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29/03/2021 | FRANCE | N°18MA01750

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 29 mars 2021, 18MA01750


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cordial Sécurité a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Carpentras à lui verser la somme de 11 453,47 euros toutes taxes comprises assortie des intérêts au taux contractuel de 8,15 % au titre de prestations effectuées et la somme de 2 000 euros en réparation du préjudice subi pour résistance abusive.

Par un jugement n° 1601641 du 29 mars 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une

requête enregistrée le 18 avril 2018, la société Cordial Sécurité, représentée par Me A..., dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cordial Sécurité a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Carpentras à lui verser la somme de 11 453,47 euros toutes taxes comprises assortie des intérêts au taux contractuel de 8,15 % au titre de prestations effectuées et la somme de 2 000 euros en réparation du préjudice subi pour résistance abusive.

Par un jugement n° 1601641 du 29 mars 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 avril 2018, la société Cordial Sécurité, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mars 2018 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) de condamner la commune de Carpentras à lui verser la somme de 11 453,47 euros toutes taxes comprises assortie des intérêts au taux contractuel de 8,15 % au titre de prestations effectuées et la somme de 2 000 euros en réparation du préjudice subi pour résistance abusive ;

3°) de rejeter les conclusions de la commune de Carpentras ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Carpentras, outre les dépens, le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en l'absence de paiement des factures établies le 31 juillet 2014, malgré la relance écrite du 26 septembre suivant, elle a mis en demeure le 20 octobre 2014 la commune de Carpentras de payer la somme due et, en l'absence de règlement, elle a adressé à cette dernière un décompte valant mémoire en réclamation le 10 novembre 2014 puis une réclamation préalable le 13 février 2015 avant d'intenter une action contentieuse ;

- les premiers juges ne pouvaient considérer que le mémoire en réclamation devait être postérieur au 12 novembre 2014, date à laquelle le différend est né ; en effet, il y a en l'espèce concomitance entre la date de la naissance du différend, le 12 novembre 2014, et celle de la notification, le 12 novembre 2014, du mémoire en réclamation daté du 10 novembre 2014 ;

- la correspondance datée du 20 octobre 2014 étant restée sans réponse, un différend entre les parties était ainsi né et la lettre recommandée du 10 novembre 2014, réceptionnée le 12 novembre suivant, qui comporte l'énoncé d'un différend et expose de manière précise les chefs de contestation en indiquant les sommes demandées, vaut mémoire en réclamation ;

- les prestations ayant été effectuées pour un montant initial de 10 085,33 euros toutes taxes comprises et un montant complémentaire de 741,77 euros toutes taxes comprises, la créance est acquise tant dans son principe que dans son montant ;

- est acquise également la créance de 586,37 euros au titre de 226 jours de pénalités de retard dans le paiement en application du cahier des clauses administratives particulières ;

- elle est fondée à demander l'application d'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros ;

- l'obligation de la commune de Carpentras étant établie dans son principe et dans son montant, cette dernière doit lui verser la somme de 11 453,47 euros augmentée des intérêts conventionnels de 8,15 % ;

- contrairement à ce que soutient la commune, elle rapporte la preuve de l'envoi de sa demande de paiement et justifie de la bonne exécution des prestations dont le paiement est réclamé ;

- elle sollicite, eu égard au comportement de la commune de Carpentras, la somme de 2 000 euros au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 juin 2019, la commune de Carpentras, représentée par la SCP Charrel et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Cordial Sécurité, outre les dépens, le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, l'unique moyen d'appel soulevé par la société Cordial Sécurité n'est pas fondé ;

- à titre subsidiaire, la demande indemnitaire de l'appelante est infondée.

Par ordonnance du 5 juin 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêté du 19 janvier 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales aux marchés de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS) ;

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... Massé-Degois, rapporteure,

- les conclusions de M. B... Thielé, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la commune de Carpentras.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Carpentras a confié à la société Cordial Sécurité, par un acte d'engagement du 19 mai 2014, un marché à bons de commandes pour un montant maximum de 40 000 euros hors taxes en vue de l'exécution de prestations de gardiennage et de sécurité sur le site de l'Hôtel Dieu à Carpentras pour la période estivale de l'année 2014. La société Cordial Sécurité a sollicité de la commune de Carpentras, par des courriers réceptionnés les 26 septembre 2014 et 22 octobre 2014, le règlement des prestations effectuées à hauteur de 10 085,33 euros et 741,77 euros toutes taxes comprises correspondant aux factures émises le 31 juillet 2014 respectivement sous le n° CS00000317 et le n° CS00000318. En l'absence de règlement, la société Cordial Sécurité a mis en demeure la collectivité, par une lettre datée du 10 novembre 2014 réceptionnée le 12 novembre suivant, de lui faire parvenir le paiement sous huitaine de l'intégralité des sommes dues, outre une somme de 402,58 euros au titre des pénalités de retard et une somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement. La société Cordial Sécurité, par l'intermédiaire de son conseil, a sollicité à nouveau la commune de Carpentras le 13 février 2015 en vue d'obtenir le règlement des factures non acquittées ainsi que les pénalités de retard de paiement et les frais de recouvrement. En l'absence de réponse de la part de la commune et à la suite du rejet de sa requête en référé provision le 21 avril 2016 par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, la société Cordial Sécurité a saisi ledit tribunal et demandé la condamnation de la collectivité à lui payer 11 453,47 euros toutes taxes comprises correspondant au montant des prestations effectuées, augmentée des intérêts au taux contractuel de 8,15 %, outre une indemnité de 2 000 euros au titre de la résistance abusive manifestée par cette dernière. La société Cordial Sécurité relève appel du jugement n° 1601641 du 29 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande indemnitaire.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes des stipulations de l'article 37.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS) approuvé par l'arrêté du 19 janvier 2009 et qui est au nombre des pièces contractuelles du marché en litige en application de l'article 3.B du cahier des clauses administratives particulières commun à tous les lots du marché en cause : " Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'un mémoire de réclamation exposant les motifs et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Ce mémoire doit être communiqué au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion. ".

3. Il résulte de l'instruction que par une lettre datée du 10 novembre 2014 réceptionnée le 12 novembre suivant par la commune de Carpentras, la société Cordial Sécurité a mis en demeure cette dernière de lui régler, sous huitaine, la somme de 12 665,73 euros dont les montants de 10 085,33 euros et 741,77 euros correspondant aux factures émises le 31 juillet 2014 sous les numéros CS00000317 et CS00000318, outre un montant de 1 788,63 euros au titre de pénalités de retard et un montant de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement. Cet envoi adressé par courrier recommandé avec accusé de réception, intitulé " RELANCE VALANT MISE EN DEMEURE POUR FACTURES IMPAYEES ", précisait qu'à défaut de respecter ledit délai, le dossier serait transmis au " correspondant judiciaire ".

4. Il est constant qu'à la suite de la réception de cette mise en demeure, la commune de Carpentras n'a pas procédé au règlement des sommes réclamées faisant l'objet des factures CS00000317 et CS00000318 dans le délai de huit jours fixé par son auteure ni, au demeurant, postérieurement au dit délai au-delà duquel elle considèrerait l'absence de réponse à sa demande comme signifiant un rejet. Dès lors, un différend opposant la société Cordial Sécurité à la commune de Carpentras est né, au sens des stipulations précitées de l'article 37.2 du CCAG-FCS, avec le refus implicite de payer les sommes réclamées par cette mise en demeure exprimé par la collectivité le 20 novembre 2014.

5. La société Cordial Sécurité ne peut, à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation du jugement dont elle relève appel, soutenir que, en l'espèce, il y a concomitance entre la date de la naissance du différend, le 12 novembre 2014, et celle de la notification du mémoire en réclamation daté du 10 novembre 2014, soit le 12 novembre suivant, dès lors que le différend qui l'oppose à la commune de Carpentras n'a pu naître qu'à l'expiration du délai au-delà duquel elle estimait que l'absence de réponse à sa demande signifiait un rejet, soit au-delà du délai de huit jours à compter du 12 novembre 2014 qu'elle a elle-même déterminé.

6. Par suite, en vertu de l'article 37.2 du CCAG-FCS cité au point 2, auquel aucun des articles du cahier des clauses administratives particulières du marché litigieux n'a entendu déroger, il appartenait à la société Cordial Sécurité d'adresser à la commune de Carpentras un mémoire de réclamation dans le délai de deux mois suivant le jour où le différend est ainsi apparu.

7. Il ne résulte d'aucune des pièces versées aux débats que l'appelante ait adressé à la commune de Carpentras, avant l'expiration du délai de deux mois qui a commencé à courir le 20 novembre 2014, un tel mémoire indiquant de manière précise et détaillée les chefs sur lesquels portaient ses réclamations et justifiant le montant de la somme réclamée. Si le courrier daté du 13 février 2015 adressé à la commune de Carpentras par le conseil de la société appelante indique, conformément aux conditions posées à l'article 37.2 du CCAG-FCS, de manière précise et détaillée les chefs sur lesquels portaient ses réclamations en justifiant le montant de la somme réclamée, peut être ainsi regardé comme un mémoire en réclamation au sens des stipulations précitées, il est constant que ce courrier n'est pas parvenu à son destinataire dans le délai de deux mois prévu par ces mêmes stipulations. Dans ces conditions, faute d'avoir présenté ce mémoire conformément aux dispositions contractuelles dans le délai de deux mois requis, la demande de la société Cordial Sécurité présentée devant le tribunal administratif de Nîmes tendant à la condamnation de la commune de Carpentras à payer les sommes correspondant aux factures n° CS00000317 et n° CS00000318 pour des montants respectifs de 10 085,33 euros et 741,77 euros augmentée des intérêts de retard et d'une indemnité pour résistance abusive était irrecevable.

8. Il résulte de ce qui précède que la société Cordial Sécurité n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué du tribunal administratif de Nîmes est entaché d'une irrégularité pour avoir rejeté sa demande comme irrecevable.

Sur les dépens :

9. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...). ".

10. La présente instance n'ayant pas donné lieu à des dépens, les conclusions présentées à ce titre tant par la société Cordial Sécurité que par la commune de Carpentras ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Carpentras, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Cordial Sécurité demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, au contraire, de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la société Cordial Sécurité, à verser à la commune de Carpentras sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er :: La requête de la société Cordial Sécurité est rejetée.

Article 2 : La société Cordial Sécurité versera la somme de 2 000 euros à la commune de Carpentras sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la commune de Carpentras est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cordial Sécurité et à la commune de Carpentras.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2021, où siégeaient :

- M. Guy Fédou, président,

- Mme D... Massé-Degois, présidente assesseure,

- M. Philippe Grimaud, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2021.

2

N° 18MA01750

MY


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA01750
Date de la décision : 29/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : SCP RIVIERE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-03-29;18ma01750 ?
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