Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCI Les Orangers a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2016 par lequel le maire de la commune de La Croix-Valmer a refusé de lui délivrer un permis de construire.
Par un jugement n° 1700986 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 mai 2019 sous le n° 19MA02269, la SCI Les Orangers, représentée par la SELARL Le Roy, Gourvennec, Prieur, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 mars 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2016 par lequel le maire de La Croix-Valmer a refusé de lui délivrer un permis de construire ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Croix-Valmer sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 3 500 euros.
La SCI Les Orangers soutient que :
- le jugement du tribunal administratif est insuffisamment motivé ;
- le tribunal a commis une erreur de droit en estimant que le maire était en situation de compétence liée ;
- le tribunal aurait dû requalifier le moyen développé à l'encontre de l'arrêté du maire en moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'avis conforme du préfet ;
- l'arrêté du maire de La Croix-Valmer et l'avis du préfet du Var sont entachés d'erreur d'appréciation dès lors que le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme et que les dispositions du SCOT des cantons de Grimaud et Saint-Tropez ne sont pas opposables à sa demande de permis.
La procédure a été régulièrement communiquée à la commune de La Croix-Valmer qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. C... pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteure publique,
- et les observations de Me D... de la SELARL Le Roy, Gourvennec, Prieur, représentant la SCI Les Orangers.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Les Orangers relève appel du jugement du 26 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant l'annulation de l'arrêté du 5 octobre 2016 par lequel le maire de La Croix-Valmer a refusé de lui délivrer un permis de construire une villa sur un terrain cadastré BI 80 situé boulevard du Littoral.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Le maire de La Croix Valmer a statué sur la demande de permis de construire de la SCI Les Orangers sur le fondement du règlement national d'urbanisme, le classement de la zone UCc où se situe le terrain d'assiette ayant été annulé par le tribunal administratif de Toulon, et le maire ayant écarté les dispositions du plan d'occupation des sols car elles étaient entachées de la même illégalité que celle entachant le plan local d'urbanisme annulé. Il ressort des pièces du dossier et notamment des mentions de l'arrêté en litige que, après avis conforme défavorable du préfet du Var, le maire de La Croix-Valmer a entendu refuser le permis de construire sollicité aux motifs que le projet méconnaissait d'une part les dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme et d'autre part la coupure d'urbanisation du massif du Vergeron définie par le schéma de cohérence territoriale (Scot) des cantons de Grimaud et Saint-Tropez.
3. Si, lorsque la délivrance d'une autorisation d'urbanisme est subordonnée à l'accord préalable d'une autre autorité, le refus d'un accord, qui s'impose à l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, ne constitue pas une décision susceptible de recours, des moyens tirés de sa régularité et de son bien-fondé peuvent, quelle que soit le sens de la décision prise par l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, être invoqués devant le juge saisi de cette décision.
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-22 du code de l'urbanisme : " Les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme doivent prévoir des espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation. ". Aux termes de l'article L. 142-1 du même code : " Sont compatibles avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale : 1° Les plans locaux d'urbanisme prévus au titre V du présent livre ; 2° Les plans de sauvegarde et de mise en valeur prévus au chapitre III du titre premier du livre III ; 3° Les cartes communales prévues au titre VI du présent livre ; 4° Les programmes locaux de l'habitat prévus par le chapitre II du titre préliminaire du livre III du code de la construction et de l'habitation ; 5° Les plans de déplacements urbains prévus par le chapitre IV du titre premier du livre II de la première partie du code des transports ; 6° La délimitation des périmètres d'intervention prévus à l'article L. 113-16 ; 7° Les opérations foncières et les opérations d'aménagement définies par décret en Conseil d'Etat ; 8° Les autorisations prévues par l'article L. 752-1 du code de commerce ; 9° Les autorisations prévues par l'article L. 212-7 du code du cinéma et de l'image animée ; 10° Les permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale prévus à l'article L. 425-4. ". Enfin aux termes de l'article R. 142-1 du même code : " Les opérations foncières et les opérations d'aménagement mentionnées au 7° de l'article L. 142-1 sont : 1° Les zones d'aménagement différé et les périmètres provisoires de zones d'aménagement différé ; 2° Les zones d'aménagement concerté ; 3° Les lotissements, les remembrements réalisés par des associations foncières urbaines et les constructions soumises à autorisations, lorsque ces opérations ou constructions portent sur une surface de plancher de plus de 5 000 mètres carrés ; 4° La constitution, par des collectivités et établissements publics, de réserves foncières de plus de cinq hectares d'un seul tenant. ".
5. Le préfet du Var a considéré que le projet remettait en cause les caractéristiques de la coupure d'urbanisation du massif du Vergeron telle qu'identifiée par le schéma de cohérence territoriale des cantons de Grimaud et Saint-Tropez. Toutefois les dispositions du Scot n'étant pas directement opposables à la demande de permis de construire en litige, la SCI Les Orangers est fondée à soutenir qu'un tel motif ne pouvait lui être légalement opposé.
6. En second lieu, aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, dans sa version alors en vigueur : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. ". Ces dispositions interdisent en principe, en l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, les constructions implantées en dehors " des parties urbanisées de la commune ", c'est-à-dire des parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions.
7. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est situé en contrebas du boulevard du Littoral, et est bordée de parcelles bâties. Si les parcelles à l'Est sont de superficies importantes et en grande partie boisées, il ressort des pièces du dossier que le secteur constituait, à la date de la demande de la société pétitionnaire, un compartiment urbanisé comportant de nombreuses parcelles bâties notamment en continu le long du boulevard du Littoral, et que le projet de construction d'une villa de deux étages n'a pas pour effet d'étendre les parties actuellement urbanisées de la commune. Enfin, si le terrain d'assiette est situé dans la coupure d'urbanisation du Vergeron telle que définie par le document graphique du Scot des cantons de Grimaud et St Tropez adopté en 2006, ce document n'est pas, comme il a été dit précédemment, directement opposable à la demande de permis en litige. Dans ces conditions, la société est fondée à soutenir que le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme précitées.
8. Il résulte de ce qui précède que la SCI Les Orangers est fondée à exciper de l'illégalité de l'avis conforme défavorable du préfet du Var et, par conséquent, à soutenir que le maire de La Croix-Valmer ne pouvait, pour les mêmes motifs, refuser de lui délivrer le permis de construire sollicité.
9. Il appartient à la cour, saisie de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les parties en première instance.
10. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
11. La commune de La Croix-Valmer a fait valoir en première instance que le projet méconnaissait les dispositions de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme et doit ainsi être regardée comme ayant sollicité une substitution de motif sur le fondement des dispositions de la loi littoral relatives à l'extension de l'urbanisation.
12 Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dans sa version applicable : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". Doivent être regardées comme une extension de l'urbanisation au sens de ces dispositions l'ouverture à la construction de zones non urbanisées ainsi que la densification significative de zones déjà urbanisées.
13. Ainsi qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est situé en contrebas du boulevard du Littoral, et est bordé de parcelles bâties. Si les parcelles à l'Est sont de superficies importantes et en grande partie boisées, il ressort des pièces du dossier que le secteur constituait, à la date de la demande de la société pétitionnaire, un compartiment urbanisé comportant de nombreuses parcelles bâties notamment en continu le long du boulevard du Littoral. Le projet de construction d'une villa de deux étages, d'une surface de plancher de 393 m, d'une hauteur limitée à 6,5 mètres et situé sur un terrain qui restera en partie à l'état naturel boisé, n'aura pas pour effet de permettre une densification significative de la zone. Dans ces conditions, la demande de substitution de motif ne peut qu'être écartée.
14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement et sur les autres moyens soulevés, que la SCI Les Orangers est fondée à soutenir que c'est à tort que le maire de La Croix-Valmer a refusé de lui délivrer un permis de construire et à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 mars 2019 et de l'arrêté du maire de La Croix-Valmer du 5 octobre 2016.
Sur les frais exposés dans l'instance :
15. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de La Croix-Valmer la somme de 2 000 euros à verser à la SCI Les Orangers sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 mars 2019 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du maire de La Croix-Valmer du 5 octobre 2016 est annulé.
Article 3 : La commune de La Croix-Valmer versera à la SCI Les Orangers la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Orangers et à la commune de La Croix-Valmer.
Délibéré après l'audience du 27 mai 2021 où siégeaient :
- M. C..., président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme B..., première conseillère,
- Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juin 2021.
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N° 19MA02269
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