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18/09/2020 | FRANCE | N°19MA02140

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 18 septembre 2020, 19MA02140


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 22 mai 2017 par laquelle le conseil municipal de Maureillas-las-Illas (Pyrénées-Orientales) a annulé une précédente délibération du 9 juin 1971 qui avait décidé de restituer plusieurs chemins ruraux aux propriétaires riverains de ces chemins.

Par un jugement n° 1703626 du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requê

te et un mémoire, enregistrés le 14 mai 2019 et le 11 mars 2020, M. E..., représenté par Me B...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 22 mai 2017 par laquelle le conseil municipal de Maureillas-las-Illas (Pyrénées-Orientales) a annulé une précédente délibération du 9 juin 1971 qui avait décidé de restituer plusieurs chemins ruraux aux propriétaires riverains de ces chemins.

Par un jugement n° 1703626 du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 mai 2019 et le 11 mars 2020, M. E..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 14 mars 2019 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Maureillas-las-Illas du 22 mai 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Maureillas-las-Illas la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la délibération du 9 juin 1971, qui n'avait pas de caractère réglementaire, était créatrice de droits et ne pouvait être retirée qu'en cas d'illégalité dans le délai de quatre mois ;

- la commune n'établit pas qu'elle serait propriétaire des chemins en cause ou que ceux-ci seraient présumés lui appartenir à raison de leur affectation à l'usage du public.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2020, la commune de Maureillas-las-Illas, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute d'être motivée

- les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant M. E..., et de Me A..., représentant la commune de Maureillas-las-Illas.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 13 décembre 1970, le conseil municipal de las Illas, commune du département des Pyrénées-Orientales fusionnée en 1972 avec celle de Maureillas, a procédé totalement ou partiellement, au déclassement de plusieurs voies communales, notamment des chemins dits de Can Bêtre, de la " place de la mairie ", de Can Lalot, de Cal Faré, du Col de Manreille, avant de les inscrire sur la liste des chemins ruraux. Par une seconde délibération du 5 février 1971, le conseil municipal a décidé de les aliéner, ainsi que trois autres chemins, ceux dits de Can Rapoulit sur 100 mètres, de Cal Roigt, sur 60 mètres et " de la rivière " sur 70 mètres, au profit des riverains et à cet effet d'engager l'enquête publique préalable à leur cession. A la suite de cette enquête publique, par une troisième délibération du 9 juin 1971, le conseil municipal a décidé de " restituer " ces différents chemins aux propriétaires riverains. Toutefois, par une délibération du 22 mai 2017, le conseil municipal de Maureillas-las-Illas a " annulé " cette précédente délibération du 9 juin 1971. M. E... relève appel du jugement du 14 mars 2019, par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération du 22 mai 2017.

Sur la légalité de la délibération du 22 mai 2017 :

En ce qui concerne la nature de la délibération du 9 juin 1971 :

2. Aux termes de l'article 69 du code rural dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsqu'un chemin rural cesse d'être affecté à l'usage du public, la vente peut être décidée après enquête par le conseil municipal à moins que les intéressés groupés en association syndicale conformément à l'article suivant n'aient demandé à se charger de l'entretien dans les deux mois qui suivent l'ouverture de l'enquête. / Lorsque l'aliénation est ordonnée, les propriétaires riverains sont mis en demeure d'acquérir les terrains attenant à leurs propriétés. / Si, dans le délai d'un mois à dater de l'avertissement, les propriétaires riverains n'ont pas déposé leur soumission ou si leurs offres sont insuffisantes, il est procédé à l'aliénation des terrains selon les règles suivies pour la vente des propriétés communales ".

3. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le législateur n'a pas entendu ouvrir aux communes, pour la cession des chemins ruraux, d'autre procédure que celle de la vente dans les conditions ci-dessus précisées. D'autre part, lorsqu'une commune envisage de céder un chemin rural, l'obligation prévue par l'article 69 du code rural de mettre en demeure tous les propriétaires riverains de ce chemin, quelle que soit l'utilité pour eux de celui-ci, a pour objet de leur permettre d'être informés de ce projet d'aliénation et de présenter une offre d'achat chiffrée.

4. Il ressort des termes de la délibération du 9 juin 1971 du conseil municipal de las Illas, que la commune a décidé " de restituer " les différents chemins ruraux en litige aux propriétaires riverains. Toutefois, cette délibération ne comporte aucune indication ni sur l'identité des bénéficiaires des chemins cédés ni sur la ou les portions de chemins qui leur seraient ainsi transférées. Elle ne précise pas davantage les conditions financières de leur aliénation en l'absence de toute indication sur le prix auquel le conseil municipal aurait entendu procéder à leur vente au regard de la présentation d'offres d'achat chiffrées. Dans cette mesure, cette délibération n'a pu faire naître aucun droit au bénéfice de M. E.... Elle doit, par suite, être regardée comme un acte non règlementaire non créateur de droits.

En ce qui concerne l'abrogation opérée par la délibération du 22 mai 2017 :

5. Aux termes de l'article L. 243-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Un acte réglementaire ou un acte non réglementaire non créateur de droits peut, pour tout motif et sans condition de délai, être modifié ou abrogé sous réserve, le cas échéant, de l'édiction de mesures transitoires dans les conditions prévues à l'article L. 221-6. "

6. Si la délibération du conseil municipal de Maureillas-las-Illas du 22 mai 2017 mentionne qu'elle " annule " celle du 9 juin 1971, il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseil municipal aurait entendu la priver rétroactivement de ses effets. Il a seulement entendu en abroger les effets à partir du 22 mai 2017. La délibération du 9 juin 1971 n'ayant créé aucun droit au profit de M. E..., comme il a été dit au point 4, les dispositions précitées de l'article L. 243-1 du code des relations entre le public et l'administration permettaient qu'elle soit légalement abrogée sans condition de délai. Par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir que le retrait ou l'abrogation de cette délibération ne pouvait plus légalement intervenir à la date du 22 mai 2017.

7. Comme rappelé au point 6, la délibération en litige du 22 mai 2017 a pour objet d'abroger celle du 9 juin 1971 décidant du principe de la cession des chemins ruraux mentionnés au point 1 aux propriétaires riverains. A supposer, comme allégué, que la commune n'aurait pas la propriété de tout ou partie de ces chemins, un tel moyen qui n'est pas dirigé contre la décision de les céder, mais contre son abrogation, est inopérant.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Maureillas-las-Illas, que M. E... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Maureillas-las-Illas, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse au requérant une somme au titre des frais liés au litige. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à ce titre une somme de 2 000 euros à la charge de M. E... à verser à la commune de Maureillas-las-Illas.

D É C I D E :

Article 1er : La requête M. E... est rejetée.

Article 2 : M. E... versera à la commune de Maureillas-las-Illas, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et à la Commune de Maureillas-las-Illas.

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2020, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. C..., président assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 septembre 2020.

2

N° 19MA02140

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02140
Date de la décision : 18/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Différentes catégories d'actes - Actes administratifs - classification - Actes individuels ou collectifs - Actes non créateurs de droits.

Collectivités territoriales - Commune - Finances communales.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS BECQUE - DAHAN - PONS-SERRADEIL - CALVET - REY

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-18;19ma02140 ?
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