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29/03/2021 | FRANCE | N°20MA01292

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 29 mars 2021, 20MA01292


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Ardèche l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de l'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2001107 du 24 février 2020, la présidente du tribunal administratif de Marseille a annulé la décision d'éloignement révélée par la mi

se à exécution de l'arrêté du 7 juillet 2019, ainsi que cet arrêté.

Procédure devant la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Ardèche l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de l'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2001107 du 24 février 2020, la présidente du tribunal administratif de Marseille a annulé la décision d'éloignement révélée par la mise à exécution de l'arrêté du 7 juillet 2019, ainsi que cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2020, le préfet de l'Ardèche demande à la Cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille et de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal.

Il soutient que :

- le tribunal administratif de Nîmes ayant rejeté la requête présentée par M. A... contre l'arrêté du 7 juillet 2019 par un jugement du 19 juillet 2019, l'obligation de quitter le territoire français était exécutable d'office et le placement en rétention ne manifestait pas une nouvelle décision d'éloignement ;

- en tout état de cause, la demande présentée devant le tribunal administratif de Marseille n'était dirigée que contre l'arrêté du 7 juillet 2019, demande qui était tardive et dès lors irrecevable ;

- le requérant ne pouvait en tout état de cause contester une éventuelle décision de mise à exécution de l'obligation de quitter le territoire français édictée le 7 juillet 2019 que par la voie d'une demande en référé-liberté ;

- le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation était en tout état de cause infondé étant donné l'absence d'attaches de M. A... en France et l'absence de preuve de la durée de son séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 janvier 2021, M. A..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête du préfet de l'Ardèche et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable dès lors que seul le ministre peut faire appel au nom de l'État et qu'elle n'a pas été présentée par un avocat ;

- l'arrêté de placement en rétention pris à son encontre pouvait encore être attaqué faute de mentionner les voies et délais de recours ;

- son placement en rétention était injustifié ;

- l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre n'est plus exécutoire ;

- l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision est entachée de détournement de pouvoir.

Par ordonnance du 19 janvier 2021, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 9 février 2021.

Par une décision du 27 novembre 2020, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... Grimaud, rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Entré pour la première fois en France en 2002 selon ses déclarations, M. A... a été interpellé le 7 juillet 2019 à Annonay. Etant dépourvu de titre de séjour, il a fait l'objet le jour même d'une obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. A... a demandé l'annulation de ces décisions au tribunal administratif de Nîmes le 9 juillet 2019. Sa demande a été rejetée par le jugement n° 1902359 de ce tribunal, en date du 19 juillet 2019. M. A... a fait l'objet à la fin de l'année 2019 d'un arrêté de placement en rétention qui a fixé son lieu de rétention au centre de rétention administrative de Marseille. Le 7 février 2020, M. A... a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juillet 2019. La présidente de ce tribunal a, par un jugement du 24 février 2020, annulé la mesure d'éloignement révélée par la mise à exécution de l'obligation de quitter le territoire français du 7 juillet 2019 ainsi que cette obligation de quitter le territoire français, la décision refusant un délai de départ volontaire à M. A..., la décision fixant le pays de destination et l'interdiction de retour sur le territoire français édictées le 7 juillet 2019.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

2. Aux termes des dispositions de l'article R. 811-10 du code de justice administrative : " Devant la cour administrative d'appel, l'Etat est dispensé de ministère d'avocat soit en demande, soit en défense, soit en intervention. Sauf dispositions contraires, les ministres intéressés présentent devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat. (...).". En vertu des dispositions de l'article R. 811-10-1 dans sa rédaction applicable à la date d'introduction de la requête : " Par dérogation aux dispositions de l'article R. 811-10, le préfet présente devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat lorsque le litige est né de l'activité des services de la préfecture dans les matières suivantes : / 1° Entrée et séjour des étrangers en France (...).".

3. Il résulte des dispositions reproduites ci-dessus que le préfet de l'Ardèche a qualité pour faire appel du jugement attaqué et qu'il est dispensé du ministère d'avocat. Les fins de non-recevoir soulevées sur ces points par M. A... doivent dès lors être écartées.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les décisions édictées le 7 juillet 2019 :

4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 7 juillet 2019 a été contesté par M. A... devant le tribunal administratif de Nîmes qui, ainsi qu'il vient d'être dit, a rejeté cette demande par un jugement du 19 juillet 2019 devenu définitif. Le préfet de l'Ardèche est dès lors fondé à soutenir que la demande présentée par M. A... à l'encontre de cet arrêté le 7 février 2020 devant le tribunal administratif de Marseille était irrecevable.

En ce qui concerne l'existence d'une nouvelle décision d'éloignement :

5. Si la mise à exécution tardive d'une mesure d'éloignement peut manifester l'existence d'une nouvelle décision d'éloignement lorsque le retard à procéder à cette exécution est imputable à l'administration et que les circonstances de fait et de droit ayant présidé à l'édiction de la première mesure ont changé, il ressort en l'espèce des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire français édictée le 7 juillet 2019 à l'encontre de M. A..., devenue définitive après sa confirmation par le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 19 juillet 2019, a été suivie d'un arrêté de placement en rétention du préfet de l'Ardèche du 8 octobre 2019 puis d'un arrêté de placement en rétention édicté par le préfet du Rhône qui s'est traduit par le placement en rétention de l'intéressé au centre de rétention administrative de Marseille à la fin du mois de décembre 2019. Eu égard, d'une part, au délai de moins de six mois qui s'est écoulé entre l'édiction de la mesure et le placement en rétention de l'intéressé, d'autre part, à la circonstance, relevée par le préfet devant la Cour et non contestée par l'intéressé, que celui-ci s'est opposé à plusieurs reprises à l'exécution de la mesure et a été emprisonné pour une durée de trois mois et, enfin, à l'absence de tout changement de circonstance entre l'édiction de l'obligation de quitter le territoire français du 7 juillet 2019 et la mesure de placement en rétention intervenue à la fin de l'année 2019, le préfet de l'Ardèche est fondé à soutenir que la mise à exécution de cet arrêté n'a pas révélé une nouvelle décision d'éloignement et que la demande interprétée comme présentée contre une telle décision était, sur ce point également, irrecevable.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Ardèche est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a annulé son arrêté du 7 juillet 2019 et la décision révélant une nouvelle mesure d'éloignement, la circonstance que l'arrêté du 7 juillet 2019 ne serait plus exécutoire étant, à la supposer établie, sans incidence sur la légalité de cet arrêté.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée pour le compte de Me D... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2001107 du tribunal administratif de Marseille du 24 février 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A... et de Me D... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2021, où siégeaient :

- M. Guy Fédou, président,

- Mme Christine Massé-Degois, présidente assesseure,

- M. C... Grimaud, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 mars 2021.

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N° 20MA01292

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01292
Date de la décision : 29/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : KOGEORGOS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-03-29;20ma01292 ?
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