Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 à 2013 et de la contribution sur les hauts revenus à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1700188 du 15 avril 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 6 juin 2019, le 14 janvier et le 4 mars 2020, M. A..., représenté par Mes Bancel et D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 15 avril 2019 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et des pénalités en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure d'évaluation d'office est irrégulière, dès lors que l'administration ne l'a pas mis en demeure de déposer ses déclarations, comme elle devait le faire sur le fondement de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales, dans la mesure où il ne peut être regardé comme s'étant livré à une activité occulte ;
- il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit pas acquitté de ses obligations déclaratives ;
- l'administration, qui a indiqué dans son mémoire en défense que la société E... Ltd est fictive, aurait dû mettre en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;
- la vérification de comptabilité a débuté préalablement à l'envoi de l'avis de vérification ;
- il a été privé d'un débat oral et contradictoire dans la mesure où la vérification de comptabilité a eu lieu hors des locaux de l'entreprise ;
- la comptabilité a été irrégulièrement emportée par le vérificateur, en méconnaissance de la doctrine administrative référencée BOI-CF-PGR-20-20 et de la réponse ministérielle n° 16 641 faite à M. C..., député, le 23 avril 2013 ;
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;
- il a été privé à tort de la possibilité de saisir la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;
- il a été imposé à tort à l'impôt sur le revenu à raison de bénéfices industriels et commerciaux correspondant à une activité individuelle, dès lors que les circuits de plongée étaient organisés par la société de droit maldivien E... Ltd, de sorte que seule cette société pouvait être imposée à l'impôt sur les sociétés en France à raison des bénéfices de son établissement stable, et qu'il n'aurait été imposable qu'à raison des revenus de capitaux mobiliers distribués par la société.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 octobre 2019 et le 28 janvier 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre des années 2009 à 2011, d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2011 à 2013 et son activité a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2014. A l'issue de ces contrôles, l'administration fiscale a estimé que M. A... exerçait une activité occulte d'organisation de circuits de plongée et l'a assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2009 à 2013, résultant de rehaussements correspondant aux résultats de son activité, imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, et à la contribution sur les hauts revenus au titre de l'année 2013. M. A... fait appel du jugement du 15 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces cotisations et des pénalités correspondantes.
Sur l'exercice d'une activité individuelle par M. A... :
2. Aux termes de l'article 34 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale (...) ".
3. M. A... a fait l'objet d'une procédure pénale au cours de laquelle il a déclaré exercer en son nom propre une activité d'organisation de circuits de plongée aux Maldives, après avoir racheté en 1992 le nom " E... ", et de nombreux documents relatifs à l'exercice de cette activité ont été trouvés à l'issue d'une perquisition diligentée le 25 juin 2013 à son domicile. Par ailleurs, le site Internet " plongee-okmaldives.com " indique que M. A... est le repreneur de l'activité depuis 1990, mentionne le numéro de téléphone portable de sa compagne, ainsi qu'un numéro de téléphone fixe et une adresse mail rattachés à une des lignes téléphoniques de son domicile, et l'adresse de ce domicile est mentionnée comme l'adresse de correspondance des bulletins d'inscription aux circuits organisés par " E... ". Enfin, des sommes encaissées sur les comptes bancaires de M. A... au cours des années 2012 et 2013 correspondent à des versements opérés par des clients pour des réservations de circuits réalisées au cours des années 2011 à 2013, et les prestataires maldiviens ont été réglés grâce à des virements portés au débit des mêmes comptes. Par suite, M. A... doit être regardé, ainsi que l'a estimé à bon droit l'administration, comme ayant exercé à titre individuel une activité de nature commerciale, et devait être assujetti à ce titre à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, conformément à l'article 34 du code général des impôts. Si l'intéressé, qui a d'ailleurs déclaré au cours de la procédure pénale que l'enregistrement en 2010, aux Maldives, de la société " E... Ltd ", n'avait pas modifié le mode de fonctionnement de son activité, fait valoir que l'activité aurait en réalité été exercée par l'établissement stable en France de cette société, la seule circonstance que, postérieurement à la perquisition et à l'engagement de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle dont M. A... a fait l'objet, cette société a déposé des liasses fiscales au titre des exercices 2009 à 2012 n'est pas suffisante pour démontrer que l'activité aurait été déployée par la société de droit maldivien. Il en va de même de la circonstance que la société en question aurait déposé, postérieurement à la perquisition, une liasse fiscale au titre de l'exercice 2013, laquelle, au demeurant, ne mentionne ni sa dénomination complète, ni l'adresse de son siège, ni son numéro d'identification, et payé l'impôt sur les sociétés ainsi déclaré, alors d'ailleurs que la liasse et le relevé de solde produits ne comportent aucune mention permettant d'attester de leur dépôt auprès de l'administration fiscale, et que ce dépôt ne saurait être démontré par la seule production d'un relevé bancaire faisant apparaître le débit d'un chèque du montant de l'impôt mentionné de façon manuscrite sur le relevé de solde.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : / 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, ou des revenus d'exploitations agricoles imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; (...) / Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° ". Aux termes de l'article L. 68 du même livre, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. / Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure : / (...) 3° Si le contribuable s'est livré à une activité occulte, au sens du deuxième alinéa de l'article L. 169 ; (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 169 de ce livre, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte. L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite ".
5. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que M. A... a exercé, au cours des années considérées, une activité individuelle d'organisation de circuits de plongée. Il est constant qu'il n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce. S'il fait valoir que c'est par erreur qu'il n'a pas fait connaître son activité et n'a pas souscrit ses déclarations, dès lors que l'activité aurait été déployée par la société E... Ltd, il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'activité en cause a été exercée à titre individuel par M. A.... Au demeurant, ainsi qu'il a été dit précédemment, la société E... Ltd ne peut être regardée comme ayant déclaré des bénéfices correspondant à cette activité avant l'engagement de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle dont M. A... a fait l'objet. Par suite et en tout état de cause, l'administration, qui doit être regardée comme démontrant l'existence d'une activité occulte exercée par M. A..., n'était pas tenue de lui adresser une mise en demeure de déposer ses déclarations préalablement à la mise en oeuvre de l'évaluation d'office de ses bénéfices industriels et commerciaux.
6. En deuxième lieu, lorsque la situation d'imposition d'office d'un contribuable n'a pas été révélée par la vérification de comptabilité dont celui-ci a fait l'objet, les irrégularités qui ont pu entacher cette vérification sont sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition. Dans ces conditions, doivent être écartés comme inopérants les moyens tirés de ce que la vérification de comptabilité de M. A... aurait débuté préalablement à l'envoi de l'avis de vérification, de ce qu'il aurait été privé d'un débat oral et contradictoire dans la mesure où la vérification a eu lieu hors des locaux de l'entreprise, et de ce que la comptabilité aurait été irrégulièrement emportée par le vérificateur.
7. En troisième lieu, l'article L. 76 du livre des procédures fiscales dispose que : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions (...) ".
8. La proposition de rectification adressée à M. A... à l'issue de la vérification de comptabilité comportait les modalités de détermination des résultats reconstitués qui ont servi de base aux impositions contestées ainsi que les montants des bénéfices industriels et commerciaux au titre de chacune des années vérifiées. Elle était ainsi suffisamment motivée au regard des dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales. La circonstance que le vérificateur a mentionné, outre l'article 34 du code général des impôts, son article 209, est sans incidence à cet égard. Il en va également ainsi de la circonstance que la proposition de rectification ne comporte aucune mention relative à la territorialité de l'impôt, alors d'ailleurs que M. A... n'a pas contesté être fiscalement domicilié en France.
9. En quatrième lieu, M. A..., ainsi qu'il a été dit précédemment, a fait l'objet de rectifications établies sur des bases évaluées d'office. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir que l'administration l'aurait irrégulièrement privé de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, dont la consultation n'est prévue que dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire.
10. En dernier lieu, M. A... ne saurait se prévaloir ni de la doctrine administrative référencée BOI-CF-PGR-20-20, ni de la réponse ministérielle n° 16 641 faite à M. C..., député, le 23 avril 2013, dès lors que, relatives à la procédure d'imposition, elles n'entrent pas dans le champ d'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé des impositions :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le requérant, qui a exercé à titre individuel une activité d'organisation de circuits de plongée, était personnellement redevable de l'impôt sur le revenu à raison des bénéfices industriels et commerciaux qu'il tirait de cette activité. Par suite, ne peuvent qu'être écartés les moyens tirés de ce que M. A... aurait été imposé à tort à l'impôt sur le revenu, alors que les circuits de plongée auraient été organisés par la société de droit maldivien E... Ltd, qui aurait seule pu être imposée à l'impôt sur les sociétés en France à raison des bénéfices de son établissement stable, et qu'il n'aurait été imposable qu'à raison des revenus de capitaux mobiliers distribués par la société.
12. En second lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration, qui s'est bornée à imposer M. A... à raison des bénéfices de l'activité qu'il a exercée à titre individuel, ait entendu se prévaloir du caractère fictif de la société E... Ltd. Il suit de là que, pour établir les impositions contestées, l'administration ne s'est pas placée, même implicitement, sur le terrain de l'abus de droit et n'a pas privé M. A... des garanties qui s'attachent à la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 15 avril 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2020, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- M. Barthez, président assesseur,
- Mme F..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.
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N° 19MA02581
nc