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30/11/2020 | FRANCE | N°18MA04310

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 30 novembre 2020, 18MA04310


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 septembre 2018 et 11 mars 2020, la SAS Immobilière groupe Casino, la SA Mercialys et la SNC SPV PV7, représentées par la SELARL Concorde avocats, demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Nîmes a refusé de leur délivrer un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour l'extension de la surface de vente de l'ensemble commercial " Cap Costières " à Nîmes de 10 300 m2 ;

2°) de mettre à la charge d

e l'Etat, au bénéfice de chacune d'entre elles, une somme de 1 000 euros au titre de...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 septembre 2018 et 11 mars 2020, la SAS Immobilière groupe Casino, la SA Mercialys et la SNC SPV PV7, représentées par la SELARL Concorde avocats, demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Nîmes a refusé de leur délivrer un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour l'extension de la surface de vente de l'ensemble commercial " Cap Costières " à Nîmes de 10 300 m2 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de chacune d'entre elles, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial est entaché d'erreur de droit dès lors qu'il prend en compte l'impact du projet sur les offres commerciales existantes ;

- cet avis est entaché d'erreur d'appréciation s'agissant de l'objectif d'aménagement du territoire fixé à l'article L. 752-6 du code de commerce, tant au regard de son impact sur la vie urbaine qu'au regard de celui sur le flux de transport ;

- il est également entaché d'erreur d'appréciation s'agissant de l'objectif de développement durable ;

- le projet respecte les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- l'article 8 du plan local d'urbanisme ne comporte aucune disposition portant sur les accès et dessertes routières ; l'arrêté est à cet égard entaché d'erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2020, la commune de Nîmes, représentée par la SELARL Maillot avocats et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge des requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la SAS Immobilière groupe Casino, la SA Mercialys et la SNC SPV PV7.

Considérant ce qui suit :

1. Le 14 décembre 2017, la SAS Immobilière groupe Casino, la SA Mercialys et la SNC SPV PV7 ont déposé une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour l'extension de 10 300 m2, dont 999 m2 à titre de régularisation, de la surface de vente de l'ensemble commercial " Cap Costières " à Nîmes, portée ainsi à 31 286 m2. La commission départementale d'aménagement commercial puis la Commission nationale d'aménagement commercial ont toutes deux rendu, respectivement les 7 février 2018 et 26 avril 2018, des avis défavorables au projet. Par un arrêté du 20 juillet 2018, le maire de la commune de Nîmes a refusé de délivrer le permis sollicité. Les pétitionnaires demandent à la Cour d'annuler cet arrêté.

Sur la légalité de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes du I de l'article L. 752-6 du code de commerce dans sa version applicable : " I.-L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : /a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / (...) / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / (...) / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / (...) / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : / (...) / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

3. En premier lieu, il ne ressort pas de l'avis litigieux que la Commission nationale d'aménagement commercial aurait évalué le projet au regard d'un critère, qui n'est pas au nombre de ceux prévus par ces dispositions, tiré de l'impact du projet sur l'offre commerciale existante.

4. En deuxième lieu, d'une part, si, ainsi que les requérantes le font valoir, l'ensemble commercial en litige se situe à environ 5 kilomètres du centre-ville de Nîmes et à 500 mètres d'habitations, au sein de la principale polarité commerciale du département du Gard, identifiée comme telle au schéma de cohérence territoriale et au plan local d'urbanisme, il est coupé de l'agglomération par la barrière physique que constitue l'autoroute A9. D'autre part, le taux de vacance commerciale au centre-ville de Nîmes, bien qu'en diminution notamment après que le fond d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce a financé la rénovation des halles, demeure élevé. Ainsi, alors même que la population de la zone de chalandise n'a cessé d'augmenter depuis l'ouverture du centre commercial " Cap Costières " en 2003, que le projet est de nature à limiter l'évasion de celle-ci vers les pôles commerciaux des agglomérations voisines et que le centre-ville de Nîmes compte un nombre relativement important d'unités commerciales, l'extension envisagée de cette galerie marchande, par la création de 24 nouveaux commerces sur presque 10 000 m2, est, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, de nature à compromettre l'animation de la vie urbaine.

5. Il n'est par ailleurs pas contesté que, selon l'étude présentée par les pétitionnaires elles-mêmes, le projet entrainera une augmentation du trafic routier de l'ordre de 8 à 10% sur des axes déjà fortement empruntés aux heures de pointe. Alors même que les difficultés de circulation seraient dues au comportement des automobilistes, il ne ressort pas des pièces du dossier que le simple réaménagement de la circulation sur le parking modifié de l'ensemble commercial et l'ouverture d'une nouvelle voie d'accès à celui-ci seraient de nature à prévenir une aggravation de ces perturbations, le trafic généré par le pôle commercial ne contribuant que pour partie à celles-ci. Dans ces circonstances, quand bien même l'ensemble commercial est très bien desservi par les transports en commun et des aménagements cyclables seraient envisagés dans le plan de déplacement urbain afin de relier cette zone à l'agglomération, de sorte que la desserte en mode doux ne soit plus seulement théorique comme l'a estimé la Commission nationale d'aménagement commercial, la réalisation du projet aurait un effet négatif sur les flux de transport.

6. Dès lors, la Commission nationale d'aménagement commercial n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que le projet compromettait l'objectif d'aménagement du territoire fixé par les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce.

7. En troisième lieu, si comme l'a relevé la Commission nationale d'aménagement commercial, le projet ne reprend aucune caractéristique architecturale de la région et renforcera le caractère massif du bâtiment, il est constant qu'il s'insère en cohérence avec le bâtiment existant dont il reprend les caractéristiques et qu'il est situé dans une zone à vocation exclusivement commerciale. Par ailleurs, si l'extension de la végétalisation est limitée, le projet, qui prévoit l'agrandissement du parking en étages, permet une désimperméabilisation du site. Il ne saurait dès lors être considéré, alors qu'est également prévue l'installation de panneaux photovoltaïques et que le projet s'inscrit dans un processus de certification d'excellence environnementale, qu'il compromet l'objectif de développement durable fixé par les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce. Toutefois, il résulte de l'instruction que la Commission nationale aurait rendu le même avis négatif si elle ne s'était fondée que sur la méconnaissance par le projet de l'objectif d'aménagement du territoire.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la décision portant refus de permis litigieuse a été rendue sur le fondement d'un avis illégal de la Commission nationale d'aménagement commercial.

Sur le respect de la réglementation en matière d'urbanisme :

9. Il résulte des dispositions de l'article L. 752-17 du code de commerce qu'un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale en application des dispositions de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme ne peut être légalement délivré que sur avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial compétente ou, le cas échéant, sur avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial. Dès lors, compte-tenu de l'avis défavorable rendu par cette dernière commission, le maire de la commune de Nîmes était tenu de refuser de délivrer le permis sollicité. Il s'ensuit que les moyens tirés de ce qu'il aurait commis des erreurs de droit et d'appréciation en estimant que le projet litigieux méconnaissait les dispositions du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doivent être écartés comme inopérants.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nîmes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par les requérantes et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de ces dernières la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Nîmes sur le fondement de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Immobilière groupe Casino, la SA Mercialys et la SNC SPV PV7 est rejetée.

Article 2 : La SAS Immobilière groupe Casino, la SA Mercialys et la SNC SPV PV7 verseront à la commune de Nîmes la somme globale de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Immobilière groupe Casino, à la SA Mercialys, à la SNC SPV PV7, à la commune de Nîmes et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Merenne, premier conseiller,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 novembre 2020.

N°18MA04310 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA04310
Date de la décision : 30/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL CONCORDE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-11-30;18ma04310 ?
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