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29/12/2020 | FRANCE | N°19MA02444

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 29 décembre 2020, 19MA02444


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. La société à responsabilité limitée (SARL) Aqualonde a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait au titre du troisième trimestre 2013 d'un montant de 20 000 euros.

II. La SARL Aqualonde a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013.

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n jugement n° 1700606, 1703383 du 7 mai 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. La société à responsabilité limitée (SARL) Aqualonde a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait au titre du troisième trimestre 2013 d'un montant de 20 000 euros.

II. La SARL Aqualonde a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1700606, 1703383 du 7 mai 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mai 2019, la SARL Aqualonde, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 mai 2019 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de faire droit à ses demandes de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle est en droit de bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'affrètement de son navire ;

- la doctrine administrative ne conditionne pas l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée à l'affectation du navire à la navigation en haute mer ;

- elle remplit les critères pour bénéficier de l'exonération de taxe : le navire " Idefixe II " est inscrit comme navire de commerce sur les registres d'une autorité française, il est doté d'un équipage permanent et est affecté aux besoins d'une activité commerciale ;

- elle bénéficie d'un droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée sur l'acquisition de pièces relatives au navire dès lors que la limitation du droit à déduction concerne uniquement l'utilisateur final ; elle entre dans les prévisions notamment de la doctrine référencée au BOI-TVA-DED-30-30-30 et au BOI-TVA-DED-30-30-20 ;

- l'administration ne pouvait remettre en cause le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée sur l'acquisition d'une remorque dès lors qu'elle ne constitue pas l'accessoire d'un véhicule n'ouvrant pas droit à déduction.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Aqualonde ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Aqualonde, qui exploite un club de plongée sous-marine, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2013 à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période vérifiée. Par ailleurs, la société requérante a présenté une demande de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 20 000 euros au titre du troisième trimestre 2013 qui a été rejetée par l'administration le 29 janvier 2017. La SARL Aqualonde relève appel du jugement du 7 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses demandes tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2013 et au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 20 000 euros au titre du troisième trimestre 2013.

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 262 dans sa rédaction applicable au litige : " (...) II. Sont également exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 2° Les opérations de livraison, de réparation, de transformation, d'entretien, d'affrètement et de location portant sur : - les navires de commerce maritime affectés à la navigation en haute mer (...) ". En application de ces dispositions, les opérations d'affrètement et de location portant sur des navires de commerce maritime ne sont exonérées qu'à la condition que les navires soient affectés à la navigation en haute mer.

3. Il résulte de l'instruction que, par des contrats d'affrètement, la SARL Aqualonde a donné en location un navire. Il est constant que ce navire n'était pas affecté à la navigation en haute mer au titre de la période vérifiée. Par suite, la société requérante ne pouvait bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue par les dispositions du 2° du II de l'article 262 du code général des impôts.

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :

4. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) ". Selon l'article L. 80 B de ce livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi (...) ".

5. D'une part, la SARL Aqualonde invoque, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre de procédures fiscales, la décision de rescrit n° 2011-2 (TCA) du 22 février 2011 qui définit la notion de navires de commerce maritime pouvant bénéficier, en application du 2° du II de l'article 262 du code général des impôts, de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée relative aux opérations " de livraison, de réparation, de transformation, d'entretien, d'affrètement et de location portant sur les navires de commerce affectés à la navigation en haute mer ". Ce rescrit, qui mentionne ainsi explicitement que l'exonération de taxe est uniquement applicable aux navires de commerce affectés à la navigation en haute mer, ne contient pas une interprétation différente de la loi fiscale dont il est, en l'espèce, fait application au point 3. Ainsi, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir de cette décision de rescrit sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

6. D'autre part, la société requérante ne peut utilement invoquer les réponses ministérielles Vitel, Marcangeli et Foulon publiées le 11 mars 2014, et le courrier du syndicat national des entreprises de plongée loisir du 5 mai 2014, postérieurs à la période en litige. En tout état de cause, le courrier du syndicat, qui n'émane pas de l'administration fiscale, ne saurait être regardé comme comportant une prise de position formelle de cette administration. Par ailleurs, la lettre de la direction des services fiscaux du Var du 5 mai 2006 ainsi que l'instruction administrative référencée 3-A-1-05 du 25 janvier 2005 qui reprend les termes de l'instruction 3-C-4-2003 du 22 octobre 2003 sont relatifs aux dispositions du 2° du II de l'article 262 du code général des impôts applicables jusqu'au 1er janvier 2011. La doctrine référencée au BOI TVA-CHAMP-30-30-30-10 du 25 juin 2013 ne comporte pas une interprétation différente de la loi fiscale dont il est, en l'espèce, fait application. Enfin, le courrier de la direction de la législation fiscale en date du 25 février 2011 concerne les dispositions du 6° du II de l'article 262 du code général des impôts dont l'administration n'a pas fait application en l'espèce.

Sur le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

7. Aux termes du I de l'article 271 du code général des impôts : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) ". Aux termes de l'article 205 de l'annexe II au même code : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction ". Le IV de l'article 206 de la même annexe dispose que : " 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : (...) 6° Pour les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, à l'exception de ceux : a. Destinés à être revendus à l'état neuf ; b. Donnés en location ; c. Comportant, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises et utilisés par des entreprises pour amener leur personnel sur les lieux du travail ; d. Affectés de façon exclusive à l'enseignement de la conduite ; e. De type tout terrain affectés exclusivement à l'exploitation des remontées mécaniques et des domaines skiables, dès lors qu'ils ont été certifiés par le service technique des remontées mécaniques et des transports guidés, dans des conditions fixées par décret ; f. Acquis par les entreprises de transports publics de voyageurs et affectés de façon exclusive à la réalisation desdits transports ; 7° Pour les éléments constitutifs, pièces détachées et accessoires des véhicules et engins mentionnés au premier alinéa du 6° ". Pour apprécier si un véhicule ou un engin a été conçu pour le transport des personnes ou pour un usage mixte, il y a lieu non pas de se référer aux conditions d'utilisation du véhicule mais de rechercher, compte tenu de ses caractéristiques lors de l'acquisition, l'usage auquel il est normalement destiné.

8. Il résulte de l'instruction que le navire utilisé par la SARL Aqualonde est, compte tenu de ses caractéristiques physiques qui lui permettent notamment d'accueillir jusqu'à vingt-cinq personnes et deux membres d'équipage, conçu pour le transport de personnes et relève donc du champ d'application de l'exclusion prévue par les dispositions du 6° du 2 du IV de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts. C'est donc à bon droit que l'administration n'a pas admis le bénéfice de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les pièces détachées du navire utilisé par la société requérante. Par ailleurs, la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'acquisition de la remorque qui est un accessoire du navire, n'est pas déductible en application des dispositions du 7° du IV de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts.

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :

9. La société requérante ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes 380 et 80 de l'instruction fiscale BOI-TVA-DED-30-30-20 s'agissant respectivement des " avions et hélicoptères " et des " Radio-téléphones installés dans des véhicules " qui sont sans influence, en tout état de cause, sur le présent litige. Par ailleurs, la SARL Aqualonde ne peut utilement invoquer ni le paragraphe 10 de l'instruction fiscale BOI-TVA-CHAMP-20-50-30 du 16 décembre 2014, postérieure à la période d'imposition en litige, ni la lettre de la direction des services fiscaux du Var du 5 mai 2006 qui concerne un contribuable différent.

10. Enfin, aux termes du paragraphe 10 de l'instruction fiscale BOI-TVA-DED-30-30-30 : " La TVA ayant grevé les transports de personnes, quels que soient la voie et les moyens utilisés (route, fer, air, eau) ne peut donner lieu à déduction. Cette exclusion s'étend aux opérations accessoires. Cette expression recouvre l'ensemble des opérations qui sont en relation étroite avec le transport lui-même. Dans la pratique, il convient de ranger dans cette catégorie les services qui, pour le même motif, bénéficient du taux consenti aux transports de voyageurs (location de place, etc.). " et aux termes du paragraphe 20 : " L'exclusion du droit à déduction se situe au seul niveau de l'entreprise qui a exposé les frais de transport pour les besoins de son propre personnel. Lorsque ces frais de transport sont ensuite répercutés au client, en complément du prix principal d'une prestation, ce dernier peut déduire, dans les conditions de droit commun, la TVA ayant grevé le prix de la prestation. Dans cette hypothèse, en effet, les frais de déplacement répercutés ne constituent pas la contrepartie d'une prestation de transport distincte qui serait rendue aux clients, mais un élément du prix de la prestation fournie qui suit le régime applicable à cette dernière. ". Il résulte de cette instruction que la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par une entreprise sur des dépenses de transport de personnes qu'elle a exposées ne lui confère un droit à déduction que dans l'hypothèse où ces dépenses de transport lui ont été facturées en complément du prix d'une prestation auquel elles s'assimilent et dont, en conséquence, elles suivent le régime. En l'espèce, les sommes facturées par la SARL Aqualonde dans le cadre des contrats d'affrètement représentaient la contrepartie d'une prestation de transport, indépendamment de toute autre prestation facturée dont elles pourraient être considérées comme l'accessoire. Par suite, la société requérante, qui n'entre pas dans les prévisions de l'instruction précitée, n'est pas fondée à s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Aqualonde n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Aqualonde est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Aqualonde et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2020, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 décembre 2020.

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N° 19MA02444

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02444
Date de la décision : 29/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Personnes et opérations taxables - Opérations taxables.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : CABINET OLIVIER BOURDEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-29;19ma02444 ?
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