation au concours de titularisation en catégorie A d'assistante ingénieur, session 2014, par Mme I..., directrice adjointe des ressources humaines qui y déclare qu'elle était au 31 mars 2011 employée par l'université en CDI de catégorie A. Cette appartenance à la catégorie A de son emploi n'est pas davantage établie par un mail du 14 octobre 2014 par lequel la direction des ressources humaines d'Aix-Marseille Université avait, à tort, rejeté sa candidature à un poste de responsable du bureau de la formation, au motif qu'il s'agissait d'un emploi de technicien de catégorie B.
12. Compte tenu de ce qui précède, Mme G... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a considéré qu'elle n'occupait pas sous contrat un poste de catégorie A dans la fonction publique de l'Etat.
En ce qui concerne la responsabilité de l'Université Jean Moulin Lyon III :
13. Compte tenu des éléments décrits aux points 9 à 11, l'Université Jean Moulin Lyon III était fondée, au vu des fonctions exercées par Mme G..., à la déclarer, par courrier du 3 juillet 2015, irrecevable à se présenter à l'examen professionnel réservé pour le recrutement d'assistants ingénieurs, session 2015, et à passer les épreuves orales d'admission de cet examen de titularisation. Dès lors, Mme G... n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de l'Université Jean Moulin Lyon III. Par suite, le tribunal administratif de Marseille était fondé à rejeter les conclusions de Mme G... formulées à ce titre.
En ce qui concerne la responsabilité d'Aix-Marseille Université :
14. En premier lieu, Mme G... ne saurait utilement reprocher à Aix-Marseille Université d'avoir omis de mentionner la catégorie hiérarchique de son emploi dans son contrat de travail dès lors, d'une part, qu'à la date de la signature de ce contrat, cette mention n'était pas obligatoire et, d'autre part, que cette absence n'est, au demeurant, pas à l'origine de la décision du 3 juillet 2015 par laquelle l'université Jean Moulin Lyon III, qui s'est fondée sur les fonctions effectivement exercées, a déclaré sa candidature irrecevable.
15. En deuxième lieu, Aix-Marseille Université ne peut être regardée comme ayant permis à Mme G... d'espérer que le fait de porter, par avenant, la mention de la catégorie hiérarchique de son emploi sur son contrat de travail permettrait la régularisation de sa situation, Aix-Marseille Université ayant pris la précaution, par une lettre du 17 février 2016, de préciser que l'intervention de l'avenant n'aurait pas d'influence sur la décision du 3 juillet 2015 de l'université Jean Moulin Lyon III. Par ailleurs, la circonstance, à la supposer avérée, qu'Aix-Marseille Université aurait tardé à proposer cet avenant à la requérante n'est pas constitutive d'une faute, dès lors que celui-ci n'a pas eu d'influence sur les fonctions effectivement exercées par la requérante. Enfin, Mme G... n'est pas fondée à soutenir que Aix-Marseille Université aurait commis une faute le 5 avril 2016 en modifiant son état des services pour remplacer la mention relative à l'exercice de fonctions de catégorie A, à compter du 1er mars 2008, par celle de fonctions de catégorie B de cette date au 31 janvier 2016, dès lors qu'il résulte de l'instruction que la requérante a exercé des fonctions de secrétariat du 1er mars 2008 au 31 août 2009 et des fonctions proches d'un technicien en formation et en orientation-insertion professionnelle, corps de catégorie B, à compter du 1er septembre 2009.
16. En revanche, en troisième lieu, en établissant le 27 mars 2014 un état des services mentionnant que Mme G... exerçait des fonctions de catégorie A depuis le 1er mars 2008, en rejetant une demande de mutation de la requérante aux motifs que le poste concerné était un poste de catégorie B et que Mme G... était un agent de catégorie A et enfin, en contactant la requérante pour lui indiquer que les sessions d'examen professionnel au titre de l'année 2013 ne concernaient que les agents exerçant des fonctions de catégorie B et C et qu'elle devrait attendre l'année 2014 pour pouvoir se présenter à cet examen professionnel en sa qualité d'agent exerçant des fonctions de catégorie A, Aix-Marseille Université doit être regardée comme ayant induit la requérante en erreur sur ses possibilités de titularisation dans le cadre de la " loi Sauvadet " en catégorie A, ce qui constitue une faute de nature à engager sa responsabilité.
En ce qui concerne l'évaluation du préjudice éprouvé par Mme G... :
17. En premier lieu, compte tenu du comportement d'Aix-Marseille Université décrit au point 16 du présent arrêt, qui a induit la requérante en erreur sur ses possibilités de titularisation dans le cadre de la " loi Sauvadet " en catégorie A, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral éprouvé de ce fait par Mme G... en condamnant Aix-Marseille Université à lui verser la somme de 3 000 euros.
18. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que Mme G... s'est présentée dès 2014 à un examen professionnel de titularisation de catégorie A et s'y est présentée à nouveau en 2015. Après la décision du 3 juillet 2015 d'irrecevabilité de sa candidature prononcée à juste titre par l'Université de Lyon III, elle s'est présentée avec succès à un examen professionnel pour une titularisation dans un corps de catégorie B. Dès lors, elle est fondée à soutenir qu'elle a subi une perte de chance sérieuse d'être titularisée dès octobre 2013 en catégorie B. Il sera fait une juste appréciation des troubles entraînés dans ses conditions d'existence, éprouvés du fait des deux années qu'elle a consacrées à préparer un concours pour lequel sa candidature n'était pas recevable, en condamnant Aix-Marseille Université à lui verser à ce titre la somme de 3 000 euros.
19. En revanche, en troisième lieu, si Mme G... demande la réparation de son préjudice financier en raison de la perte de rémunération qu'elle aurait subie entre octobre 2013 et octobre 2015, d'une part, elle n'établit ni la réalité ni l'ampleur de son préjudice et, d'autre part, il résulte de l'instruction qu'elle a été rémunérée par Aix-Marseille Université en tant qu'agent de niveau de catégorie A à compter du 1er mars 2008.
20. Enfin, en dernier lieu, ne pouvant prétendre, comme il a été dit, avoir jamais exercé des fonctions correspondant à l'emploi d'assistante-ingénieur de catégorie A, Mme G... n'est pas davantage fondée à demander la réparation des autres préjudices qu'elle invoque. Par suite le tribunal administratif de Marseille était fondé à rejeter ses conclusions indemnitaires formulées au titre de ses préjudices de manque à gagner.
21. Par suite, compte tenu de ce qui a été dit aux points 17 et 18 du présent arrêt, il y a lieu de condamner Aix-Marseille Université à payer à Mme G... la somme totale de 6 000 euros en réparation de son préjudice et de réformer en conséquence le jugement du tribunal administratif de Marseille.
En ce qui concerne la demande d'intérêts moratoires :
22. Aux termes de l'article 1231-6 du code civil : " Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte... ". Il résulte de ces dispositions que lorsqu'ils sont demandés, et quelle que soit la date de la demande, les intérêts des indemnités allouées sont dus à compter du jour où la demande de réclamation de la somme principale est parvenue à la partie débitrice ou, à défaut, à compter de la date d'enregistrement au greffe du tribunal administratif des conclusions tendant au versement de cette indemnité.
23. En l'espèce, Mme G... a droit à ce que la somme qui lui est allouée en réparation de son préjudice soit assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2016, date de réception de la demande préalable d'indemnisation par les services d'Aix-Marseille Université.
En ce qui concerne la capitalisation des intérêts :
24. Aux termes de l'article 1343-2 du code civil : " Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise ". Il résulte de ces dispositions que lorsqu'ils sont dus au moins pour une année entière, les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts. Pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée, et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière. Le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande.
25. En l'espèce, Mme G... a demandé la capitalisation des intérêts sur la somme qui lui est due, pour la première fois le 3 février 2017, date d'enregistrement de sa requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de Marseille. Dès lors, il y a lieu de faire droit à sa demande de capitalisation des intérêts à compter du 7 novembre 2017, date à laquelle est due, pour la première fois, une année entière d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
26. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
27. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge d'Aix-Marseille Université une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme G... et non compris dans les dépens, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme G... qui, dans la présente instance, n'est pas la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par Aix-Marseille Université et non compris dans les dépens.
29. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'Université Jean Moulin Lyon III présentées au titre des mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : Aix-Marseille Université est condamnée à payer à Mme G... une somme totale de 6 000 euros en réparation de son préjudice.
Article 2 : Cette somme portera intérêts moratoires au taux légal à compter du 7 novembre 2016, avec capitalisation de ces intérêts à compter du 7 novembre 2017, date à laquelle est due, pour la première fois, une année entière d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure.
Article 3 : Le jugement n° 1701526 du 24 juin 2019 du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme G... est rejeté.
Article 5 : L'Etat (ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation) est mis hors de cause.
Article 6 : Il est mis à la charge d'Aix-Marseille Université, au profit de Mme G..., une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Les conclusions d'Aix-Marseille Université et de l'Université Jean Moulin Lyon III tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... G..., à Aix-Marseille Université et à l'Université Jean Moulin Lyon III.
Copie en sera adressée au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2021, où siégeaient :
- M. Guy Fédou, président,
- M. D... Taormina, président assesseur,
- M. François Point, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2021.
N°19MA03951 11