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17/07/2020 | FRANCE | N°19MA04259

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 17 juillet 2020, 19MA04259


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1905679 du 8 août 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 septembre 2019, M. A..., r

eprésenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1905679 du 8 août 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 septembre 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille du 8 août 2019 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 11 juin 2019 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet a examiné son droit au séjour ;

- c'est donc à tort que le tribunal administratif a jugé que les conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de séjour étaient irrecevables ;

- il a droit à être admis de façon exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.

Par décision du 25 octobre 2019, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant pakistanais né le 4 mars 1991, relève appel du jugement du 8 août 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 juin 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes du I de l'article L. 5111 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 1211, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (..) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 7432, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 7433 du même code : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 7432 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. ".

3. Il résulte des dispositions de l'article L. 5111 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le prononcé par l'autorité administrative à l'encontre d'un ressortissant étranger d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de cet article n'est pas subordonné à l'intervention préalable d'une décision statuant sur le droit au séjour de l'intéressé en France. Toutefois, lorsque le préfet, statuant sur la demande de titre de séjour, examine d'office si l'étranger est susceptible de se voir délivrer un titre sur un autre fondement que l'asile, tous les motifs de rejet de la demande, y compris donc les motifs se prononçant sur les fondements examinés d'office par le préfet, peuvent être utilement contestés devant le juge de l'excès de pouvoir. Il en va, par exemple, ainsi, si la décision de refus de titre de séjour a pour motif que le demandeur n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit ou que le refus ne porte pas d'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé.

4. Il ressort des pièces du dossier que, après avoir relevé dans ses motifs que la reconnaissance de la qualité de réfugié et le bénéfice de la protection subsidiaire avaient été définitivement refusés à M. A... et que ce dernier ne satisfaisait pas aux conditions requises pour prétendre à la régularisation de sa situation administrative et n'entrait dans aucune des situations énoncées aux articles L. 31311 et L. 31411 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant l'attribution d'un titre de séjour de plein droit, l'arrêté attaqué constate, en son article 1, que la demande d'asile de l'intéressé est rejetée et qu'est abrogé tout récépissé et attestation de demande de statut de réfugié en possession de l'intéressé. Eu égard à ces mentions, le préfet des BouchesduRhône doit être regardé non pas comme s'étant borné à adresser à M. A... une obligation de quitter le territoire français après avoir constaté que la situation de ce dernier entrait dans le champ d'application des dispositions du 6° du I de de l'article L. 5111 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais comme ayant statué sur le droit au séjour de l'intéressé en France après avoir examiné d'office si celuici était susceptible de se voir délivrer un titre de séjour de plein droit. Dès lors, le requérant est fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il a rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus d'admission au séjour. Par suite, ce jugement doit être annulé dans cette mesure.

5. Il y a lieu pour la Cour de se prononcer immédiatement par voie d'évocation sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de la décision du préfet des BouchesduRhône portant refus d'admission au séjour et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions de la requête.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de séjour :

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D... C..., signataire de l'arrêté contesté, bénéficiait, en sa qualité de chef du bureau de l'éloignement, du contentieux et de l'asile à la préfecture des Bouches-du-Rhône, par un arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 10 septembre 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 13-2018-223 du même jour, d'une délégation à l'effet de signer les décisions en matière de refus de séjour, d'obligations de quitter le territoire français, relatives au délai de départ volontaire et fixant le pays de destination. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait et doit être écarté.

7. En second lieu, s'il ressort de l'arrêté contesté que le préfet des Bouches-du-Rhône a examiné le droit au séjour de M. A... au regard des titres de séjour qui sont délivrés de plein droit, il n'a néanmoins pas examiné la situation de l'intéressé au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel ne constitue pas non plus le fondement de la demande. Le moyen tiré de sa méconnaissance doit par suite être écarté comme inopérant.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de refus de séjour du 11 juin 2019.

Sur le bienfondé du jugement rejetant les conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Il convient d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision portant obligation de quitter le territoire français pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

Sur le bienfondé du jugement rejetant les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination :

10. En premier lieu, il convient d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision fixant le pays de destination pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

11. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de 1'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". M. A... soutient qu'il encourt des risques en cas de retour au Pakistan, faisant l'objet de menaces de la part des Talibans. Cependant, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, les éléments qu'il a produits en première instance, constitués par des articles de presse, une plainte déposée par son oncle le 8 avril 2011, aux termes de laquelle ce dernier affirme avoir été sans nouvelle du requérant après que soient venus dans le magasin dans lequel il travaillait les services de renseignement pakistanais, une attestation " des chefs du village " aux termes de laquelle il serait menacé de mort par les talibans en raison des liens que son cousin entretiendrait avec eux, ainsi qu'un certificat de décès de son frère des suites d'une blessure par arme à feu le 25 avril 2018, sont insuffisamment probants à établir la réalité des risques encourus en cas de retour au Pakistan. Les deux pièces fournies en appel, constituées par une déclaration sur l'honneur de son épouse et une autre émanant des dignitaires du village dans lequel elle vit, ne sont pas non plus suffisamment probants pour démontrer la réalité de tels risques, alors que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au conseil de M. A... en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 8 août 2019 du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de séjour du 11 juin 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône.

Article 2 : Les conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de séjour du 11 juin 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône et le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. A... sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.

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N° 19MA04259


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04259
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Karine DURAN-GOTTSCHALK
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL GRIMALDI - MOLINA et ASSOCIÉS - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-17;19ma04259 ?
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