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15/06/2021 | FRANCE | N°19MA00526

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9eme chambre - formation a 3, 15 juin 2021, 19MA00526


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel le maire de Gordes a délivré à la société civile immobilière (SCI) Le Hameau d'Orbiane un permis de construire, valant division, en vue de l'édification d'un groupe d'habitation comprenant huit maisons.

Par un jugement n° 1800774 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête des mémoires, enregistr

s les 5 février 2019, les 16 et 18 octobre 2019 et 10 mars 2020, les 1er et 16 avril 2021, M. F......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel le maire de Gordes a délivré à la société civile immobilière (SCI) Le Hameau d'Orbiane un permis de construire, valant division, en vue de l'édification d'un groupe d'habitation comprenant huit maisons.

Par un jugement n° 1800774 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête des mémoires, enregistrés les 5 février 2019, les 16 et 18 octobre 2019 et 10 mars 2020, les 1er et 16 avril 2021, M. F..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 4 décembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2017 ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Gordes et de la SCI Le Hameau d'Orbiane une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas statué sur les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme ;

- aucun permis de démolir n'a été délivré en méconnaissance de l'article R. 431-21 du code de l'urbanisme alors que le projet prévoit la démolition d'un muret ;

- les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;

- le projet litigieux méconnaît les articles R. 111-2, R. 111-5, R. 111-8, R. 111-15, R. 111-16, R. 111-17, et R. 111-27 du même code.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 août 2019 et les 31 mars et 27 avril 2021, la SCI Le Hameau d'Orbiane, représentée par la SCP Lachat-Mouronvalle, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. F... d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- M. F... n'a pas intérêt pour agir à l'encontre de l'arrêté du 13 octobre 2017 ;

- les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

Un mémoire enregistré le 13 mai 2021 présenté pour M. F... n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

La requête a été communiquée à la commune de Gordes qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. F..., et de Me A..., représentant Le Hameau d'Orbiane.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... fait appel du jugement du 4 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel le maire de Gordes a délivré à la SCI Le Hameau d'Orbiane un permis de construire, valant division, en vue de l'édification d'un groupe d'habitations comprenant 8 maisons et 18 places de stationnement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.

3. En l'espèce, le tribunal a répondu aux moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme au point 11 de sa décision et la critique formulée par M. F... sur ce point relève du bien-fondé du jugement et non de sa régularité.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

4. En premier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 111-8, R. 111-15, R. 111-16 et R. 111-17 du code de l'urbanisme ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Nîmes par M. F.... Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, lorsque l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.

6. Il ressort de l'avis émis le 13 juillet 2017 par le syndicat des eaux Durance-Ventoux que l'opération projetée peut être raccordée au réseau de distribution d'eau par un branchement de 60 m de longueur et il ne ressort pas des pièces du dossier que l'alimentation en eau des constructions projetées nécessite, indépendamment de ce branchement, des travaux de renforcement du réseau public. Il suit de là que M. F... n'est pas fondé à soutenir que le délai de réalisation de ces travaux aurait dû être précisé en application des dispositions précitées.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". L'article R. 111-5 du même code dispose que : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic ".

8. L'autorité compétente et, en cas de recours, le juge administratif doivent s'assurer qu'une ou plusieurs voies d'accès au terrain d'assiette du projet pour lequel un permis de construire est demandé permettent de satisfaire aux exigences posées par les règles d'urbanisme, notamment celles de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme. A cette fin, pour apprécier les possibilités d'accès au terrain pour le propriétaire ou les tiers, il leur incombe de s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie. Il résulte par ailleurs des dispositions des articles L. 1424-2 à L. 1424-4 du code général des collectivités territoriales que les services publics d'incendie et de secours sont, dans le cadre de leurs missions de protection et de secours, en droit d'intervenir sur tout le territoire de la commune, sans que puisse leur être opposé le caractère privé des voies qu'ils doivent emprunter. Dès lors, pour apprécier les possibilités d'accès de ces services au même terrain d'assiette, il appartient seulement à l'autorité compétente et au juge de s'assurer que les caractéristiques physiques d'une voie d'accès permettent l'intervention de leurs engins, la circonstance que cette voie ne serait pas ouverte à la circulation publique ou grevée d'une servitude de passage étant sans incidence.

9. Le projet prévoit la réalisation d'un lotissement en zone B 3 du Plan de Prévention des Risques Incendie du massif des Monts de Vaucluse Ouest et est par suite exposé à un aléa moyen. Toutefois, d'une part, le chemin de desserte constitué par la Route de Sénanque, la RD177, présente des caractéristiques et notamment une largeur de 5 mètres suffisante pour le passage des véhicules de lutte contre l'incendie et de secours. D'autre part, le terrain d'assiette du projet, qui ne prévoit pas la démolition du muret ancien le bordant contrairement à ce qui est soutenu, est directement desservi depuis cette la route départementale, par un accès existant prenant la forme d'une " placette " triangulaire et ouvert à la circulation publique. La circonstance que ce passage ne soit pas bitumé et ne comporte pas de signalisation au sol n'est pas de nature à en établir la dangerosité. S'il ressort des pièces du dossier et notamment du constat d'huissier établi le 6 février 2020, que l'accès pour les véhicules au lotissement, dont l'emprunt, compte tenu de la configuration des lieux s'avère indispensable à la défense de certaines des villas qui le composeront, présente une largeur maximale de 3,40 m en sus du passage pour les piétons, il ressort des indications données par le service d'incendie et de secours accessibles à tous concernant le gabarit des véhicules qu'une telle largeur suffit à en assurer le passage tout comme de la voie interne du lotissement qui comprend une aire de retournement. Il en va de même pour les véhicules des habitants du lotissement. D'autre part, si le SDIS a estimé dans son avis du 11 août 2017 que le projet présentait des insuffisances s'agissant de la défense extérieure contre l'incendie, l'ensemble de ses prescriptions relatives à la mise en place d'un poteau incendie répondant aux exigences du Plan de Prévention des Risques Incendie du massif des Monts de Vaucluse Ouest dont il précise les caractéristiques techniques et la nécessaire validation par ses soins, aux déboisement et débroussaillement et concernant les constructions est repris en annexe de l'arrêté en litige. La circonstance que la société ne mette pas en oeuvre ces prescriptions qui sont réalisables est sans influence sur la légalité de l'arrêté en litige mais relève de son exécution. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées n'est pas fondé.

10. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".

11. Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

12. Si le terrain d'assiette du projet est inclus dans le site inscrit du Plan de Gordes et situé dans le périmètre délimité des abords de l'ancien château de Gordes, monument historique et les lieux en cause présentent un intérêt paysager, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de ses caractéristiques architecturales et paysagères, le projet d'édification de cinq maisons en RDC avec des toits végétalisés et 3 autres en R+1 avec des charpentes en bois recouvertes de tuiles, l'ensemble de ces constructions étant en murs de pierre, bénéficie d'une insertion satisfaisante dans son environnement tant bâti que naturel et végétal. En outre, l'arrêté en litige est assorti de prescriptions architecturales reprenant celles figurant dans l'avis conforme émis le 11 août 2017 par l'architecte des Bâtiments de France et visant à assurer l'insertion du projet dans cet environnement. Dans ces conditions, et alors même il entraîne la suppression d'une partie de la végétation présente sur le terrain d'assiette, le projet autorisé n'est pas de nature à porter au caractère ou à l'intérêt des lieux et paysages avoisinants une atteinte telle que le maire de Gordes aurait, en autorisant sa réalisation sous réserve du respect de ces prescriptions, commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

13. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la SCI Le Hameau d'Orbiane, que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2017.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Gordes et la SCI Le Hameau d'Orbiane, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, versent à M. F... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'appelant une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à la SCI Le Hameau d'Orbiane.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : M. F... versera à la SCI Le Hameau d'Orbiane une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F..., à la commune de Gordes et à la SCI Le Hameau d'Orbiane.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2021, où siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme B..., présidente assesseure,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021.

N° 19MA00526 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 19MA00526
Date de la décision : 15/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

68-03-025-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Octroi du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: Mme Frederique SIMON
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP LACHAT MOURONVALLE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-15;19ma00526 ?
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