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17/06/2021 | FRANCE | N°20MA03096

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 17 juin 2021, 20MA03096


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1904205 en date du 10 février 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 août 2020, Mme

C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 février 2020 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1904205 en date du 10 février 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 août 2020, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 février 2020 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 du préfet du Gard ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la décision de refus de séjour :

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale du fait de l'illégalité entachant le refus de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où elle ne pourra pas bénéficier d'un suivi adapté à sa pathologie en Arménie ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2020, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., de nationalité arménienne, née le 21 juillet 1978, déclare être entrée sur le territoire français le 10 juillet 2016. Le 11 juin 2018, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Elle relève appel du jugement du 10 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 septembre 2019 du préfet du Gard lui refusant la délivrance du titre de séjour sollicité et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et, en particulier, des mentions de la décision contestée que le préfet du Gard a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de Mme C... avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour. Ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Nîmes, la circonstance que certains éléments relatifs à la situation de la requérante seraient erronés, ou auraient été omis, ne suffit pas à démontrer une absence d'examen réel. Le moyen d'erreur de droit qu'elle soulève sur ce point doit dès lors être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

4. Dans son avis émis le 2 octobre 2018, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait effectivement bénéficier dans son pays d'origine de soins appropriés à son état de santé. Il ressort des pièces du dossier que si Mme C..., qui souffre d'un cancer de l'estomac, a été opérée en Arménie en juin 2016 et a suivi en France un traitement par radio-chimiothérapie, les pièces qu'elle produit se bornent à faire état de la nécessité d'un suivi médical, d'un traitement nutritionnel et la prise de vitamine B12, sans invoquer l'impossibilité de prodiguer de tels soins en Arménie. Par ailleurs, le préfet du Gard verse au débat la fiche pays établie par le ministère de l'intérieur, la fiche Medcoi ainsi qu'une liste de médicaments disponibles en Arménie datant de décembre 2016, qui permettent d'établir que les soins médicaux que requiert l'état de santé de la requérante sont disponibles en Arménie. Dans ces conditions, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Gard a fait une inexacte application des dispositions précitées en lui refusant le séjour sur leur fondement.

5. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que la requérante est entrée en France pour la première fois le 10 juillet 2016 à l'âge de trente-huit ans sous couvert d'un visa délivré par les autorités italiennes. Le 22 mars 2017, elle a fait l'objet d'une décision de transfert vers l'Italie en vue de l'examen de sa demande d'asile et a été déclarée en fuite le 3 avril 2017. Si elle fait état de la présence sur le territoire national de ses deux enfants, elle ne conteste cependant pas le caractère irrégulier de leur séjour ainsi que de celui de son époux. En outre, elle n'établit pas qu'elle serait isolée dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-huit ans. Les circonstances qu'elle ait fait des efforts d'intégration, que ses enfants soient scolarisés en France et qu'elle et son mari bénéficient d'une promesse d'embauche, au demeurant établie par le même employeur, à la même date pour chacun d'entre eux, et postérieurement à la décision attaquée, ne suffisent pas à faire regarder le refus de séjour dont elle est l'objet comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, le préfet du Gard, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, aurait porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus a été pris. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs et au vu des mêmes éléments du dossier, le préfet du Gard n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la décision de refus de titre de séjour opposée à Mme C... n'est pas entachée des illégalités que celle-ci lui impute. Dès lors, elle n'est pas fondée à invoquer son illégalité par voie d'exception à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français.

8. En deuxième lieu, la décision contestée énonce, avec une précision suffisante, les considérations de droit et de fait qui fondent l'obligation faite à Mme C... de quitter le territoire français. Le préfet n'était pas tenu de rappeler l'ensemble des éléments relatifs à la situation de la requérante mais seulement ceux sur lesquels il s'est fondé pour prendre sa décision.

9. En troisième lieu, si, aux termes des dispositions de l'article L 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ", il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 4 ci-dessus, que la requérante ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement adapté en Arménie. Ce moyen doit donc être écarté.

10. En quatrième lieu, à l'appui du moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, Mme C... invoque les mêmes arguments qu'à l'encontre de la décision de refus de séjour. Ce moyen doit donc être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 ci-dessus.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont, par leur jugement, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Gard du 25 septembre 2019. Sa requête doit dès lors être rejetée.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée par Me B... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C..., à Me B..., et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2021, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente de chambre,

- Mme Bernabeu, présidente assesseure,

- Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 juin 2021.

6

N° 20MA03096

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 20MA03096
Date de la décision : 17/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : DEBUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-17;20ma03096 ?
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