La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/2021 | FRANCE | N°20MA01124

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 25 mars 2021, 20MA01124


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire national.

Par un jugement n° 1900126 du 3 février 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2020, M. A..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de

Marseille du 3 février 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet des Bou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire national.

Par un jugement n° 1900126 du 3 février 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2020, M. A..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 février 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire national ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône d'instruire à nouveau sa demande dans un délai de quatre mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie d'une communauté de vie avec son épouse qui fait échec à la mesure d'expulsion conformément aux dispositions de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il n'existe pas de menace grave à l'ordre public.

La procédure a été régulièrement communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... relève appel du jugement du 3 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire national.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public ". Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que les dispositions de l'article L. 521-3 n'y fassent pas obstacle : (...) 2° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; (...) Par dérogation aux dispositions du présent article, l'étranger peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application de l'article L. 521-1 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., né en 1973, s'est marié en Algérie le 1er décembre 2001, avec Mme F... C..., ressortissante française née en 1957, et a bénéficié, en sa qualité de conjoint de français, d'un titre de séjour à compter de novembre 2015 jusqu'au 4 novembre 2016. Pour justifier de la poursuite de la communauté de vie avec son épouse, le requérant se prévaut de documents tels que des attestations de versements d'allocation de la CAF, factures d'électricité et de téléphone ou relevés d'assurance maladie établis au nom et à l'adresse des époux. Toutefois, ces documents ne peuvent attester au mieux que d'une adresse postale commune, dès lors qu'un certain nombre de pièces, telles que des quittances de loyers entre 2016 et 2018 ou les relevés bancaires depuis 2016, ne sont établis qu'au seul nom de Mme C..., que l'avis d'imposition 2018 a été établi au seul nom de M. A..., et qu'enfin, les attestations très peu circonstanciées de trois amis de M. A... et Mme C... ne sont pas de nature à établir une vie commune. En outre, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a adressé aux services préfectoraux une lettre en 2016 afin de signaler que son époux l'avait " dépouillée de ses biens " et comptait contracter un second mariage en Algérie, lettre par laquelle elle demandait à ces services d'exercer un " contrôle administratif appuyé " sur la situation de son mari. Mme C... a également déclaré lors de l'enquête de police réalisée en mars 2017 que son époux ne vivait avec elle que dans le but d'obtenir une carte de séjour de dix ans et n'avait " aucun sentiment amoureux ". Les résultats de cette enquête ont conclu à l'absence de communauté de vie entre les époux, alors au demeurant qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que Mme C... aurait rendu visite à son époux au centre pénitentiaire avant son placement sous le régime de semi-liberté. Enfin, si Mme C... indiquait devant la commission d'expulsion être l'autrice d'une lettre du 16 août 2018, rédigée pourtant avec une écriture distincte de la lettre écrite en 2016, par laquelle elle expliquait que sa " jalousie possessive " l'aurait conduite à faire de fausses déclarations sur les intentions de son conjoint, ces explications tardives sont dépourvues de toute crédibilité. Dans ces conditions, M. A... était bien au nombre des étrangers susceptibles de faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application des dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public. Lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour prononcer l'expulsion d'un étranger, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné le 10 juillet 2015 par le tribunal correctionnel de Marseille à une peine de quatre ans d'emprisonnement pour des faits de transport, détention, offre ou cession et acquisition de stupéfiants courant 2012 au 23 octobre 2012 et participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. A... s'était déjà rendu coupable d'infractions à la législation sur les stupéfiants, pour lesquelles il a été condamné à plusieurs reprises en 1993, 1994 et 1997. En raison de la succession de ces faits d'une nature particulièrement grave, ainsi que du comportement de l'intéressé qui n'a jamais cherché avant 2015 à régulariser sa situation au regard de la législation sur les étrangers, et alors que les éléments produits par M. A... concernant ses missions d'intérim ne peuvent démontrer au mieux qu'une période de douze mois de travail, le préfet des Bouches-du-Rhône pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que sa présence en France constituait une menace grave pour l'ordre public.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. A... ne justifie pas de la continuité de sa présence en France ni, comme il a été dit au point 3, de sa communauté de vie avec Mme C.... En outre, les éléments produits s'agissant de ses missions en intérim ne sauraient démontrer une insertion professionnelle et M. A..., qui a fait l'objet d'une condamnation, devenue définitive, à quatre ans d'emprisonnement par le tribunal correctionnel de Marseille le 10 juillet 2015 pour des faits de transport, détention, offre ou cession, acquisition de stupéfiants et participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement, ne démontre pas une intégration particulière à la société française. M. A... n'établit pas plus être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. Dans ces conditions, et malgré l'avis défavorable de la commission d'expulsion, eu égard à la gravité des faits reprochés, au comportement d'ensemble de l'intéressé et à son absence d'intégration, la mesure d'expulsion n'a pas porté, au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

9. Par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A..., il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

10. L'Etat n'étant pas la partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions de M. A... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2021 où siégeaient :

- M. Poujade, président,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2021.

2

N° 20MA01124

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01124
Date de la décision : 25/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : BISSANE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-03-25;20ma01124 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award