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14/06/2021 | FRANCE | N°18MA04800

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 14 juin 2021, 18MA04800


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Vitrolles a demandé au tribunal administratif de Marseille de déclarer la nullité de l'article 4 de la convention de concession d'aménagement conclue le 4 décembre 1992 avec la société anonyme vitrollaise d'économie mixte (SAVEM), en tant qu'elle constituait une aide publique illégale.

Par un jugement n° 1605252 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a déclaré nulle l'intégralité de ladite convention.

Procédure devant la Cour :

Par une requ

te et un mémoire enregistrés le 19 novembre 2018 et le 12 février 2020, la SCI Vitrolles Roqueb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Vitrolles a demandé au tribunal administratif de Marseille de déclarer la nullité de l'article 4 de la convention de concession d'aménagement conclue le 4 décembre 1992 avec la société anonyme vitrollaise d'économie mixte (SAVEM), en tant qu'elle constituait une aide publique illégale.

Par un jugement n° 1605252 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a déclaré nulle l'intégralité de ladite convention.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 19 novembre 2018 et le 12 février 2020, la SCI Vitrolles Roquebrune, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 septembre 2018 ;

2°) de rejeter la demande de la commune de Vitrolles ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Vitrolles la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est tardive et dépourvue d'objet dès lors qu'elle porte sur une convention arrivée à son terme ;

- la requête est irrecevable en tant qu'elle la met en cause alors qu'elle n'est pas partie à la convention d'aménagement du 4 décembre 1992 en litige et que la procédure n'a pas été menée au contradictoire de la SAVEM pourtant partie à la convention ;

- la commune de Vitrolles ne justifie pas d'un intérêt à agir ;

- le tribunal a statué ultra petita en annulant l'intégralité de la convention alors que la commune de Vitrolles demandait la nullité de son seul article 4.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 avril 2019, la commune de Vitrolles, représentée par Me D... et Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SCI Vitrolles Roquebrune la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la SCI Vitrolles Roquebrune ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 13 février 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 82-6 du 7 janvier 1982 approuvant le plan intérimaire 1982-1983 ;

- la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions ;

- la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983 relative aux sociétés d'économie mixte locales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... Massé-Degois, rapporteure,

- les conclusions de M. B... Thielé, rapporteur public,

- et les observations de Me A... représentant la SCI Vitrolles Roquebrune.

Considérant ce qui suit :

1. Le 4 décembre 1992, la commune de Vitrolles a conclu avec la société anonyme " Vitrollaise d'économie mixte ", dénommée la SAVEM, une convention de concession d'aménagement portant sur la zone industrielle des Estroublans située sur un ensemble de terrains de 71 hectares entre l'autoroute A7 et la route départementale n° 9. Cette convention a été conclue pour une durée de 8 ans prorogeable par avenants successifs. En vertu de son article 4, la commune de Vitrolles s'est notamment engagée à garantir à hauteur de 50 % la SAVEM du paiement des loyers en cas d'acquisition d'un bail à construction. Par un acte de cession partielle conclu le 21 janvier 1993 avec la société Onasud, la SAVEM est devenue titulaire des droits et obligations résultant d'un bail à construction portant sur un terrain appartenant à la SCI Vitrolles Roquebrune. Le même acte prévoit, en sa page 14, une promesse de délégation à la SCI Vitrolles Roquebrune " de créance éventuelle de la SAVEM " envers la commune de Vitrolles. Le 13 décembre 2010, le tribunal de commerce de Salon-de-Provence a prononcé la liquidation judiciaire de la SAVEM. Le 24 décembre 2015, la SCI Vitrolles Roquebrune a signifié à la commune de Vitrolles une cession de créance d'un montant de 480 369,63 euros en exécution de la garantie de paiement des loyers dus par la SAVEM et prévue à l'article 4 de la convention de concession. Saisi par la commune de Vitrolles d'une requête introductive d'instance en vue d'obtenir la déclaration de nullité de l'article 4 de la convention de concession d'aménagement conclue le 4 décembre 1992, le tribunal administratif de Marseille, par un jugement du 18 septembre 2018 dont la SCI Vitrolles Roquebrune relève appel, a déclaré nulle ladite convention de concession d'aménagement.

2. En premier lieu, les parties à un contrat administratif peuvent saisir le juge d'un recours de plein contentieux contestant la validité du contrat qui les lie. Il appartient alors au juge, lorsqu'il constate l'existence d'irrégularités, d'en apprécier l'importance et les conséquences, après avoir vérifié que les irrégularités dont se prévalent les parties sont de celles qu'elles peuvent, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, invoquer devant lui. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise et en tenant compte de l'objectif de stabilité des relations contractuelles, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, la résiliation du contrat ou, en raison seulement d'une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, son annulation. Cette action est ouverte aux parties au contrat pendant toute la durée d'exécution de celui-ci.

3. En second lieu, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel.

4. Il résulte de l'instruction que la convention de concession d'aménagement portant sur la zone industrielle des Estroublans a été conclue le 4 décembre 1992 pour une durée de huit ans, dès qu'elle a été rendue exécutoire, renouvelable par avenants. Dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que de tels avenants prorogeant la durée de validité de la convention aient été conclus, le contrat doit être considéré comme totalement exécuté et arrivé à son terme à la date du 4 décembre 2000. Dans ces conditions, alors qu'au surplus le vice entachant ce contrat ne relève pas des conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, la demande présentée par la commune de Vitrolles, seize ans après son terme, n'était ainsi pas recevable. La SCI Vitrolles Roquebrune est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a fait droit, par son jugement en date du 18 septembre 2018, à la demande de la commune de Vitrolles en déclarant nulle ladite convention. Ce jugement doit, dès lors, être annulé.

5. En l'absence de conclusions subsidiaires présentées par la commune de Vitrolles dont pourrait se trouver saisie la Cour par l'effet dévolutif de l'appel, il y a lieu de rejeter pour irrecevabilité la demande de première instance.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions s'opposent à ce que la somme réclamée par la commune de Vitrolles sur leur fondement soit mise à la charge de la SCI Vitrolles Roquebrune, qui n'est pas la partie perdante. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Vitrolles, au profit de l'appelante, une somme de 2 000 euros sur le fondement de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 18 septembre 2018 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la commune de Vitrolles devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 3 : La commune de Vitrolles versera à la société Vitrolles Roquebrune une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Vitrolles présentées devant la Cour au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Vitrolles et à la société Vitrolles Roquebrune.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2021, où siégeaient :

- M. Guy Fédou président,

- Mme C... Massé-Degois, présidente assesseure,

- M. Philippe Grimaud, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2021.

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N° 18MA04800

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 18MA04800
Date de la décision : 14/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-01 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Nullité.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : KUJAWA CYRIL

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-14;18ma04800 ?
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