La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/04/2021 | FRANCE | N°18MA05362

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 19 avril 2021, 18MA05362


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... G... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite par laquelle le maire d'Aix-en-Provence a refusé de procéder à la fermeture administrative d'un établissement recevant du public, d'enjoindre au maire d'Aix-en-Provence de procéder à cette fermeture dans un délai de deux mois à compter du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du cod

e de justice administrative.

Par un jugement n° 1609939 du 15 octobre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... G... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite par laquelle le maire d'Aix-en-Provence a refusé de procéder à la fermeture administrative d'un établissement recevant du public, d'enjoindre au maire d'Aix-en-Provence de procéder à cette fermeture dans un délai de deux mois à compter du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1609939 du 15 octobre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 18 décembre 2018, 23 novembre 2020 et 5 mars 2021, M. F... G..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 octobre 2018 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le maire d'Aix-en-Provence a refusé de procéder à la fermeture administrative d'un établissement recevant du public ;

3°) d'enjoindre au maire d'Aix-en-Provence de procéder à cette fermeture dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute de réponse à un moyen non inopérant ;

- l'établissement est de 3ème catégorie et non pas de 4ème catégorie ;

- la décision méconnait l'article R 123-7 du code de la construction et de l'habitat ;

- elle méconnait l'article CO1 et suivants de l'arrêté du 25 juin 1980 ;

- cet établissement constitue un risque grave pour la sécurité publique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er novembre 2020, la commune d'Aix-en-Provence, représentée par Me I..., sollicite le rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. G... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable car la décision attaquée est confirmative ;

- les moyens soulevés par M. G... ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 février 2021 et 16 mars 2021, l'association islamique française, représentée par Me C..., sollicite le rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. G... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable car la décision attaquée est confirmative ;

- les moyens soulevés par M. G... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. H...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- les observations de Me A... E..., représentant M. G..., de Me B..., représentant la commune d'Aix-en-Provence, et de Me C... représentant l'association islamique française.

Deux notes en délibéré ont été enregistrées le 16 avril 2021 pour l'association islamique française.

Considérant ce qui suit :

1. Par un courrier du 1er septembre 2016 M. G... a demandé au maire d'Aix-en-Provence de procéder à la fermeture de l'établissement recevant du public dont il est voisin, et qui abrite un lieu de culte. M. G... relève appel du jugement du 15 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 5 octobre 2016 par laquelle le maire d'Aix-en-Provence a refusé de faire droit à sa demande.

Sur la recevabilité des conclusions de M. G... :

2. Contrairement aux affirmations de la commune d'Aix-en-Provence et de l'association islamique française, la décision du 5 octobre 2016 rejetant implicitement la demande de M. G... n'est pas confirmative de la décision née du silence gardée sur une précédente demande ayant le même objet et formulée le 5 novembre 2015 dans la mesure où la nouvelle décision fait suite à la visite de la commission de sécurité du 15 septembre 2016, préconisant d'ailleurs la fermeture de l'établissement. Les circonstances de faits ne sont donc pas identiques et, par suite la demande présentée devant le tribunal administratif était recevable.

Sur le fond et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 123-4 du code de la construction et de l'habitation : " Sans préjudice de l'exercice par les autorités de police de leurs pouvoirs généraux et dans le cadre de leurs compétences respectives, le maire ou le représentant de l'Etat dans le département peuvent par arrêté, pris après avis de la commission de sécurité compétente, ordonner la fermeture des établissements recevant du public en infraction avec les règles de sécurité propres à ce type d'établissement, jusqu'à la réalisation des travaux de mise en conformité (...) ".

4. Aux termes de l'article R. 123-4 du code de la construction et de l'habitation : " Les bâtiments et les locaux où sont installés les établissements recevant du public doivent être construits de manière à permettre l'évacuation rapide et en bon ordre de la totalité des occupants ou leur évacuation différée si celle-ci est rendue nécessaire. / Ils doivent avoir une ou plusieurs façades en bordure de voies ou d'espaces libres permettant l'évacuation du public, l'accès et la mise en service des moyens de secours et de lutte contre l'incendie. ". Aux termes de l'article CO 4 de l'arrêté du 25 juin 1980 : " Le nombre minimal de façades accessibles et de dessertes correspondantes par des voies ou espaces libres est fixé comme suit : (...) e) Etablissements de 4e catégorie : Une façade accessible qui, par dérogation aux dispositions de l'article CO 2 (§ 1 et 2), est desservie : par une voie de 6 mètres de large comportant une chaussée libre de stationnement de 4 mètres de large au moins ou par une impasse de 8 mètres de large avec une chaussée libre de stationnement de 7 mètres de large au moins. / Toutefois si l'établissement est en rez-de-chaussée, toutes les sorties peuvent donner sur un passage d'une largeur de 1,80 mètre aboutissant à ses deux extrémités à des voies utilisables par les engins de secours. Si ce passage est couvert et non désenfumé, la distance de tout point de l'établissement à l'une des extrémités du passage doit être inférieure à 50 mètres. Si le passage est désenfumé ou à l'air libre, cette distance est portée à 100 mètres. ".

5. En premier lieu, les dispositions de l'article CO 4, fondées sur l'article R. 123-12 du code de la construction et de l'habitation, admettent pour les établissements en rez-de-chaussée, cas de l'espèce, que les sorties donnent sur un passage d'une largeur de 1,80 mètre aboutissant à ses deux extrémités à des voies utilisables par les engins de secours. Contrairement à ce que soutient l'association, cette exigence de débouché est conforme à l'objectif de sécurité et en particulier à la protection en cas d'incendie et ne comporte aucune contradiction.

6. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de la visite de la commission de sécurité du 15 septembre 2016, que l'établissement recevant du public en cause, qui relève de la quatrième catégorie, est situé au rez-de-chaussée d'une maison d'habitation dotée d'une façade qui comporte trois sorties donnant sur un jardin constituant un espace libre. En admettant même que le jardin de la propriété puisse être assimilé à un passage d'une largeur de plus de 1,80 mètre au sens des dispositions précitées de l'arrêté du 25 juin 1980, il est constant que ce jardin donne lui-même accès à une voie publique en impasse, qui ne peut avoir la nature d'un passage au sens desdites dispositions, dès lors qu'il n'aboutit pas à ses deux extrémités à des voies utilisables par les engins de secours. L'exploitation de cet établissement méconnait donc les dispositions du dernier alinéa de l'article CO 4 précité. Par suite, M. G... est fondé à soutenir que les modalités d'évacuation de l'établissement présenteraient des risques graves pour la sécurité et que, par conséquent, c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête dirigée contre la décision du maire d'Aix-en-Provence refusant de faire droit à sa demande de fermeture.

Sur la demande d'injonction :

7. En l'état de l'instruction, l'illégalité relevée au point 6 n'est susceptible d'aucune régularisation. Elle implique nécessairement qu'il soit procédé à la fermeture de l'établissement en cause. Il y a dès lors lieu d'ordonner à la commune d'Aix-en-Provence d'y procéder, dans un délai de 6 mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais du litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune d'Aix-en-Provence et de l'Association Islamique de France, M. G... n'ayant pas la qualité de partie perdante à l'instance. Il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 2 000 euros à verser à M. G....

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 15 octobre 2018 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La décision du maire d'Aix-en-Provence, rejetant la demande de fermeture de l'établissement exploité comme salle de prière par l'association islamique française, situé impasse de Brédasque, que lui a adressée M. G..., est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au maire d'Aix-en-Provence de procéder, dans un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, à la fermeture de l'établissement exploité comme salle de prière par l'association islamique française, situé impasse de Brédasque, à Aix-en-Provence.

Article 4 : Il est mis à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 2 000 euros à verser à M. G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de la commune d'Aix-en-Provence et de l'association islamique française fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... G..., à l'association islamique française et à la commune d'Aix-en-Provence.

Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2021, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. H..., président assesseur,

- M. Merenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2021.

2

N° 18MA05362


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA05362
Date de la décision : 19/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-003 Police. Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : CABINET JEAN DEBEAURAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-04-19;18ma05362 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award