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15/06/2021 | FRANCE | N°18MA03466

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9eme chambre - formation a 3, 15 juin 2021, 18MA03466


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

LA SCI de Brouzet a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 22 juin 2016 par laquelle le maire de Brouzet-Lès-Quissac, agissant au nom de l'Etat, a implicitement refusé de constater une infraction aux règles d'urbanisme sur les parcelles cadastrées AL59 et AL104 situées lieu-dit " Le Patron ".

Par un jugement n° 1602211 du 23 mai 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enre

gistrés le 23 juillet 2018 et le 15 septembre 2020 la SCI de Brouzet, représentée par Me A...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

LA SCI de Brouzet a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 22 juin 2016 par laquelle le maire de Brouzet-Lès-Quissac, agissant au nom de l'Etat, a implicitement refusé de constater une infraction aux règles d'urbanisme sur les parcelles cadastrées AL59 et AL104 situées lieu-dit " Le Patron ".

Par un jugement n° 1602211 du 23 mai 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 juillet 2018 et le 15 septembre 2020 la SCI de Brouzet, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 23 mai 2018 ;

2°) d'annuler la décision implicite de refus du maire de Brouzet-Lès-Quissac ;

3°) d'enjoindre au maire de Brouzet-Les-Quissac, agissant au nom de l'Etat, et en cas de carence de celui-ci au préfet du Gard, de dresser procès-verbal d'infraction aux règles d'urbanisme sur les parcelles cadastrées AL59 et AL104 situées lieu-dit " Le Patron " ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Brouzet-Lès-Quissac une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu à l'intégralité de ses moyens ;

- les travaux exécutés sur ces parcelles étaient soumis à autorisation d'urbanisme par les articles R. 421-20 et R. 421-23 du code de l'urbanisme ;

- l'article L. 541-32 du code de l'environnement est méconnu ainsi que les prescriptions de l'article R. 541-45 du même code ;

- les travaux n'ont donné lieu à aucune autorisation au titre de la " police des eaux " ;

- ils sont constitutifs de l'infraction prévue par l'article L. 624-3 du code du patrimoine.

Par un mémoire, enregistré les 4 mars 2019, la commune de Brouzet-Lès-Quissac, représentée par la SCP Margall D..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'appelante d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le moyen tiré de ce que les travaux litigieux étaient soumis à autorisation n'est pas fondé ;

- les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du code de l'environnement et de celui du patrimoine sont inopérants.

Par un mémoire en défense, enregistré 9 décembre 2019 la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- le moyen tiré de ce que les travaux litigieux étaient soumis à autorisation n'est pas fondé ;

- les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du code de l'environnement et de celui du patrimoine sont inopérants.

Un mémoire enregistré le 30 septembre 2020 présenté pour la commune de Brouzet-Les-Quissac n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Un mémoire enregistré le 16 octobre 2020 présenté pour la SCI de Brouzet n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la SCI de Bouzet, et de Me D..., représentant la commune de Brouzet-Lès-Quissac.

Une note en délibéré présentée pour la SCI de Brouzet a été enregistrée le 7 juin 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de Brouzet-Lès-Quissac a implicitement rejeté le 22 avril 2016 la demande de la SCI de Brouzet afin de dresser procès-verbal d'une infraction de réalisation, sur des parcelles des parcelles situées lieu-dit " Le Patron " cadastrées AL59 et AL104, sans autorisation d'urbanisme, de travaux d'exhaussement dont la hauteur excède deux mètres et qui portent sur une superficie supérieure ou égale à cent mètres carrés. La SCI de Brouzet fait appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 23 mai 2018 rejetant sa demande tendant à titre principal à l'annulation de cette décision implicite.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges n'ont ni visé ni répondu au moyen tiré de de la méconnaissance de l'article R. 421-23 f) du code de l'urbanisme. Ils ont par suite entaché leur décision d'irrégularité alors même que ce moyen était inopérant. La requérante est par suite fondée à en demander l'annulation.

3. Il y a lieu d'évoquer et, par là, de statuer en qualité de juge de première instance sur la demande présentée par la SCI de Brouzet devant le tribunal administratif de Nîmes.

Sur la légalité de la décision du 22 juin 2016 :

4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-20 du code de l'urbanisme : " Dans les secteurs sauvegardés, les sites classés ou en instance de classement et les réserves naturelles doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager (...) - les (...) exhaussements du sol dont la hauteur (...) excède deux mètres et portant sur une superficie supérieure ou égale à cent mètres carrés (...) ; ". Aux termes de l'article R. 421-23 f) du même code : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable les travaux, installations et aménagements suivants : (...) f) A moins qu'ils ne soient nécessaires à l'exécution d'un permis de construire, les affouillements et exhaussements du sol dont la hauteur, s'il s'agit d'un exhaussement, ou la profondeur dans le cas d'un affouillement, excède deux mètres et qui portent sur une superficie supérieure ou égale à cent mètres carrés (...) ".

5. D'une part, la requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que les travaux en litige ont été effectuées sur des parcelles situées dans le champ de visibilité du Domaine du Patron, inscrit à l'inventaire des monuments historiques.

6. D'autre part, il ressort des deux procès-verbaux dressés le 14 septembre 2016 par un agent assermenté de la direction départementale des territoires et de la mer du Gard que l'exhaussement constitué de terre et de blocs de pierre sur les parcelles AL59 et AL104 est d'une hauteur inférieure à deux mètres, sur la totalité de ces deux parcelles, aucun exhaussement n'ayant toutefois été réalisé sur les parties de terrain situées en zone d'aléa du plan de prévention des risques inondation du Moyen Vidourle. Ces constats ne sont pas utilement remis en cause par la production par la société requérante d'un constat d'huissier du 1er avril 2016 avec photos et d'un plan de nivellement établi le même jour par un technicien-géomètre à partir du chemin du Valat des Valtz et de la départementale n° 118, par relevé terrestre laser. Par ailleurs, elle ne peut utilement se prévaloir des deux autres procès-verbaux du même jour qui constatent des exhaussements de plus de deux mètres de hauteur dès lors qu'ils sont relatifs à d'autres parcelles que celles concernées par sa demande.

7. En deuxième lieu, l'article L. 624-3 du code du patrimoine dispose que : " Sont punies des peines prévues à l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme : 1° La réalisation, sans l'autorisation prévue par l'article L. 621-31, de toute opération de nature à affecter l'aspect d'un immeuble situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit parmi les monuments historiques( ...) ".

8. La SCI de Brouzet ne peut utilement se prévaloir de l'article L. 624-3 précité du code du patrimoine dès lors que les travaux en litige étaient entièrement soumis comme il a été dit à l'application de l'article R. 421-20 du code de l'urbanisme.

9. En troisième lieu, aux termes l'article L. 541-1-1 du code de l'environnement : " Au sens du présent chapitre, on entend par : Déchet : toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire (...).

10. En application de l'article L541-1-1 précité du code de l'environnement, la terre et les blocs de pierre avec lesquels ont été réalisés les exhaussements sur les parcelles AL59 et AL104 ne constituent pas des déchets. La SCI de Brouzet ne peut dès lors par utilement invoquer les articles L. 541-32 et R. 541-45 du code de l'environnement.

11. En dernier lieu, si la requérante soutient que les travaux auraient dû faire l'objet d'une autorisation au titre de la " police de l'eau " alors même que l'ensemble du secteur est exposé à un sévère risque d'inondation au motif que les travaux entrepris sur la parcelle AO64 ont emporté le détournement du lit d'un ruisseau, cette parcelle n'était en tout état de cause pas concernée par sa demande.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI de Brouzet n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision implicite du maire de Brouzet-Lès-Quissac refusant de dresser procès-verbal d'infraction. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

13. Lorsqu'il lui est demandé de mettre en oeuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme, le maire agit au nom de l'Etat. La décision implicite en litige ayant été prise au nom de l'Etat, la commune de Brouzet-Les-Quissac n'est pas partie à la présente instance au sens des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par suite, ces dispositions font obstacle aux conclusions présentées par la commune et par la SCI de Brouzet au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 23 mai 2018 est annulé.

Article 2 : La demande de la SCI de Brouzet devant le tribunal administratif de Nîmes et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetées.

Article 3 : les conclusions présentées par la commune de Brouzet-Lès-Quissac au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI de Brouzet, au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la commune de Brouzet-lès-Quissac.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2021, où siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme B..., présidente assesseure,

- Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021.

2

N° 18MA03466


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 18MA03466
Date de la décision : 15/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

68-03-05-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Contrôle des travaux. Interruption des travaux.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: Mme Frederique SIMON
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : GUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-15;18ma03466 ?
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